Leadership et influence en soins infirmiers

Leadership et influence en soins infirmiers

eCampusOntario

Stevenson

Table des matières

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Droits d’auteur

Icône de la licence Creative Commons Attribution 4.0 International

Leadership et influence en soins infirmiers de Joan Wagner est distribué sous la licence de Creative Commons Attribution 4.0 International, sauf indication contraire.

La licence Creative Commons vous autorise à conserver, réutiliser, copier, distribuer et réviser gratuitement ce livre, en tout ou en partie, accompagné de l’attribution suivante :

Leadership et influence en soins infirmiers est corédigé sous la direction de Joan Wagner et publié par les Presses de l’Université de Regina (2018), et distribué sous licence CC BY 4.0 International.

Si vous distribuez le livre en tout ou en partie, vous devez indiquer sur chaque page numérique (y compris, mais sans s’y limiter, les formats ePUB, PDF ou html) et dans l’avis de droits d’auteur de la version imprimée ce qui suit :

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Exemptions

La section 2 du chapitre 3, « Vie au sein de la communauté » selon Norma Rabbitskin de la Première Nation de Big River se fonde sur le savoir traditionnel de la Première Nation de Big River et n’est pas distribuée sous la licence Creative Commons Attribution 4.0 International. Veuillez respecter le protocole de transmission du savoir traditionnel autochtone et communiquer avec Norma Rabbitskin, au Sturgeon Lake Health Centre, si vous souhaitez utiliser ce contenu à d’autres fins.

La figure 4.1.1 [mai 1897], « Countess of Aberdeen in Queen’s U Robes Topley », par William James Topley (1845-1930), photo reproduite avec l’aimable autorisation de Bibliothèque et Archives Canada sous le numéro de référence PA-027869 et sous le numéro d’identification MIKAN 3194681, est publiée dans le domaine public dans Wikimedia Commons.

La figure 4.1.2 [1889], photo reproduite avec l’aimable autorisation des Provincial Archives of Saskatchewan, Photographic Services Collection, numéro de collection R-B10796, est diffusée dans le domaine public.

La figure 10.5.1 [Janvier 1958], photo reproduite avec l’aimable autorisation des Provincial Archives of Saskatchewan, Photographic Services branche Collection, numéro de collection R-B6805, est diffusée avec autorisation. Tous droits réservés.

La figure 13.1, « Photographie de Jocelyn Augustino prise le 30 août 2005 en Louisiane » par Jocelyn Augustino, FEMA/FEMA Photo Library, est distribuée dans le domaine public par le biais de Wikimedia Commons.

La figure 13.1.1, « Paysage du feu de forêt près de l’autoroute 63 à Fort McMurray Sud, » par DarrenRD, est distribuée sous la licence CC BY-SA 4.0 International, sur Wikimedia Commons.

La figure 13.3.1, « Le navire Mercy réalise un exercice avec un grand nombre de blessés dans le cadre du partenariat Pacific 2015 [image 12 de 12] », par Mayra Conde, nommé par DVIDS, est distribuée dans le domaine public par le biais de Wikimedia Commons.

Les trois figures du chapitre 16 (Questions émergentes en leadership infirmier) sont utilisées avec l’autorisation de la créatrice Judy Boychuk Duchscher et ne sont pas régies par la licence Creative Commons utilisée dans le manuel.

Figure 16.7.1, « Facteurs de qualité du lieu de travail pour le personnel infirmier nouvellement diplômé » © Judy Boychuk Duchscher, 2012. Tous droits réservés, utilisation avec autorisation.

Figure 16.7.2, « Modèle des étapes de transition », © Judy Boychuk Duchscher, 2007. Tous droits réservés, utilisation avec autorisation.

Figure 16.7.3, « Modèle de choc de transition » © Judy Boychuk Duchscher, 2007. Tous droits réservés, utilisation avec autorisation.

Si vous avez des questions sur les licences et les droits de publication, écrivez à uofrpress@uregina.ca. Pour en savoir plus sur le programme de publication de manuels libres des Presses de l’Université de Regina, visitez le www.uofrpress.ca.

Conception de la couverture : John van der Woude, JVDW Designs, distribution sous licence CC BY 4.0 International.

Image de couverture : « Doctor Nursing Hospital Nurse Bless You Medicine », disponible en Max Pixels et distribué sous la licence de domaine public CC0.

Vous pouvez citer des passages du manuel. Par exemple, la notice bibliographique du document se lirait comme suit selon les normes de l’APA :

Wagner, J. (dir.). 2018.  Leadership et influence en soins infirmiers. Regina, Saskatchewan, Presses de l’Université de Regina https://ourspace.uregina.ca/handle/10294/8296.

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Table des matières

À propos du livre

Joan Wagner

 

Avant-propos

Améliorer les résultats des populations autochtones en santé

Wendy Whitebear

 

1. Déterminer ses forces et ses possibilités de croissance en leadership

Joan Wagner

2. Diversité dans les organismes de soins de santé

Sonia Udod et Louise Racine

3. Travailler dans des milieux autochtones et collaborer avec des chef.fe.s autochtones

Anthony de Padua et Norma Rabbitskin

4. Rôle des leaders infirmiers dans le développement du système de santé canadien

Joan Wagner

5. Assurer un leadership infirmier dans le système de santé

Joan Wagner

6. Soins de santé primaires : Travail d’équipe, leadership et collaboration interprofessionnels

Colleen Toye et Joan Wagner

7. Leadership en sécurité et gestion de la qualité

Joan Wagner

8. Leaders et prise de décision éclairée par des preuves

Maura MacPhee

9. Théories courantes sur le changement et application à différentes situations en soins infirmiers

Sonia Udod et Joan Wagner

10. S’appuyer sur la défense d’une cause pour agir de manière éthique

Joan Wagner

11. Cerner et comprendre la gestion des conflits

Bureau de résolution des conflits, ministère de la Justice (gouvernement de la Saskatchewan)

12. Responsabilités et autorité des leaders infirmiers

Lisa Little, Joan Wagner et Anne Sutherland Boal

13. Préparation et réponse aux situations d’urgence

Yvonne Harris

14. Leadership infirmier et informatique

Renforcer le secteur de la santé à l’aide de la technologie numérique Shauna Davies

15. Réglementation, lois, relations de travail et négociations

Beverly Balaski

16. Questions émergentes en leadership infirmier

Brendalynn Ens, Susan Bazylewski et Judy Boychuk Duchscher

 

À propos des contributeur.trice.s

Remerciements

Publication en libre accès

Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives Canada

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À propos de l’ouvrage

Joan Wagner

Leadership et influence en soins infirmiers initie pendant une session au rôle de leadership du personnel infirmier, en tant que prestataire de soins et leader désigné. Les personnes étudiant en sciences infirmières suivront le cours en troisième année, alors qu’elles s’apprêtent à assumer un rôle professionnel dans l’environnement clinique des soins de santé. Une variété d’auteur.e.s occupant divers rôles de leadership en soins infirmiers en Saskatchewan au Canada ont apporté leur contribution au manuel. De tels spécialistes proposent aux étudiant.e.s outils, techniques et connaissances fondamentales pour relever les défis du leadership dans le milieu en constante évolution des soins de santé au Canada. Par conséquent, créer un manuel en ligne permet de le mettre à jour régulièrement afin de suivre l’évolution rapide des connaissances.

Voici les objectifs du manuel :

  • Proposer un contenu pertinent aux personnes étudiant en sciences infirmières de la Saskatchewan.
  • Adapter le contenu aux connaissances théoriques et pratiques des étudiant.e.s.
  • Proposer un contenu actualisé et éprouvé sur le leadership infirmier.
  • Présenter du contenu autochtone.
  • Adapter le contenu au programme d’études.

Approche méthodologique et pédagogique

Le manuel libre explore des concepts liés au leadership et à l’incitation aux changements en soins infirmiers. La théorie et les lectures essentielles y figurent. Les auteur.e.s proposent des méthodes de gestion concrètes qui reposent sur des pratiques cliniques et de connaissances étayées par des recherches fondées sur des preuves. L’approche vise à développer la pensée critique et permet de prendre des décisions de leadership éclairées fondées sur des pratiques exemplaires et des données probantes. Les auteur.e.s œuvrent sans cesse pour que les lectures proposées présentent les éléments les plus récents et pertinents. Le manuel est libre; le contenu est donc revu et mis à jour annuellement pour que les éléments pédagogiques essentiels et les résultats attendus répondent aux objectifs du cours. Les enseignant.e.s peuvent proposer des lectures complémentaires afin d’enrichir les apprentissages.

Au début de chaque chapitre figure une citation percutante sur le leadership en rapport avec le contenu du chapitre. Les concepts clés présentés dans l’ouvrage sont en gras.

Des encadrés de couleur sont également utilisés dans les chapitres pour différencier et mettre en évidence les notions importantes (voir le diagramme suivant).

Éléments clés d’apprentissage
Objectifs d’apprentissage
Expérience sur le terrain
Notes de recherche
Activités d’apprentissage essentielles
 Exercices

Les Objectifs d’apprentissage énoncés au début de chaque chapitre donnent un aperçu des sections et encadrent l’apprentissage.

Trois types d’encadrés dans chaque chapitre contiennent de l’information importante :

Les Expérience sur le terrain contiennent de sages observations d’infirmier.ère.s en chef.

Les Notes de recherche indiquent comment chaque chapitre repose sur des données probantes et fournissent des liens vers d’importantes recherches universitaires qui approfondissent les grands thèmes abordés.

Les Activités d’apprentissage essentielles proposent des liens vers des ressources pertinentes. Elles proposent également des balados des auteur.e.s des chapitres spécialement créés pour le manuel. Ils et elles fournissent des liens vers les documents sources et les vidéos indispensables, au lieu d’en résumer ou répéter le contenu. Les activités d’apprentissage essentielles font partie intégrante des chapitres et permettent de mieux comprendre les enjeux contemporains de la profession infirmière. Il est donc important de consulter les sources proposées et de répondre aux questions en faisant preuve d’esprit critique et en résumant de nouvelles connaissances. Les liens mènent à du contenu indispensable au cours, qui ne figure pas ailleurs dans le manuel.

Un résumé clôt chaque chapitre et brosse un portrait du contenu. Il passe en revue les objectifs, propose des exercices de révision en utilisant de nouvelles connaissances en matière de leadership ainsi qu’une liste complète de références pour tous les documents cités afin de les consulter au besoin.

Hypothesis

Hypothesis (ou Hypothes.is) est un outil d’annotation Web en code source libre que la population étudiante et le personnel enseignant peuvent utiliser pour surligner et annoter des textes en ligne, qui peuvent être partagés publiquement ou en privé (pour des discussions de groupe) ou utilisés pour des études individuelles. La plateforme offre un très grand accès aux textes universitaires et à d’autres ressources en ligne.

Hypothesis a été activée pour le format en ligne du manuel. Pour utiliser l’outil, créez gratuitement un compte et suivez les instructions.

Pour obtenir plus d’information, Hypothesis propose des guides de démarrage :

  1. Guide de démarrage pour étudiant.e.s
  2. Guide de démarrage pour personnel enseignant

Structures des chapitres

Le chapitre 1 présente à la relève infirmière la théorie du leadership. Les compétences qui sont la pierre d’assise de l’excellence en matière de leadership y sont décrites. En outre, de différents styles de leadership en soins infirmiers pratiqués au cours du siècle dernier sont brièvement présentés. Les leaders en devenir du personnel infirmier peuvent comparer et opposer différentes approches tout en jetant les bases de leur propre style de leadership.

Le chapitre 2 propose une analyse complète de la diversité sur le lieu de travail dans les établissements de soins de santé. Les futurs responsables du personnel infirmier s’initient à la diversité culturelle et aux modèles théoriques qui orientent les infirmier.ère.s pour prodiguer de soins qui traduisent de la sensibilité culturelle. Ils sont appelés à développer une compréhension de la diversité afin de bien gérer le lieu de travail.

Le chapitre 3 initie aux soins de santé autochtones pour que les responsables du personnel infirmier s’inspirent du « leadership autochtone » (Nichols, 2004, p. 177). Ces derniers ont un aperçu de la vision autochtone du monde. De plus, les auteur.e.s illustrent la manière dont cette conception influence les décisions en matière de leadership. Une analyse de l’évolution du système de soins de santé dans les communautés autochtones et du développement des structures autochtones permet aux étudiant.e.s d’acquérir des connaissances supplémentaires indispensables pour le leadership de la profession infirmière. Le chapitre se termine par des recommandations qui favorisent la collaboration à l’avenir avec les communautés autochtones.

Le chapitre 4 met en lumière les liens historiques entre la profession infirmière et le système de santé canadien. Par le passé, les infirmières ont joué des rôles notables : prodiguer des soins aux premiers colons et aux populations autochtones, faire pression pour apporter des changements majeurs à la Loi canadienne sur la santé, créer des programmes de doctorat en sciences infirmières et, enfin, développer un corpus unique de recherches sur les soins infirmiers au Canada. Les chefs de file en soins infirmiers forment un groupe dynamique et vigilant qui se consacre à bâtir l’avenir de la profession et des soins de santé au Canada.

Le chapitre 5 met en évidence quelques changements importants dans le système de santé canadien qui ont influencé le leadership et les pratiques infirmières. Il présente un aperçu des principes d’un système adaptatif complexe et souligne l’importance de la vision, de la mission et des valeurs des établissements pour éclairer la prise de décisions des chefs de file en soins infirmiers. Le chapitre se termine par une discussion sur les récentes adaptations de la culture organisationnelle en matière de soins de santé, qui ont conduit à une évolution du champ d’activité du personnel infirmier autorisé et à la création d’un protocole de délégation des soins.

Le chapitre 6 souligne la nécessité d’une collaboration entre les professionnels de la santé pour offrir des soins de santé de qualité à la patientèle en milieu communautaire. La transition aux soins communautaires est complexe en raison des soins spécialisés prodigués à une patientèle gériatrique croissante, avec une attention particulière aux personnes âgées autochtones et à celles ayant des besoins en santé mentale et de soins palliatifs. Les chefs de file en soins infirmiers doivent prendre part à des collaborations interprofessionnelles qui aboutissent à un travail d’équipe efficace, axé sur la définition des besoins de la patientèle et l’obtention de résultats positifs.

Le chapitre 7 porte sur la conception de projets de gestion de la qualité aux quatre coins du monde pour faire face aux nouveaux enjeux de sécurité de la patientèle. Il décrit également l’influence des hôpitaux magnétiques aux États-Unis et du rapport Francis en Angleterre sur la culture internationale de la sécurité des patient.e.s. Enfin, la manière dont les principes de gestion « Lean » et les outils d’amélioration de la qualité comme le cycle « prévoir – faire – analyser – agir » influencent la qualité des soins sera examinée.

Le chapitre 8 souligne l’importance d’un leadership et d’une pratique fondés sur des données probantes pour offrir des soins sûrs et de qualité à la patientèle. Il passe en revue les trois noyaux d’innovation à disposition des dirigeants pour promouvoir une organisation de l’apprentissage transparente. Les dirigeants doivent constamment se remettre en question, être à l’écoute et explorer de meilleures façons de fournir des soins sûrs, de qualité et fondés sur des données probantes. La fin du chapitre décrit la crise des opioïdes au Canada et aux États-Unis et en montre comment les approches de réduction des risques fondées sur des données éprouvées renvoient les responsables en soins infirmiers aux principes de base.

Le chapitre 9 met en évidence l’importance des responsables en soins infirmiers comme agents de changement. Quelques théories et modèles du changement sont présentés et plusieurs notions sont appliquées au rôle des responsables en soins infirmiers dans la gestion du changement. Le chapitre prend fin avec une explication sur la résistance au changement et propose des suggestions pratiques qui permettent d’accompagner les personnes dans le changement.

Le chapitre 10 présente le code de déontologie de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada (AIIC), qui régit la pratique infirmière au pays. En mettant l’accent sur « les répercussions des principaux enjeux de société sur la santé et le bien-être », le code promeut la lutte contre des inégalités en santé. Une réflexion sur la défense des droits, la justice sociale, l’autonomie, la théorie critique sociale, la dénonciation et l’activisme social offre aux étudiant.e.s des repères pour mieux comprendre les exigences des responsables en soins infirmiers dans la défense de la santé et du bien-être de tous, comme les décrit le code de déontologie.

Le chapitre 11 met à profit l’expérience des médiateurs du Bureau de règlement des différends du ministère de la Justice et d’autres spécialistes sur la résolution des conflits. La notion de conflit est expliquée en début de chapitre et différentes approches sont proposées pour y faire face. Ces dernières sont ensuite appliquées à des scénarios réels de soins infirmiers. Le chapitre se conclut par une description de l’aggravation des conflits et par des conseils pour les désamorcer et proposer aux personnes des solutions. Grâce à ces connaissances, les responsables en soins infirmiers apprennent à comprendre les autres et à adapter leur approche du leadership en conséquence.

Le chapitre 12 porte sur les outils et les ressources pour soutenir les responsables en soins infirmiers et s’appuie sur des pratiques éthiques et professionnelles. La récente transformation du système de santé canadien amène les responsables à élargir leur vision et comprendre le contexte contemporain tout en faisant preuve de solides compétences en matière d’organisation et de gestion. Les auteur.e.s discutent des changements dans le système qui exigent les valeurs personnelles et professionnelles, comme celles énoncées dans le code de déontologie de l’AIIC, se traduisent dans les responsabilités en matière d’excellence dans les soins à la patientèle.

Le chapitre 13 présente aux responsables en soins infirmiers la façon de se préparer aux situations d’urgence et aux catastrophes. Le personnel infirmier a souvent des responsabilités importantes en cas de catastrophes naturelles ou anthropiques (causées par l’humain). Le chapitre décrit les quatre domaines d’intervention de la planification en cas d’urgences : l’atténuation, la préparation, l’intervention et le rétablissement. Les étudiant.e.s reçoivent des suggestions sur la manière de se préparer à des événements inattendus en planifiant des actions qui réduiront au minimum les dommages et favoriseront le rétablissement. Un travail coordonné entre les professionnels des secteurs de la santé, public et privé est nécessaire pour relever les défis posés par les catastrophes, qu’elles soient naturelles, anthropiques ou technologiques.

Le chapitre 14 permet aux étudiant.e.s de comprendre l’informatique et la technologie en soins infirmiers. Les différents types de technologies de l’information y sont définis et passés en revue. Les progrès technologiques apportent de nombreux avantages à la patientèle. Néanmoins, les responsables du personnel infirmer doivent tenir compte de la sécurité, de l’aspect légal et des défis associés à l’utilisation de telles technologies.

Le chapitre 15 traite du rôle des organisations de soins infirmiers professionnelles dans le soutien et l’engagement du personnel infirmier canadien dans le renforcement d’une profession forte. Les mandats des organismes de réglementation professionnelle, des syndicats et des quatre organismes nationaux (AIIC, FCSII, SPIIC et CINA) seront examinés. De plus, les responsables du personnel en soins infirmiers comprendront comment ces organisations évoluent et se transforment pour épauler plus efficacement les infirmières professionnelles au Canada en assurant un leadership dans la prestation de soins infirmiers sûrs et de qualité.

Le chapitre 16 décrit l’évolution rapide du leadership et de la gestion en soins infirmiers en lien avec les changements en soins de santé. Ils comprennent notamment l’évolution rapide du milieu de la santé à l’échelle mondiale, nationale et provinciale et les transformations des systèmes qui ont une incidence sur le personnel en plus d’entraîner des changements dans les systèmes de gestion et les styles de leadership. Bon nombre de changements exigent que les gestionnaires et leaders en soins infirmiers aient le sens des affaires et de solides compétences en affaires. Enfin, la clientèle et les familles demandent que leur point de vue soit privilégié dans le processus de soins. L’évolution rapide du milieu de la santé et des soins infirmiers exige que les responsables du personnel infirmier gèrent leur stress personnel en prenant le temps de prendre soin d’eux-mêmes. Les soins personnels sont un aspect particulièrement important pour les nouvelles infirmières qui entrent dans la profession après la fin de leurs études.

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Avant-propos

Améliorer les résultats des populations autochtones en santé

Améliorer les résultats des populations autochtones en santé

Wendy Whitebear

Une grande partie de ma carrière et de mes activités bénévoles a été consacrée au mieux-être des populations et communautés autochtones. Je mets tout en œuvre pour trouver des solutions positives aux problèmes criants que vivent les concitoyens en collaborant avec des personnes aux idées similaires dans tous les aspects de ma vie. Afin de parler au nom des plus démunis, je coanime bénévolement une émission-causerie locale de femmes autochtones intitulée « The Four » qui braque les projecteurs sur des enjeux contemporains. L’objectif est de lutter contre les stéréotypes autochtones et d’encourager la discussion sur les questions politiques et sociales qui ont façonné la réalité.

Lorsque j’ai travaillé au Indigenous Peoples’ Health Research Centre (IPHRC), j’ai côtoyé des alliés comme Joan Wagner. Dans le cadre de ses recherches pour trouver des solutions aux problèmes de santé, notamment ceux de la population autochtone, elle a contribué activement à un projet de la Saskatchewan Centre for Patient-Oriented Research. Joan s’est dite préoccupée, car le système de santé ne répond pas aux besoins des membres des Premières Nations. Comme elle enseigne à des étudiant.e.s des territoires des Traités 4 et 6, elle sait parfaitement qu’elle doit former de futurs leaders qui tiennent compte de la diversité des populations autochtones de ces territoires.

Je sais pertinemment que les personnes autochtones sont surreprésentées dans le système de santé. Le phénomène est une conséquence des politiques systémiques élaborées pour éradiquer la population autochtone du Canada. De tels actes de génocide culturel ont provoqué des disparités criantes en matière de santé entre les populations autochtones et la population canadienne. Sans une connaissance adéquate de la véritable histoire des peuples autochtones, le racisme et les stéréotypes gangrèneront perpétuellement le milieu de la santé. Si le personnel enseignant n’encadre pas adéquatement la prochaine génération d’apprenant.e.s pour qu’ils deviennent des leaders doués de sensibilité culturelle, cette pratique perdurera et les résultats en matière de santé pour la population autochtone stagneront ou se détérioreront.

Les enjeux sociaux contemporains et la pauvreté qui touche les communautés autochtones du Canada ont de graves répercussions sur les résultats en matière de santé. Les autochtones présentent des taux élevés de maladies mentales, d’alcoolisme, de trouble du spectre de l’alcoolisation fœtale, de violence conjugale, de diabète et de tuberculose. Sans soins holistiques et adaptés à la culture, ces problèmes de santé risquent de s’aggraver. Les futurs responsables du système de santé doivent à tout prix tenir compte des facteurs historiques et s’attarder à chaque patient, tout en respectant les besoins culturels.

Depuis la création des réserves, des pensionnats et de la Loi sur les Indiens, les populations des Premières Nations vivent des relations de pouvoir fondamentalement inégales avec le reste de la population canadienne. Le rapport Compétence culturelle et sécurité culturelle en enseignement infirmier : Programme d’études pour la profession infirmière autochtone fait état de six compétences fondamentales pour travailler avec les patients et les collègues autochtones. Le cadre reconnaît que des facteurs atténuants ont contribué aux mauvais résultats en matière de santé des populations autochtones. La compréhension postcoloniale de la sensibilité culturelle encourage l’apprentissage nécessaire pour explorer ces questions afin que les professionnels de la santé deviennent des leaders plus compétents au sein du système.

Afin d’aider les apprenant.e.s à comprendre que les Premières Nations ont une vision de la santé qui transcende de l’aspect physique des concepts institutionnels, le document « Guidelines for Cultural Safety, the Treaty of Waitangi, and Maori Health in Nursing Education and Practice », qui explore les multiples facettes des croyances des peuples autochtones, est une ressource indispensable. À l’instar des Maoris, les membres des Premières Nations ont des croyances et des pratiques culturelles diversifiées. On compte cinq groupes linguistiques en Saskatchewan : Cris, Saulteaux, Dakota, Nakota et Déné. Chaque groupe a des coutumes et croyances différentes tout en partageant certaines similitudes. Par exemple, en cas de problèmes de santé, les familles se réunissent en signe de soutien et donnent de l’énergie de guérison au malade. La famille demeure parfois présente jusqu’au rétablissement. Il est important de respecter cette coutume pour le bien-être de la famille et du patient.

Apprendre la véritable histoire des Premières Nations et des Métis et être ouvert à leurs besoins culturels aura des retombées bénéfiques sur les apprenant.e.s et améliorera les pauvres résultats en matière de santé sanitaire des personnes autochtones. Les travailleurs de la santé qui se dotent d’outils pour devenir des professionnels compétents et qui adoptent des pratiques exemplaires lorsqu’ils traitent une patientèle autochtone feront toute une différence pour notre peuple. Dans le cadre du cours Leadership et influence en soins infirmiers, les apprenant.e.s acquièrent également la confiance, l’intégrité, l’inspiration et la passion qui leur seront utiles comme leaders dans le milieu de la santé. Le manuel permet aux étudiant.e.s de mieux comprendre la notion de sensibilité culturelle et propose des références supplémentaires pour enrichir et améliorer significativement des compétences en leadership infirmier.

Icône de la licence Creative Commons Attribution 4.0 International

L’avant-propos de Wendy Whitebear est distribué sous la licence Creative Commons Attribution 4.0 International, sauf indication contraire.

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Déterminer ses forces et ses possibilités de croissance en leadership

Joan Wagner

Le leadership doué se manifeste là où le cœur et la tête, les sentiments et la pensée, se rencontrent. Ce sont les deux ailes grâce auxquelles un leader s’envole.

– Goleman, Boyatzis et McKee (2002, p. 33)

Introduction

Le leadership n’arrive pas seul. Les leaders influencent le changement en aidant les membres du groupe à atteindre leurs objectifs. Ce chapitre vous permettra de mieux comprendre les comportements associés aux concepts suivants : leadership, gestion, mentorat et esprit de collaboration (followership). Le développement de l’intelligence émotionnelle et sociale sera également abordé en tant qu’aspect intégral d’un leadership efficace.

Objectifs d’apprentissage

  1. Découvrir vos forces et vos possibilités de croissance ainsi que celles des membres du groupe.
  2. Définir les caractéristiques du leadership, de la gestion, du mentorat et de l’esprit de collaboration.
  3. Cerner les différences et les similitudes entre le leadership et la gestion de la profession infirmière.
  4. Proposer des conclusions concernant le rôle du mentorat dans les milieux de soins.
  5. Proposer des conclusions concernant le rôle et la valeur du développement personnel.
  6. Proposer des conclusions concernant l’importance de l’intelligence sociale et émotionnelle dans le développement du leadership.
  7. Comprendre l’énoncé de position de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada sur le leadership de la profession infirmière.
  8. Décrire les styles de leadership les plus courants (c.-à-d. le leadership serviteur, le leadership résonnant, le leadership dissonant, la gestion par exception et le leadership du laissez-faire), puis indiquer votre style de leadership de préférence.

1.1 Gestion, leadership, esprit de collaboration et mentorat

Expérience sur le terrain

La compréhension des principes liés à la gestion, au leadership, à l’esprit de collaboration et au mentorat est importante pour les étudiant.e.s en soins infirmiers, qui observeront et feront l’expérience d’innombrables exemples de ces quatre concepts tout au long de leur carrière. Par exemple :

  • Le personnel infirmier d’une équipe de codage peut avoir besoin d’apprendre à bien suivre et accepter les directives.
  • L’infirmier.ère-chef doit être de capable de suivre les protocoles de l’hôpital.
  • Un membre du personnel infirmier expérimenté qui encadre un nouveau membre de l’unité peut être un bon mentor s’il donne des exemples pertinents et travaille à un rythme qui facilite l’intégration de la recrue.

Gestionnaires

La gestion se compose traditionnellement de cinq fonctions essentielles : la planification, l’organisation, le commandement, la coordination et la vérification. À la fin des années 1930, ces cinq fonctions ont été modifiées et élargies pour inclure sept éléments connus sous l’acronyme POSDCORB (MacLeod, 2012). Lors de la planification, le gestionnaire fixe des buts. Pendant l’organisation, il crée un lieu de travail efficace. Il est responsable de la sélection du personnel, soit du recrutement, de l’embauche, de la formation et du maintien du personnel, et de la direction ou de l’orientation de l’organisation en vue d’atteindre des objectifs spécifiques. Il s’occupe aussi de la coordination des activités et de l’utilisation des ressources. Enfin, le gestionnaire, pour démontrer qu’il a atteint les buts, présente des rapports (communication du progrès et des résultats) et un budget (utilisation judicieuse des ressources limitées). Bien que les détracteur.trice.s considèrent POSDCORB comme une vision simpliste de la gestion, chacun des sept éléments demeure présent dans les pratiques de gestion.

Leaders

Les responsabilités des gestionnaires et celles des leaders au sein d’un groupe ou d’une organisation sont étroitement liées. Le leadership est considéré par beaucoup comme la capacité d’amener les autres à combler les besoins de l’organisation. MacPhee décrit le leadership comme « le processus qui vise l’engagement et l’influence exercée sur les autres » (2015, p. 6). Les leaders des soins déterminent ce qui est nécessaire aux clients et à la santé, tant pour les personnes que pour les organisations, puis incitent les autres à combler ces besoins. Porter-O’Grady et Malloch (2011) affirment que le leader en santé n’a pas besoin d’être un spécialiste des activités ou de la résolution de problèmes, mais qu’il doit « bien interpréter les indicateurs ». De plus, le leader définit des tâches à confier aux collaborateur.trice.s (followers) à partir de cette connaissance des « indicateurs » de l’avenir. Les leaders sont reconnus pour les visions et stratégies qu’ils proposent tandis que les gestionnaires sont responsables de les mettre en œuvre (Pangman et Pangman, 2010).

Le leadership individuel se manifeste dans tous les domaines des soins. Les leaders ne sont pas nécessairement nommés à des postes officiels de direction. Les leaders du personnel infirmier possèdent les connaissances et les compétences nécessaires pour aider les personnes à mener une vie saine et soutenir les établissements de soins dans la mise en place d’un système de soins de qualité. Les leaders communiquent leur vision de l’avenir par des mots et des actions. Ils créent et suivent une vision d’avenir. L’action est bien plus convaincante que les mots. Les leaders changent la donne.

L’énoncé de position de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada (AIIC) sur le leadership de la profession infirmière (2009) stipule ce qui suit :

Le leadership de la profession infirmière concerne la pratique compétente et engagée du personnel infirmier, qui fournit des soins exemplaires, fait preuve d’esprit critique et d’indépendance, fonde sa pratique sur des données probantes, délègue et prend en charge de manière appropriée, défend les intérêts des patient.e.s et des communautés, respecte rigoureusement la portée juridique de sa profession et fait preuve d’innovation dans la pratique.

Collaborateur.trice.s

L’esprit de collaboration est souvent décrit comme l’« influence ascendante » des individus sur leurs leaders et leurs équipes. Les actions des collaborateur.trice.s ont une influence importante sur le rendement du personnel et les résultats pour les patient.e.s (Whitlock, 2013). Pour contribuer efficacement à l’équipe, ils ou elles doivent non seulement faire ce qui leur est demandé, mais aussi reconnaître les problèmes et les signaler. Les personnes qui collaborent efficacement savent qu’elles peuvent amorcer des changements, exprimer leur désaccord ou contester leurs leaders si elles estiment que leur organisation ou leur unité ne parvient pas à « promouvoir le bien-être et à fournir des soins sûrs, axés sur la valeur et la compassion » (Spriggs, 2016, p. 637). Les leaders qui gagnent la confiance et le dévouement des collaborateur.trice.s exercent leur leadership plus efficacement (Hibberd et Smith, 2006). Chaque personne a la responsabilité de s’exprimer et de s’approprier la culture du lieu de travail. D’ailleurs, un bon esprit de collaboration contribue à la mise en place d’équipes performantes et soucieuses de la sécurité (Whitlock, 2013).

Mentors

Les personnes mentores expérimentées et attentives jouent un rôle important dans le perfectionnement des leaders du personnel infirmier. Le mentorat est défini comme « une relation de soutien formelle entre deux ou plusieurs professionnels de la santé qui a le potentiel d’entraîner une croissance et un perfectionnement professionnels à la fois pour les personnes mentores et mentorées » (ministère de la Santé et des Soins de longue durée de l’Ontario, 2017, p. 1). Il s’agit d’une relation réciproque entre une spécialiste et un novice; la spécialiste fournit des conseils, de la rétroaction et une orientation, tandis que le novice aide la mentore à exécuter ses projets dans le cadre d’une relation de respect, de loyauté et de confidentialité (Evans, 2015).

Les personnes mentores peuvent apporter un soutien émotionnel et une orientation professionnelle qui permettent aux nouveaux membres du personnel infirmier et aux gestionnaires en soins infirmiers de progresser sur le plan professionnel. Cependant, Porter-O’Grady et Malloch (2011) suggèrent que les mentorats sont parfois toxiques. Par exemple, lorsque les personnes mentores perpétuent d’anciennes pratiques qui empêchent les changements nécessaires de se produire au lieu d’encourager la croissance et le perfectionnement, il s’agit de mentorat toxique. C’est aussi le cas quand la personne mentore n’aide pas la personne mentorée à développer sa propre identité et son propre style de leadership, de sorte que celle-ci n’est pas en mesure de progresser dans sa carrière seule. Enfin, la personne mentore peut confier à la personne mentorée des missions irréalistes qui restent inachevées, ce qui aboutit à l’échec de la personne mentorée. Ces exemples montrent l’importance pour les personnes mentorées de choisir leur mentor avec soin, car cette relation nécessite de la confiance et un regard positif mutuel.

Activité d’apprentissage essentielle 1.1.1

Pour obtenir plus d’information sur la position de l’AIIC en matière de leadership de la profession infirmière, lisez son « Énoncé de position sur le leadership de la profession infirmière ».

1.2 Styles de leadership

Vue d’ensemble

Une revue de la littérature sur le leadership révèle une multitude de styles de leadership. Marquis et Huston (2015) organisent leur étude scientifique du leadership en établissant des liens entre les thèmes du leadership et des périodes spécifiques. La recherche sur le leadership a commencé au début des années 1900 avec la théorie du grand homme (ou théorie des traits), qui a été la théorie dominante du leadership jusqu’en 1940 environ. Depuis les années 1970, la théorie du leadership a évolué vers l’étude de la relation entre les leaders et les collaborateur.trice.s au sein des organisations. Le progrès des théories du leadership montre que la « connaissance » du leadership change à mesure que l’environnement des leaders évolue et que d’autres recherches sont menées.

L’adaptation du style des leaders infirmiers aux besoins de l’environnement organisationnel est essentielle à la réussite du leadership. Une revue systématique de la littérature infirmière par Cummings et coll. (2010) nous aide à comprendre ces différents styles de leadership en divisant les théories du leadership de la profession infirmière en deux catégories distinctes : le leadership axé sur les tâches et celui axé sur les relations. L’observation des théories du leadership sous l’angle des relations est devenue cruciale au moment où nous entrons dans l’ère de la technologie associée à la théorie du chaos et à la science de la complexité.

Les leaders axés sur les tâches ont tendance à se concentrer sur les tâches à accomplir ou sur les échanges entre les leaders, les collègues et les collaborateur.trice.s nécessaires à l’exécution des tâches, plutôt que sur les relations entre les personnes au sein de l’organisation. Les leaders axés sur les relations, quant à eux, pensent que les relations et non les tâches sont le fondement de la réalisation de changements ou de résultats positifs (Hibberd et Smith, 2006). Il existe de nombreux exemples de leadership axé sur les tâches et les relations dans la littérature scientifique (Villeneuve et Wagner, 2015).

Les recherches menées par Wagner et coll. (2013) examinent la relation entre un style de leadership résonnant (style de leadership relationnel axé sur l’établissement de relations et la gestion des émotions), l’autonomisation du personnel infirmier autorisé et les résultats au travail, par exemple la satisfaction au travail, l’engagement organisationnel et l’enthousiasme au travail. L’étude de l’enthousiasme au travail, une mesure holistique des expériences au travail, examine les perceptions de l’engagement au travail, du sens de la communauté, de la connexion spirituelle (connexion à quelque chose de plus grand que soi pendant le travail) et de l’expérience mystique (sentiment de transcendance pendant le travail) de chaque membre du personnel infirmier. Les recherches en cours montrent une relation étroite entre le leadership résonnant et l’enthousiasme au travail. Elles indiquent également que ces mesures holistiques de l’enthousiasme au travail expliquent un plus grand écart dans les résultats des employés que la satisfaction au travail (Wagner et coll., 2013; Wagner et Gregory, 2015).

Note de recherche

Wagner, J.I.J., et Gregory, D. (2015). Spirit at work (SAW) : Fostering a healthy RN workplace. Western Journal of Nursing Research, 37(2), p. 197 à 216.

But

Le but de cette étude était d’explorer et de mesurer les relations entre l’enthousiasme au travail, la satisfaction au travail et l’engagement organisationnel du personnel infirmier autorisé dans deux contextes de pratique distincts : le personnel infirmier autorisé en chirurgie, qui pratique dans un environnement hospitalier de soins de courte durée, et le personnel infirmier autorisé de soins à domicile, qui fournit généralement des soins infirmiers directs au domicile du client. Nous avons voulu étudier les répercussions du contexte de la pratique sur l’enthousiasme et la satisfaction au travail du personnel infirmier autorisé. Selon la première hypothèse de cette étude, l’expérience, la formation, le contexte de pratique (chirurgie ou soins à domicile) et les concepts de l’enthousiasme au travail prédisent les variables de résultats que sont la satisfaction au travail et l’engagement organisationnel du personnel infirmier autorisé en chirurgie et en soins à domicile. Selon la deuxième hypothèse, il existe des différences d’expérience, de formation, des concepts de l’enthousiasme au travail et des variables de résultats que sont la satisfaction au travail et l’engagement organisationnel entre le personnel infirmier autorisé en chirurgie et celui en soins à domicile (Wagner et Gregory, 2015, p. 200).

Discussion

L’engagement au travail et l’expérience mystique, des concepts de l’enthousiasme au travail, ont représenté un écart de modéré à important par rapport au modèle pour le personnel infirmier en soins à domicile et en chirurgie, tandis que des relations positives significatives entre les concepts de l’enthousiasme au travail, la satisfaction au travail et l’engagement organisationnel ont également été notés. Les chercheur.euse.s ont conclu que l’enthousiasme au travail contribue à améliorer la satisfaction au travail et l’engagement organisationnel et que la mesure des concepts de l’enthousiasme au travail est sensible aux expériences du personnel infirmier autorisé dans les différents contextes cliniques. En tant que mesure holistique des perceptions du personnel infirmier autorisé au travail, l’enthousiasme au travail fournit des informations essentielles à la création d’environnements optimaux pour les prestataires et les bénéficiaires de soins (Wagner et Gregory, 2015, p. 197).

Application dans la pratique

Nous croyons qu’il est prudent de surveiller régulièrement les perceptions du personnel infirmier autorisé en matière d’enthousiasme au travail et d’apporter les modifications nécessaires en réponse à ses préoccupations. Par exemple, les données de l’enquête ont révélé que le personnel infirmier autorisé a de nombreuses préoccupations concernant son lieu de travail en rapport avec les quatre concepts de l’enthousiasme au travail, à savoir l’engagement au travail, le sens de la communauté, l’expérience mystique et la connexion spirituelle. Ces préoccupations contribuent collectivement à réduire la satisfaction au travail et l’engagement organisationnel, d’où le roulement en hausse du personnel infirmier autorisé (Aiken et coll., 2008; Leiter et Maslach, 2009; Purdy, Spence Laschinger, Finegan, Kerr et Olivera, 2010). « L’évaluation critique de ces préoccupations peut conduire à l’apparition de réponses ciblées d’atténuation du stress dans l’environnement de pratique du personnel infirmier autorisé » (Wagner et Gregory, 2015, p. 211).

Le gouvernement et le syndicat du personnel infirmier apportent actuellement de nombreuses améliorations à l’environnement de travail du personnel infirmier autorisé. L’enthousiasme au travail, avec sa vision holistique du lieu de travail, semble fournir une mesure plus représentative des perceptions du personnel infirmier autorisé relatives à cet aspect que les outils de mesure existants (Wagner et Gregory, 2015, p. 213).

Pour obtenir plus d’information sur l’enthousiasme au travail, écoutez le balado « Spirit at Work (SAW) » du Western Journal of Nursing Research.

1.3 L’intelligence émotionnelle et sociale dans le leadership

Vue d’ensemble

La position de leader ou de collaborateur.trice ne confère pas de pouvoir. C’est plutôt notre façon de réagir selon notre intelligence émotionnelle quand nous occupons ces rôles qui leur en donne. L’intelligence émotionnelle a été décrite comme la « capacité de surveiller et de distinguer les émotions, puis de guider la pensée et l’action en fonction de ces données » (Pangman et Pangman, 2010, p. 146). Goleman (1998), un chercheur qui a réalisé d’excellents travaux dans le domaine du rendement au travail, a étudié l’importance de l’intelligence émotionnelle dans l’atteinte de l’excellence personnelle. Il définit l’intelligence émotionnelle de manière plus approfondie, affirmant qu’elle se compose « d’aptitudes telles que la capacité à se motiver, à persévérer malgré les frustrations, à contrôler ses impulsions, à retarder la satisfaction, à modérer ses humeurs, à empêcher la détresse de miner la capacité de penser, à faire preuve d’empathie et à espérer » (Goleman, 1995, p. 21). Le modèle d’intelligence émotionnelle de Goleman inclut cinq aptitudes qui sont des compétences personnelles et sociales (voir le tableau 1.3.1 ci-dessous). Les trois aptitudes que sont la conscience de soi, la discipline et la motivation se rapportent aux compétences personnelles. Les autres aptitudes, à savoir l’empathie et les aptitudes sociales, sont classées dans la catégorie des compétences sociales (Sadri, 2012, p. 537). Goleman a souligné que toutes les compétences peuvent être acquises.

Tableau 1.3.1 – Aptitudes et compétences en matière d’intelligence émotionnelle (Source de données : Tableau basé sur les données de Sadri, 2012)

Compétence

Domaine de compétence

Description

Personnel

Conscience de soi

Connaissance de soi

Discipline

Gestion de soi

Motivation

Sentiments et passions qui facilitent l’atteinte des buts

Social

Empathie

Compréhension des autres et compassion à leur égard

Compétences sociales

Expertise dans l’art de gagner l’accord des autres

Développer l’intelligence émotionnelle et sociale

Les étudiant.e.s se trouvent à une étape idéale de leur vie et de leur carrière pour évaluer leur intelligence émotionnelle. Le questionnaire sur l’intelligence émotionnelle, dont le lien figure ci-dessous, peut vous aider à déterminer vos domaines de croissance.

Activité d’apprentissage essentielle 1.3.1

Visitez Queendom.com pour accéder à une évaluation de l’intelligence émotionnelle.

Maintenant que vous avez cerné un domaine de croissance, vous pouvez vous demander comment améliorer votre intelligence émotionnelle. Depuis la petite enfance, votre cerveau développe des voies neuronales en réponse à votre environnement. Au fil du temps, ces voies s’ancrent dans votre cerveau, ce qui vous permet de réagir rapidement aux circonstances de votre environnement. En fait, les réponses émotionnelles seraient plus rapides que les réponses cognitives, alors vous semblez agir avant de penser. Les recherches de Siegel (2012) dans le domaine de la neurobiologie interpersonnelle montrent qu’il est possible de modifier la réponse du cerveau aux facteurs de stress. Améliorer votre « pleine conscience » peut vous permettre de « rompre le lien entre les stimuli environnementaux et les réponses habituelles » (Gerardi, 2015, p. 60) et de choisir un plan d’action différent. Daniel Siegel (2010) a inventé le terme « Mindsight » pour décrire le fait de prendre conscience de ses réactions émotionnelles et de les modifier en temps réel. Gerardi (2015) a souligné que développer cette aptitude est difficile, mais c’est un atout précieux pour les gens qui souhaitent réussir en tant que leaders performants.

Expérience sur le terrain

Il est important de prendre du recul, de respirer profondément et d’examiner tous les aspects de la situation avant de réagir.

Pour un membre du personnel infirmier, l’acquisition d’une intelligence émotionnelle et sociale de même qu’une approche « Mindsight » sont essentielles pour devenir un leader performant dans ce domaine. Vous devrez faire face à de nombreux types de personnes différentes, qu’il s’agisse de collègues ou de patient.e.s. Il est extrêmement important d’avoir conscience de soi, de réfléchir à ses sentiments et de penser à l’influence des émotions sur les actions et les relations ou les interactions sociales. Autrement dit, vous devez apprendre à réfléchir à vos expériences cliniques pour comprendre comment la conscience de soi ou l’approche « Mindsight » vous aurait permis de changer une situation. Pattakos le disait ainsi : « Entre le stimulus et la réponse, il y a un moment. C’est là que se trouvent notre liberté et notre pouvoir de choisir notre réponse. C’est dans notre réponse que résident notre croissance et notre bonheur » (cité dans Gerardi, 2015, p. 60).

1.4 Leadership au XXIe siècle

Les progrès technologiques ont fait passer le monde de l’ère industrielle à l’ère de l’information. Porter-O’Gradyet Malloch (2011) décrivent quatre facteurs découlant de la technologie qui contribuent à l’augmentation des demandes dans le domaine des soins et qui sont associés à un épuisement des ressources : (1) une évolution sans fin; (2) la disponibilité de l’information; (3) la connaissance en tant que service plutôt que possession, avec des utilisateurs qui accèdent à la bonne information au bon endroit et au bon moment; et (4) les progrès rapides modifient la relation de service (p. ex., les procédures assistées par la technologie ont réduit le nombre et la durée des séjours à l’hôpital). Keith A. Bezanson, ancien directeur canadien du Centre de recherches pour le développement international, a conclu lors d’un congrès des Nations unies en 1994 que la société connaît une transformation si profonde que l’avenir est imprévisible (Hibberd et Davies, 2006). Des domaines d’études novateurs, tels que la science de la complexité, naissent de cette convergence rapide de preuves empiriques à l’échelle mondiale.

La complexité fait référence aux « phénomènes complexes démontrés dans les systèmes caractérisés par des composants interactifs non linéaires, des phénomènes émergents, des changements continus et discontinus, et des résultats imprévisibles » (Zimmerman, Lindberg et Plsek, 1998, p. 263). Lors d’un sommet international organisé à l’Université du Minnesota en 2003, un orateur a décrit comment le réductionnisme de Newton, qui a guidé la pensée scientifique pendant 300 ans, a été remplacé par la science de la complexité au XXIe siècle (Hibberd et Davies, 2006). Ce même orateur a souligné que

la science de la complexité peut nous aider à comprendre le système de soins, un système à plusieurs paliers très influencé par l’évolution rapide de la technologie et de l’information. Dans le secteur des soins, les praticien.ne.s constituent un système en constante évolution en raison de leurs adaptations novatrices, diverses et progressives (Holland, cité dans Hibberd et Davies, 2006, p. 500).

Activité d’apprentissage essentielle 1.4.1

Pour mieux comprendre la science de la complexité et les systèmes adaptatifs complexes des soins infirmiers, regardez la courte vidéo de Pat Ebright, « Complex Adaptive System Theory » (4:30). Répondez ensuite aux questions suivantes :

  1. Pourquoi est-il important que la ou le gestionnaire en soins infirmiers circule dans l’unité de soins infirmiers? Qu’est-ce que cette « tournée » lui apprend?
  2. À quoi Pat Ebright fait-elle référence lorsqu’elle parle des « yeux vitreux » du partenaire d’un membre du personnel infirmier?

MacPhee (2015) décrit l’intervention sanitaire fondée sur la complexité comme un système. Dans ce système, la prise de décision est répartie entre les membres de l’organisation (c’est-à-dire au niveau de la pratique), et les prestataires de soins encouragent les patient.e.s et les familles à assumer davantage la responsabilité de leurs soins.

Chaque personne peut diriger, gérer ou suivre selon les besoins. Le flux entre ces rôles favorise un environnement habilitant qui réduit la peur et le silence organisationnel concernant des sujets essentiels pour les patient.e.s, le personnel et les résultats de l’organisation (MacPhee, 2015, p. 13).

Quel type de leadership de la profession infirmière est nécessaire à l’ère de la science de la complexité? Les spécialistes soulignent que les responsables du personnel infirmier doivent comprendre les principes d’un système adaptatif complexe qui appuie le changement en veillant à ce que la confiance, la prise de risque et la flexibilité se développent, ce qui permet l’émergence de nouvelles idées (Pangman et Pangman, 2010). Pour que ces principes se concrétisent, il faut que les leaders examinent l’organisation sous l’angle de la complexité, et que les chefs d’unité laissent les problèmes de l’unité se manifester. Les leaders proposent une « vision satisfaisante » de résolution des difficultés qui permet aux individus d’élaborer et d’adopter des approches novatrices dans leur environnement de travail au lieu de leur donner des directives spécifiques. Pangman et Pangman soulignent que, pour trouver l’équilibre entre les données (simplicité) et l’intuition (complexité), les leaders infirmiers doivent circuler sur le lieu de travail, observer, apporter leur soutien ou suggérer une solution différente lorsqu’un problème est découvert. Les différences réelles entre les buts de l’organisation et le rendement quotidien de l’unité (paradoxe et tension) sont soulignées par l’ouverture des leaders à remettre en question les « vaches sacrées », c’est-à-dire les idées ou les systèmes généralement considérés comme étant au-dessus de tout questionnement ou de toute critique. Les leaders sont conscients des différents réseaux formels et informels (systèmes fantômes) qui influencent le comportement du personnel. Cette conscientisation les guide dans l’exploration et l’adoption de points de vue différents. Dans l’ensemble, les leaders valorisent à la fois la coopération et la concurrence au sein du personnel parce qu’ils ou elles savent que ces deux comportements, lorsqu’ils sont encouragés et guidés, peuvent augmenter la productivité (Pangman et Pangman, 2010).

Styles de leadership axés sur les relations

Les théories du leadership axées sur les situations et les contingences, surtout populaires de 1950 à 1980, suggèrent qu’aucun style de leadership n’est idéal dans toutes les situations. Le leadership doit être adapté aux besoins des leaders, des employés et de l’environnement (Marquis et Huston, 2015). Les réponses à la complexité croissante de notre système incluent les styles de leadership axés sur les relations, par exemple le leadership fondé sur les forces, où les leaders tentent de développer les atouts du personnel au lieu de trouver des lacunes (Wong, 2012), et le leadership authentique ou congruent, où les collaborateur.trice.s sont incité.e.s à agir (Avolio, Walumbwa et Weber, 2009). Robert Greenleaf a adopté un leadership serviteur selon lequel les leaders ont pour principale responsabilité de servir les autres et de reconnaître que le rôle des organisations est de former des personnes capables de créer un avenir meilleur (Parris et Peachey, 2013). En revanche, la théorie de l’agent principal met l’accent sur le fait que le ou la leader doit inciter les collaborateur.trice.s à agir dans l’intérêt de l’organisation, étant donné qu’ils ou elles n’ont pas tous tendance à agir dans l’intérêt de la leader ou de l’employeur.

Un autre style de leadership de la profession infirmière axé sur les relations, largement répandu en Amérique du Nord, est le style de leadership transformationnel. Ces leaders présentent quatre caractéristiques dominantes, à savoir l’influence idéalisée, la motivation inspirante, la stimulation intellectuelle et la considération idéalisée. Ils ou elles sont sensibles aux exigences des autres et s’efforcent d’aligner la culture organisationnelle existante sur une nouvelle vision (Bass et Avolio, 1993). Le leadership féministe, fondé sur les principes du leadership transformationnel, met davantage l’accent sur une éthique des soins exprimée par des compétences collaboratives et relationnelles et par l’élaboration de buts organisationnels équitables en matière de genre et d’autonomisation (Christensen, 2011).

Le leadership quantique, une réponse directe au changement constant présent dans l’environnement complexe, « s’appuie sur le leadership transformationnel et suggère que les leaders doivent collaborer avec leurs subordonnés pour définir des buts communs, tirer parti des occasions et donner au personnel les moyens de prendre des décisions » (Marquis et Huston, 2015, p. 63). Un autre style de leadership, conçu en réaction à la complexité croissante des enjeux stratégiques transversaux, est le leadership en dyade, qui consiste à créer des mini-équipes de deux personnes ou plus. Sanford et Moore (2015) ont décrit le leadership en dyade comme « un modèle de leadership formel dans lequel deux personnes ayant des compétences, une éducation et des antécédents différents sont associées pour mieux remplir la mission de l’organisation » (p. 7).

Styles de leadership axés sur les tâches

La littérature regorge d’exemples de styles de leadership axés sur les tâches, qui mettent l’accent sur l’exécution des tâches affectées plutôt que sur le développement de relations productives au travail. Les styles axés sur les tâches, tels que le leadership transactionnel, où les leaders tendent à expliquer les attentes, à récompenser le bon rendement, à corriger les écarts par rapport aux attentes et à prévenir les problèmes futurs (Xirasagar, 2008), peuvent s’avérer utiles dans les environnements rapides et stressants, tels que le service des urgences. Toutefois, d’autres styles de leadership axés sur les tâches, tels que le laissez-faire, qui caractérise les leaders qui refusent d’assumer leurs responsabilités et ne se préoccupent pas des résultats de l’organisation ou des comportements des collaborateur.trice.s (Avolio, Basset Jung, 1999), peuvent avoir des effets néfastes sur l’organisation.

L’efficacité des différents styles de leadership axés sur les tâches dépend des besoins de l’organisation. Parmi les autres types courants de leaders axés sur les tâches, il y a ceux et celles qui gèrent par exception, qui se concentrent sur la correction des tâches qui ne sont pas accomplies correctement; les leaders pragmatiques, qui se concentrent sur la stratégie et les résultats du travail plutôt que sur la prise de décisions fondées sur les valeurs (Antonakis et Atwater, 2002); les leaders passifs évasifs, qui laissent les problèmes s’aggraver avant de les résoudre (Avolio, Bass et Jung, 1999); et enfin, les leaders dissonants, qui manquent d’intelligence émotionnelle, ont tendance à être pessimistes et à ne pas avoir d’empathie envers les collaborateur.trice.s (Goleman, 1998).

Activité d’apprentissage essentielle 1.4.2

Regardez le discours TEDx de Joseph Trimble sur la culture et le leadership (17:57), puis répondez aux questions suivantes :

  1. Pourquoi Joseph Trimble affirme-t-il que nous délaissons le style de leadership du mâle alpha?
  2. M. Trimble raconte l’histoire de Diane, une femme autochtone d’un petit village d’Alaska qui a été invitée à jouer un rôle de leader au sein de son organisation. Elle a refusé. Lorsque le rôle lui a été proposé une deuxième fois, elle est retournée à son village en parler à sa famille, aux anciens et aux chefs spirituels, puis elle a accepté l’offre. Son leadership a entraîné des changements au sein de l’organisation. Comment s’y est-elle prise?
  3. Selon vous, quel était le style de leadership de Diane?
  4. Qu’est-ce que son style de leadership culturellement unique a apporté à l’organisation?

Résumé

Les changements rapides et la complexité croissante de la société se traduisent par l’apparition de nombreux styles de leadership différents. Les excellent.e.s responsables du personnel infirmier sont conscient.e.s des caractéristiques de leur environnement de travail et démontrent leur volonté d’adapter leur style de leadership en conséquence. Les leaders exceptionnels assurent la prestation de soins de qualité aux patient.e.s tout en favorisant l’atteinte des buts et objectifs de l’organisation.

À la fin du chapitre, vous devriez être en mesure de faire ce qui suit :

  1. Découvrir vos forces et vos possibilités de croissance ainsi que celles des membres du groupe.
  2. Définir les caractéristiques du leadership, de la gestion, du mentorat et de l’esprit de collaboration.
  3. Cerner les différences et les similitudes entre le leadership et la gestion de la profession infirmière.
  4. Proposer des conclusions concernant le rôle du mentorat dans les milieux de soins.
  5. Proposer des conclusions concernant le rôle et la valeur du développement personnel.
  6. Proposer des conclusions concernant l’importance de l’intelligence sociale et émotionnelle dans le développement du leadership.
  7. Comprendre l’énoncé de position de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada sur le leadership de la profession infirmière.
  8. Décrire les styles de leadership les plus courants (c.-à-d. le leadership serviteur, le leadership résonnant, le leadership dissonant, la gestion par exception et le leadership du laissez-faire), puis indiquer votre style de leadership de préférence.

Exercices

  1. Quels sont les principaux attributs personnels requis pour diriger, gérer et suivre? Quelles sont les différences entre le leadership, la gestion et le mentorat?
  2. Pourquoi la science de la complexité est-elle importante pour comprendre le leadership, la gestion et l’esprit de collaboration de la profession infirmière?
  3. Lisez « The Value of Active Followership » (la valeur de l’esprit de collaboration en action) de J. Whitlock (2013) et déterminez les facteurs humains courants qui peuvent influencer le risque, puis écrivez un scénario où règne un mauvais esprit de collaboration pendant une journée typique d’un membre du personnel infirmier autorisé. (Soyez bref – 300 mots ou moins.) Maintenant, réécrivez-le en scénario positif. Déterminez les facteurs humains courants qui peuvent influencer le risque.
  4. Réfléchissez à une situation du domaine des soins infirmiers où vous vous êtes senti frustré et avez mal réagi. Compte tenu de ce que vous avez appris sur l’intelligence émotionnelle et sociale, comment réagirez-vous à l’avenir dans des situations similaires?
  5. Quel est votre style de leadership préféré? Pourquoi avez-vous choisi ce style? Comment adopterez-vous ce style de leadership en tant qu’élève infirmier.ère?
  6. Quand pensez-vous qu’il est le plus approprié d’utiliser (a) un style de leadership relationnel et (b) un style de leadership axé sur les tâches? Pourquoi? Donnez un exemple.

Références

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2

Diversité dans les organismes de soins de santé

Sonia Udod et Louise Racine

Dans une société multiraciale, aucun groupe ne peut survivre seul.

– Martin Luther King, Jr., 31 mars 1968 (Phillips, 1999, p. 136)

Introduction

La diversité en milieu de travail est de plus en plus importante dans le domaine des soins de santé au Canada. Avec l’évolution du personnel infirmier et des tendances démographiques, il est important pour les responsables du personnel infirmier de comprendre et d’influencer le personnel dont les valeurs, les croyances et les attentes sont diverses. Ce chapitre examine d’abord la diversité culturelle, l’ethnie, la race, la compétence culturelle et la sécurité culturelle. Il aborde ensuite la différence entre la compétence culturelle et la sécurité culturelle. Troisièmement, il présente des théories pouvant être utilisées pour guider la mise en œuvre et la prestation de soins infirmiers qui tiennent compte de la compétence culturelle, en plus d’examiner le rôle des infirmier.ère.s gestionnaires dans le soutien à la mise en œuvre de soins qui font preuve de compétence culturelle auprès de la patientèle et au sein des établissements de soins de santé. Enfin, ce chapitre abordera la manière dont la diversité s’applique aux nouvelles générations et comment les conflits intergénérationnels découlent de croyances culturelles différentes. La conclusion présente des stratégies de gestion de la diversité en milieu de travail.

Objectifs d’apprentissage

  1. Comprendre les concepts de culture, de sensibilité culturelle et de sécurité culturelle dans la direction et la gestion des soins infirmiers.
  2. Aborder la diversité culturelle et la question de la différence.
  3. Cibler les modèles théoriques qui peuvent favoriser la compétence culturelle dans les soins aux patients.
  4. Expliquer les différences de générations entre la génération de l’entre-deux-guerres, les baby-boomers, la génération X et la génération Y.
  5. Explorer les enjeux liés à la diversité en milieu de travail dans le domaine des soins de santé pour le personnel infirmier, les responsables du personnel infirmier, la patientèle et leur famille.
  6. Décrire comment les responsables du personnel infirmier peuvent gérer la diversité en milieu de travail.

Au Canada, la population générale se diversifie de plus en plus en ce qui a trait à la couleur, la culture, la religion, l’ethnie et les origines (Statistique Canada, 2017). Selon les données, 20 % de la population canadienne en 2011 était composée d’immigrants. Ce pourcentage devrait continuer d’augmenter au Canada (Statistique Canada, 2017). L’afflux d’immigrants au Canada s’est caractérisé par une immigration soutenue et une diversification accrue des immigrants, conçue pour aux besoins économiques du Canada et à offrir un refuge fort apprécié aux réfugiés vulnérables.

Le nombre de nouveaux arrivants et leur emplacement géographique pourraient avoir une incidence sur la diversité ethnoculturelle des différentes régions du Canada. Par exemple, les dix principaux pays d’origine des immigrants en Saskatchewan sont les suivants : Philippines, Inde, Chine, Pakistan, Ukraine, Royaume-Uni, États-Unis, Bangladesh, Irak et Afrique du Sud (The Canadian Magazine of Immigration, 2016). De tels changements dans la reconfiguration culturelle de la population des Prairies auront une incidence sur la diversité en milieu de travail.

Ces changements ont conduit à un enjeu croissant en matière de leadership en soins infirmiers en ce qui concerne la gestion d’un environnement de travail culturellement diversifié. Les différences culturelles et générationnelles liées aux comportements, aux croyances, aux habitudes de travail et aux attentes se sont révélées être un défi pour les responsables du personnel infirmier (Kramer, 2010) et continueront d’être une priorité importante en gestion et leadership. Les différences démographiques, linguistiques, culturelles, générationnelles, éducatives, de genre et de race sont des facteurs qui ont augmenté les conflits au sein des équipes de soins, ce qui est associé à l’épuisement professionnel et à la diminution de la satisfaction au travail (Almost, 2006; Mortell, 2013). En cas de conflit et de désaccord au sein d’une équipe, la personne responsable du personnel infirmier joue un rôle important. Les malentendus et mauvaises interprétations liés aux différences culturelles et générationnelles peuvent avoir des conséquences coûteuses pour les établissements de santé, par exemple l’absentéisme, la diminution de la satisfaction du personnel et une baisse de la qualité des soins aux patient.e.s (Weingarten, 2009).

2.1 Diversité culturelle

Le Canada, les États-Unis et les pays européens sont actuellement confrontés à une crise migratoire d’une ampleur sans précédent depuis les déplacements massifs de population après la Seconde Guerre mondiale (Fleras, 2015). En réponse aux effets de la mondialisation, des politiques économiques, des contraintes financières et des migrations forcées en raison de conflits environnementaux ou armés, les infirmier.ère.s fournissent des soins de santé à des populations très diversifiées et parfois vulnérables, telles que les réfugié.e.s et les demandeur.euse.s d’asile (Racine et Lu, 2015). D’autre part, la mondialisation entraîne également une plus grande diversité ethnique et culturelle au sein des établissements de soins de santé, ce qui a une incidence sur la manière dont le personnel dispense les soins et sur les interactions avec les infirmier.ère.s venant d’autres pays. Plus que jamais, les infirmier.ère.s doivent faire preuve de compétence culturelle et de sécurité culturelle dans leur pratique quotidienne, peu importe le cadre de travail. De même, les infirmier.ère.s gestionnaires doivent comprendre leur rôle dans le soutien de la compétence et de la sécurité culturelle, tant auprès de la personne que de l’organisation. La compétence culturelle et la sécurité culturelle sont des compétences essentielles que le personnel infirmier doit acquérir et maintenir. L’Association des infirmières et infirmiers du Canada, l’Association canadienne des écoles de sciences infirmières, l’American Nurses Association, l’American Organization of Nurse Executives et l’Office of Minority Health des États-Unis comptent parmi les principaux organismes de réglementation des soins infirmiers qui reconnaissent le devoir moral et éthique des infirmier.ère.s de défendre et de fournir des soins qui font preuve de compétence culturelle.

2.2 Terminologie

La diversité culturelle fait référence aux différences culturelles et à la manière dont les personnes et les groupes varient en fonction de certaines caractéristiques ethniques, raciales et culturelles. Le concept est cependant complexe, car la reconnaissance de cette diversité ne signifie pas que les différences de « l’Autre » sont respectées ou même acceptées (Bhabha, 1994). Andrews et Boyle (2012) définissent la diversité comme les différences de race, d’ethnicité, de nationalité, de religion, de genre, d’orientation sexuelle, de capacité ou de handicap, de statut ou de classe socioéconomique, d’éducation et d’autres caractéristiques de groupes de personnes dans la société (p. 5). La diversité culturelle au Canada demande que le personnel infirmier acquière des connaissances culturelles et prenne conscience de ses attitudes à l’égard des personnes appartenant à d’autres groupes ethnoculturels. Les questions de race et d’ethnicité sont souvent combinées et apparaissent comme des questions problématiques résultant de conflits culturels ou de malentendus entre personnes et groupes. Il est donc important de comprendre les différences entre l’ethnicité et la race.

Ethnicité et ethnocentrisme

Les relations raciales et ethniques représentent un défi pour la pratique infirmière contemporaine dans le contexte de la mondialisation. Selon Cornell et Hartmann (2007), un groupe ethnique est une collectivité au sein d’une société plus large ayant une ascendance commune réelle ou supposée, des souvenirs d’une histoire commune partagée et un poids culturel sur un ou plusieurs éléments symboliques définis comme l’incarnation de leur peuple (p. 19). L’ethnicité et la race sont des concepts différents qui peuvent parfois se chevaucher. Par exemple, Eriksen (2010) souligne que les Croates, les Serbes et les Bosniaques peuvent être considérés comme caucasiens, mais forment différents groupes ethniques. Le même raisonnement s’applique aux peuples asiatiques appartenant à différents groupes ethniques, par exemple les peuples vietnamiens, chinois, coréens et cambodgiens. Cornell et Hartmann (2007) soutiennent l’idée que les groupes ethniques sont conscients de leurs caractéristiques distinctes. Selon Eriksen (2010), l’ethnicité se définit comme « les relations entre les groupes dont les membres se considèrent comme distincts » (p. 10). L’ethnicité et les valeurs qui sous-tendent l’appartenance à un groupe ethnique peuvent être utilisées pour catégoriser les personnes et les groupes selon certaines normes ou valeurs qui peuvent être à l’origine de préjugés. Ce concept est appelé ethnocentrisme.

L’ethnocentrisme désigne la tendance universelle des êtres humains à penser que leurs façons de penser, d’agir et de croire sont les seules justes, appropriées et naturelles (Purnell, 2013, p. 7). L’ethnocentrisme peut conduire à de l’imposition culturelle, ce qui peut créer des conflits avec les patient.e.s et les collègues infirmier.ère.s en raison de visions du monde différentes sur la santé, la maladie ou les soins infirmiers. L’ethnocentrisme n’influence pas seulement les interactions entre le personnel infirmier et la patientèle ou les groupes, il crée ou renforce également des inégalités dans l’accès aux soins de santé. L’ethnocentrisme peut avoir une incidence sur la santé et les résultats cliniques, car les groupes mal desservis et défavorisés peuvent choisir de ne pas consulter des infirmier.ère.s ou d’autres professionnels de la santé s’ils estiment que leurs croyances ethnoculturelles ne sont pas respectées (Sampselle, 2007). L’ethnocentrisme va à l’encontre du mandat de défense des intérêts et de justice sociale de la profession infirmière en intégrant des préjugés dans la prestation professionnelle des soins (Boutain, 2016).

Race, altérisation et racialisation

La notion de race reste controversée parce qu’elle découle du colonialisme, où les différences construites entre les peuples européens et non européens ont conduit à la marginalisation (Driedger, 2003). D’un point de vue colonialiste, la race peut être utilisée pour voir des différences basées sur la couleur de la peau. Toutefois, la notion de race en tant que construction biologique est très problématique, car elle peut mener au racisme**. Cornell et Hartmann (2007) affirment que la race est une construction sociale, car elle est liée aux significations attribuées à certaines différences biologiques. Ils précisent que la race désigne un groupe d’êtres humains socialement défini par des caractéristiques physiques. La détermination des caractéristiques qui constituent la race, la sélection des marqueurs et, par conséquent, la construction de la catégorie raciale elle-même, est un choix (2007, p. 25).

Autrement dit, la race est socialement construite, car c’est la société qui choisit les marqueurs de différences en fonction de caractéristiques biologiques ou culturelles.

Purnell (2013) affirme que la « race a une signification sociale, attribue un statut, limite ou augmente les occasions et influence les interactions entre la patientèle et les clinicien.ne.s » (p. 8). Le racisme est un « concept négatif, fondé sur la croyance que certaines races sont inférieures à d’autres » (Driedger, 2003, p. 216). En tant que construction biologique et sociale, la race peut être utilisée comme moyen de stratification sociale, également appelée altérisation. Canales (2010) affirme que l’altérisation est à la fois source d’exclusion et d’inclusion. L’altérisation représente un processus de racialisation (Ahmad & Atkin, 1996). Canales affirme que l’altérisation « utilise souvent le pouvoir des relations pour dominer et subordonner, ce qui peut entraîner l’aliénation, la marginalisation, la diminution des occasions, l’oppression intériorisée et l’exclusion ». L’altérisation est liée à la « visibilité » (couleur de peau, accent, orientation sexuelle, etc.) de la différence d’une personne (2010, p. 5). Il est difficile de réfléchir à ses propres préjugés raciaux, mais c’est une étape nécessaire pour développer et mettre en œuvre la compétence et la sécurité culturelles.

La discussion sur la race et l’ethnicité souligne que « les cultures et les différences culturelles ne sont pas découvertes, elles sont construites » (Allen, 1999, p. 230). Si les stéréotypes sont socialement construits, on peut affirmer que la compétence et la sécurité culturelles sont des processus par lesquels les infirmier.ère.s déconstruisent la race et l’ethnicité afin d’éviter d’appliquer des stéréotypes raciaux et culturels dans leurs interactions avec des personnes et des groupes appartenant à des groupes raciaux et ethnoculturels différents. Le personnel infirmier a le devoir éthique de respecter les croyances culturelles des autres personnes et groupes en matière de santé et de maladie. Ce respect se recoupe avec la culture et la compétence culturelle pour favoriser le dépassement des barrières de la race et de l’ethnicité et permet de traiter les personnes culturellement différentes de nous de manière humaine et bienveillante (Andrews et Boyle, 2012).

Andrews et Boyle (2012) mentionnent que les soins infirmiers transculturels permettent le développement d’un « ensemble de connaissances scientifiques et humanistes permettant d’offrir des soins infirmiers propres à la culture et universels » (p. 4). Pour fournir des soins infirmiers adaptés à la culture et universels, le personnel infirmier doit s’efforcer de connaître les personnes issues de milieux ethnoculturels différents. Les infirmier.ère.s doivent s’efforcer de faire preuve de compétence culturelle et de sécurité dans leurs interactions non seulement avec les patient.e.s, mais aussi avec leurs collègues et les professionnel.le.s de la santé.

2.3 Compétence culturelle

Description

La compétence culturelle est un concept tiré des travaux fondamentaux de Madeleine Leininger, infirmière et anthropologue de formation. Leininger a été la première à constater l’importance de la culture dans la prestation des soins infirmiers. La théorie de Leininger sur la diversité et l’universalité des soins culturels (1995) repose sur l’hypothèse selon laquelle la culture a une incidence sur les expériences de santé et de maladie des personnes ainsi que sur la prestation des soins infirmiers. Leininger (1995) suggère que « la culture est un aspect intégral et essentiel de l’être humain, et les aspects liés à la prise en charge de la culture ne peuvent être ignorés ou négligés » (p. 4). La culture représente la connaissance acquise, partagée et transmise des valeurs, des croyances, des normes et des modes de vie d’un groupe spécifique qui guide une personne ou un groupe dans sa réflexion, ses décisions et ses actions de manière systématique (Leininger, 1995, p. 60). La religion, le sexe et la socialisation ont une incidence sur les modèles culturels et créent une diversité de besoins lorsqu’ils sont appliqués aux soins infirmiers et aux soins de santé. Les infirmier.ère.s doivent faire preuve de compétence culturelle au moment d’interagir avec une patientèle culturellement diversifiée et des milieux de travail multiculturels.

La compétence culturelle est un processus à la fois individuel et organisationnel (Andrews et Boyle, 2012). Purnell (2013) définit la compétence culturelle en santé comme le fait d’avoir les connaissances, capacités et compétences nécessaires pour fournir des soins conformes aux croyances et pratiques culturelles du patient (p. 7). Pour Jeffreys (2010), la compétence culturelle est un processus d’apprentissage multidimensionnel qui intègre les compétences infirmières transculturelles dans les trois dimensions (cognitive, pratique et affective) qui demandent l’auto-efficacité transculturelle (confiance) et vise à fournir des soins infirmiers culturellement compétents » (p. 36). Pour Campinha-Bacote (2002), la compétence culturelle est un « processus continu dans lequel le professionnel de soins de santé s’efforce continuellement d’acquérir la capacité de travailler efficacement dans le contexte culturel du client [personne, famille, communauté] » (p. 181). Le processus de compétence culturelle et le modèle de soins de Campinha-Bacote (2002) reposent sur l’hypothèse que la compétence culturelle est un processus continu d’être et de devenir. Campinha-Bacote (2002) souligne que pour être efficace, ce modèle « exige que les professionnel.le.s de soins de santé se perçoivent comme étant en train d’acquérir des compétences culturelles et non comme s’ils les avaient déjà » (p. 181). Ce processus continu signifie que le personnel infirmier est plongé dans un processus d’éducation où l’apprentissage des différences culturelles n’a pas de fin.

Dans son article, Bourque Bearskin (2011) souligne que « la culture est tout ce qui concerne les gens : la façon dont ils vivent, dont ils voient les choses, dont ils communiquent » (p. 4). C’est en rencontrant des personnes d’origines ethnoculturelles différentes que le personnel infirmier peut commencer à faire preuve de compétence culturelle. La compétence culturelle est possible qu’au contact de la diversité culturelle. De même, Campinha-Bacote souligne que la rencontre de la diversité culturelle est une condition préalable ou un antécédent au développement de la compétence culturelle. Dans son modèle, Campinha-Bacote décrit cinq concepts interdépendants : (1) la prise de conscience culturelle; (2) les connaissances culturelles; (3) les habiletés culturelles; (4) les rencontres culturelles; (5) le désir culturel.

Évaluation culturelle

La prise de conscience culturelle consiste à évaluer ses propres préjugés culturels et raciaux afin de cibler comment ils peuvent affecter la prestation de soins infirmiers aux groupes culturels ou linguistiques minoritaires. Les connaissances culturelles font référence aux connaissances sur les groupes culturels et sur la manière dont leurs croyances et normes culturelles peuvent avoir une incidence sur les perceptions et les expériences de la santé et de la maladie, et influencer l’accès aux soins de santé et les relations avec le personnel infirmier et les autres professionnels de la santé. Il est important de savoir comment l’ethnicité et la race peuvent avoir un impact sur la pharmacothérapie ou de quelle façon la culture peut façonner le mode de vie et d’autres comportements liés à la santé.

Campinha-Bacote (2002) affirme que la reconnaissance de la culture implique que les infirmier.ère.s doivent acquérir des connaissances et des habiletés culturelles pour procéder à une évaluation culturelle de chaque patient.e. L’évaluation culturelle est définie comme « une évaluation ou un examen systématique des personnes, des groupes et des communautés en ce qui concerne leurs croyances, valeurs et pratiques culturelles afin de déterminer leurs besoins explicites et les pratiques d’intervention » dans le contexte de la santé (Leininger, 1995, p. 122). D’autres théories peuvent être utilisées pour réaliser ces évaluations, notamment le modèle d’évaluation transculturelle de Giger et Davidhizar (2002), la théorie de la diversité et de l’universalité des soins culturels de Leininger (2002), le modèle de compétence culturelle de Purnell (2013) ou le modèle de diversité culturelle en matière de santé et de maladie de Spector (2009). Par exemple, le modèle d’évaluation transculturelle de Giger et Davidhizar (2002) explore six phénomènes culturels, considérés comme culturellement uniques chez les humains, qui deviennent l’objet de l’évaluation culturelle. Ces variables sont les suivantes : (1) la communication; (2) l’espace; (3) l’organisation sociale; (4) le temps; (5) le contrôle environnemental; (6) les variations biologiques (Giger et Davidhizar, 2002, p. 185). De façon similaire, le modèle de compétence culturelle de Purnell (2013) évalue les 12 domaines de la culture suivants :

1) sommaire; localités habitées et topographie; 2) communication; 3) rôles et organisation de la famille; 4) questions relatives à la main-d’œuvre; 5) écologie bioculturelle; 6) comportements à risques élevés pour la santé; 7) nutrition; 8) pratiques durant la grossesse et la gestation; 9) rituels mortuaires; 10) spiritualité; 11) pratiques de soins; 12) pratiques des intervenants de la santé (Purnell, 2013, p. 18).

Les rencontres culturelles se concentrent sur les interactions transculturelles. Les interactions transculturelles permettent aux infirmier.ère.s de s’engager auprès de patient.e.s ou de groupes culturellement diversifiés pour changer ou remettre en question les préjugés ethniques et raciaux. La communication et la langue sont des facteurs importants pour faciliter l’accès aux expériences vécues par les clients en matière de santé et de maladie. En cas de problème de maîtrise de la langue, les infirmier.ère.s peuvent faire appel à des interprètes ou à des courtiers culturels pour accéder aux connaissances des patient.e.s sur leur maladie ou leur état de santé.

Les habiletés culturelles représentent la capacité de réaliser une évaluation culturelle lors des rencontres avec les patient.e.s ou les familles. Le désir culturel fait référence à la motivation et au véritable désir de compréhension culturelle, par opposition à l’obligation de tenir compte de la diversité culturelle. Campinha-Bacote suggère que la bienveillance est un précurseur du désir culturel, c’est-à-dire que l’infirmier.ère se soucie des personnes provenant de différentes cultures. Le désir culturel peut se manifester par une ouverture à la diversité culturelle et une volonté d’apprendre des autres. Campinha-Bacote explique que l’acquisition de la compétence culturelle est un processus interactif et transformationnel.

Lignes directrices professionnelles pour des soins infirmiers culturellement compétents

La prestation de soins culturellement compétents s’inscrit dans les normes et codes de déontologie établis par des organismes internationaux, nationaux et provinciaux de réglementation des soins infirmiers, dont l’Association des infirmières et infirmiers du Canada. Le Conseil international des infirmières (2012) mentionne qu’en « prodiguant des soins, le personnel infirmier favorise un environnement dans lequel les droits de l’homme, les valeurs, les coutumes et les croyances spirituelles de la personne, de la famille et de la communauté sont respectés » (p. 2). L’Association des infirmières et infirmiers du Canada soutient la notion de justice sociale inhérente à la prestation de soins infirmiers culturellement compétents. Pour l’Association des infirmières et infirmiers du Canada (2010), la compétence culturelle est « une série de comportements, d’attitudes et de politiques qui convergent dans un système, un organisme ou entre professionnels et [leur] permettent de travailler efficacement dans des situations transculturelles » (p. 1). Dans le document « Compétence culturelle et sécurité culturelle en enseignement infirmier, Programme d’études pour la profession infirmière autochtone », l’Association des infirmières et infirmiers autochtones du Canada, l’Association canadienne des écoles de sciences infirmières et l’Association des infirmières et infirmiers du Canada stipulent que le personnel infirmier canadien doit comprendre l’impact du colonialisme sur les enjeux de santé autochtones pour éviter de tomber dans les pièges de l’ethnocentrisme et de l’imposition culturelle. Les infirmier.ère.s doivent apprendre à respecter les modes de connaissance autochtones dans leurs communications. Bien que la compétence culturelle englobe des caractéristiques telles que la conscience culturelle, la sensibilité et l’humilité, l’objectif ultime du développement et de l’application des compétences culturelles de base est de défendre et de protéger la dignité des personnes et des groupes (Douglas et coll., 2014).

De même, aux États-Unis, l’Office of Minority Health (OMH), qui fait partie du Department of Health and Human Services des États-Unis, exige que les citoyens américains aient accès à des « services adaptés à la culture et à la langue, respectueux des croyances, des pratiques et des besoins des patients multiculturels et issus de la diversité » (OMH, 2017). La compétence culturelle n’est donc pas seulement un devoir individuel et éthique du personnel infirmier, mais aussi une responsabilité de l’organisation : la responsabilité de permettre et de faciliter l’établissement de règles et de politiques qui favoriseront la compétence culturelle dans les relations de travail sur le lieu de travail des infirmier.ère.s.

Enfin, le College of Registered Nurses of Saskatchewan (CRNS) (autrefois la Saskatchewan Registered Nurses’ Association) souligne que le développement de la sécurité culturelle est une compétence de base qui doit être abordée dans les programmes de formation en soins infirmiers. La compétence culturelle est reflétée à la norme II.2 (44) : « Traiter les priorités de soins et les résultats souhaités avec les clients tout en étant conscients de la sécurité culturelle et de l’influence des relations de pouvoir existantes » (CRNS, 2013, p. 13). Voyons maintenant les caractéristiques des établissements culturellement compétents.

2.4 Compétence culturelle dans les établissements

La diversité culturelle accrue du Canada oblige les établissements à adapter leurs services au portrait démographique du pays. La prestation de soins culturellement compétents n’est pas efficace sans la mise en œuvre de valeurs infirmières dans qui elles-mêmes font preuve de compétence culturelle dans les établissements de soins. Bien que les déterminants sociaux de la santé affectent les gens de différentes façons, les établissements de soins de santé doivent s’efforcer d’adapter les soins infirmiers et la prestation des soins pour répondre aux besoins d’une population culturellement diversifiée. Le personnel infirmier et les établissements de santé, sachant que les inégalités ont une incidence sur les résultats cliniques, doivent s’efforcer d’offrir des soins de qualité qui tiennent compte de la diversité culturelle.

Aux États-Unis, les questions de compétence culturelle dans les établissements sont une priorité pour l’Office of Minority Health. L’Office of Minority Health contribue à l’amélioration du développement des normes nationales pour des services de santé adaptés à la culture et à la langue. Il existe 15 normes nationales visant à améliorer la qualité des soins de santé et favoriser l’équité en santé dans les établissements de soins. Les trois principes suivants sous-tendent les normes : (1) la gouvernance; le leadership et la main-d’œuvre; (2) la communication et l’aide linguistique; (3) l’engagement à l’amélioration continue et la responsabilisation.

Andrews et Boyle (2012) estiment que la compétence culturelle organisationnelle implique des caractéristiques partagées au sein d’un établissement. Elles affirment que les établissements doivent mettre en place des principes et des politiques qui permettront au personnel infirmier et autre professionnel de la santé de travailler efficacement en contexte de diversité. Ces établissements devront « valoriser la diversité, procéder à une autoévaluation, gérer la dynamique des différences, acquérir et institutionnaliser les connaissances culturelles et s’adapter à la diversité dans le cadre des processus d’embauche et de recrutement » (Andrews et Boyle 2012, p. 18). Douglas et coll. (2014) affirment qu’une approche unique de la compétence culturelle au sein d’un établissement ne s’applique pas à tous les contextes de santé et à tous les groupes culturels, toutefois, certains principes généraux ou lignes directrices peuvent démontrer l’ouverture de l’établissement à la diversité culturelle. Douglas et coll. (2012) définissent dix lignes directrices qui soutiennent la compétence culturelle à l’étape de l’enseignement : (1) connaissances des cultures; (2) éducation et formation en soins faisant preuve de compétence culturelle; (3) réflexion critique; (4) communication interculturelle; (5) pratique faisant preuve de compétence culturelle; (6) compétence culturelle dans le système et les établissements de soins de santé; (7)  autonomisation et défense des intérêts des patients; (8) main-d’œuvre multiculturelle; (9) leadership interculturel; (10) pratique et recherche fondées sur des données probantes.

Il est possible de consulter l’article de Douglas et coll. (2014) pour obtenir plus de détails. Ces lignes directrices définissent le rôle important des responsables du personnel infirmier et de l’administration dans la mise en place d’un environnement de travail ouvert et positif pour gérer la diversité culturelle. Les établissements de soins de santé doivent donc fournir les outils et contextes nécessaires pour permettre aux responsables du personnel infirmier de soutenir la compétence culturelle. Andrews et Boyle (2012) soulignent la nécessité d’une formation à la communication interculturelle, ainsi que de l’importance de l’accès à des outils adaptés à la langue et à des interprètes qui peuvent également jouer le rôle d’intermédiaires culturels, permettant la compréhension des comportements, des attitudes et des normes concernant les expériences de la santé et de la maladie. La compétence culturelle sous-entend également que les établissements soient attentifs à la diversité culturelle sous leur toit. La question de la migration des infirmier.ère.s souligne l’importance pour les organismes de santé de développer des stratégies pour résoudre les conflits culturels et soutenir le personnel infirmier formé à l’étranger dans leur adaptation à un nouvel environnement de travail (Douglas et coll., 2014).

Bref, la compétence culturelle est une compétence de base exigée de tout le personnel infirmier. Faire preuve de compétence culturelle en soins infirmiers est une manière éthique et respectueuse de reconnaître que la patientèle, les familles et les communautés ont une vision de la santé et de la maladie qui peut être différente de la nôtre. La compétence culturelle n’exige pas de connaître tous les détails des origines ethnoculturelles des gens, mais consiste plutôt à faire preuve d’ouverture et de souplesse pour avoir un dialogue constructif avec les patient.e.s ou les familles (Bourque Bearskin, 2011; Woods, 2010). Le respect et la pratique éthique sont les sceaux de la compétence culturelle. La compétence culturelle est étroitement liée au concept de bienveillance (Leininger, 1995). La bienveillance implique toujours le respect des différences culturelles et de la diversité culturelle (Racine, 2014). Pour acquérir la compétence culturelle, le personnel infirmier doit également être conscient des relations de pouvoir en place. De ce fait, les infirmier.ère.s doivent examiner leurs propres valeurs culturelles et leurs attitudes dans la pratique infirmière auprès de divers groupes ethnoculturels.

2.5 Sécurité culturelle

Malgré l’essor remarquable de la documentation sur la compétence culturelle en soins infirmiers, la prestation de soins infirmiers culturellement sécuritaires n’est pas encore une réalité (Racine, 2014). La sécurité culturelle est un concept issu des travaux d’Irihapeti Ramsden, une infirmière pionnière maorie qui a décrit les inégalités persistantes affectant les peuples autochtones de Nouvelle-Zélande (Nursing Council of New Zealand, 2011). La sécurité culturelle, bien qu’il s’agisse d’un concept relativement nouveau, permet de comprendre la persistance des inégalités en santé parmi les populations autochtones et minoritaires au Canada. Ces expériences d’inégalités en santé expliquent pourquoi la compétence culturelle ne peut à elle seule éliminer les obstacles systémiques et institutionnels qui affectent la santé et les résultats cliniques (Racine, 2014). La compétence culturelle permet de comprendre d’autres normes et comportements culturels, mais tend à négliger les barrières systémiques ou celles créées par l’inégalité d’accès aux déterminants sociaux de la santé, parce qu’au centre des relations raciales se trouvent le concept de pouvoir, et que les relations raciales ne peuvent être dissociées des questions de pouvoir qui affectent la discrimination raciale, ethnique, linguistique et de genre (Racine, 2014). La sécurité culturelle demande au personnel infirmier d’être conscient des relations de pouvoir dans leurs interactions avec la patientèle et leurs collègues de travail.

La sécurité culturelle est définie comme « les mesures des membres du personnel infirmier ou de la pratique sage-femme pour protéger du danger ou atténuer les risques de dangers pour la santé et le bien-être des patient.e.s et la communauté » (Papps et Ramsden, 1996, p. 493). Contrairement à la sécurité culturelle, les soins infirmiers transculturels ne demandent pas aux infirmirer.ère.s d’examiner leurs propres attitudes et comportements culturels et l’incidence que ces attitudes ethnocentriques peuvent avoir sur les patient.e.s (Ramsden, 1993). La sécurité culturelle place le personnel infirmier au centre de la réflexion, tandis que la compétence culturelle se concentre sur la connaissance des antécédents ethnoculturels de la patientèle, des familles ou des communautés. La sécurité culturelle permet de poser un regard critique sur le personnel infirmier et à la patientèle de juger la qualité de la sécurité culturelle des soins. À ce titre, toute intervention infirmière qui ne tient pas compte des relations de pouvoir peut mettre en péril la santé et l’intégrité des personnes et des groupes, et peut donc être considérée comme culturellement dangereuse. La présence de relations de pouvoir dans la rencontre professionnelle entre l’infirmier.ère et son patient.e oblige les infirmier.ère.s à réfléchir à leurs préjugés et à leurs privilèges raciaux ou ethniques quand vient le temps de se soucier de personnes et de groupes culturellement non sécuritaires. Autrement dit, il ne suffit pas de faire preuve de compétence culturelle pour fournir des soins infirmiers adaptés aux croyances et pratiques de santé de patientèles diversifiées et vulnérables (Andrews et Boyle, 2012). Les théoricien.ne.s de la sécurité culturelle invitent les infirmier.ère.s à prendre conscience de la place des problèmes de santé dans les processus historiques et sociaux. La sécurité culturelle vise à instaurer la confiance pour que les patient.e.s, les familles et les communautés se sentent acceptés et accueillis dans le système de soins de santé. Browne et Fiske (2001) soulignent que les pratiques culturellement dangereuses compromettent l’accès des patient.e.s aux soins de santé en raison des stéréotypes négatifs du personnel infirmier et des autres professionnel.le.s de la santé en matière de différences culturelles. La sécurité culturelle représente un angle d’analyse important pour explorer les questions de pouvoir et la manière dont le pouvoir a une incidence sur les soins et la prestation de soins infirmiers (Smye et Browne, 2002).

La sécurité culturelle concerne les relations de pouvoir et plus particulièrement l’incidence du colonialisme et du postcolonialisme sur la création d’inégalités en santé parmi les groupes marginalisés (Racine, 2008). De même, Bourque Bearskin rappelle aux membres du personnel infirmier que leurs responsabilités « en matière de sécurité culturelle doivent inclure une attention aux inégalités dans les soins de santé » (2011, p. 6). Dans le contexte de mondialisation du 21e siècle, la migration des infirmier.ère.s et les déplacements massifs de réfugiés des pays en développement vers les pays développés obligent le personnel infirmier occidental à faire preuve de compétence et de sécurité culturelles lors de leurs rencontres professionnelles avec des patient.e.s et des familles non occidentaux. Ce contexte de diversité culturelle en constante évolution demande aux gestionnaires du personnel infirmier de prendre conscience de leur rôle dans la création d’occasions de formation et dans la promotion de l’intégration professionnelle, culturelle et sociale des infirmier.ère.s d’origines non occidentales sur les lieux de travail. De nombreux efforts visant à mettre en place des pratiques de gestion qui font preuve de compétence et de sécurité culturelles ont été définis (American Organization of Nurse Executives, 2015; Association des infirmières et infirmiers autochtones du Canada, 2009; Association des infirmières et infirmiers du Canada,2010; Conseil international des infirmières,2012; Nursing Council of New Zealand, 2011). Il reste toutefois encore beaucoup à faire, car les inégalités en santé persistent et le personnel infirmier formé à l’étranger est toujours confronté à des défis au sein des systèmes de santé occidentaux (Mortell, 2013).

Note de recherche

Dauvrin, M. et Lorant, V. (2015). Leadership and cultural competence of healthcare professionals: A social network analysis. Nursing Research, 64(3), 200-210.

Objectif

L’objectif de cette étude était de décrire la compétence culturelle des responsables et du personnel de soins, et de déterminer le lien entre la compétence culturelle des responsables et celle du personnel à l’aide d’une analyse des réseaux sociaux. La première question de recherche émettait l’hypothèse que le personnel de santé serait probablement plus culturellement compétent si les responsables étaient culturellement compétents. La deuxième question de recherche émettait l’hypothèse que l’incidence du leadership dépendrait des caractéristiques du responsable, notamment de son expertise en matière de compétence culturelle.

Discussion

Les trois zones géographiques reflétant des populations non résidentes ont été sélectionnées en Belgique. L’échantillon final comprenait 24 services de santé : cinq services de soins primaires externes et 19 services d’hospitalisation provenant de quatre hôpitaux. Les 19 services de santé pour patients hospitalisés comprenaient quatre unités gériatriques, quatre unités de soins intensifs, quatre unités d’oncologie, trois unités de psychiatrie, deux unités de maladies transmissibles, une unité de soins palliatifs et une unité d’endocrinologie. Les participants étaient des responsables (n=71) et des professionnel.le.s de la santé (n=436). L’échelle de compétence culturelle a été adaptée au contexte belge pour tous les professionnel.le.s de soins de santé. L’échelle est composée de cinq domaines de compétence culturelle : (1) le paradigme (capacité à s’adapter à un type de soins différent); (2) la communication (capacité à fournir des informations aux patient.e.s dans un langage clair); (3) la spécificité (capacité à fournir des soins spécifiques à des groupes spécifiques); (4) l’organisation (capacité de l’établissement à s’adapter aux besoins des patient.e.s); (5) la médiation (capacité à négocier avec les patient.e.s).

La compétence culturelle du personnel de soins a été associée à la compétence culturelle du responsable. Ces résultats sont particulièrement significatifs en ce qui concerne la médiation et le paradigme, ce qui suggère que les lieux de travail qui encouragent les différentes manières de fournir des soins et en font l’exemple et qui enseignent au personnel comment gérer les différences culturelles sont mieux outillés pour fournir des soins de qualité aux diverses populations migrantes.

Application dans la pratique

La migration internationale est un phénomène mondial qui présente un défi aux leaders et aux professionnels de la santé en matière de prestation de soins faisant preuve de compétence culturelle. Les leaders qui occupent des postes officiels ont une incidence positive plus importante sur la diffusion de la compétence culturelle au sein du personnel de soins. Différentes stratégies, comme de donner l’exemple, peuvent contribuer à transmettre l’empathie, le professionnalisme et l’adoption de comportements respectueux envers les personnes issues de toutes les cultures. Les relations sociales et les effets du leadership au sein des services de soins de santé doivent être pris en compte lors de l’élaboration et de la mise en œuvre de stratégies qui font preuve de compétence culturelle. Il serait justifié de mener des recherches supplémentaires en contexte canadien.

2.6 Théories et modèles de compétence culturelle

Il existe un certain nombre de modèles conceptuels et de théories qui guident la mise en œuvre de la compétence culturelle dans la formation en soins infirmiers. L’une des principales critiques est que ces théories ou modèles de compétence culturelle restent axés sur les patient.e.s ou client.e.s et non sur les établissements.

L’absence de théories de la culture infirmière pour guider la recherche sur la compétence culturelle organisationnelle peut être associée au fait que la compétence a été étudiée d’un point de vue individuel plutôt que d’un point de vue organisationnel, ce qui signifie également que les soins infirmiers restent culturellement homogènes. Un important corpus de connaissances sur les infirmier.ère.s formé.e.s à l’étranger a été développé au fil des ans, mais moins de recherches ont été menées sur les questions de gestion de la diversité culturelle en gestion des soins infirmiers. Dans un contexte d’immigration et de mondialisation, les responsables du personnel infirmier devront peut-être examiner la théorie de la diversité et de l’universalité des soins culturels de Leininger pour mettre en œuvre des pratiques de gestion exemplaires afin d’intégrer le personnel infirmier migrant et toute autre forme de diversité (générationnelle, démographique) (McFarland et Wehbe-Alamah, 2017).

L’objectif de la théorie de Leininger sur la diversité et l’universalité des soins culturels est de « découvrir, consigner, comprendre et expliquer l’interdépendance des phénomènes de soins et de culture grâce aux différences et similitudes des cultures » (McFarland et Wehbe-Alamah, 2017, p. 5). Bien que les soins, la bienveillance et la culture représentent des concepts centraux de la théorie, Leininger a estimé que les concepts de connaissances émiques et étiques, d’ethnohistoire, d’environnement, de vision du monde et de soins infirmiers professionnels étaient profondément influencés par la culture (McFarland et Wehbe-Alamah, 2017). Ces concepts permettent d’appliquer la théorie de Leininger pour explorer les cultures organisationnelles. Les connaissances émiques représentent les connaissances des personnes, des participant.e.s, des client.e.s, des familles ou des communautés, tandis que les connaissances étiques représentent les connaissances professionnelles (élitistes). L’ethnohistoire fait référence aux « faits, événements, instances et expériences d’êtres humains, de groupes et d’établissements qui se produisent au fil du temps dans des contextes particuliers et qui aident à expliquer les modes de vie [pratiques] passés et actuels » (McFarland et Wehbe-Alamah, 2017, p. 15). Le contexte environnemental fait référence aux facteurs sociaux, culturels, économiques et technologiques qui influencent les entreprises et les organisations.

L’utilisation des technologies de pointe a une incidence sur les décisions des gestionnaires en soins infirmiers ainsi que sur leur perception des problèmes complexes liés aux soins de santé. La vision du monde est la perception qu’a une personne des enjeux de la vie quotidienne tels que la santé, la maladie et la prestation de services de santé; cette vision du monde révèle les valeurs sociétales et organisationnelles. Ces visions peuvent également être considérées comme des idéologies qui ont une incidence sur les établissements de soins de santé et définissent les missions et les activités de planification stratégique. La théorie de Leininger peut être appliquée pour explorer, découvrir et comprendre une culture organisationnelle et la manière dont elle affecte la vision, la mission et la prestation des services de soins de santé. Il s’agit d’une importante théorie en soins infirmiers. En raison de sa vaste portée, on peut plus facilement déplacer son attention des infirmières individuelles vers les établissements de soins de santé.

Activité d’apprentissage essentielle 2.6.1

Passez en revue quatre des références ci-dessous et choisissez un point important sur lequel revenir avec vos collègues de classes.

Pour obtenir plus d’informations sur la diversité, voir « Soutenir la main-d’œuvre en acceptant la diversité » sur le site Web de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada.

Pour obtenir plus d’information sur la compétence culturelle, consulter l’article de Josepha Campinha-Bacote intitulé « Process of Cultural Competence in the Delivery of Healthcare Services ».

Pour obtenir plus d’information sur la compétence culturelle et la sécurité culturelle, consulter « Compétence culturelle et sécurité culturelle en enseignement infirmier. Programme d’études pour la profession infirmière autochtone » (2009) publié par l’Association des infirmières et infirmiers autochtones du Canada.

Pour obtenir plus d’information sur la compétence culturelle, voir l’énoncé de position « Encourager la compétence culturelle dans les soins infirmiers » de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada, 2010.

Pour obtenir plus d’information sur les compétences culturelles, voir le document « Standards and Foundation Competencies for the Practice of Registered Nurses » du College of Registered Nurses of Saskatchewan (CRNS) (autrefois la Saskatchewan Registered Nurses’ Association), 2013.

Pour obtenir plus d’information sur la sécurité culturelle, consulter le document « Guidelines for Cultural Safety, the Treaty of Waitangi and Maori Health in Nursing Education and Practice » du Nursing Council of New Zealand, 2011.

Pour obtenir plus d’information sur la théorie de la diversité et de l’universalité des soins culturels de Madeleine Leininger, visitez le site Web de la Transcultural Nursing Society.

Pour obtenir plus d’information sur la compétence culturelle, consulter le site Web du US Office of Minority Health.

Pour obtenir plus d’information sur les compétences, voir le document « Nurse Manager Competencies » de l’American Organization of Nurse Executives, 2015.

Activité d’apprentissage essentielle 2.6.2

Formez des groupes de quatre ou cinq personnes. Sélectionnez un groupe ethnoculturel à étudier et sur lequel portera vos discussions (votre formateur.trice fera circuler une feuille d’inscription dressant la liste de groupes présents dans votre zone géographique). En groupe, préparez une présentation de 10 à 15 minutes (10 minutes de présentation et 5 minutes de discussions et questions). Dans votre présentation, vous devrez :

  • donner des informations sur le groupe ethnoculturel choisi;
  • relever les facteurs culturels susceptibles d’influencer les services de soins de santé pour les personnes appartenant à ce groupe;
  • déterminer les stratégies sensibles à la culture qui peuvent avoir une incidence positive sur la prestation des soins.

Tenez compte des éléments suivants dans vos discussions : Quelle incidence aurait une personne issue de chacun des groupes culturels ciblés sur le milieu de travail? Quand les soins infirmiers deviennent-ils culturellement non sécuritaires? Pourquoi ne sommes-nous pas capables d’atteindre la sécurité culturelle dans le secteur des soins infirmiers?

2.7 Diversité générationnelle

La diversité générationnelle est présente dans tous les établissements de soins de santé. Chaque génération a ses propres valeurs, points de vue sur l’autorité, attitudes à l’égard du travail, styles de communication et attentes à l’égard de leur responsable et de leur milieu de travail (Stanley, 2010). Les cohortes générationnelles désignent des groupes de personnes qui partagent des années de naissance, une histoire et une personnalité collective découlant d’expériences déterminantes (Kramer, 2010). Les responsables du personnel infirmier doivent relever le défi d’accueillir et de respecter un personnel issu de plusieurs générations différentes tout en développant et en soutenant une équipe fonctionnelle et cohésive (Hahn, 2011). Connaître les caractéristiques et valeurs de chaque cohorte mène à une meilleure compréhension du portrait de chaque génération et permet de mieux collaborer, d’accroître la productivité et d’avoir une incidence sur la rétention. Les marqueurs générationnels sont des événements qui ont une incidence sur les membres d’une génération (Huber, 2014). Les cohortes générationnelles ont tendance à se concentrer sur les défauts de caractère des autres générations plutôt que d’apprécier leurs différences culturelles et générationnelles (voir le tableau 2.7.1 : Cohortes générationnelles).

Diversité générationnelle de la main-d’œuvre

Le personnel infirmier actuel est formé de quatre générations distinctes : la génération de l’entre-deux-guerres, les baby-boomers, la génération X et la génération Y. La génération Z est la cohorte générationnelle la plus récente, mais nous avons moins de données sur cette génération en milieu de travail**. Les profils de chaque génération, présentés ci-dessous, permettent de comprendre leurs valeurs, leur éthique professionnelle, leurs attitudes envers l’autorité et leurs aspirations professionnelles (Kramer, 2010). Connaître et respecter ces différences peut favoriser un environnement de travail qui répond efficacement aux différents besoins, attentes et comportements de chaque génération, et qui mène à un groupe de travail cohésif.

Génération de l’entre-deux-guerres (avant 1946)

La présence de cette cohorte dans la main-d’œuvre est de moins en moins grande, mais quelques personnes sont encore présentes. Les infirmier.ère.s de la génération sont des personnes expérimentées, loyales, dévouées et fiables qui apprécient la constance; pour elles, le changement est difficile à accepter t(Hahn, 2011). Cette génération a grandi dans l’incertitude politique et économique et a vécu des expériences telles que la Grande Dépression et la Seconde Guerre mondiale. Pour cette génération, il faut obéir aux figures d’autorité et le succès est le fruit d’un travail acharné et du respect des règles. En raison de leur loyauté, de leur sens du devoir, de leur respect de l’autorité et de leur travail acharné, les membres de cette génération apprécient les styles de leadership fondés sur le l’autorité et le contrôle. La communication en personne ou par écrit est généralement plus efficace que l’utilisation de technologies numériques. On peut encore observer leur éthique de travail dans les administrations, les politiques et les pratiques des établissements de soins de santé.

Baby-boomers (1946-1963)

La génération du baby-boom comprend généralement les personnes nées entre 1946 et 1963 (Duchscher et Cowin, 2004). Les baby-boomers sont nés après la Seconde Guerre mondiale et n’ont pas été confrontés aux mêmes attentes sévères en matière de respect de l’autorité ou d’obéissance (Blythe et coll., 2008). Par conséquent, les baby-boomers ont grandi à une époque caractérisée par l’optimisme, l’esprit d’équipe, les possibilités et la croissance (Hart, 2006; Solaja et Ogunola, 2016; Stanley, 2010). Leurs valeurs fondamentales sont ente autre le sens aiguisé du devoir, l’engagement, la santé et le bien-être et une bonne éthique de travail qui se reflète dans l’estime de soi et l’épanouissement (Duchscher etCowin, 2004; Hart, 2006; Solaja et Ogunola, 2016; Stanley, 2010; Weingarten, 2009).

Les membres de cette génération sont considérés comme des bourreaux de travail, motivés par les récompenses matérielles et critiques à l’égard de ceux qui ont des opinions différentes des leurs (Blythe et coll., 2008; Lavoie-Tremblay et coll., 2010; Widger et coll., 2007). De nombreux baby-boomers ont eu des emplois stables, une prospérité matérielle et un accès à l’éducation (Stanley, 2010).

Nombre de baby-boomers faisant toujours partie de la population active occupent des postes de direction dans les établissements de soins de santé (Solaja et Ogunola, 2016). Ces personnes atteignent ou dépassent toutefois de plus en plus l’âge de la retraite et doivent quitter le marché du travail.

Génération X (1964-1980)

Les personnes nées entre 1964 et 1980 font partie de la génération X (Duchscher etCowin, 2004). Pour cette génération, il faut travailler pour survivre. Cette génération a grandi à l’époque où de plus en plus de ménages avaient deux revenus, où le taux de divorce était de plus en plus élevé et où l’instabilité familiale était présente pour plusieurs (Hart, 2006; Solaja et Ogunola, 2016). Ce groupe est fiable et autonome (Hahn, 2011). Au cours de cette même période, les innovations technologiques, comme l’arrivée de l’ordinateur, ont commencé à jouer un rôle transformateur dans les communications. Les valeurs de la génération X sont entre autres la diversité, l’équilibre, la simplicité, la pensée globale, la capacité à effectuer plusieurs tâches à la fois et l’indépendance(Gursoy, Maier et Chi, 2008; Hart, 2006; Solaja et Ogunola, 2016; Weingarten, 2009).

L’une des plus grandes différences entre la génération X et les baby-boomers est leur conception du travail : Pour la génération X, le travail n’est qu’une partie de son identité (Jovic, Wallace, et Lemaire, 2006; Wendover, 2002). Il n’est pas rare que les membres de cette génération remettent en question le statu quo et les figures d’autorité, et ils considèrent que la sécurité de l’emploi est un concept dépassé (Stanley, 2010). Les membres de cette cohorte apprécient la rétroaction et ont tendance à faire preuve d’autonomie et d’ingéniosité et préfèrent le travail individuel au travail d’équipe (Hahn, 2011).

Génération Y (1981–2000)

La génération Y, dont les membres sont aussi appelés les millénariaux.ales, est composée des personnes nées entre 1981 et 2000 (Duchscher etCowin, 2004). Leur vie a été considérablement influencée par la disponibilité et l’accessibilité de l’information et la communication instantanée grâce à Internet et aux téléphones intelligents. Nés de parents plus âgés engagés dans les activités parascolaires de leurs enfants, les membres de cette génération ont vécu des expériences qui les ont poussés à adopter des valeurs telles que la confiance, le devoir civique, la moralité, la réussite et la sociabilité (Calhoun et Strasser, 2005; Duchscher et Cowin, 2004; Hart, 2006; Solaja et Ogunola, 2016). Dans l’ensemble, ce groupe est très différent des générations précédentes : il est le plus jeune et le plus nombreux dans la population active, il est plus prospère et plus éduqué et il est plus diversifié sur le plan ethnique.

L’entrée de la génération Y sur le marché du travail propose une éthique de travail distincte, qui se concentre sur l’importance de travailler à son rythme et dans son propre style. Par conséquent, les membres de la génération Y exigent que la haute direction stipule clairement les attentes et les résultats attendus, qu’ils fournissent de la rétroaction, qu’ils communiquent sur l’affectation des ressources et qu’ils fixent des échéances. Les membres de cette cohorte apprécient les horaires de travail flexibles qui permettent la conciliation travail-vie personnelle. Comme la génération X, la génération Y accorde une plus grande importance au développement des compétences et une moins grande importance à la sécurité d’emploi (Bova et Kroth, 2001; Loughlin et Barling, 2001). Les membres de la génération Y sont très productifs dans leur travail, en particulier lorsqu’ils croient aux résultats et aux valeurs et objectifs de l’établissement en général (Erickson, 2009). Cette génération est optimiste et sociable et apprécie le travail d’équipe et la diversité (Hahn, 2011; Stanley, 2010).

Génération Z (2000-début 2010)

La plage d’années de naissance de la génération Z fait encore l’objet de débats, mais une chose est sûre, cette cohorte est l’une des plus importantes à entrer sur le marché du travail (Wiedmer, 2015). Comme la majorité de cette population n’est pas encore sur le marché du travail, il n’existe pas beaucoup d’information sur leur performance.

Comparaison

De façon générale, la satisfaction au travail du personnel infirmier de la génération des baby-boomers est assez élevée et la rémunération et les possibilités d’avancement ne sont pas une préoccupation majeure (Blythe et coll., 2008), peut-être parce que la retraite approche pour plusieurs, que l’ancienneté assure un certain niveau de protection lors de restructuration organisationnelle, et que ce personnel occupe probablement des postes à temps plein. Les baby-boomers perçoivent leurs homologues plus jeunes comme arrogants et moins dévoués (Blythe et coll., 2008). De leur côté, les infirmier.ère.s de la génération X accordent de l’importance à l’éducation et au développement des compétences, ce qui est différent des générations précédentes (Blythe et coll., 2008). Les infirmier.ère.s de la génération Y accordent plus d’importance à la rémunération, au prestige et à la reconnaissance et à la diversité des possibilités de carrière (McNeese-Smith et Crook, 2003). Ces jeunes infirmier.ère.s sont moins critiques à l’égard de leurs aîné.e.s et se considèrent comme autonomes plutôt qu’arrogant.e.s (Blythe et coll., 2008).

Tableau 2.7.1 : Cohortes générationnelles (source des données : tableau d’après les travaux de Clipper, 2012, et Hahn, 2011.)

Générations

Événements

Valeurs fondamentales

Valeurs professionnelles

Éthique de travail

Génération de l’entre-deux-guerres

• Grande Dépression

• Pearl Harbor

• Seconde Guerre mondiale

• Âge du grand écran

• Travail acharné

• Dévouement

• Respect de l’autorité

• Paix et harmonie (ne sont pas à l’aise avec les conflits)

• Acceptation d’une récompense différée

• Sécurité financière • À la merci de l’horodateur (temps)

• Bonne éthique de travail

Baby-boomers

• Mouvement des droits civiques

• Assassinats du président Kennedy, de Robert Kennedy et de Matin Luther King

• Premier atterrissage sur la lune

• Sens aigu du devoir

• Travail d’équipe

• Paix et harmonie (ne sont pas à l’aise avec les conflits)

• Reconnaissance et récompense immédiates

• Épanouissement personnel et sens profond** • Visibilité

• Appréciation des interactions en personne

• Disposition à travailler pour avancer (p. ex., temps supplémentaire)

Génération X

• Démission du président Nixon

• Scandale du Watergate

• Épidémie du SIDA

• Accident de la centrale nucléaire Three Miles Island

• Autonomie

• Indépendance

• Conciliation travail-vie personnelle

• Diversité

• Actions plutôt que paroles

• Rétroaction positive individuelle

• Réalisation d’objectifs financiers sans sacrifier la vie personnelle • Fait le nécessaire puis passe à autre chose

• Vise la conciliation travail-vie personnelle

Génération Y

• Fusillade à Columbine

• Attentat à la bombe d’Oklahoma City

• Guerre du Golfe

• Guerre mondiale contre le terrorisme

• Optimisme

• Diversité

• Ambition

• Attitude gagnante

• Souplesse

• Travail plaisant et utile • Utilisation de la technologie pour un travail plus efficace et plus de temps libre

• Recherche des emplois intéressants et une conciliation travail-vie personnelle

Activité d’apprentissage essentielle 2.7.1

Vous êtes nouveau à l’unité de neurologie d’un grand hôpital universitaire. Vous avez remarqué qu’un grand nombre d’infirmier.ère.s plus âgé.e.s travaillent dans l’unité et que l’infirmier.ère gestionnaire est également plus âgé.e. Beaucoup de personnes de votre âge ont obtenu leur diplôme au cours des cinq dernières années et souhaitent travailler plus efficacement avec tous les membres de l’équipe soignante.

En équipe de deux, trouvez comment une personne gestionnaire issue de la génération des baby-boomers peut réussir à combler les fossés générationnels entre le « personnel infirmier plus âgé » et les générations X et Y. Quelles stratégies peuvent être utilisées pour créer un environnement de travail plus positif?

2.8 Gérer la diversité de la main-d’œuvre

Les responsables du personnel infirmier jouent un rôle essentiel dans la création d’un environnement de travail favorable où les différences culturelles et générationnelles sont valorisées et où les différences individuelles sont encouragées et prises en compte. Voici quelques recommandations et stratégies importantes à l’intention des responsables du personnel infirmier qui travaillent avec une main-d’œuvre diversifiée :

  • Donner l’exemple en adoptant un comportement qui accepte la diversité afin de créer et de maintenir un environnement de travail favorable. Les employé.e.s veulent se sentir valorisés et engagés peu importe leur âge ou leur fonction. Le respect des perspectives culturelles et générationnelles est un moyen de soutenir et d’encourager le travail d’équipe (Yukl, 2013). Ne pas porter de jugement, mettre l’accent sur les aspects positifs et adopter de bonnes techniques de communication sont des facteurs de réussite.
  • S’assurer que les attentes en matière d’emploi et les objectifs organisationnels liés à la diversité en milieu de travail sont les mêmes pour l’ensemble du personnel. De cette façon, les règles de conduite et de pratique professionnelles sont établies pour tout le monde.
  • Cherchez à en savoir plus sur la diversité et renseignez le personnel sur les différences culturelles et générationnelles en ce qui concerne les attitudes, les comportements et les valeurs, tout en favorisant la cohésion du groupe de travail (Yukl, 2013).
  • Faites le pont entre les différents besoins du personnel et de la patientèle. Accepter les points communs et tirer profit de la diversité grâce aux talents individuels est essentiel pour entraîner un changement positif de l’environnement de travail. En retour, le succès auprès de patient.e.s et de familles culturellement diversifiées peut favoriser le recrutement d’une main-d’œuvre diversifiée. La synergie des différents points de vue peut améliorer les connaissances et les stratégies de soins des infirmier.ère.s.
  • Adoptez un style de leadership souple, ouvert et accessible, favorisant l’égalité des possibilités et l’élimination de la discrimination sans toutefois ignorer les différences. Bien que cette approche demande des efforts et une énergie considérables, elle est essentielle pour créer un environnement de travail favorable.
  • Faites preuve de souplesse en s’adaptant à plusieurs styles de communication en fonction des préférences culturelles et générationnelles.
  • Expliquez les avantages de la diversité en milieu de travail (Yukl, 2013). Tenir un forum avec l’ensemble du personnel, qui fait appel à des modes de pensée et à des approches nouvelles et différentes pour résoudre les problèmes et les conflits, peut améliorer les pratiques de soins.
  • Reconnaître que les différences peuvent être source de stress et de conflits (Hahn, 2011). Les différences entre les générations peuvent avoir une incidence directe sur la manière dont les problèmes, les évaluations et les stratégies d’intervention sont gérés (Huber, 2014). Prendre en compte les enjeux de style de communication, d’espace interpersonnel, de sens de la durée et d’autres différences dans les croyances et les comportements favorise un travail d’équipe efficace.
  • Favorisez l’autonomie sur le lieu de travail et encouragez la croissance professionnelle en accompagnant et en conseillant le personnel à différents stades de développement de carrière. Cette démarche peut avoir une incidence sur la culture et les pratiques en milieu de travail afin d’améliorer la satisfaction au travail et la rétention. Offrir des possibilités de développement de responsables, de perfectionnement des compétences cliniques et de participation aux efforts des comités peut améliorer les compétences de communication, la motivation et la résolution des problèmes. Par exemple, appuyer la participation d’un membre du personnel à un comité d’unité ou d’hôpital peut renforcer la cohésion du groupe, l’innovation et l’autonomie en milieu de travail (Kramer, 2010).

Résumé

Comprendre les motivations et perspectives de chaque génération permet à la personne responsable du personnel infirmier de mieux comprendre les différences générationnelles. Étant donné que l’immigration mondiale continue d’avoir un impact sur le Canada, il est de plus en plus nécessaire de comprendre les différences culturelles et de réduire au minimum les conflits qui nuisent à une consolidation d’équipes efficace.

Miser sur ce que chaque personne a de meilleur à offrir permet de mettre en place un puissant réseau d’infirmier.ère.s et de tirer profit de leurs contributions à travailler ensemble pour fournir des soins de santé sécuritaires et de qualité. Au cours des dix prochaines années, un grand nombre de baby-boomers prendront leur retraite et les générations X et Y seront de plus en plus présentes sur le marché du travail et dans des postes de direction. Notre compréhension collective de la diversité en milieu de travail peut favoriser la coopération et la collaboration du personnel dans un environnement de soins de santé à haute intensité.

À la fin du chapitre, vous devriez être en mesure de faire ce qui suit :

  1. Décrire les concepts de culture, de sensibilité culturelle et de sécurité culturelle dans la direction et la gestion des soins infirmiers.
  2. Aborder la diversité culturelle et la question de la différence.
  3. Appliquer des modèles théoriques qui favorisent la compétence culturelle dans les soins aux patients.
  4. Décrire les différences de générations entre la génération de l’entre-deux-guerres, les baby-boomers, la génération X et la génération Y.
  5. Relever et décrire les enjeux liés à la diversité en milieu de travail dans le domaine des soins de santé pour le personnel infirmier, les responsables du personnel infirmier, la patientèle et leur famille.
  6. Décrire comment les responsables du personnel infirmier peuvent gérer la diversité en milieu de travail.

Exercices

  1. Pourquoi est-il important de comprendre les différences culturelles et générationnelles dans la pratique clinique?
  2. Que peuvent faire les responsables du personnel infirmier pour gérer la diversité dans les établissements de soins de santé?
  3. Comment les infirmier.ère.s autorisé.e.s peuvent-il.elle.s appuyer efficacement la diversité en milieu de travail?
  4. Définir la sécurité culturelle et la compétence culturelle.
  5. Faire la distinction entre la sécurité culturelle et la compétence culturelle.

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3

Travailler dans des milieux autochtones et collaborer avec des chef.fe.s autochtones

Anthony de Padua et Norma Rabbitskin

Le leadership signifie s’appuyer sur des principes enracinés dans les valeurs et les pratiques de notre culture.

– Norma Rabbitskin, 2017

Introduction

Pour être un leader efficace, il faut développer des compétences, connaissances et attitudes qui favorisent de bonnes relations de travail avec les communautés, les chef.fe.s et les personnes autochtones. Nichols (2004) souligne que les programmes de soins infirmiers préparent les futur.e.s membres du personnel infirmier au rôle de leader dans leur profession, mais omettent de les former à assumer ce rôle à la manière autochtone (p. 177). Julien, Wright et Zinni (2010) reconnaissent par ailleurs que les théories actuelles sur le leadership reflètent souvent des idées culturelles des sociétés occidentales et ne tiennent pas compte des visions autochtones du monde. Ce chapitre présente une sélection de défis et visions autochtones que la population étudiante pourra comparer avec ses propres interprétations des cultures autochtones. Il fournit aussi des recommandations et des exemples qui indiquent comment les leaders peuvent manœuvrer dans les différents mondes culturels dans lesquels ils vivent et travaillent, et comment ils peuvent les déchiffrer. Bien que ce chapitre aborde les points de vue autochtones, il est important de reconnaître que les cultures autochtones au Canada sont extrêmement diversifiées, non seulement entre les différents territoires visés par un traité, mais aussi entre les communautés voisines. Il existe cependant des normes communes qui s’appliquent à de nombreuses communautés autochtones. Dans ce chapitre, les auteur.e.s présentent certains récits ainsi que leurs connaissances sur le leadership en soins infirmiers dans le but d’aider la population étudiante à mieux comprendre comment remplir son rôle de responsable en soins infirmiers en collaboration avec les chef.fe.s autochtones.

Objectifs d’apprentissage

  1. Relever les différences entre vos propres visions du monde et celles des Autochtones.
  2. Réfléchir de façon critique aux façons dont les différentes visions peuvent influencer les décisions en matière de leadership.
  3. Reconnaître au sein des communautés autochtones les structures de leadership qui leur sont propres.
  4. Définir les avantages d’une collaboration avec les membres des communautés autochtones.

3.1 Regard sur la littérature

Plusieurs différences distinguent les styles de leadership autochtones des autres types de leadership. L’utilisation d’une imagerie et de récits traditionnels en est un bon exemple (Julien et coll., 2010; Nichols, 2004). Les histoires deviennent des vecteurs pour l’apprentissage de leçons qui ont également un lien avec la terre et l’identité autochtone (Nichols, 2004; Wolfgramm, Spiller et Voyageur, 2016).

Expérience sur le terrain

Pensons à l’importance de s’ouvrir aux différents styles d’apprentissage et de rester à l’écoute du point de vue des autres.

Je me rappelle ma première discussion en tant que non-Autochtone avec un aîné autochtone. Nous explorions sa vision des gens et d’une situation particulière que je jugeais importante dans le milieu correctionnel. Au fil de notre discussion, il m’a demandé de m’asseoir avec lui autour d’une tasse de thé. Je croyais au départ qu’il s’agirait d’une entrevue où j’interrogerais cette personne, mais en fin de compte, ce fut une conversation avec un homme humble ayant des dizaines d’années d’expérience à son actif. Sa nature modeste m’a aussitôt mis à l’aise et la manière dont il parlait et me considérait m’a fait réaliser à quel point j’avais encore beaucoup à apprendre. Lorsque je lui posais des questions, il me racontait des histoires qui m’ont fait comprendre que je devais voir ces questions sous un angle différent.

– Anthony de Padua, IA, Ph. D.

Nichols (2004) a organisé des groupes de discussion avec des responsables autochtones en soins infirmiers qui lui ont permis de conclure que le point de référence de ces professionnel.le.s autochtones était les personnes qu’ils desservent : leurs familles et leurs communautés tribales. Les responsables autochtones en soins infirmiers étaient étroitement liés à leurs communautés et leur vision du leadership consistait à mener l’organisation et la communauté en un même ensemble.

Felicity (1999) et Nichols (2004) ont renchéri que les leaders autochtones ont une vision holistique du leadership et se préoccupent de la communauté. Julien et coll. (2010) ont approfondi cette notion de leadership holistique en expliquant que la spiritualité est au centre des pratiques et croyances des leaders autochtones :

Un des participants a souligné que ses collègues non autochtones se concentraient généralement sur les processus et étaient fortement motivé.e.s par les résultats purement axés sur les profits, tandis qu’il voyait son travail comme une réalisation spirituelle. Il a exprimé sa pensée comme suit : « Le travail que nous faisons n’est pas une question d’éducation ni de recherche, mais plutôt de spiritualité; les choses qui l’entourent ne sont qu’une partie du processus global. » (p. 119-120.)

Julien et coll. (2010) ont également mentionné l’importance du temps pour les leaders autochtones. Le savoir transmis par nos défunt.e.s aîné.e.s doit être pris en compte, exploité et reconnu. Il est également important de penser aux répercussions que nos résolutions auront sur les générations futures (les sept prochaines générations).

Comme l’explique Madeleine Leininger, théoricienne des soins infirmiers, les responsables en soins infirmiers doivent penser à la population qu’ils desservent. Sa théorie sur les soins infirmiers transculturels englobe le concept de sensibilité culturelle, c’est-à-dire la capacité du personnel infirmier à prendre en compte le contexte culturel d’une personne dans sa pratique [et son leadership] en soins infirmiers (Johnson et Webber, 2015, p. 207).

3.2 Vie au sein de la communauté : comprendre la vision du monde et les structures de leadership des Autochtones

La section 3.2, racontée par Norma Rabbitskin de la Première Nation Big River, se fonde sur le savoir traditionnel. Norma est une gardienne du savoir des coutumes de la Première Nation Big River. Ce savoir traditionnel N’EST PAS soumis à une licence Creative Commons Attribution 4.0 International. Veuillez respecter le protocole de transmission du savoir traditionnel autochtone et communiquer avec Norma Rabbitskin, au Sturgeon Lake Health Centre, si vous souhaitez utiliser ce contenu à d’autres fins.

Norma Rabbitskin s’est naturellement engagée dans une carrière de soins. Membre de la Première Nation de Big River, elle parle couramment le cri. Son expérience professionnelle compte plus de 29 ans à titre d’IA. Elle a passé la majorité de sa carrière auprès des communautés autochtones. Dans la section qui suit, elle transmet ses diverses connaissances en soins infirmiers et les enseignements qu’elle a acquis auprès de sa famille, de responsables de cérémonies, de gardiens du savoir et de divers dirigeant.e.s. Norma fait part de son expérience de travail auprès des communautés autochtones et des compétences essentielles en leadership requises pour superviser un programme de soins infirmiers.

D’abord et avant tout, à titre de membres des Premières Nations, nous reconnaissons le Créateur et les principes de la création. Nous défendons la loi naturelle, notre façon d’être et de vivre en harmonie avec l’askîy pimâtisiwin (la vie terrestre). Les connaissances sont transmises d’une génération à l’autre par la tradition orale et sont renouvelées lors de cérémonies, en commençant par l’histoire de la création. La culture est un mode de vie; elle maintient et préserve le caractère sacré de la vie et enseigne comment vivre en harmonie dans le cercle de la vie et avec toutes les relations sur Terre. Le rôle des keytayak (les anciens) modélise un processus d’intégration doux où chaque personne imagine sa pleine capacité et son bien-être pour réaliser tout son potentiel.

Modèle holistique de leadership d’après les enseignements du cercle de la vie

En tant que responsables du personnel infirmier, nous devons trouver des moyens efficaces d’outiller les personnes et leurs familles et nous devons comprendre ce qu’est la santé pour une communauté autochtone. Pour ce faire, nous participons à un apprentissage par l’expérience de la culture et de la vision du monde autochtones.

Enseignements du cercle de la vie

Nos aîné.e.s nous disent que le processus de maturation et d’apprentissage de l’être humain n’est pas linéaire, mais que la vie est plutôt un cercle, nous rappelant que, où que nous allions et quoi que nous vivions, le moi demeure présent, nous ramenant à nous-mêmes, à nos familles et à notre communauté avec tout ce que nous sommes devenus pendant le processus d’apprentissage. Les enseignements des lois naturelles créent une base pour la guérison et la compréhension de l’interconnexion de notre développement autochtone (mental, émotionnel, physique et spirituel) et de nos relations humaines (famille, communauté). Les enseignements du cercle de la vie représentent un mode de vie qui favorise la santé et le bien-être. Cette vision reflète une philosophie de vie et de guérison holistique et centrée sur la terre que l’on ne trouve pas souvent dans les approches occidentales de la santé. Les aîné.e.s disent que le cercle de la vie nous enseigne l’interdépendance : si on prend le temps de se guérir soi-même en tant que personne, on aide sa famille à guérir. Lorsque les familles commencent à changer ou à guérir, les communautés changent également. Plus les communautés tendent vers le bien-être, plus les personnes trouveront la voie de la guérison. Au moment de planifier ou d’élaborer des programmes, nous devons tenir compte de tout le monde, dans une optique holistique : la personne, la famille et la communauté.

La personne

Nos aîné.e.s enseignent le principe selon lequel tous les aspects d’une personne, physique, mental, émotionnel et spirituel, doivent être pris en compte et en harmonie afin de promouvoir une santé et une guérison holistiques. Une bonne santé exige un état de bien-être optimal dans ces quatre domaines. Le bien-être découle du maintien de l’équilibre et de l’harmonie entre tous ces domaines et avec la nature. Une approche holistique de la santé prend également en compte l’importance de la culture, de la langue et de la tradition. Les aîné.e.s sont sollicités pour leurs conseils sur le plan émotionnel.

La santé mentale fait référence à la façon de penser et aux pensées, y compris les connaissances, l’éducation, la lecture et l’apprentissage au sujet des maladies chroniques. Les personnes apprennent à s’autodiscipliner, à prendre des décisions saines, à résoudre des problèmes et à changer les choses. Une santé mentale optimale se traduit par des choix sains.

La santé émotionnelle fait référence à la reconnaissance et à l’acceptation des sentiments : la peur, la colère, la confusion, la tristesse, la dépression, la solitude, l’inquiétude et l’anxiété. Apprendre à exprimer ses sentiments de manière adéquate au moyen de compétences d’adaptation efficaces qui aident à maintenir l’équilibre conduit à un sentiment de bien-être dans les périodes difficiles. Une santé émotionnelle optimale se traduit par une amélioration de l’estime de soi, de la conscience de soi, du positivisme, de la confiance, de l’honnêteté et de l’espoir.

La santé physique consiste à prendre soin de son corps : manger sainement et de manière équilibrée, maîtriser son poids, faire de l’exercice et bouger tous les jours et se reposer. Les personnes apprennent à développer des habitudes saines et à éviter les habitudes destructrices telles que le tabagisme, la toxicomanie et l’alcoolisme. Le fait de prendre soin de soi peut se concrétiser lorsque les personnes apprennent à prendre la responsabilité de leur santé, à être bonnes et bienveillantes et à s’aimer et à se respecter.

La santé spirituelle fait référence à la volonté de vivre en harmonie avec une puissance supérieure et à trouver un sens à sa vie. En adoptant des valeurs, les personnes peuvent alors choisir des activités et des comportements en cohérence avec elles. Les personnes cherchent des conseils spirituels auprès des aîné.e.s et participent à des cercles de partage, de guérison et de discussion. Une santé spirituelle optimale se traduit par une vie de prière, de foi, de croyance, d’espoir, d’amour, d’acceptation, de pardon et de respect.

Aujourd’hui, le personnel de la santé identifie de manière active les attributs de la santé ou du bien-être tels que les personnes desservies les définissent. Afin d’outiller efficacement la clientèle, nous devons, en tant que personnel infirmier, comprendre ce qu’est la santé pour une communauté autochtone. Il faut être attentif à la population desservie et aux pratiques culturelles de guérison. Auparavant, les communautés autochtones observaient un modèle holistique qui oriente la manière de réagir aux maux. Par exemple, la clientèle obtient des résultats de santé différents :

  • selon le point de vue, notamment s’il est axé sur le bien-être ou sur la maladie;
  • si le travail se fait avec la famille plutôt qu’avec la personne seulement;
  • si l’on adopte une perspective à long terme ou ponctuelle.

La famille

La famille est le plus beau cadeau qui soit. Les aîné.e.s nous enseignent que le Créateur nous a donné un système familial. Il s’agit du lieu où tous les enseignements sont transmis des grands-parents aux parents et aux enfants. Dans cette perspective, tous les membres de la famille sont responsables de soutenir la santé et le bien-être des autres. Dans votre rôle à titre d’infirmier.ère, il est important que vous établissiez une relation entre vous et la personne soignée et entre vous et la famille. Ces relations sont essentielles à la qualité des soins holistiques prodigués à la personne et à la famille. Ces relations favorisent une expérience positive fondée sur la communication et la compréhension des besoins physiques, émotionnels, mentaux et spirituels et respectent les droits de la personne et de sa famille dans les décisions qu’elles prennent. À titre de membres du personnel infirmier, nous favorisons le changement qui les aide à atteindre leur vision de la santé et du bien-être.

Le travail auprès des communautés autochtones exige que le personnel infirmier fasse preuve d’esprit critique et de compétences en évaluation. L’intégration d’outils efficaces, tels que le modèle intégré d’évaluation et d’intervention familiale, qui s’appuie sur les points forts de la famille pour l’aider à trouver des stratégies pour résoudre des problèmes (Kaakinen et coll., 2014, p.92.), est essentielle. L’emploi de cet outil exige du personnel infirmier qu’il acquière des connaissances à la fois sur la personne et sur sa famille par l’entremise du génogramme familial (arbre généalogique). Il s’agit là de soins personnalisés qui témoignent de respect envers la clientèle et sa famille.

De solides compétences en communication et en relations interpersonnelles sont essentielles à la qualité des soins infirmiers dans une communauté autochtone. Si le personnel infirmier ne possède pas ces compétences, il aura une incidence négative sur une situation déjà délicate pour la clientèle et les familles autochtones. Un autre outil efficace pour la clientèle et les familles autochtones est le relevé des forces et des facteurs de stress des systèmes familiaux. Il s’agit d’un outil d’évaluation qui guide le personnel infirmier auprès des familles qui vivent des événements stressants en matière de santé… . pour miser sur les forces de la famille (Kaakinen et coll., 2014, p.93).

En tant que membre du personnel infirmier, nous devons créer des interventions qui mènent à des soins holistiques pour la clientèle et leurs familles selon une bonne évaluation. Les soins prodigués à la personne reposent sur une relation thérapeutique respectueuse entre le personnel infirmier, la personne et sa famille. Ce n’est que par une réflexion critique que nous pouvons examiner nos valeurs et nos croyances ainsi que nos connaissances en soins infirmiers dispensés aux familles pour entraîner un changement d’attitude et développer une relation thérapeutique de confiance avec la clientèle et les familles. Les relations solides reposent sur le fait de prendre le temps d’écouter les personnes, de planifier des visites à domicile, d’appeler les personnes et de maintenir la famille active dans le processus. Une composante essentielle des évaluations cliniques et communautaires consiste à poser des questions sur les préoccupations de santé et à demander à la clientèle comment les aider à atteindre leurs objectifs.

La communauté

Les Premières Nations ont accepté des visions élargies de la santé en s’appuyant sur leur culture et en tenant compte de paradigmes holistiques qui prêtent attention aux modes d’interconnexion de l’esprit, du corps et de l’âme. Dans une telle perspective inclusive, la culture des croyances, les coutumes et les pratiques en tant que fondements de la société autochtone dans laquelle les personnes baignent, s’ouvrent comme des sites pour des services intégrés et réactifs pour les personnes dans les milieux communautaires. Certains modes de culture, par exemple, comme la valorisation de la terre en tant que lieu de santé, l’établissement de relations et le développement d’esprits forts et déterminés grâce au savoir autochtone, sont reconnus comme des facteurs permettant de construire des personnes fortes ou comme des déterminants de la santé localisés bien réels. L’évaluation de l’état de santé et de bien-être des communautés passe nécessairement par l’examen de l’éthique communautaire qui incarne les croyances, les valeurs et les pratiques jugées essentielles à la vitalité de la communauté (Willie Ermine, Indigenous Knowledge Keeper, communication personnelle, avril 2017).

En tant que grand-mère et en tant que personne ayant choisi une profession en soins infirmiers, j’aime la façon dont les décisions de leadership sont prises dans la communauté autochtone. La base de la communauté est façonnée par les conseils que fournissent les gardien.ne.s du savoir, les guérisseur.euse.s, les responsables de cérémonies, les leaders et les aîné.e.s de la communauté. Par leur exemple, j’ai pu comprendre le spectre entier du leadership en matière de services. Ces gardien.ne.s du calumet, les responsables de cérémonies qui ont consacré leur vie au maintien de la médecine et des traditions culturelles, m’ont aidée à m’intégrer parfaitement dans un rôle de leadership infirmier. De plus, mes processus décisionnels sont issus de mon éducation crie et de cette expérience vécue, et ils sont fondés sur l’inclusivité, en toute reconnaissance du caractère sacré de toutes formes de vie.

Dans ma vision du monde, les décisions sont prises dans un esprit de réciprocité, c’est l’épine dorsale de ma vision du monde nehiyaw (crie) . Dans un esprit de réciprocité, nous donnons avant de prendre, et c’est le véritable partenariat du partage de l’espace et des ressources, c’est la manière dont nous interagissons. Je reconnais l’humanité de chacun et que personne n’est parfait. Je pense que les cérémonies et pratiques traditionnelles sont le fondement qui permet aux personnes d’assumer leurs responsabilités et d’aider autrui.

Pour jouer un rôle de leadership en soins infirmiers dans les communautés autochtones, il faut être conscient des systèmes de leadership qui coexistent. Les élus, qui ont des mandats définis par les différents paliers gouvernementaux, doivent rendre des comptes à la population. Je travaille dans une communauté autochtone située sur le territoire visé par le Traité no 6. Cette communauté a sa propre approche souveraine et cette population contrôle son propre système de santé. Le chef et le conseil votent sur les décisions qui sont par la suite présentées comme des résolutions du conseil de bande, selon un processus hautement politique dirigé par des membres élus de la réserve. Ces personnes assument ces rôles pour lesquels elles ont été élues parce qu’ils veulent servir la communauté en menant les membres dans un processus officiel organisé. Les protocoles et les cérémonies servent à inspirer les personnes à travailler au bien-être de la communauté.

Pour comprendre les structures de leadership autochtones en vigueur dans les diverses communautés autochtones, il faut d’abord créer un processus de dialogue qui s’appuie sur la réciprocité et le maintien d’un équilibre dans la coexistence. Le respect est au cœur de nos vies. Notre tradition orale en tant que peuple nehiyaw est un exemple des valeurs indiquant la façon de vivre en équilibre et en harmonie avec la loi naturelle. Il s’agit d’un véritable leadership ancré dans le territoire. Il existe deux grands types d’onikaniwak (pour ceux qui dirigent) dans les communautés autochtones et ce sont les suivants : (1) le leadership axé sur le service et (2) le leadership à la suite de l’élection du chef et du conseil. Il faut toutefois savoir que les aîné.e.s et les membres de la communauté pratiquent les deux types d’onikaniwak, mais ils le font selon différentes approches.

3.3 Histoire du système de santé dans les communautés autochtones

Dans l’esprit et l’intention des négociations des traités, les peuples autochtones ont négocié l’accès aux remèdes médicinaux et à l’expertise médicale requise pour traiter les nouvelles maladies dans la clause sur le buffet à médicaments du Traité 6 afin de fournir tout le nécessaire au maintien d’une bonne santé (Bureau du commissaire aux traités, 2000). Le gouvernement fédéral est responsable de la fourniture et du maintien des services de santé auprès des Autochtones. Depuis l’époque des traités, ces remèdes médicinaux comprennent les hôpitaux autochtones, les médicaments, les médecins, les examens et le traitement des malades, les rayons-X et la technologie médicale.

Par le passé, les relations entre les Autochtones et les colons ont été caractérisées par nombre d’expériences négatives et les deux sociétés se sont développées séparément. Pour la majorité des Canadien.ne.s, la Loi canadienne sur la santé et les lois provinciales ou territoriales garantissent les services de santé. Les Autochtones peuvent accéder aux mêmes services, mais dans des mesures différentes.

En 1989, le ministère de la Santé nationale et du Bien-être social et le Conseil du Trésor du Canada ont commencé à travailler sur le transfert des services de santé pour les communautés autochtones du fédéral au palier communautaire. Le transfert des services de santé est un mécanisme administratif qui permet de transférer l’allocation de ressources financières de la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits (DGSPNI) aux communautés autochtones pour un certains programmes de santé. Ce transfert aide les communautés autochtones à exercer une grande gouvernance sur le système de soins de santé de la communauté et à faire pression pour imposer des changements au besoin dans le système de santé.

Les buts et objectifs de la politique de transfert de santé étaient les suivants :

  • offrir aux populations autochtones la possibilité de participer activement à la planification, à l’administration et à la prestation de services de santé dans les réserves, à l’élaboration de politiques et à la recherche;
  • améliorer la santé des populations autochtones;
  • veiller à ce que les populations autochtones profitent de la même qualité de soins continus que le reste des Canadien.ne.s ;
  • permettre aux communautés de concevoir des programmes de santé, mettre en place des services et allouer des fonds en fonction des priorités de la communauté en matière de santé;
  • renforcer et améliorer la reddition de comptes des leaders devant les membres;
  • veiller à ce que la santé et la sécurité publiques soient préservées par l’adhésion à des programmes obligatoires (ministère de la Santé nationale et du Bien-être social et Conseil du Trésor du Canada, 1989; Smith et Lavoie, 2008).

Le tableau ci-dessous décrit les modèles de prestation de services selon un accord de contribution avec Santé Canada sous la DGSPNI.

Tableau 3.3.1 Modèles de prestation des services de santé (Source des données : Tableau selon les données de Lavoie et coll., 2005.)

Transfert à la communauté

Intégration dans la communauté

Communauté sous le contrôle de la DGSPNI

  • Les programmes de santé publique transférés sont déployés auprès de la communauté ou par le conseil tribal.
  • La responsabilité financière incombe à la communauté ou au conseil tribal.
  • Un financement quinquennal est versé pour les programmes.
  • Les programmes de santé publique sont guidés par les éléments suivants : (1) un cadre de mise en œuvre du transfert; (2) un plan de santé communautaire; et (3) un plan d’évaluation.
  • La DGSPNI fournit des programmes non transférables.
  • La DGSPNI assure le semi-transfert des programmes de santé publique.
  • Les communautés peuvent engager leur propre personnel infirmier.
  • La DGSPNI propose aux communautés des programmes de santé publique non transférables.
  • La DGSPNI fournit directement aux communautés des programmes de santé de deuxième ou de troisième niveaux.
  • La DGSPNI fournit des politiques et des services de santé spécialisés.
  • La DGSPNI affecte le personnel infirmier.

Le tableau ci-dessus présente les différences entre les systèmes de prestation de soins de santé que les communautés peuvent choisir d’adopter selon leur état de préparation, leurs besoins et les recommandations dans l’évaluation. Cette méthode leur permet de répondre aux tendances en santé en évolution dans la communauté.

La communauté où je travaille profite d’un transfert complet. Par conséquent, elle met en œuvre les programmes suivants dans la communauté et un soutien de deuxième ou de troisième niveau assure la prestation de certains services :

  • programmes de santé communautaire (promotion de la santé et prévention)
  • soins primaires communautaires
  • programmes de surveillance et de contrôle des maladies transmissibles (Northern Intertribal Health Authority, soutien de troisième niveau)
  • programmes communautaires de vaccination
  • Programme de santé environnementale et publique des Premières Nations (conseil tribal, soutien de deuxième niveau)
  • Programme national de lutte contre l’abus de l’alcool et des drogues chez les Autochtones (PNLAADA)
  • Programme de soins à domicile et de proximité (semi-transféré)

Les services communautaires sont fournis dans la communauté par le personnel infirmier et des représentant.e.s en santé communautaire, lesquel.le.s comprennent des travailleur.euse.s en toxicomanie et en soins maternels et infantiles. Les services de santé environnementale sont dispensés par des agent.e.s dans le domaine au deuxième niveau d’organisation (conseil tribal) et sont soutenus par le troisième niveau (province ou région sanitaire).

Le modèle de prestation des services de proximité transférés est guidé par le cadre de mise en œuvre du transfert, qui décrit la manière dont les services doivent être fournis et évalués. Les communautés respectent des critères stricts de déclaration avant que les fonds ne soient versés. Ces renseignements sont indiqués dans les accords de contribution de la DGSPNI. La prestation de services de santé pour le modèle de prestation intégrée diffère considérablement du modèle de soins de proximité transférés et a été approuvée en 1994 en vertu d’autorités distinctes du Conseil du Trésor. Un modèle intégré est considéré comme une étape vers le modèle de transfert complet. Les communautés peuvent sélectionner une série de programmes communautaires dans le cadre d’un accord de contribution unique qui peut durer jusqu’à cinq ans. Le financement est fondé sur les plans de travail communautaire et la communauté ou le conseil tribal doit demander la permission à la DGSPNI pour y apporter des changements. Le epport de fonds n’est pas autorisé et tout financement non dépensé doit être renvoyé.

La DGSPNI a une responsabilité fiduciaire (obligation légale d’agir dans l’intérêt de la communauté) et est responsable de l’ensemble du système de prestation de soins de santé pour les personnes vivant sur une réserve, une communauté autochtone. Le Conseil national du Trésor transfère des fonds à la région pour veiller à ce que les besoins en santé de tous les Autochtones soient satisfaits. De nos jours, la DGSPNI continue de surveiller la qualité des services que les Autochtones dispensent afin de veiller à ce que les accords de contribution soient respectés. Le type de financement de la santé de chaque communauté dépend de la désignation particulière de l’établissement. S’agit-il d’un bureau de la santé, d’un poste sanitaire, d’un centre de santé, d’un centre de santé avec traitement ou d’un poste de soins infirmiers. Chaque type d’établissement se différencie par le type et l’étendue des services qu’il fournit. C’est une préoccupation constante pour certaines communautés, car elle affecte le degré de financement auquel une organisation peut avoir accès.

Expérience sur le terrain

Pour moi, en tant que responsable autochtone du personnel infirmier qui travaille dans une communauté autochtone, il est essentiel d’enseigner au nouveau personnel infirmier la complexité du modèle de prestation de services et de les sensibiliser aux événements historiques qui constituent la base des stéréotypes négatifs et des attitudes racistes actuels au sujet des Autochtones. De nombreux progrès ont été réalisés pour établir des relations positives dans le système.

—Norma Rabbitskin, inf. aut., B. Sc. inf.

Pour obtenir de plus amples renseignements sur l’histoire de la santé et des maladies des Autochtones au Canada, voir le livre Aboriginal Health in Canada: Historical, Cultural, and Epidemiological Perspectives (2006) de Waldram, Herring et Young ou consulter le document Évaluation de la Politique de transfert des services de santé aux Premières Nations et aux Inuits (2004) de Lavoie et coll.

3.4 Structures de leadership

Au fil des ans, depuis que le système de transfert a été mis en place, des leçons importantes ont été tirées et nommées par les Premières Nations et les Inuits qui continuent à ce jour de combler les lacunes en plaidant pour des soins de santé équitables et unifiés, dans le respect des droits issus des traités. Les communautés autochtones travaillent avec des organismes qui les aident à mettre en œuvre les politiques et à protéger les droits issus des traités. La Federation of Sovereign Indigenous Nations (FSIN) représente 74 Premières Nations en Saskatchewan, et l’Assemblée des Premières Nations (APN) est l’organisation nationale représentative de 630 Premières Nations au Canada. Ces organismes travaillent avec les Premières Nations, par l’intermédiaire de leurs leaders, pour promouvoir, protéger et mettre en œuvre les promesses des traités dans des domaines tels que les droits autochtones et issus des traités, le développement économique, l’éducation, les langues et l’alphabétisation, la santé, le logement, le développement social, la justice, la fiscalité, les revendications territoriales et l’environnement ainsi que toute une série de sujets d’intérêt commun. Les communautés des Premières Nations font partie de 50 groupes distincts sur le plan culturel et linguistique dispersés partout au Canada. Il y a un certain nombre d’autres organismes politiques qui représentent aussi les différentes Premières Nations à différents degrés, notamment les conseils de bande locaux, les conseils tribaux et les organisations provinciales.

Le tableau suivant présente les niveaux de leadership dans la structure de leadership des Premières Nations et les responsabilités qui leur incombent. En tant que responsable du personnel infirmier, il est important de comprendre les structures de leadership des Premières Nations afin de savoir qui est responsable des domaines que le personnel infirmier pourrait vouloir aborder.

Tableau 3.4.1 Niveaux de leadership dans la structure de leadership des Premières Nations

Responsable de la gestion, du maintien et de la prestation
de services en soins de santé pour les points suivants  :

Premier et deuxième niveaux

(premier niveau – communauté de Premières Nations;

deuxième niveau – conseil tribal ou organisation de plusieurs communautés)

  • Gestion de dossiers (y compris les dossiers d’activité du personnel)
  • Système d’administration pour l’embauche et la supervision du personnel
  • Soutien professionnel
  • Conception et prestation du programme
  • Direction du programme
  • Soutien au programme
  • Évaluation du programme
  • Achat de matériel pédagogique
  • Supervision des éducateurs et des professionnels
  • Défense des intérêts
  • Collecte de données et préparation de rapports
  • Établissement de liens entre les programmes et coordination de ces derniers afin d’offrir un accès aux programmes sociaux pour les enfants et les familles à partir d’une seule source
  • Renforcement des capacités, notamment par la formation, l’éducation, le développement communautaire, le soutien par les pairs et le réseautage
  • Recherche communautaire

Troisième niveau

(régional ou provincial)

  • Maintien d’une relation de travail avec Santé Canada, Service Canada, Affaires autochtones et du Nord Canada (AANC) et l’Assemblée des Premières Nations (APN)
  • Représentation dans des groupes consultatifs et de travail régionaux, provinciaux et nationaux
  • Planification stratégique régionale pour le Nord
  • Intendance des données pour les partenaires, comme indiqué
  • Collecte de données et coordination avec les partenaires
  • Établissement de liens entre les programmes et coordination de ces derniers afin d’offrir un accès aux programmes et aux services
  • Renforcement des capacités, notamment par la formation, l’éducation, le développement communautaire, le soutien par les pairs et le réseautage
  • Soutien pour les programmes, comme la distribution d’information et de documents pertinents
  • Expertise clinique et des programmes
  • Coordination de la formation
  • Surveillance et évaluation des programmes
  • Recherche et évaluation

Quatrième niveau

(national)

  • Soutien à la recherche
  • Maintien d’une relation de travail entre Santé Canada, la Direction générale des services médicaux (DGSM), l’APN, Inuit Tapiriit Kanatami et AANC
  • Coordination des activités du comité directeur national et suivi des orientations
  • Communication continue d’information aux Premières Nations sur les avancées nationales
  • Élaboration des normes de programmes pour la formation et les soins
  • Analyse des données et préparation de rapports d’un point de vue national
  • Activités nationales d’évaluation et de reddition de comptes
  • Facilitation des programmes d’élaboration et de mise en œuvre

En tant que responsable du personnel infirmier qui travaille auprès de leaders et de communautés autochtones, il est important de revenir au modèle de planification et de politiques holistiques des Premières Nations (Reading, Kmetic, & Gideon, 2007), lequel a été créé pour mieux comprendre la structure des politiques, la planification et les interventions associées aux indicateurs de performance réalistes pour les communautés. Ce modèle tente de révéler la complexité du travail avec les communautés autochtones d’un point de vue autochtone. Il a les caractéristiques clés suivantes (p. 30) :

  • la communauté est au centre du modèle;
  • les quatre composantes de la roue de médecine (spirituelle, physique, émotionnelle et mentale);
  • les quatre cycles de la vie (enfance, jeunesse, âge adulte et âge d’or);
  • les quatre dimensions clés de l’autonomie des Premières Nations (autonomie/compétence, relations fiscales/responsabilité, droits collectifs et individuels, capacités/négociations);
  • les déterminants sociaux de la santé;
  • les trois composantes du capital social (les liens intracommunautaires, les liens intercommunautaires et liens entre les communautés et les institutions).

Activité d’apprentissage essentielle 3.4.1

Pour obtenir de plus amples renseignements sur le modèle de planification et de politiques holistiques des Premières Nations, voir la page 5 du document First Nations’ Wholistic Approach to Indicators. Il s’agit d’un document que l’Assemblée des Premières Nations (Canada) a présenté au congrès sur la recherche sur les politiques autochtones qui s’est tenu à Ottawa, en Ontario, les 22 et 23 mars 2006. Le rapport a été préparé pour la réunion sur les Autochtones et les indicateurs de bien-être qui a eu lieu pendant le congrès.

Une fois que vous aurez examiné le document du lien ci-dessus, décrivez le lien entre la roue de la médecine et le diagramme complet à la page 7 du document First Nations’ Wholistic Approach to Indicators.

3.5 Recommandations sur le travail auprès des communautés autochtones

Lignes directrices en matière d’éthique et de recherche

Les études sur les communautés et peuples autochtones pullulent et, lorsque des personnes non autochtones interagissent avec eux ou ont besoin de leur aide, les Autochtones sont symbolisés (Campbell, 2014; First Nations Centre, 2007). Par conséquent, des organismes de recherche, tels que les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) (2007), le Conseil de recherches en sciences humaines (2015) et le First Nations Centre (2007), ont dû rédiger des lignes directrices à l’intention des personnes qui font de la recherche sur les Autochtones. La première série de principes des IRSC (2007) est un ensemble collectif de lignes directrices pour aider les chercheur.euse.s et les établissements à effectuer des recherches éthiques et empreintes d’une sensibilité culturelle sur les Autochtones (p. 259). Selon Ramsden et coll. (2017), les lignes directrices indiquent ce qui suit :

les interactions avec les Premières Nations sont décrites dans le chapitre 9 de l’Énoncé de politique des trois conseils : Éthique de la recherche avec des êtres humains… . où tout projet de recherche sur les Premières Nations, les Inuits et les Métis ainsi que sur leurs populations et communautés doivent jouer un rôle pour façonner et co-créer toute recherche qui les touche [Traduction] (p. 2).

Cette façon de faire respecte certainement l’autonomie des patients autochtones, de leurs familles et des communautés qui prennent part aux recherches (Campbell, 2014).

Le First Nations Centre (2007) a créé le principe OCAP (propriété [Ownership], contrôle [Control], accès [Access] et possession [Possession]). La propriété remet en question la notion de la propriété intellectuelle et décrit la propriété communautaire des données. Le contrôle remet en question la notion du contrôle du processus de recherche. Les principes qui guident l’accès et la possession de la communauté exigent que la communauté ait un accès complet aux renseignements de la recherche et qu’elle en ait la possession. Dans les postes de leadership, il est important de comprendre comment appliquer ces principes au travail et dans les projets auxquels les populations autochtones prennent part.

Activité d’apprentissage essentielle 3.5.1

Veuillez lire les Lignes directrices des IRSC pour la recherche en santé chez les peuples autochtones (2007-2010) et répondre aux questions suivantes :

  1. Pourquoi était-il important pour les IRSC de rédiger ces lignes directrices?
  2. Qu’est-ce que la recherche participative et pourquoi est-elle importante?
  3. Que signifie la « collaboration » pour vous?

En plus des lignes directrices susmentionnées, les chercheur.euse.s ont nommé l’importance des questions qui sont soulevées dans le travail avec d’autres cultures (Clandinin et Connelly, 2000; Ermine, 2007). Ermine (2007) souligne l’importance de créer une relation de recherche respectueuse et demande aux chercheur.euse.s de prendre en compte l’espace éthique de l’interaction :

Cet espace éthique se concrétise lorsque deux sociétés, aux visions du monde différentes, interagissent l’une avec l’autre. La réflexion sur les sociétés diverses et l’espace entre elles façonne le cadre de dialogue entre les communautés humaines. L’espace éthique de l’interaction propose un cadre qui permet d’examiner la diversité et le positionnement des peuples autochtones et de la société occidentale dans la poursuite d’une discussion pertinente sur les questions juridiques autochtones et en particulier sur la délicate intersection entre le droit autochtone et les systèmes juridiques canadiens (p. 193).

Il soutient que les chercheur.euse.s doivent examiner l’influence qu’ont les points de vue occidentaux sur leur compréhension du monde et reconnaître qu’ils n’offrent souvent qu’une seule perspective. Il est important de faire un examen élargi des facteurs culturels, sociaux et politiques lorsque l’on travaille avec les personnes autochtones et que l’on se soucie d’elles. Il est essentiel que les chercheur.euse.s reconnaissent et critiquent les relations antérieures entre les visions du monde autochtones et la pensée occidentale (Barlow, 2009; Ermine, 2007; Patterson, Jackson et Edwards, 2006).

Note de recherche

Ramsden, V., Rabbitskin, N., Westfall, J., Felzien, M., Braden, J. et Sand, J. (2017). Is Knowledge translation without patient or community engagement flawed? Family Practice, 34(3), p. 259-261.

But

L’objectif de l’article est d’entamer la discussion sur une « participation authentique » dans la rédaction de manuscrits et de présentations qui émanent de la recherche à laquelle des patient.e.s, personnes ou communautés autochtones ont participé.

Discussion

Au Canada, l’Énoncé de politique des trois conseils précise que les Premières Nations, les Inuits et les Métis ont un rôle à jouer pour façonner et co-créer la recherche qui les touche.

Application à la pratique

En tant que responsables du personnel infirmier, nous devons tenir compte des cadres de recherche tels que ceux mentionnés ci-dessus (IRSC, OCAP) et veiller à ce que ces principes soient respectés afin de maintenir une participation éthique et significative des Autochtones du Canada à la fois dans la recherche et dans la pratique.

Commission de vérité et réconciliation du Canada

Il est bien établi que la culture et l’identité autochtones ont été perdues dans la foulée des pensionnats et de l’institutionnalisation (Adelson, 2000; Barlow, 2009; Comack, 2008; King, Smith et Gracey, 2009; Laliberte et coll., 2000; Commission de vérité et réconciliation du Canada, 2015). Adelson (2000) affirme que, si le colonialisme et le néocolonialisme ont entraîné une privation des droits et des tentatives d’éradiquer l’histoire culturelle, alors la reconstitution et la réaffirmation de l’identité (p. 30) sont peut-être ce qu’il faut pour contrecarrer ces actes. La Commission de vérité et réconciliation du Canada (2015) propose un document détaillé qui présente non seulement l’histoire des effets du colonialisme au Canada, mais aussi un appel à l’action pour lutter contre les tentatives de l’Église et du gouvernement d’assimiler les peuples autochtones au Canada. Le document contient des « appels à l’action » pour « effacer les séquelles laissées par les pensionnats ».

Note de recherche

Sasakamoose, J., Bellegarde, T., Sutherland, W., Pete, S. et McKay-McNabb, K. (2017). Miýo-pimātisiwin Developing Indigenous Cultural Responsiveness Theory (ICRT): Improving Indigenous Health and Well-Being, The International Indigenous Policy Journal, 8(4), p. 1-16.

But

L’objectif de l’article est de décrire l’élaboration théorique de la théorie de la sensibilité à la culture autochtone pour améliorer la santé et le bien-être des Autochtones.

Discussion

L’article s’appuie sur le cadre de sensibilité à la culture de la Federation of Sovereign Indigenous Nations (FSIN) et sur les connaissances des leaders autochtones, des gardien.ne.s du savoir, des universitaires et des professionnels de la santé pour étudier un modèle qui porte sur et insiste sur l’importance de faire participer les communautés, érudit.e.s et personnes autochtones à tout travail effectué avec les Autochtones. En tant que responsable du personnel infirmier, il est important d’être conscient et de comprendre ses propres points de vue et ses propres préjugés et de les comparer à ceux des personnes avec qui vous travaillez.

Application à la pratique

La Commission de vérité et réconciliation du Canada demande à ceux qui peuvent faire évoluer les systèmes canadiens de reconnaître la valeur des pratiques de guérison autochtones et de collaborer avec les guérisseur.euse.s, aîné.e.s et gardien.ne.s du savoir autochtone lorsque les Autochtones le demandent. Les pratiques de décolonisation consistent à privilégier et à observer les philosophies, croyances, pratiques et valeurs autochtones qui vont à l’encontre du colonialisme et rétablissent le bien-être. La théorie de la sensibilité à la culture autochtone soutient l’établissement de relations de collaboration entre les peuples autochtones et les allié.e.s non autochtones qui cherchent à améliorer l’état de santé et de bien-être des Premières Nations (Sasakamoose et coll., 2017).

Résumé

Les responsables du personnel infirmier doivent apprendre à travailler efficacement dans les communautés autochtones et avec les leaders autochtones. La première étape consiste à être ouvert et disposé à comprendre les visions du monde des Autochtones. Pour ce faire, les infirmier.ère.s doivent reconnaître l’histoire des peuples autochtones au Canada et la spécificité des structures de leadership et de prise de décisions des communautés autochtones. Enfin, si le personnel infirmier s’ouvre à la collaboration avec les leaders autochtones et les membres de la communauté, il peut établir des relations respectueuses, éthiques et significatives qui, en fin de compte, bénéficieront à la santé de tous.

À la fin du chapitre, vous devriez être en mesure de faire ce qui suit :

  1. Relever les différences entre vos propres visions du monde et celles des Autochtones.
  2. Réfléchir de façon critique aux façons dont les différentes visions peuvent influencer les décisions en matière de leadership.
  3. Reconnaître au sein des communautés autochtones les structures de leadership qui leur sont propres.
  4. Définir les avantages d’une collaboration avec les membres des communautés autochtones.

Exercices

  1. Imaginez que vous êtes un leader non autochtone qui souhaite apporter un changement dans une communauté autochtone. Lisez le concept d’espace éthique d’Ermine (2007) et discutez avec vos camarades de classe de la manière dont vous négocieriez respectueusement le travail que vous souhaitez effectuer avec l’équipe de leadership de la communauté.
  2. Lisez le résumé des Lignes directrices des IRSC pour la recherche en santé chez les peuples autochtones (2007-2010) et discutez avec vos camarades de classe de la façon dont les 15 articles du document peuvent être appliqués dans un contexte de leadership.
  3. Dans le résumé du rapport final de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, Honorer la vérité, réconcilier pour l’avenir, trouvez la section sur la santé (p. 218-226) et discutez avec vos camarades de classe de la manière dont vous pouvez concrétiser ces appels à l’action dans vos travaux futurs en tant que responsable du personnel infirmier.
  4. Déterminez le nombre de traités au Canada. Quel traité portait sur la négociation du droit inhérent à la santé conféré par traité?

Références

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Clandinin, D. J., et Connelly, F. M. (2000). Narrative inquiry: Experience and story in qualitative research. San Francisco: Jossey-Bass.

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Rôle des leaders infirmiers dans le développement du système de santé canadien

Joan Wagner

Chaque jour, le personnel infirmier interagit avec les membres de la population canadienne qui ont besoin d’aide pour maintenir ou améliorer leur santé. Le personnel infirmier peut ainsi cerner les tendances démographiques en santé publique. Elles connaissent les forces et les faiblesses du système de santé canadien et sont les premières à constater les problèmes liés à l’accessibilité des services. Le personnel infirmier témoigne de la nécessité d’intégrer les services de santé à d’autres aspects de la politique de développement social et participe au changement par la recherche, les connaissances et les nouvelles technologies.

Présentation de l’AIIC à la commission sénatoriale permanente des affaires sociales, de la science et de la technologie (Calnan et Lemire Rodger, 2002)

Introduction

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a fixé 17 objectifs de développement durable (ODD) pour la santé mondiale en 2015. Ces 17 ODD englobent les activités humaines relatives aux dimensions économique, sociale et environnementale de la santé. Margaret Chan, directrice générale de l’OMS, a souligné que la couverture sanitaire universelle (CSU) est le « pivot du programme de développement de la santé, non seulement parce qu’elle sous-tend une approche plus durable de la réalisation des autres objectifs de santé, mais aussi parce qu’elle permet de les équilibrer » (OMS, 2015, p. iii). Sur le plan international, la CSU est considérée comme un cadre « testé et éprouvé » qui guide la transformation progressive des soins de santé dans les différents pays. Le Canada a été le premier pays à mettre en place un système de santé universel. Ce chapitre retrace le rôle des leaders infirmiers qui ont été des pionniers du développement et de la prestation des soins de santé au Canada, depuis l’époque des premiers colons jusqu’à la création, la mise en œuvre et l’amélioration continue du système de santé publique universel. Il brosse aussi un portrait des forces démographiques et sociales qui ont façonné le leadership infirmier et le système de santé canadien.

La plupart des renseignements historiques contenus dans ce chapitre sont tirés du livre d’histoire L’Association des infirmières et infirmiers du Canada : cent ans de service (AIIC, 2013). Pour un compte rendu détaillé du rôle historique des leaders infirmiers au Canada, consultez le livre complet ici.

Objectifs d’apprentissage

  1. Examiner les événements historiques liés aux soins de santé au Canada et le rôle qu’y ont joué les leaders infirmiers.
  2. Décrire la répartition des responsabilités en matière de soins de santé entre les gouvernements provinciaux, territoriaux et fédéral.
  3. Décrire l’influence des forces démographiques et sociales sur le leadership du personnel infirmier du système de santé canadien.

4.1 Les premiers leaders infirmiers du système de santé au Canada

Le personnel infirmier joue un rôle important dans la santé des Canadiens depuis plus de 400 ans. Leur histoire commence avec Marie Rollet Hébert, épouse d’un apothicaire venu d’Europe qui s’était établi sur le territoire de l’actuelle ville de Québec. À partir de 1617, elle aide son mari à s’occuper des premiers colons jusqu’à ce qu’elle décède en 1649. Gregory et ses collègues décrivent comment elle a appris des méthodes de guérison auprès des peuples autochtones (Gregory, Raymond-Seniuk, Patrick,et Stephen, 2015). Ils racontent également comment elle a enseigné à des enfants autochtones, ce qui lui a rapidement valu le surnom de « première enseignante du Canada ».

Le premier Hôtel-Dieu de Nouvelle-France, qui existe encore aujourd’hui, est fondé en 1639 par trois sœurs des Augustines de la Miséricorde de Jésus à Québec pour répondre aux besoins spirituels et physiques de leur patientèle. Jeanne Mance, reconnue comme la première infirmière laïque du Canada (AIIC, 2013), avait des compétences à la fois médicales et chirurgicales. Elle est arrivée de France sur l’île de Montréal en 1642 et a fondé un hôpital l’année suivante (Gregory et coll., 2015). En 1659, elle recrute trois sœurs des religieuses hospitalières de Saint-Joseph en France pour aider à la gestion de l’Hôtel-Dieu de Montréal (Noel, 2008). On lui attribue la cofondation de la ville de Montréal.

La création de la Compagnie de la Baie d’Hudson accélère le développement du commerce et des échanges entre les Européens et les populations autochtones du Canada, mais les Européens apportent au Canada bien plus que des commerçants, des colons et de l’éducation. Au cours du XVIIe siècle, une épidémie de variole tue près de la moitié des Hurons (AIIC, 2013) et les services du personnel infirmier laïc européen sont très sollicités.

En 1747, Marie-Marguerite (Dufrost de Lajemmarais) d’Youville dirige un groupe de femmes laïques pour prendre en charge l’Hôpital général de Montréal, alors en faillite. Elles en font un hospice pour hommes et femmes âgés, orphelins et orphelines, ainsi que femmes « déshonorées ». Ce groupe de femmes a adopté le nom de Sœurs grises en 1755 (Jaenen, 2008). Marie-Marguerite d’Youville a été la première Canadienne à être canonisée : elle a été nommée sainte en 1990 (AIIC, 2013).

Le XIXe siècle a été une période de progrès rapides dans les soins de santé et la formation en soins infirmiers. Presque simultanément à la publication des Notes on Nursing de Florence Nightingale en 1859, Louis Pasteur publiait un article suggérant que les maladies humaines et animales sont causées par des micro-organismes (AIIC, 2013). L’expertise canadienne en soins infirmiers s’est rapidement développée puisque les premières diplômées de la Nightingale Training School ont commencé à travailler en 1865 et les premières diplômées canadiennes de la Mack Training School for Nurses ont commencé à travailler en 1878. Les deux premiers infirmiers professionnels du Canada ont obtenu leur diplôme à l’école d’études en soins infirmiers de l’hôpital général Victoria (Halifax) en 1892 (AIIC, 2013).

La frontière nord-américaine a également connu des changements rapides au cours du XIXe siècle. L’Acte de l’Amérique du Nord britannique entérine officiellement le Dominion du Canada, composé du Québec, de l’Ontario, de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick. John A. Macdonald est élu premier ministre en 1867. Entre 1870 et 1898, le Manitoba, la Colombie-Britannique, l’Île-du-Prince-Édouard, les Territoires du Nord-Ouest et le Territoire du Yukon rejoignent le Canada. L’achèvement du premier chemin de fer transcontinental canadien en 1885 permet d’unifier ces vastes étendues de terre en un seul pays et de transporter les colons vers les terres ouvertes de l’Ouest.

L’expansion rapide de l’Ouest canadien par la colonisation met en évidence une pénurie de prestataires de soins de santé et d’hôpitaux dans les communautés isolées de l’Ouest. Lady Ishbel Aberdeen, épouse du gouverneur général du Canada, témoigne par écrit sur les histoires tragiques qu’elle entend, où de jeunes mères et des enfants décèdent parce que les maris ou les pères sont contraints de faire de longs voyages épuisants pour obtenir l’aide médicale et les soins infirmiers qui auraient pu leur sauver la vie s’ils avaient été accessibles plus rapidement (VON Canada, 2017). Le Conseil national des femmes du Canada lui demande de créer un ordre d’infirmières visiteuses pour se rendre dans des régions dépourvues de services médicaux ou sanitaires et y établir de petits hôpitaux de campagne. Cet ordre d’infirmières devait être fondé en l’honneur du soixantième anniversaire de l’accession au trône de la reine Victoria. Étonnamment, l’opposition des médecins canadiens a fait vaciller le soutien parlementaire à l’ordonnance.

Lady Aberdeen a néanmoins relevé le défi et, malgré les résistances, elle crée les Infirmières de l’Ordre de Victoria (VON) à la fin de l’année 1897, dont elle assume la première présidence.

Figure 4.1.1 Lady Aberdeen crée le VON pour fournir des services de santé aux communautés rurales et éloignées

Lady Aberdeen, Queen's robes,

[mai 1897], « Countess of Aberdeen in Queen’s U Robes Topley », par William James Topley (1845-1930), photo reproduite avec l’aimable autorisation de Bibliothèque et Archives Canada sous le numéro de référence PA-027869 et sous le numéro d’identification MIKAN 3194681, publiée dans le domaine public, via Wikimedia Commons. À propos de cette photo : La comtesse d’Aberdeen (née Ishbel Maria Marjoribanks) dans la robe qu’elle portait lorsqu’elle a reçu un L.L.D. honorifique de l’Université Queen’s. Elle est la première femme à recevoir un diplôme honorifique d’une université canadienne.

Les premières tâches du VON consistent à fournir les services d’infirmières visiteuses aux régions dépourvues d’installations médicales et à créer de petits hôpitaux « de campagne » dans les régions isolées de l’ouest. Le personnel infirmier de VON Canada est donc immédiatement réparti dans les régions rurales et éloignées du Canada. En 1898, quatre infirmier.ère.s de VON Canada accompagnent des militaires et des représentants du gouvernement au Klondike, dans le Yukon, où de nombreux prospecteurs de la ruée vers l’or souffrent d’une épidémie de typhoïde. Des sites de VON Canada sont ensuite ouverts à Ottawa, Montréal, Toronto, Halifax et Kingston, et le premier hôpital « de campagne » est fondé à Regina pour soigner les premiers colons des Prairies.

Figure 4.1.2 Le premier hôpital de Regina, en Saskatchewan

Premier hôpital, 1889

[1889], photo reproduite avec l’aimable autorisation des Provincial Archives of Saskatchewan, Photographic Services Collection, numéro de collection R-B10796, diffusée dans le domaine public. À propos de cette photo : Le premier hôpital de Regina se situait dans la maison de Mary Truesdell, à l’angle de la 11e avenue et de la rue McIntyre.

Activité d’apprentissage essentielle 4.1.1

Pour en savoir davantage sur la réaction des médecins à la création du VON, regardez cette courte vidéo des Minutes du patrimoine sur les « Hôpitaux de campagne » (2 min), produite par Historica Canada.

4.2 Soins de santé et soins infirmiers : faits marquants de la première moitié du XXe siècle

Au cours des premières années du XXe siècle, 43 hôpitaux VON supplémentaires ont été fondés dans les régions rurales et isolées du Canada. Les services de VON ont été financés par des levées de fonds communautaires menées par des membres distingués, notamment Lady Minto (l’épouse d’un autre gouverneur général canadien). La gestion de ces hôpitaux a finalement été progressivement confiée aux communautés; la gestion du dernier hôpital géré par VON Canada a été remise à la communauté en 1924. Les infirmier.ère.s de VON ont toutefois continué de fournir des soins infirmiers communautaires, et même encore de nos jours.

Dans les bonnes comme dans les mauvaises périodes, VON Canada a servi de catalyseur pour renforcer le sentiment d’appartenance à la communauté, en créant des occasions pour les gens de travailler ensemble afin de répondre à leurs propres besoins et à ceux de leurs amis et voisins. L’éducation prénatale, les cliniques de soins pédiatriques, les services de santé scolaire, les infirmières visiteuses et les programmes coordonnés de soins à domicile ont tous été mis sur pied par VON Canada (VON Canada, 2017).

La création du Conseil international des infirmières en 1899 et la participation des troupes canadiennes à la guerre des Boers en Afrique du Sud ont marqué le début d’une participation accrue du personnel infirmier canadien aux affaires internationales, qui ont laissé leur empreinte dans la guerre des Boers. Georgina Fane Pope a notamment été la première Canadienne à recevoir la Croix-Rouge royale pour ses services extraordinaires en tant qu’infirmière pendant la guerre des Boers.

La revue Canadian Nurse a été publiée pour la première fois en 1905. Son objectif était « d’unir et de motiver la profession et de protéger le public par des efforts comme les interventions en faveur d’une législation sur l’autorisation des infirmières » (AIIC, 2013, p. 215). Les articles de la revue traitaient de questions semblables à celles que nous traitons encore aujourd’hui. L’un des premiers articles abordait la sécurité des patients en salle d’opération et rapportait qu’une paire de forceps avait été oubliée dans une patiente; on y recommandait que les forceps soient comptés dans les salles d’opération (AIIC, 2013, p. 215). L’auteure d’un autre article y notait que les infirmier.ère.s canadien.ne.s sont très apprécié.e.s à l’étranger (AIIC, 2013, p. 216) et déplorait que 50 à 75 % des infirmières diplômées des petites villes de l’Ontario partaient travailler aux États-Unis. Dès 1907, le rédacteur en chef de la revue Canadian Nurse demandait « l’amélioration des heures de travail, de la charge de travail et des conditions de travail générales des infirmières et infirmiers » (AIIC, 2013, p. 216).

Cette préoccupation croissante pour la sécurité des patients et la nécessité d’unifier la voix des infirmières ont conduit à la création, en 1908, de l’Association canadienne nationale des infirmières diplômées, laquelle est ensuite devenue l’Association des infirmières et infirmiers du Canada. Mary Agnes Snively était la présidente fondatrice de l’organisme. Qui plus est, en 1914, toutes les provinces de l’époque étaient dotées de leur propre association provinciale d’infirmier.ère.s, à l’exception de l’Île-du-Prince-Édouard. Les neuf provinces existantes en 1922 avaient toutes une législation sur l’enregistrement des infirmier.ère.s.

La Première Guerre mondiale a débuté en 1914. Environ 2 000 infirmier.ère.s canadien.ne.s formé.e.s ont alors été enrôlé.e.s, avec 27 matrones et une réserve de 203 infirmier.ère.s pour le service hospitalier spécial (The War Years, 2005, p. 39). Les infirmier.ère.s se bousculaient pour se porter volontaires et servir dans les forces armées. Par exemple, lorsqu’un appel a été lancé en janvier 1915 pour pourvoir 75 postes, 2 000 infirmier.ère.s ont déposé leur candidature (The First World War’s Nursing Sisters, 2016, p. 17). Les infirmier.ère.s de l’armée canadienne recevaient un salaire plus élevé que les soldats et bénéficiaient d’une autorité équivalente à celle d’un lieutenant. La lieutenante-colonelle (à la retraite) Harriet (Hallie) Sloan explique les raisons de cette ruée des infirmier.ère.s vers l’armée :

Depuis la guerre des Boers, les infirmier.ère.s canadien.ne.s ont le statut d’officier, avec le même rang, le même salaire et les mêmes privilèges qu’un lieutenant de l’armée. Elles avaient également le pouvoir de commander ceux qui travaillaient sous leurs ordres, comme les aides-soignants. . . . Parmi les membres des forces alliées des deux guerres mondiales, les infirmier.ère.s canadien.ne.s sont les seul.e.s à se trouver à pied d’égalité avec les officiers (The War Years,2005, p. 39).

L’infirmière canadienne Margaret MacDonald, nommée matrone en chef du service infirmier de l’armée canadienne, a été la première femme à recevoir le grade de major dans l’Empire britannique; de plus, des médailles ou des décorations ont été décernées à 660 infirmières canadiennes. Cependant, malgré les nombreux aspects positifs du service infirmier dans l’armée, 47 infirmier.ère.s canadien.ne.s ont perdu la vie au cours de la Première Guerre mondiale (AIIC, 2013).

Activité d’apprentissage essentielle 4.2.1

Pour en savoir plus sur les infirmier.ère.s militaires de la Première Guerre mondiale, regardez cette courte vidéo des Minutes du patrimoine intitulée « Les infirmières canadiennes » (1 min).

La Première Guerre mondiale, conjuguée à la pandémie de grippe espagnole (de 1918 au milieu des années 1920), a durement frappé les jeunes adultes en bonne santé et a laissé de nombreux.ses infirmier.ère.s veuf.ves qui devaient subvenir aux besoins de leur famille. En outre, le krach boursier de 1929 a déclenché la Grande Dépression, laquelle a entraîné d’autres difficultés. Les emplois en soins infirmiers en milieu hospitalier se faisaient rares et comme les services infirmiers privés étaient plus nombreux et offraient des horaires plus courts et une meilleure rémunération que ceux en milieu hospitalier, beaucoup d’infirmier.ère.s travaillaient au privé (CNA, 2013). Toutefois, les salaires médiocres et la pénurie de travail ont fait en sorte que d’innombrables infirmier.ère.s et leurs proches ont dû faire d’énormes sacrifices tout au long de cette période.

La Seconde Guerre mondiale a quant à elle débuté en 1939; plus de 4 000 infirmier.ère.s se sont enrôlé.e.s. Beaucoup l’ont fait pour s’assurer d’un bon salaire. Leurs services étaient très appréciés des soldats, comme le décrit Pauline Siddons : « Je me souviens de couloirs remplis de patients attendant sur civière qu’un lit se libère, tandis que toujours plus d’ambulances n’avaient de cesse d’arriver avec de nouveaux patients » [Traduction libre] (Bassendowski, 2012, p. 91).

Figure 4.2.1 Image historique d’infirmier.ère.s en pleine intervention de catastrophe

infirmier.ère.s, leadership, ambulances, catastrophe

[1940-50], photo gracieusement fournie par la Saskatchewan Health Authority (anciennement Regina Qu’Appelle Health Region), numéro de collection 1999.79-1855, sous licence Creative Commons Attribution 4.0 International.

Le service militaire a donné aux infirmier.ère.s canadien.ne.s l’autonomie de prendre des décisions et les a préparé.e.s à occuper des postes de direction. Une ancienne infirmière se souvient :

C’est au cours de cette guerre sanglante que l’on a appris à devenir les infirmier.ère.s de demain. En tant qu’infirmier.ère.s militaires dans les unités de première ligne, nous devions faire des injections intramusculaires, administrer des solutions intraveineuses, . . enlever des sutures, faire des gros pansements. . . . Lorsque nous étions en route pour l’Italie, . le paludisme a considérablement alourdi notre charge de travail. Nous avons appris à faire des frottis sanguins, à diagnostiquer en nous fondant sur les résultats le type de maladie et à administrer un traitement intraveineux si nécessaire (Pepper, 2015, p. 8).

Treize infirmier.ère.s militaires canadien.ne.s ont perdu la vie au cours de la Seconde Guerre mondiale.

Au cours de celle-ci, une grave pénurie d’infirmier.ère.s civil.e.s qualifié.e.s a rendu nécessaire de trouver une nouvelle source de personnel infirmier dans les hôpitaux. L’AIIC a conseillé aux provinces de mettre sur pied un cours de formation pour les infirmier.ère.s auxiliaires. Pour soutenir les provinces dans cette démarche, l’AIIC a élaboré le premier programme d’études pour les infirmier.ère.s auxiliaires en 1940.

Les recommandations issues d’une enquête nationale sur la santé réalisée en 1943 visaient à offrir aux infirmier.ère.s des salaires et des conditions de travail « comparables à ceux qui prévalent dans d’autres professions qui exigent une préparation semblable » (AIIC, 2013, p. 231). Cependant, les hôpitaux ont été incapables ou n’ont pas voulu tirer parti des capacités démontrées des infirmier.ère.s militaires à assumer des rôles technologiques élargis ou disposer d’une autonomie accrue. Les hôpitaux se sont plutôt fortement appuyés sur la main-d’œuvre étudiante, avec des rôles limités pour les infirmier.ère.s diplômé.e.s « spécialement formé.e.s » (Toman, 2007, p. 202).  De retour à la vie civile après la fin de la Seconde Guerre mondiale, la plupart des infirmier.ère.s militaires n’ont pas voulu se résigner aux rôles hospitaliers conventionnels et ont donc poursuivi d’autres carrières. La déclaration suivante de Mary Tweddell donne une petite idée du dilemme des infirmier.ère.s militaires : « Nous avions vécu la vie dans l’armée – j’y ai consacré quatre ans de ma vie – et c’était un monde complètement différent. Le retour à la vie normale était un choc, de voir à quel point il était difficile de s’ajuster » [Traduction libre] (Bassendowski, 2012, p. 48).

4.3 Faits marquants sur les soins de santé et soins infirmiers de la seconde moitié du vingtième siècle

Dans les décennies qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, l’accès aux soins de santé est devenu une priorité publique au Canada. La pénurie d’infirmier.ère.s s’est néanmoins poursuivie. L’accroissement de la charge de travail et les mauvaises conditions de travail dans les hôpitaux ont poussé les infirmier.ère.s à vouloir entreprendre une négociation collective. Le premier syndicat d’infirmier.ère.s a été créé en Colombie-Britannique en 1945.

Le programme fédéral de subventions de 1948 offre des fonds pour les enquêtes sur la santé, la recherche en santé publique, la lutte contre les maladies infectieuses et des subventions pour la construction d’hôpitaux (à condition qu’elles soient assorties d’un financement provincial). La construction de nouveaux hôpitaux a exacerbé la pénurie de personnel en santé. Les établissements de formation en soins infirmiers n’ont pas été en mesure de former un nombre suffisant d’infirmier.ère.s diplômé.e.s pour répondre à la demande. Des travailleurs auxiliaires, tels que les infirmier.ère.s auxiliaires, ont été engagés par les hôpitaux pour soutenir les infirmier.ère.s diplômé.e.s.

Couverture universelle des soins de santé

L’appréhension du public quant à l’accès aux soins de santé a dominé le paysage de la santé au Canada pendant la seconde moitié du XXe siècle. La première région sociosanitaire du Canada a été créée à Swift Current en 1946. Pour moins de 20 dollars par personne et par an, les habitants bénéficiaient de services médicaux, d’hospitalisation, de soins dentaires pour les enfants et d’un service de santé publique professionnel comprenant des infirmier.ère.s, des programmes de vaccination et des inspecteurs de la santé publique (Matthews, 2006, paragraphe 3).

Deux des principaux résultats de cette « expérience » ont été (1) l’augmentation du nombre de médecins dans la région sociosanitaire de Swift Current, qui est passé de 19 en 1946 à 36 en 1948, et (2) la baisse du taux de mortalité infantile, qui est devenu le plus bas de la Saskatchewan, conséquence directe du travail des infirmier.ère.s et de l’accès aux médecins. Le système d’assurance-maladie de la Saskatchewan, fondé sur le modèle de Swift Current, a été élargi à toute la province en 1962. La région sociosanitaire de Swift Current, premier programme universel de soins hospitaliers et médicaux en Amérique du Nord, a été le précurseur des priorités internationales en matière de soins de santé au XXIe siècle (OMS, 2017).

Activité d’apprentissage essentielle 4.3.1

Les infirmier.ère.s de la Saskatchewan ont joué un rôle de premier plan dans le système de santé canadien. Pour en savoir plus sur l’histoire des soins infirmiers en Saskatchewan, regardez la vidéo intitulée « The Role of Canadian Nurses during WW1 & WW2 » (5 min 19), réalisée par Sandra Bassendowski, professeure au College of Nursing de l’Université de la Saskatchewan.

L’introduction du système de soins de santé public universel pour les Canadiens s’est faite en plusieurs étapes, en commençant par l’adoption de la Loi sur l’assurance-hospitalisation et les services diagnostiques (1957), qui couvrait le coût des traitements hospitaliers, des services de laboratoire et des services de diagnostic radiologique dans les hôpitaux de soins de courte durée partout au Canada.. En 1966, la Loi sur les soins médicaux a étendu la couverture médicale des Canadiens pour les aider à couvrir les coûts des services des médecins en dehors des hôpitaux. Le programme national d’assurance-maladie a été structuré de manière à ce que chaque Canadien puisse recevoir des soins médicaux et des traitements hospitaliers, lesquels sont payés par les impôts ou des primes d’assurance obligatoire. Les coûts étaient répartis entre les gouvernements fédéral et provinciaux, à condition que les provinces respectent les principes d’accessibilité, d’universalité, d’exhaustivité, de transférabilité et d’administration (AIIC, 2013; Dunlop, 2006).

Les coûts des soins de santé ont grimpé en flèche après la mise sur pied de Medicare; un examen des programmes d’assurance financés par l’État a été effectué en 1979 par le juge Emmett Matthew Hall. La Dre Helen Mussallem, directrice générale de l’AIIC à l’époque (et vétérante de la Seconde Guerre mondiale), a présenté le mémoire de l’AIIC intitulé « Putting Health Back into Health Care » aux fins de cet examen. Ce document mettait en évidence les convictions de l’AIIC :

les services de santé assurés devraient être élargis pour y inclure plus que seulement les soins actifs, les services de soins infirmiers devraient être couverts et servir de points d’accès au système de soins de santé, et toutes les primes supplémentaires telles que la surfacturation et les frais d’utilisation devraient être interdites (CNA, 2013, p. 105).

La Dre Ginette Lemire Rodger a assumé le poste de directrice générale de l’AIIC après le départ à la retraite de la Dre Mussallem en 1981. La Dre Lemire Rodger a mené un important travail de lobbying pour soutenir les recommandations formulées dans le document « Putting Health Back into Health Care ». La Loi canadienne sur la santé adoptée en 1984 comprenait plusieurs des révisions recommandées par l’AIIC. Lemire Rodger et Helen Preston Glass (présidente de l’AIIC) n’ont pas réussi à convaincre les parlementaires d’étendre la couverture aux services fournis en dehors des hôpitaux et autres établissements médicaux, mais ils ont obtenu que la description des prestataires potentiels de services assurés soit élargie pour inclure les professionnels de la santé plutôt que seulement les médecins (AIIC, 2013, p. 115). Ouvrir la porte au financement des services infirmiers assurés a été le catalyseur qui a favorisé la présence d’infirmier.ère.s praticien.ne.s dans les cliniques ambulatoires et les centres de soins infirmiers.

Activité d’apprentissage essentielle 4.3.2

Répondez aux questions suivantes en vous référant à la Loi canadienne sur la santé :

  1. Quelles sont les cinq normes que les provinces et les territoires doivent respecter?
  2. Quelles sont les responsabilités des provinces et des territoires en matière de soins de santé?
  3. Quels sont les services financés par les provinces et les territoires?
  4. Quelles sont les responsabilités du gouvernement fédéral en soins de santé?
  5. Quels sont les services financés par le gouvernement fédéral?
  6. Comment le gouvernement fédéral finance-t-il les soins offerts aux Premières Nations et aux Inuits et comment travaille-t-il avec eux?

Pour en apprendre davantage sur les services de santé destinés aux Premières Nations et aux Inuits, consultez la page Web consacrée à la santé des Premières Nations et des Inuits sur le site de Santé Canada. Répondez ensuite aux questions suivantes :

  1. Qu’est-ce que le principe de Jordan?
  2. Si un enfant des Premières Nations ne reçoit pas de services et de soutien, qui doit en être informé?

Travailleurs auxiliaires

Le plan du gouvernement fédéral prévoyait des subventions qui devaient être complétées par des fonds provinciaux et donner le coup d’envoi à la construction et à la rénovation rapides des hôpitaux. En 1950, des fonds ont été accordés pour ajouter près de 20 000 lits d’hôpitaux dans tout le Canada. Ces subventions, combinées à d’autres programmes de santé parrainés par l’État, ont fait augmenter la demande de soins de santé de la part du public. Une nouvelle catégorie de travailleurs auxiliaires a été introduite pour répondre à cette demande. L’AIIC soutenait ces travailleurs auxiliaires et avait même déjà mis sur pied un programme d’études pour les aides-soignants en 1940. Les provinces ont commencé à concevoir des cours et à contrôler l’octroi des licences pour cette nouvelle catégorie de travailleurs auxiliaires.

Formation en soins infirmiers

Figure 4.3.1 Première cohorte de l’Université de la Saskatchewan, 1943

classe d’infirmier.ère.s diplômé.e.s, Université de la Saskatchewan, 1943, formation des infirmier.ère.s

[n.d], « Nursing Students », photo reproduite avec l’autorisation du service des archives et des collections spéciales de l’Université de la Saskatchewan, numéro de collection A-2636, sous licence Creative Commons Attribution 4.0 International. À propos de cette photo : Visitez le site Web du College of Nursing, pour en apprendre davantage sur l’histoire du Collège des sciences infirmières de l’Université de la Saskatchewan.

La formation du personnel infirmier a été au centre des préoccupations des leaders infirmiers au Canada pendant la seconde moitié du XXe siècle. L’administration des établissements hospitaliers délestait une lourde charge de travail sur les étudiants en soins infirmiers, qui étaient devenus des prestataires de soins indispensables pour les patients dans les hôpitaux. Les leaders infirmiers s’inquiétaient de plus en plus de la qualité de l’enseignement dispensé à ces étudiants qui apprenaient sur le tas en prodiguant une grande partie des soins aux patients. En 1946, Evelyn Mallory, présidente de la Registered Nurses Association of British Columbia, s’interroge sur la qualité de la formation en soins infirmiers :

« Allons-nous continuer de pratiquer le compromis, d’avancer tant bien que mal tandis qu’une confusion désespérée règne au sujet de l’éducation et des services de soins infirmiers, non seulement dans l’esprit du public, mais aussi dans celui des infirmières, comme c’est le cas depuis des années? » ou les infirmières « feront-elles enfin de la planification vraiment constructive pour ce qui est de la préparation des infirmières professionnelles, reconnaissant franchement qu’il nous faut davantage d’infirmières mieux qualifiées si nous voulons répondre aux besoins de la communauté? » (extrait de l’AIIC, 2013, p.72).

Afin d’améliorer la formation des infirmier.ère.s, l’AIIC a piloté un programme d’accréditation des écoles de sciences infirmières. Le rapport du projet pilote d’accréditation de 1960 sur l’évaluation des écoles de sciences infirmières a révélé que 21 écoles sur 25 ne répondaient pas aux normes. Comme l’a affirmé la Dre Helen Mussallem, « J’ai compris que les étudiantes n’étaient pas des étudiantes en réalité, qu’elles constituaient plutôt une main-d’œuvre en servitude » (AIIC,2013,p. 81).

Dre Mussallem a été la première infirmière canadienne à obtenir un doctorat en sciences infirmières. Ses recherches, qui portaient sur le développement de la formation en soins infirmiers dans les systèmes d’enseignement général, ont reçu une grande attention de la part des professionnels et du grand public. Elle a recommandé une refonte complète du système de formation en soins infirmiers au Canada. Après la publication de ses recherches, le Globe and Mail a décrit la formation des infirmier.ère.s de cette manière :

« le système de formation des infirmières en milieu hospitalier ressemble de près au système d’entraînement des militaires dans l’armée… . et prive les infirmières de certains de leurs droits civils elles doivent respecter des couvre-feux, leur temps de loisirs est contrôlé énormément, on leur impose même leur tenue personnelle… . et elles ne peuvent même pas insister pour obtenir les droits les plus fondamentaux – celui d’être traitées comme des adultes raisonnables et responsables dans une société libre » (AIIC, 2013, p. 85).

Les recherches de la Dre Mussallem ont mis en évidence la nécessité d’un changement dans la formation des infirmier.ère.s au Canada et ont servi de catalyseur à transférer la formation en sciences infirmières hors des hôpitaux vers les collèges et les universités du Canada.

Figure 4.3.2 Licence collaborative en sciences infirmières de la Saskatchewan (SCBScN)

premiers doyens, Saskatchewan Collaborative Baccalaureate of Science of Nursing

[8 janvier 2016] « IMG_0074 », photo reproduite avec l’autorisation du College of Registered Nurses of Saskatchewan, est sous licence Creative Commons Attribution 4.0 International. À propos de cette photo : Cérémonie de remise de l’épinglette. Grace Onwuka, le doyen David Gregory (Université de Regina) et la doyenne Netha Dyck (SaskPolytechnic) sont sur le podium. Les étudiants en soins infirmiers ont commencé leurs études dans le programme SCBScN à l’automne 2011.

Recherche en sciences infirmières

À son entrée au Conseil de recherches médicales (aujourd’hui Instituts de recherche en santé du Canada) en 1986, Ginette Lemire Rodger, chef de file dans le domaine des sciences infirmières, a lutté contre les préjugés liés au sexe, à l’âge, à la profession et à l’enseignement et pour que le financement de la recherche ne se limite pas aux scientifiques de laboratoire et aux médecins. Sa persévérance a permis de trouver du soutien financier pour la recherche en sciences infirmières et les infrastructures nécessaires. Cette prise de conscience de la nécessité de la recherche en soins infirmiers a mené à la mise sur pied du premier programme de doctorat entièrement financé à l’Université de l’Alberta en 1991. Dre Lemire Rodger est rapidement devenue la première diplômée d’un programme de doctorat en sciences infirmières au Canada. En plus d’acquérir les qualifications universitaires requises pour l’enseignement et la recherche, les infirmier.ère.s canadien.ne.s ont commencé à développer un corpus unique de recherche centrée sur les sciences infirmières.

Note de recherche

Le Nord de la Saskatchewan abrite de nombreux peuples des Premières Nations, qui vivent dans de petites localités souvent isolées. Les conditions économiques dans la région ont été catastrophiques au cours du XXe siècle. Les premiers postes infirmiers ont été créés à Île-à-la-Crosse en 1927 et à Cumberland House en 1929. Les soins infirmiers constituaient l’essentiel des soins de santé dans le Nord.

Après l’élection en 1944 de la Fédération du Commonwealth coopératif (FCC) en Saskatchewan, l’accent a été mis sur l’intégration des membres plus défavorisés de la société (McBain, 2015). Cette initiative a été financée par les profits de l’exploitation des ressources naturelles abondantes dans cette région, notamment l’uranium. Neuf autres postes infirmiers ont été créés entre 1941 et 1955. Seuls deux de ces postes relevaient du fédéral : Lac La Ronge et Pelican Narrows. Puisque les petites localités étaient très dispersées dans le Nord, il était difficile de mettre en place suffisamment de ressources pour leur fournir des soins médicaux de qualité. En conséquence, des ambulances aériennes ont été utilisées pour transporter les patients des postes infirmiers vers les grands centres hospitaliers pour recevoir les soins nécessaires.

Les ressources infirmières provinciales s’occupaient des populations du Nord hors traité. Les quelques ressources infirmières fédérales présentes dans le Nord s’occupaient des Indiens inscrits. De nombreux enjeux juridictionnels se sont posés entre les fournisseurs des soins de santé provinciaux et fédéraux. Au cours de la seconde moitié du XXe siècle, de nombreux.euse.s infirmier.ère.s de la province ont été réprimandé.e.s pour avoir prodigué des soins à des Indiens inscrits. Cette question sur les territoires de compétence se pose encore aujourd’hui. Les infirmier.ère.s n’ont cependant jamais refusé de fournir des soins et ont toujours trouvé un moyen de répondre aux besoins du patient, quel que soit son statut.

Dans cette vidéo YouTube (53 min), intitulée « Place and Nursing in Remote Northern Communities: A Historical Perspective », la Dre Lesley McBain discute de la recherche historique menée auprès des infirmier.ère.s du Nord de la Saskatchewan. La recherche décrite dans cette vidéo illustre certains des défis que doivent surmonter les infirmier.ère.s des postes éloignés lorsqu’ils.elles fournissent des soins aux citoyens de la région. Dans des lettres adressées à leurs superviseur.e.s, les infirmier.ère.s soulignent que les environnements de travail ne répondent pas aux normes, ce qui limite leur capacité à fournir des soins professionnels en plus de l’impact négatif sur le bien-être de la patientèle.

Après avoir regardé la vidéo, répondez aux questions suivantes :

  1. D’après cette recherche, la Loi canadienne sur la santé a-t-elle eu un impact sur les communautés du Nord?
  2. Quels changements recommanderiez-vous pour améliorer les soins de santé dans le Nord?
  3. Comment les déplacements fréquents des infirmier.ère.s du Nord ont-ils influé sur leur « proximité morale », telle qu’elle est décrite dans la théorie de Malone sur les soins infirmiers en zone éloignée dont il est question dans la vidéo?
  4. Si vous étiez une infirmière provinciale du Nord, que feriez-vous pour vous assurer que tout le monde reçoit des soins de qualité?

Activité d’apprentissage essentielle 4.3.3

Pour comprendre comment l’évolution du professionnalisme des infirmier.ère.s au cours des 60 dernières années a été liée aux changements d’attitude de la société, regardez cette vidéo de Margaret Scaia : « Working Professionalism: Nursing in Calgary and Vancouver 1958 to 1977 » (51 min).

Résumé

Les infirmier.ère.s ont été les premier.ère.s à offrir des soins de santé holistiques aux Canadien.ne.s, soit dès 1617 avec Marie Rollet Hébert qui a prodigué des soins aux premier.ère.s colon.ne.s et aux populations autochtones. Au cours des quatre siècles qui ont suivi, l’attitude de la société à l’égard des infirmier.ère.s et leurs conditions de travail a conduit à de multiples pénuries d’infirmier.ère.s, ce qui a entraîné l’apparition de personnel de santé auxiliaire sur le lieu de travail.

Lorsque la formation en sciences infirmières est devenue du ressort des universités, les chercheurs et les dirigeants en sciences infirmières ont créé un corpus unique de connaissances destinées à la pratique individuelle. Ce savoir infirmier exige que les soins dispensés soient fondés sur des données probantes. Le personnel infirmier moderne doit analyser les problèmes dans sa pratique pour suggérer des pistes de recherches qui permettront d’émettre des recommandations sur la façon de dispenser les soins (Lieb Zalon, 2015, p. 425). En tant que praticiens holistiques, les infirmier.ère.s doivent être au fait de la recherche pour prendre des décisions rationnelles en fonction de leur connaissance de la patientèle et de l’environnement où les soins sont prodigués (Rycroft-Malone, 2008).

De nombreux problèmes qui avaient déjà été relevés au début de l’histoire des soins de santé au Canada sont toujours d’actualité pour les infirmier.ère.s canadien.ne.s d’aujourd’hui. Comprendre le passé des soins infirmiers aidera les professionnels d’aujourd’hui à aller de l’avant face aux problèmes actuels, notamment : la pénurie d’infirmier.ère.s et les problèmes d’offre et de demande; les coupures en soins de santé qui forcent les hôpitaux à remplacer les infirmier.ère.s par des travailleur.euse.s moins qualifié.e.s; l’estompement de la démarcation entre les infirmier.ère.s auxiliaires et les infirmier.ère.s autorisé.e.s; la mise en œuvre d’une pratique infirmière étendue qui permet aux infirmier.ère.s de pleinement se réaliser; les soins de santé primaires; le recrutement d’infirmier.ère.s praticien.ne.s; le développement de l’informatique infirmière; l’accent sur l’autorégulation; la réforme des programmes d’études et de l’enseignement en soins infirmiers; et enfin, une attention particulière et constante à la rémunération appropriée des infirmier.ère.s et à la mise en place d’environnements de travail de qualité dans le domaine des soins de santé. Les leçons tirées de l’histoire du Canada incitent les leaders infirmiers à faire preuve de vigilance en façonnant l’avenir des soins infirmiers et de santé au Canada.

À la fin du chapitre, vous devriez être en mesure de faire ce qui suit :

  1. Déterminer les événements historiques liés aux soins de santé au Canada et le rôle que les leaders infirmiers y ont joué.
  2. Décrire la répartition des responsabilités en matière de soins de santé entre les gouvernements provinciaux, territoriaux et fédéral.
  3. Décrire l’influence des forces démographiques et sociales sur le leadership des leaders infirmiers du système de santé canadien.

Exercices

  1. Quelles sont les responsabilités du gouvernement fédéral en vertu de la Loi canadienne sur la santé? Discutez de l’effet de la répartition des responsabilités sur les soins de santé entre les gouvernements provinciaux, territoriaux et fédéral.
  2. Discutez de la manière dont les forces sociales ont eu un effet significatif sur les rôles des infirmier.ère.s dans les soins de santé au Canada. Nommez au moins trois exemples de forces sociales.
  3. Quelles modifications recommanderiez-vous d’apporter à la Loi canadienne sur la santé?

Références

Bassendowski, S. (2012) A portrait of Saskatchewan nurses in military times. Saskatoon, Sask. : Houghton Boston.

Calnan, R. et Lemire Rodger, G. (2002) Primary healthcare: A new approach to healthcare reform, Notes for remarks to the Senate standing committee on social affairs, science and technology. Ottawa, Association des infirmières et infirmiers du Canada.

Association des infirmières et infirmiers du Canada [AIIC]. (2013). Cent ans de service. Ottawa, AIIC. https://www.cna-aiic.ca/viewdocument/lassociation-des-infirmires-et-in

Dunlop, M. E. (2006). Politique sur la santé. L’Encyclopédie canadienne. https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/politique-sur-la-sante

Gregory, d., Raymond-Seniuk, C., Patrick, L. et Stephen, T. (2015). An introduction to Canadian nursing. Dans D. Gregory, C. Raymond-Seniuk, C. Patrick, et T. Stephen (dir.), Fundamentals:Perspectives on the art and science of Canadian nursing, Philadelphie, Penn. : Walters Kluwer, p. 3-22.

Jaenen, C. J. (2008). Marie-Marguerite d’Youville. L’Encyclopédie canadienne. https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/youville-marie-marguerite-d

Lieb Zalon, M. (2015). Translating research into practice. Dans P. S. Yoder-Wise, L. G. Grant, et S. Regan (dir.), Leading and Managing in Canadian Nursing, Toronto. Elsevier, p. 411-429.

Matthews, M. (2005) Swift Current Health Region. Dans Encyclopedia of Saskatchewan: A living legacy. Regina, Sask. : Canadian Plains Research Center, Université de Regina, p. 919-920.

Noel, J. (2008). Jeanne Mance, L’Encyclopédie canadienne. https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/jeanne-mance

Pepper, E. A. (2015). Over There » in World War II. The Canadian Nurse, 111(8), p. 8-9.

Rycroft-Malone, J. (2008). Evidence-informed practice: From individual to context. Journal of Nursing Management, 16(4), p. 404-408.

The First World War’s nursing sisters. (2016). Canadian Nurse, 112(8), p. 17.

The war years. (2005) Canadian Nurse, 101(7), p. 38-41.

Toman, Cynthia. (2007) An officer and a lady: Canadian military nursing and the Second World War, Vancouver, C.-B. : UBC Press.

VON Canada. (2017). More than a Century of Caring: Our Proud Legacy. www.von.ca/en/history

Organisation mondiale de la santé [OMS]. (2015). Health in 2015: From MDGs, Millennium Development Goals to SDGs, Sustainable Development Goals, Genève, OMS. http://apps.who.int/iris/bitstream/10665/200009/1/9789241565110_eng.pdf?ua=1

5

Assurer un leadership infirmier dans le système de santé

Joan Wagner

Il se passe quelque chose d’imprévu et de magnifique. Les soins de santé, qui sont passés par la nuit noire de l’âme à notre époque, montrent des signes de renaissance, de transformation.

– Barbara Dossey et Larry Dossey (cités dans Porter-O’Grady et Malloch, 2011, p. 433)

Introduction

Le système de santé doit constamment s’adapter à l’environnement changeant et les leaders infirmiers doivent affinent leurs méthodes d’administration et adapter leurs processus de soins. Les outils de leadership tels que l’énoncé de mission, la vision et les valeurs de l’organisation, qui orientent l’administration et les prestataires de soins aux patients dans leur travail quotidien, sont régulièrement revus et modifiés. La « délégation des soins » ou le transfert de responsabilités d’une catégorie de prestataires de soins à une autre est un exemple de l’adaptation importante du processus de soins de santé en réponse à des changements rapides à l’échelle du système. Les leaders infirmiers jouent un rôle important dans ce système adaptatif complexe en assurant le maintien d’une culture de soins solide axée sur la qualité des soins et l’amélioration des résultats pour les patients, en dépit des changements incessants.

Objectifs d’apprentissage

  1. Appliquer la théorie des systèmes aux soins de santé.
  2. Établir les relations entre la culture organisationnelle, le leadership, l’intelligence culturelle et le changement.
  3. Expliquer l’importance de la vision, de la mission et des valeurs d’une organisation.
  4. Conclure que le leadership relationnel et l’autonomisation jouent un rôle important dans le changement de la culture organisationnelle.
  5. Passer en revue les normes de délégation des soins établies par le College of Registered Nurses of Saskatchewan (CRNS), autant entre le personnel infirmier autorisé et les prestataires de soins non réglementés qu’entre les médecins et le personnel infirmier autorisé.

5.1 Théorie des systèmes et soins de santé

Le chapitre un traite de la science de la complexité et des systèmes adaptatifs complexes dans le domaine des sciences infirmières. Il est important de comprendre que la causalité dans un système adaptatif complexe n’est pas linéaire, de sorte qu’il est difficile de prédire le résultat final d’une intervention spécifique axée sur le prestataire ou le patient. En tant que personnel infirmier, nous savons que la réussite d’une intervention de soins centrés sur le patient dépend de nombreux facteurs. Trop souvent, en dépit d’une préparation minutieuse et d’un travail acharné, une intervention de soins aux patients ne donne pas les résultats escomptés. Des facteurs indépendants de notre volonté, et souvent de notre connaissance, détournent les résultats escomptés. Ce phénomène est typique de la séquence des événements dans un système adaptatif complexe.

Dès lors, comment être des leaders efficaces si nous ne pouvons pas prédire le résultat de nos actions pour guider les autres? Un examen des deux premiers principes du système adaptatif complexe, abordés au chapitre 1, permettra peut-être de répondre à cette question. Le premier principe, qui se concentre sur l’utilisation de la lentille de la complexité, et le deuxième principe, qui décrit une vision suffisamment bonne, nous donnent des indices sur la manière de diriger les autres dans un système de soins de santé complexe et adaptatif. Les organisations et les leaders infirmiers reconnaissent leur incapacité à contrôler le changement et n’essaient donc pas de gérer tous les aspects du changement organisationnel. Les leaders efficaces des soins de santé s’efforcent de donner une orientation générale aux prestataires, plutôt que de relever des détails spécifiques. De plus, ils les encouragent également à apporter des réponses innovantes qui répondent au mieux à leurs forces et besoins individuels et à l’objectif ultime du système de soins de santé, qui est d’assurer des soins de qualité aux patients. Même s’ils ne peuvent pas prédire tous les facteurs qui influenceront les résultats des activités de changement, en suivant ces principes, ils savent que la solution finale sera la mieux adaptée à l’environnement, au système de soins de santé et aux besoins de tous.

Activité d’apprentissage essentielle 5.1.1

Comment peut-on appliquer la théorie des systèmes à une organisation de soins de santé? Pour mieux comprendre, regardez la vidéo « System Theory of Management » (7 min 37) (théorie de gestion par les systèmes) de Nguyen Thanh Thi, puis répondez aux questions suivantes :

  1. Quels sont les trois types de systèmes de base? Décrivez chaque type.
  2. Quel type de système est utilisé dans un hôpital?
  3. Qu’est-ce que la synergie? Qu’est-ce que l’entropie?

Il existe trois concepts fondamentaux qui, appliqués à nos organisations individuelles, peuvent transformer la prestation des soins de santé. Pour en savoir davantage, regardez la vidéo « Systems Thinking and Complexity in Health A Short Introduction » (5 min 02) (Introduction à la pensée systémique et à la complexité en santé), puis faites les exercices suivants :

  1. Citez les trois concepts fondamentaux qui peuvent transformer la prestation des soins de santé.
  2. Définissez ces trois concepts et donnez un exemple de changements qu’ils peuvent apporter.

Regardez ensuite la vidéo « Interview with Judith Shamian on International Nurses Day 2016 » (4:44) (entrevue avec Judith Shamian le journée mondiale des infirmières), où l’invitée parle d’encourager les citoyen.ne.s à collaborer avec les infirmier.ère.s pour créer un système de soins de santé positif. Judith Shamian est présidente du Conseil international des infirmières.

5.2 Vision, mission et valeurs de l’organisation

L’administration fournit un cadre sur la vision, la mission et les valeurs de l’organisation pour donner une orientation et des directives générales aux prestataires. L’énoncé de la vision d’une organisation définit sa raison d’être, ce qui la distingue des organisations similaires, et précise dans quelle direction les leaders orientent l’organisation (Sanders, 2013). La mission décrit la manière dont l’organisation réalisera sa vision et établit la ligne de conduite commune pour l’avenir. Enfin, les valeurs sont définies pour contribuer à la réalisation de la vision et de la mission et fournissent des lignes directrices stratégiques pour la prise de décision tant en interne qu’en externe, par les membres de l’organisation (Hibberd, Doody,et Hennessey, 2006). Les énoncés de la vision, la mission et les valeurs sont clairs, concis et faciles à comprendre pour tous les membres de l’organisation. La vision, la mission et les valeurs fournissent des lignes directrices à tous ceux qui participent aux activités de l’organisation et les encouragent à « passer de la parole aux actes. »

Le système de santé canadien est un système ouvert en constant changement pour s’adapter à son environnement. La science de la complexité exige que les leaders et le personnel répondent au changement de manière rapide et réfléchie. Les soins de santé n’ont de cesse d’évoluer et d’adopter de nouveaux modèles de soins, les responsables doivent donc envisager des approches innovantes qui répondent aux besoins de changement tout en respectant la vision, la mission et les valeurs de leur organisation. Selon Porter–O’Grady et Malloch, le langage du leadership doit refléter les exigences de la mission, expliquer comment les efforts de chacun y contribuent, et garantir que les résultats du travail font progresser la mission et l’objectif de l’organisation (2011, p. 233). Les leaders s’appuient sur la vision, la mission et les valeurs pour réagir aux événements critiques et aux défis imprévus, lesquels surviennent fréquemment dans un système complexe. Les organisations efficaces exigent que tous s’engagent à suivre ces lignes directrices stratégiques dans le cadre de leurs activités professionnelles. Les prestataires qui comprennent la relation entre leur travail, la mission et l’objectif de l’organisation contribuent à la création d’un système de soins de santé plus fort qui excelle dans la fourniture de soins de première qualité aux patients. La vision, la mission et les valeurs fournissent un cadre de référence commun à l’ensemble de l’organisation pour la prise de décision, tant pour les gestionnaires que pour le personnel (Kotalik et coll., 2014).

La mission, la vision et les valeurs d’une organisation ne sont pas statiques et immuables au fil des ans; c’est pourquoi les lignes directrices stratégiques de l’organisation sont régulièrement revues et mises à jour. Ce processus de révision permet de s’assurer que les services offerts par une organisation répondent aux besoins de ses clients ou patients. Ce processus est expliqué par Conger, Knuth et McDonald (2014) qui décrivent l’adaptation des soins de santé à la conception et à la mise en œuvre d’un système de dossiers de santé électroniques. La mise en œuvre de ce système a permis de rafraîchir la vision de l’agence de soins de santé, à redéfinir ses objectifs et finalement à réinventer son système de rapports et mesure du rendement. Les transformations entraînées par les changements dans l’environnement technologique externe correspondent à la mission et à la vision de l’agence de soins de santé qui visent à engager, enrôler et responsabiliser les prestataires de soins pour établir une culture de la transparence et de l’excellence clinique (Congeret coll., p. 55).

Activité d’apprentissage essentielle 5.2.1

Regardez la vidéo « How to Write a Mission Statement » (4 min) (écrire un énoncé de mission), présentée par M3 Planning, puis répondez aux questions suivantes :

  1. Qu’est-ce qu’un énoncé de mission?
  2. Quelles sont les cinq caractéristiques d’un énoncé de mission?
  3. Qui doit prendre part à la rédaction d’un énoncé de mission?
  4. Quels renseignements doivent être présentés dans un énoncé de mission?
  5. Comment se déroule le processus de rédaction d’un énoncé de mission?

5.3 Culture organisationnelle et leadership infirmier

La culture organisationnelle peut être décrite comme les connaissances, valeurs et croyances implicites qui reflètent les normes et traditions de l’organisation (Mancini et Wong, 2015, p. 152). Schein (cité dans Ko, Murphy et Birdman, 2015) décrit en outre la culture organisationnelle comme étant le modèle des hypothèses de base communes, . . la bonne façon de percevoir, de penser et de ressentir les choses (p. S676). La vision, la mission et les valeurs de l’organisation, établies par la direction, constituent le fondement de la culture d’un établissement. Puisque chaque organisation a ses propres valeurs, vision et mission, chacune a aussi sa propre culture. Il n’est pas surprenant que lorsque la mission et la vision des différentes institutions ne correspondent pas, la collaboration dans la prestation de services aux patients ou clients peut également donner lieu à des désaccords (Ko et coll., 2015). L’accent étant mis de plus en plus sur la collaboration entre les organismes de soins de santé, il est essentiel de comprendre comment surmonter les défis posés par les différences culturelles qui peuvent entraver les efforts du groupe.

La récente crise sanitaire au Royaume-Uni est un exemple du rôle prépondérant de la culture organisationnelle. L’enquête Francis de 2013 sur les décès inutiles de près de 1 200 personnes entre janvier 2005 et mars 2009 a secoué les fondations du Service national de santé britannique. Le premier rapport Francis en 2010 avait mis en lumière les failles du système, qui visait davantage à réduire les coûts qu’à fournir des soins sûrs et efficaces aux patients. Le deuxième rapport Francis en 2013 préconise une culture centrée sur le patient, qui lui accorde la priorité au-delà de toutes les préoccupations du système et du personnel. Le rapport Francis a souligné l’effet significatif du leadership sur la culture organisationnelle et, ultimement, sur la qualité des soins aux patients : En réalité, la culture organisationnelle est influencée par la nature de son leadership. Le ministère de la Santé a un rôle important à jouer dans la promotion du changement de culture nécessaire à l’échelle du système de soins de santé (Francis, 2013, p. 64).

Note de recherche

Hung, D., Chung, S., Martinez, M. et Tai-Seale, M. Effect of organizational culture on patient access, care continuity and experience of primary care. Journal of Ambulatory Care Management, 39(3), 2016, p. 242–252.

But

Examiner les relations entre la culture organisationnelle et les résultats centrés sur le patient d’un grand cabinet médical.

Discussion

Cette étude américaine a été menée dans un grand groupe de 357 médecins, dans 41 services de soins primaires et auprès d’un million de patients. Il en est ressorti que la culture organisationnelle est associée de manière significative à l’accès des patients aux soins, à la continuité des soins et aux expériences rapportées en matière de prestation de soins (Hung et coll., 2016, p. 245-246).

Application dans la pratique

Lorsqu’on apporte un changement à une organisation, il est essentiel de tenir compte de sa culture organisationnelle. Reconnaître et exploiter cet aspect du comportement collectif tout en visant des objectifs de soins spécifiques centrés sur le patient permettra d’améliorer les soins.

Comment le Service national de santé britannique a-t-il donc fait adopter un changement culturel favorisant la sécurité des patients et la qualité des soins? L’une des nombreuses mesures prises pour susciter la discussion et favoriser l’apprentissage entre les disciplines professionnelles a été d’encourager les organisations de tout le Royaume-Uni à mettre en place des « rondes Schwartz », qui donnaient aux membres de toutes les disciplines de l’organisation l’occasion de réfléchir aux aspects émotionnels de leur travail, ainsi que d’améliorer leur communication et leurs relations avec les patients (Muls et coll., 2015). Les relations de qualité au sein du personnel sont essentielles à la fourniture de soins de qualité aux clients.

La direction a conscience que le personnel est souvent réfractaire au changement et à l’innovation sur le lieu de travail en invoquant le soi-disant argument selon lequel « il en a toujours été ainsi ». La direction joue un rôle essentiel en inspirant le changement. La mise en œuvre de mesures novatrices et transformatrices nécessite de reconnaître que le changement culturel ne peut pas être imposé, mais seulement inspiré. Les leaders efficaces comprennent que tout changement doit tenir compte des normes et traditions culturelles implicites et explicites dans l’organisation. Comme le souligne la littérature britannique sur la santé, la direction donne l’exemple au personnel en partageant les valeurs d’une culture de tolérance zéro pour les soins de qualité inférieure (Muls et coll., 2015).

La recherche menée de pair avec les hôpitaux-aimants aux États-Unis a réaffirmé la nécessité d’un environnement de soins de santé axé sur la fourniture de soins de qualité aux patients. Ce besoin a également été constaté au Royaume-Uni. Lorsque les soignants disposent de ressources adéquates, de soutien et de respect, il est prouvé qu’ils ressentent davantage de satisfaction dans leur travail et qu’il s’ensuit une réduction de la morbidité et de la mortalité chez les patients (Aiken, Clarke,Sloane,Lake et Cheney,2008).

Les approches de leadership holistique, qui mettent l’accent sur le leadership relationnel et la responsabilisation du personnel, favorisent une culture forte et solide des prestataires de soins au sein de l’organisation. Une culture organisationnelle de soutien est favorable à l’amélioration de la santé autant chez les prestataires de soins que les patients (Wagner, Cummings, Smith, Olson et Warren, 2013). La recherche indique que les responsables du personnel infirmier efficaces et performants améliorent le bien-être des travailleurs, ce qui se traduit par une amélioration des résultats de la patientèle et la clientèle (Cummings, 2004).

Activité d’apprentissage essentielle 5.3.1

Visionnez le balado « Spirit at Work Can Make a Difference! » (20:00) (l’enthousiasme au travail change la donne) par la Dre Joan Wagner sur la recherche sur le leadership résonnant, la responsabilisation et l’enthousiasme au travail, puis répondez aux questions suivantes :

  1. Qu’est-ce que l’enthousiasme au travail?
  2. Quelles sont les quatre dimensions de l’enthousiasme au travail? Décrivez-les. 
  3. Le leadership résonnant a-t-il un effet sur l’autonomisation structurelle? Sur l’autonomisation psychologique? Sur l’enthousiasme au travail?
  4. Comment la recherche sur l’enthousiasme au travail peut-elle contribuer à la création de lieux de travail sains?

5.4 Délégation des soins

Les changements importants survenus dans le domaine des soins de santé au cours du siècle dernier ont inclus la mise en place d’un système de soins de santé universel, le vieillissement rapide de la population, les progrès technologiques et les découvertes scientifiques, ce qui a exacerbé la pression sur le système et causé une escalade rapide des coûts. Les leaders en santé ont cherché des moyens de répondre aux demandes croissantes qui pèsent sur le système. La délégation des soins est une solution qui a été mise en œuvre avec succès au cours des 20 à 30 dernières années en réponse à ces pressions. La délégation des soins fait référence au transfert de la responsabilité d’une tâche lorsqu’elle ne fait pas partie du champ d’activité ou du champ d’emploi du prestataire de soins (SRNA, 2015, p. 8). Ce transfert de responsabilité se produit le plus souvent d’une IA à un prestataire de soins non réglementé ou d’un médecin au personnel infirmier autorisé. Des lignes directrices ont été établies pour garantir la qualité des soins aux patients tout au long du processus de délégation.

Délégation et attribution des soins infirmiers

Attribution

Le personnel infirmier autorisé est responsable de la coordination des soins aux patients, ce qui peut inclure l’évaluation, l’attribution, la planification des soins, la supervision, la surveillance continue, la prise de décision et l’évaluation des soins (SRNA, 2015). Le personnel infirmier autorisé confie les soins du patient au prestataire de soins qu’elle juge avoir les meilleures compétences pour la tâche.

Il y a attribution lorsque les soins requis relèvent du champ d’activité (p. ex., personnel infirmier auxiliaire autorisé, personnel infirmier autorisé, personnel infirmier psychiatrique autorisé) ou de la description de poste (p. ex., prestataire de soins non réglementé) du prestataire de soins qui accepte la responsabilité déléguée par le personnel infirmier autorisé. . . . Le personnel infirmier autorisé au point de prestation de soins conserve la responsabilité globale de la qualité de l’attribution et de la supervision des soins au patient. Cette responsabilité ne peut être déléguée (SRNA, 2015, p. 8).

Délégation

La délégation des soins infirmiers est différente de l’attribution puisqu’elle désigne le transfert de la responsabilité d’une tâche lorsqu’elle ne fait pas partie du champ de pratique ou du champ d’emploi du prestataire de soins (SRNA, 2015, p. 8). Il est important de se rappeler que seule la tâche peut être déléguée; le personnel infirmier autorisé conserve la responsabilité de la coordination des soins aux patients. Les leaders infirmiers doivent s’assurer que les principes de délégation suivants (SRNA, 2015, p. 9) sont appliqués dans leur organisation avant de procéder à la délégation :

  1. Des processus et des politiques formels doivent être mis en place pour soutenir le délégant (la personne qui délègue) et le délégataire (la personne qui reçoit la responsabilité);
  2. La sécurité du patient ne doit en aucun cas être compromise par le recours à des travailleurs moins qualifiés pour fournir des soins ou effectuer une intervention lorsque toutes les compétences et l’étendue des connaissances, des aptitudes et du jugement du personnel infirmier autorisé sont requises;
  3. Une tâche déléguée ne peut pas être déléguée de nouveau; et
  4. L’infirmier.ère qui délègue est responsable de s’assurer que les tâches sont bien effectuées et de faire une évaluation globale, la planification des soins, l’intervention et l’évaluation des soins (SRNA, 2015, p. 9).

Cette responsabilité exige que le personnel infirmier autorisé veille au contrôle de l’exécution et à l’achèvement des tâches par le prestataire de soins non réglementé. Une communication régulière avec le prestataire de soins non réglementé est nécessaire lors de la délégation initiale de la tâche, tout au long de son exécution et après qu’elle a été effectuée.

Activité d’apprentissage essentielle 5.4.1

Les cinq droits de la délégation constituent une excellente liste de vérification mentale pour le personnel infirmier autorisé qui cherche à déléguer des soins aux patients. Cette liste vise à vérifier qu’il s’agit de la bonne tâche, des bonnes circonstances, de la bonne personne, de la bonne communication et de la bonne supervision. Pour en savoir plus sur les cinq droits de délégation, voir les pages 21 à 23 de « SRNA Interpretation of the RN Scope of Practice ».

Délégation du médecin au personnel infirmier autorisé

En septembre 2014, la Loi médicale de 1981 a été modifiée pour donner au College of Physicians and Surgeons of Saskatchewan (CPSS) le pouvoir d’adopter des règlements qui peuvent permettre aux médecins de déléguer les activités décrites dans le règlement du Collège à d’autres professionnels de la santé (CPSS, 2015, p. 7). En conséquence, les règlements du CPSS ont été modifiés pour permettre aux médecins de déléguer certaines activités au personnel infirmier autorisé. Le transfert d’actes médicaux (TAM) permet au personnel infirmier autorisé d’effectuer des actes complexes et hautement spécialisés qui sortent du cadre des soins infirmiers autorisés et qui relèvent de la pratique de la médecine (SRNA, 2016, p. 1).

Les principes du CPSS en matière de délégation sont les suivants :

  1. La délégation se fait d’un seul médecin à un seul membre du personnel infirmier autorisé; La délégation ne se fera pas par « catégorie »;
  2. Les actes qui peuvent être délégués sont énumérés dans le règlement [du CPSS];
  3. Lorsqu’un programme spécifique est indiqué (comme l’équipe de transport néonatal en soins intensifs, l’équipe de transport pédiatrique du personnel infirmier autorisé ou l’ambulance aérienne), il n’est pas nécessaire d’indiquer les procédures spécifiques qui peuvent être fournies par le personnel infirmier autorisé dans le cadre du programme;
  4. Il incombe au médecin qui délègue l’acte d’évaluer les compétences et les connaissances du personnel infirmier autorisé afin de déterminer si, de l’avis du médecin, le personnel infirmier autorisé possède les compétences et les connaissances appropriées pour effectuer l’acte délégué;
  5. La délégation doit être consignée par écrit, sauf en cas d’urgence;
  6. Le médecin qui délègue l’autorité au personnel infirmier autorisé doit mettre en place un processus de supervision approprié (CPSS, 2015, p. 7–8).

Activité d’apprentissage essentielle 5.4.2

Évolution du champ de pratique du personnel infirmier autorisé

Lisez les pages 9 à 13 du document « SRNA Interpretation of the RN Scope of Practice » (interprétation par le SRNA du champ de pratique des IA), puis répondez aux questions suivantes :

  1. Pourquoi le champ de pratique du personnel infirmier autorisé évolue-t-il?
  2. Veuillez décrire les pratiques du personnel infirmier autorisé spécialisé. Sur quelles normes repose la pratique de la spécialité du personnel infirmier autorisé?
  3. Quel est le champ de pratique du personnel infirmier autorisé avec une « pratique autorisée supplémentaire »? Quelles sont les conditions requises pour qu’un.e infirmier.ère puisse assumer le rôle d’un membre du personnel infirmier autorisé avec une pratique autorisée supplémentaire?

Collaboration entre le personnel infirmier autorisé, le personnel infirmier psychiatrique autorisé et le personnel infirmier auxiliaire autorisé en Saskatchewan

Lisez « Collaborative Decision-Making Framework: Quality Nursing Practice » (approuvé par la Saskatchewan Association of Licensed Practical Nurses, le CRNS, et la Registered Psychiatric Nurses Association of Saskatchewan le 9 septembre 2017), puis répondez aux questions suivantes :

  1. Sur quels facteurs doit se fonder l’attribution des soins aux patients?
  2. Quels sont les quatre principaux facteurs qui influencent le champ de pratique? Décrivez ce que les infirmier.ère.s sont formé.e.s et autorisé.e.s à faire.
  3. Quels sont les trois facteurs que le modèle de continuum de soins présenté à la page 11 exige d’analyser lors de la prise de décisions concernant l’utilisation la plus efficace du personnel infirmier auxiliaire autorisé, du personnel infirmier autorisé et du personnel infirmier psychiatrique autorisé?

Résumé

Ce chapitre aborde la relation entre les responsables du personnel infirmier et le système de santé dans son ensemble. Comprendre cette relation nécessite de considérer le système de soins de santé comme un système adaptatif complexe, dont les multiples interrelations entre ses différents aspects affectent à la fois le système et la santé des participants. Les organismes de soins de santé définissent leur rôle et la manière dont ils s’en acquittent au sein du système par leur énoncé sur leur vision, leur mission et leurs valeurs. Les membres de l’organisation s’appuient sur cet énoncé de principes directeurs pour prendre leurs décisions. Ces décisions guidées favorisent le développement d’une culture organisationnelle, c’est-à-dire d’un système commun de croyances et de comportements pour tous les prestataires. Toutefois, dans les systèmes adaptatifs complexes, outre la vision, la mission et les valeurs, la culture organisationnelle peut être influencée par d’autres facteurs qui entraînent des résultats indésirables, comme la situation du Royaume-Uni. Cela dit, même dans les systèmes adaptatifs complexes, les leaders peuvent inspirer le changement en mettant l’accent sur le leadership relationnel et l’autonomisation.

La délégation des soins est une solution récente aux problèmes en constant changement de notre système de soins de santé complexe et adaptatif. La délégation peut concerner le personnel infirmier autorisé qui délègue des tâches de prestation de soins à des prestataires non réglementés; dans ce cas, le personnel infirmier autorisé qui délègue conserve le rôle de coordination des soins aux patients, avec toutes les responsabilités qui y sont associées, et ce tout au long du processus. La délégation peut également concerner les médecins qui délèguent des actes médicaux spécifiques au personnel infirmier autorisé. Dans ce cas, le médecin délégant conserve les responsabilités d’évaluation et de supervision du personnel infirmier autorisé tout au long de l’exécution de l’acte médical délégué.

À la fin du chapitre, vous devriez être en mesure de faire ce qui suit :

  1. Appliquer la théorie des systèmes aux soins de santé.
  2. Établir les relations entre la culture organisationnelle, le leadership, l’intelligence culturelle et le changement.
  3. Expliquer l’importance de la vision, de la mission et des valeurs d’une organisation.
  4. Décrire le rôle important que jouent le leadership relationnel inspirant et l’autonomisation dans le changement de la culture organisationnelle.
  5. Expliquer les normes de délégation des soins établies par le College of Registered Nurses of Saskatchewan, que le transfert soit du personnel infirmier autorisé aux prestataires de soins non réglementés ou du médecin au personnel infirmier autorisé.

Exercices

  1. Le système de soins de santé de votre communauté locale fonctionne-t-il comme un système ouvert, fermé ou un sous-système? Veuillez expliquer pourquoi vous êtes d’avis que ce type de système correspond à votre communauté locale.
  2. Choisissez un aspect des soins de santé que vous aimeriez changer dans votre communauté locale. Appliquez un ou plusieurs des concepts fondamentaux de la théorie des systèmes, des interrelations, des perspectives et des limites à cet aspect de la prestation des soins de santé d’une manière à améliorer les soins aux patients.
  3. Vous exercez en soins infirmiers et prodiguez des soins à domicile. Un patient âgé et diabétique a été ajouté à votre charge de travail. Vous procédez à son évaluation et déterminez qu’en raison d’une neuropathie des mains, il a besoin d’aide pour appliquer des gouttes ophtalmiques contre le glaucome. Vous décidez de déléguer cet acte à un prestataire de soins non réglementé. Élaborez un plan pour la délégation des soins de ce patient en vous fondant sur les cinq droits de la délégation.
  4. En tant qu’infirmier.ère gestionnaire, vous affecterez des prestataires de soins à des patient.e.s présentant différents besoins en matière de soins et divers niveaux d’acuité. Élaborez deux scénarios distincts de soins aux patient.e.s, en accordant une attention particulière aux compétences spécifiques requises pour s’occuper de chacun. Quelles sont les différences entre les patient.e.s du scénario A et du scénario B? (a) Le scénario A concerne un.e patient.e qui peut être soigné.e par le personnel infirmier auxiliaire autorisé, le personnel infirmier autorisé ou le personnel infirmier psychiatrique autorisé. (b) Le ou la patient.e du scénario B a besoin d’un membre du personnel infirmier autorisé ou du personnel infirmier psychiatrique autorisé pour lui fournir des soins.

Références

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6

Soins de santé primaires : Travail d’équipe, leadership et collaboration interprofessionnels

Colleen Toye et Joan Wagner

La complexité de la prestation de soins de santé et de services sociaux efficaces signifie qu’au 21e siècle, aucune profession ne peut répondre à elle seule aux besoins des patients. Il est nécessaire d’adopter une nouvelle approche plus souple de la prestation des soins (Reeves, Macmillan et van Soeren, 2010, p. 262).

Introduction

Bienvenue dans le monde du travail d’équipe et de la collaboration! Dans ce chapitre, vous commencerez à comprendre l’importance des relations multidisciplinaires efficaces pour parvenir à des résultats cliniques optimaux dans la communauté, mais aussi la nécessité d’un leadership interprofessionnel dans la négociation de ces relations. Quelle que soit la population servie, une pratique collaborative est essentielle dans notre système de santé actuel.

Objectifs d’apprentissage

  1. Décrire la complexité croissante des besoins en soins de santé dans la communauté et ses implications dans notre système de santé actuel.
  2. Explorer la nécessité d’une collaboration interprofessionnelle dans les soins de proximité.
  3. Examiner l’importance de l’engagement du patient et de sa famille dans les soins.
  4. Établir des parallèles entre les caractéristiques ou les styles de leadership et le leadership interprofessionnel dans le cadre d’une pratique collaborative.
  5. Déterminer les compétences et les pratiques spécifiques qui favorisent le leadership et la collaboration interprofessionnels.
  6. Reconnaître les principaux ingrédients d’une collaboration réussie.
  7. Explorer la dynamique relationnelle des équipes positives.
Remarque : Le terme patient est utilisé tout au long du chapitre pour désigner une personne ayant besoin de soins de santé. Le masculin est utilisé au sens générique pour alléger le texte, mais désigne autant les personnes de sexe féminin que masculin.

6.1 Contexte : Pourquoi la collaboration interprofessionnelle est-elle nécessaire?

Soins de santé primaires

Le besoin urgent de mettre en place des soins de santé primaires dans le monde entier a été reconnu en 1978 au congrès de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à Alma-Ata, en URSS. Les soins de santé primaires ont été décrits comme une philosophie de services de santé de proximité axée sur la prévention des maladies, la promotion de la santé, le traitement, la réadaptation et la détermination des personnes à risque (Howse et Grant, 2015, p. 132). L’Association des infirmières et infirmiers du Canada (AIIC) a publié un énoncé de position soutenant fermement les cinq principes essentiels des soins de santé primaires : « l’accessibilité; la participation active du public; la promotion de la santé ainsi que la prévention et la prise en charge des maladies chroniques; l’utilisation des technologies appropriées et de l’innovation; la collaboration intersectorielle » (AIIC, 2015, p. 1). La collaboration et le travail d’équipe entre les professions et les secteurs des soins de santé s’imposent pour respecter les cinq principes inhérents à la philosophie des soins de santé primaires adoptée à Alma-Ata. Ces principes sont le catalyseur de la collaboration interprofessionnelle et intersectorielle dans la prestation de soins de santé complets à la population.

Figure 6.1.1 Infirmière de santé publique en action

« Public Health, 2009 », du Saskatchewan Union of Nurses, est distribué sous la licence CC BY 4.0 International.

Prestation de soins de santé primaires : Les besoins complexes des patients et le passage aux soins dans le secteur communautaire

Partout dans le monde, la population des personnes de plus de 65 ans augmente et, dans la plupart des pays développés, l’augmentation est la plus frappante chez les personnes de 80 ans et plus (Kwan, Chi, Lam, Lam et Chou, 2000). La démographie du Canada évolue rapidement. La population des personnes âgées devrait passer de 3,5 millions en 1996 à 6,9 millions en 2021 au Canada (Statistique Canada, 2015). D’ici 2021, environ 18,7 % de la population aura plus de 65 ans (Santé Canada, 2010). En 2014, les personnes âgées représentaient environ 14 % de la population et 40 % du fardeau hospitalier (AIIC, 2016). Avec le vieillissement de la population vient l’augmentation de l’incidence des maladies chroniques (gouvernement du Canada, 2015). En conséquence, la capacité à répondre aux besoins de santé des personnes âgées d’une manière (professionnelle) cliniquement et fiscalement responsable est devenue un enjeu critique pour le système de santé actuel (Institut canadien d’information sur la santé, 2010; Hirdes, Ljunggren et coll., 2008; Kwan et coll., 2000). Comme l’affirment Leung, Liu, Chow et Chi (2004), même si le vieillissement n’est pas synonyme de fragilité, les personnes âgées sont de grands consommateurs de soins de santé (p. 71).

De plus, Bernabei, Landi, Onder, Liperoti et Gambassi (2008) et Hirdes, Ljunggren et coll. (2008) laissent entendre que les systèmes de santé doivent de plus en plus traiter des personnes âgées qui reçoivent des médicaments et des traitements multiples pour un éventail de problèmes de santé qui demandent de tenir compte des interactions médicamenteuses potentielles et des interactions complexes entre des facteurs physiques, sociaux, médicaux et environnementaux. Il s’agit notamment d’une population ayant un petit réseau de soutien et des ressources financières limitées pour répondre à des besoins de santé croissants.

Bien que les systèmes de santé actuels aient évolué pour fournir des soins de courte durée perfectionnés, ils doivent composer avec une patientèle gériatrique complexe ayant des besoins médicaux, psychologiques et sociaux chroniques. La responsabilité de leur prise en charge, qui incombait autrefois aux hôpitaux et établissements de soins de longue durée, s’est déplacée vers la communauté (Bernabei et coll., 2008). Une revue systématique de la littérature sur les résultats des programmes de soins primaires à domicile chez les personnes âgées confinées à la maison a indiqué que ces programmes peuvent réduire les hospitalisations et les admissions dans les établissements de soins de longue durée tout en améliorant la satisfaction à l’égard des soins ainsi que la qualité de vie des personnes et de leurs aidants (Stall, Nowaczynski et Sinha, 2014, p. 2249). Les services de santé communautaires jouent un rôle de plus en plus important dans le système de santé pour réduire les hospitalisations inappropriées ou les admissions dans les établissements de soins de longue durée (Gray et coll., 2009; Hirdes, Poss et Curtin-Telegdi, 2008).

Une attention particulière doit être portée à la population autochtone canadienne âgée dont les besoins de santé sont souvent complexes. De plus, elle se trouve généralement dans des régions où il est plus difficile et coûteux de fournir des soins. En 2006, près de 5 % des autochtones avaient 65 ans ou plus (Conseil canadien de la santé, 2013). Les conditions sociales qui prévalent dans de nombreuses réserves reflètent la négligence historique et politique dont le Canada a fait preuve à l’égard des personnes d’origine autochtone (voir Condition sociale des Autochtones au Canada). De nombreuses personnes âgées autochtones sont isolées et éprouvent des difficultés en raison de multiples facteurs dans leur vie personnelle et leur communauté; elles ont besoin d’un soutien plus intensif que les personnes âgées non autochtones (Conseil canadien de la santé, 2013, p. 28). Elles peuvent aussi se sentir intimidées par le système de santé institutionnalisé. Ce sentiment peut être attribué aux approches des prestataires de soins semblables à celles décrites dans une récente étude de recherche où des patients autochtones ont fait le récit d’histoires d’intimidation, de peur et d’absence de compréhension culturelle (Cameron, Carmargo Plazas, Salas, Bourque Bearskin et Hungler, K., 2014, p. E1). Les prestataires de soins de santé qui adoptent une pratique respectueuse de la culture créent un environnement accueillant qui encourage les Autochtones à utiliser les services de soins de santé.

Au moins un million de personnes âgées ont une maladie mentale au Canada (AIIC, 2011). Neill, Hayward et Peterson (2007) font valoir le besoin pressant d’assurer l’accès aux soins de bien-être qui permettent de vieillir en bonne santé, en soulignant que la population mondiale des personnes de plus de 60 ans devrait s’élever à près de deux milliards d’ici 2050 (p. 425). Cependant, les problèmes de santé mentale chroniques touchent tous les groupes d’âge. Les personnes qui en sont atteintes peuvent faire partie des groupes les plus défavorisés au Canada. Dans bien des cas, plusieurs problèmes de santé et de société intersectionnels les amènent à utiliser une variété de services (Schofield et coll., 2016).

Note de recherche

Mitchell, L. A., Hirdes, J., Poss, J. W., Slegers-Boyd, C., Caldarelli, H. et L. Martin. (2015). Informal caregivers of clients with neurological conditions: Profiles, patterns and risk factors for distress from a home care prevalence study. BMC Health Services Research, 15, p. 350. doi:10.1186/s12913-015-1010-1

But

L’objectif de ce projet était de dresser un profil des aidants naturels de bénéficiaires de soins à domicile atteints de troubles neurologiques. L’étude a également examiné la prévalence de la détresse chez les aidants naturels et l’association entre la détresse et les troubles neurologiques et d’autres caractéristiques des bénéficiaires et des aidants.

Discussion

La population étudiée comprenait les bénéficiaires de soins à domicile de Winnipeg, du Manitoba et de la province de l’Ontario. Les troubles neurologiques inclus dans l’étude étaient la maladie d’Alzheimer et les démences apparentées, la sclérose en plaques, la sclérose latérale amyotrophique, la maladie de Parkinson, la maladie de Huntington, l’épilepsie, la dystrophie musculaire, la paralysie cérébrale, les traumatismes crâniens, les lésions médullaires et les accidents vasculaires cérébraux (AVC). Les caractéristiques des bénéficiaires de soins à domicile et des aidants ont été recueillies et analysées pour chaque trouble neurologique. Les facteurs de risque associés à la détresse des aidants ont été relevés.

Résultats

De nombreux bénéficiaires de soins à domicile présentaient un ou plusieurs troubles neurologiques (38,8-41,9 %). La détresse était deux fois plus fréquente chez les aidants de bénéficiaires atteints de troubles neurologiques (28,0 %). « Les associations les plus importantes avec la détresse de l’aidant sont le nombre d’heures de soins informels fournis au cours d’une semaine et l’algorithme MAPLe, une méthode pour établir le niveau de priorité des soins d’un bénéficiaire » (p. 350). La maladie de Huntington est le trouble neurologique le plus fortement associé à la détresse de l’aidant. Cependant, les caractéristiques cliniques du bénéficiaire et le nombre d’heures de soins informels étaient plus fortement associés à la détresse de l’aidant. La fourniture de services officiels de soins à domicile par la communauté a réduit le stress des aidants.

Application dans la pratique

De nombreux aidants naturels qui s’occupent de ces bénéficiaires atteints de troubles neurologiques éprouvent de la détresse. Des stratégies de soutien à plusieurs composantes sont nécessaires pour appuyer les aidants naturels de bénéficiaires aux besoins complexes.

Un rapport de la Commission sur l’avenir des soins de santé au Canada (Romanow, 2002) préconise un renforcement du système de santé canadien par l’inclusion des soins postactifs, des soins palliatifs et des services de soins de santé mentale à domicile dans le cadre d’une révision de la Loi canadienne sur la santé, ces services étant couverts par le régime d’assurance-maladie. De son côté, Shamian (2007) a déclaré :

Si les décideurs politiques veulent vraiment garantir la pérennité et la qualité de notre système de santé, ils doivent se pencher sur le rôle que jouent les soins à domicile et de proximité. Autrement, le système de santé sera fragmenté et affaibli (p. 296).

Les services communautaires doivent jouer un rôle accru et fondamental dans la prestation des soins au Canada afin de répondre à la demande croissante des bénéficiaires dans la communauté ayant des besoins médicaux, psychologiques et sociaux complexes et chroniques. Avec la réduction des effectifs et la fermeture des établissements, l’acuité et la chronicité des soins prodigués ont pris de l’ampleur dans la communauté, tant du côté des soins à domicile que de celui des services de santé mentale communautaires. En outre, la volonté du bénéficiaire et de sa famille de rester à domicile et d’être soigné dans la communauté est devenue un facteur important dans l’évolution des soins centrés sur le bénéficiaire et la famille.

Cette situation pose toutefois des problèmes aux bénéficiaires, à leurs familles, aux prestataires de soins et au système de santé. Comment répondre de manière optimale aux besoins complexes de ces bénéficiaires, tout en gardant à l’esprit la qualité, la sécurité et l’efficacité des soins? Comment le personnel infirmier peut-il maintenir une approche centrée sur le bénéficiaire et sa famille? Comment ces prestataires de soins peuvent-ils optimiser le rétablissement, le bien-être dans la chronicité et la prévention dans la prestation de soins de proximité?

Complexité, soins Communautaires et pratique Collaborative : Les « 3 C »

La prévalence croissante des maladies chroniques dans les sociétés occidentales et le besoin de soins de qualité non actifs qui en découle pour les bénéficiaires mettent en évidence la nécessité d’une pratique collaborative (Xyrichis et Lowton, 2008). Xyrichis et Lowton (2008) suggèrent que le travail d’équipe multidisciplinaire conduira à une approche intégrée de la promotion et du maintien de la santé de la population, tout en améliorant l’efficacité et les résultats des soins prodigués.

De plus, les soins de proximité englobent les soins médicaux, psychologiques et sociaux ainsi que les stratégies de promotion de la santé et de prévention des maladies. Pour qu’un service aussi complet puisse être fourni, il faut intégrer un éventail de professionnels et de compétences dans une approche collaborative (Xyrichis et Lowton, 2008). Neill et coll. (2007) affirment qu’un modèle de soins interprofessionnels collaboratifs soutient la prestation complète de soins de qualité grâce à l’intégration de plusieurs professions.

Activité d’apprentissage essentielle 6.1.1

Lisez l’« Énoncé de position sur la collaboration interprofessionnelle » de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada et relevez les quatre principes qui facilitent la collaboration.

La diversité au sein de l’équipe multidisciplinaire favorise la pertinence culturelle et apporte de la créativité à la prise en charge globale des patients. Néanmoins, Naylor (2012) a constaté que la communication au sein des équipes multidisciplinaires était souvent inadéquate et que l’engagement avec le patient et les membres de sa famille était insuffisant. Cependant, Naylor fait remarquer que pour interrompre les schémas d’utilisation élevée des soins de santé par les malades chroniques et remédier aux effets négatifs de cette utilisation sur la qualité et les coûts, des solutions innovantes visant à améliorer la collaboration professionnelle et l’engagement du patient et de sa famille sont apparues dans de nombreux milieux de soins de santé. Les soins infirmiers à distance qui aident les prestataires de soins à surmonter les difficultés liées à la distance géographique et aux problèmes de transport en sont un exemple (Souza-Junior, Mendes, Mazzo et Godoy, 2016). La reconnaissance du point de vue du patient, ainsi que l’engagement et la participation du patient et de sa famille en ce qui a trait à la planification et à la mise en œuvre des soins, ont donné lieu à des soins de qualité dans de nombreux milieux de soins en Saskatchewan.

Activité d’apprentissage essentielle 6.1.2

Regardez cette vidéo « How does interprofessional collaboration impact care: The patient’s perspective » (7:45) de la Dre Maria Wamsley sur l’approche axée sur le patient et sa famille, puis répondez aux questions suivantes :

  1. Qu’entend-on par soins axés sur le patient?
  2. Qu’est-ce que les soins axés sur la maladie?
  3. Quels sont les professionnels qui font partie d’une équipe de soins axés sur le patient?
  4. Pourquoi est-il important d’avoir plusieurs types de professionnels dans une équipe axée sur le patient?

Expérience sur le terrain

La revue Infirmière canadienne de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada met souvent un infirmier ou une infirmière de l’avant dans sa section Profil. Les citations suivantes sont extraites de ces profils personnels, où l’infirmière ou l’infirmier est interrogé à la fin de l’entretien. Leurs réponses reflètent l’esprit de ce chapitre, puisque ces leaders réfléchissent à leurs propres expériences en soins infirmiers dans le système de santé canadien, notamment aux difficultés perçues et aux changements nécessaires.

a) Qu’est-ce que vous aimez le moins dans le métier d’infirmière/infirmier?

« Le manque de véritable travail d’équipe dans les équipes interprofessionnelles. » – Marion Rattray (Eggertson, 2016, p. 28)

b) Quel est votre plus grand regret?

« Avoir essayé de dire à un résident du Massachusetts General qu’il se trompait et que j’avais une meilleure idée. J’aurais dû me contenter de lui offrir des biscuits. » – Gina Browne (Geller, 2015a, p. 33)

c) S’il était en votre pouvoir de changer un aspect du système de soins de santé, quel serait-il?

« J’augmenterais certains services, comme les centres de jeunesse, les organismes de distribution de vêtements usagés et les banques alimentaires, qui contribuent à la santé et au bien-être des communautés. » – Julie Francis (Geller, 2013, p. 31)

d) S’il était en votre pouvoir de changer un aspect du système de soins de santé, ce serait lequel?

« Je supprimerais toutes les frontières. » – John Pringle (Cavanaugh, 2013, p. 33)

e) Qu’est-ce que vous appréciez le plus dans votre travail actuel?

« Avoir l’autonomie nécessaire pour améliorer vraiment la vie des gens. » – Helen Boyd(Jaimet, 2013a, p. 31)

f) Si vous aviez le pouvoir de changer un aspect du système de santé, quel serait-il?

« J’améliorerais les services pour les personnes aux prises avec des problèmes de toxicomanie et de santé mentale. » – Helen Boyd (Jaimet, 2013a, p. 31)

« Je réduirais l’aspect “système”. On devrait plutôt se soucier de l’intérêt du patient. » – Hazel Booth (Jaimet, 2013b, p. 31)

« Je diminuerais la fragmentation des services de soins de santé. » – Angélique Benois (Geller, 2015b, p. 27)

« J’aimerais voir utiliser davantage des systèmes d’information intégrés sur les soins de santé pour améliorer la coordination et éviter les redondances. » – Manal Kleib (Geller, 2014, p. 33)

Ces réflexions pertinentes capturent le point de vue de nombreux responsables exemplaires du personnel infirmier sur les soins de première ligne et le volet administratif partout au Canada. Elles soulignent l’importance du rôle central du patient et de sa famille, de la continuité des soins d’un service à l’autre, de la collaboration et du travail d’équipe, des soins de proximité et de l’intégration des systèmes pour optimiser les soins, la sécurité et l’efficacité des soins.

6.2 Leadership

Que signifie être un leader? Un leader est-il autoritaire, franc ou sûr de lui? Le parcours de leadership de bien des infirmiers et infirmières qui débutent est souvent parsemé d’erreurs et d’apprentissages. Le potentiel de leadership du personnel infirmier est reconnu par les autres prestataires de soins lorsqu’une personne fait preuve d’une aptitude inhérente à défendre les intérêts du patient tout en s’efforçant de répondre à ses besoins. Lorsque le leadership est associé à la collaboration avec les patients et les équipes plutôt qu’à la volonté de diriger, le parcours est plus agréable pour tout le monde. Une gestionnaire relate son parcours dans la rubrique « Expérience sur le terrain ».

Expérience sur le terrain

Lorsqu’une personne accède à un poste administratif, elle n’acquiert pas automatiquement des qualités de leader. Par ailleurs, le leadership se développe. Il ne s’hérite pas. Les étudiants associent souvent le leadership aux postes de direction. Mon entrée en fonction dans l’administration des soins infirmiers, et ce que je pensais être ma première expérience de leadership, est comparable à l’expérience de bien d’autres infirmières gestionnaires : le service avait besoin d’un gestionnaire et j’ai été recrutée. Il n’y avait que peu ou pas d’orientation et encore moins de formation en gestion et leadership. À l’époque, je pensais que la gestion et le leadership étaient une seule et même chose.

Selon les ères d’évolution du leadership décrites par Daft (2011), j’ai accédé au leadership officiel au cours de l’ère 3, au début des années 1990, à une période d’instabilité et d’agitation, quelque peu comparable à notre situation en 2017. En effet, en Saskatchewan, cette période a été marquée par des licenciements, des fermetures d’hôpitaux et la première série de fusions de conseils de santé. Des gestionnaires d’expérience se sont tournés vers des approches fondées sur le travail d’équipe pour répondre aux besoins du personnel et des organisations. Le leadership était souvent partagé entre le chef et les membres de l’équipe, la personne la mieux informée ou la plus expérimentée dans une situation donnée prenant la direction des opérations. Cette collaboration horizontale a permis d’accroître la motivation et l’engagement des employés à cette époque agitée (Daft, 2011).

En tant que nouvelle gestionnaire inexpérimentée, travaillant avec une superviseure autocratique, j’ai adopté une approche directive et axée sur les tâches pour gérer tous les employés et toutes les situations. Mes efforts pour faciliter le changement, pour gagner la confiance de mes subordonnés et de mes pairs, et pour diriger la prestation de soins optimaux aux patients ont essentiellement échoué. J’avais beaucoup à apprendre. Je devais comprendre que pour être efficace dans mon travail administratif, je devais cultiver le leadership. Daft (2011) affirme que le leadership est un acte intentionnel. La plupart des gens ne naissent pas avec des compétences et des qualités naturelles de leadership. Il faut les apprendre et les développer.

Ce qui a évolué au fil des ans, c’est une philosophie personnelle du leadership qui incarne les rôles administratifs que j’ai occupés. Daft soutient que la direction et le leadership sont tous deux essentiels dans les organisations et qu’il faut les intégrer de manière efficace pour assurer un haut niveau de performance (2011, p. 15). J’en suis venu à comprendre que le leadership est une influence relationnelle positive (Daft, 2011) et est essentiel pour avoir un système de santé optimal avec des soins de la plus haute qualité. « En investissant de l’énergie dans les relations avec le personnel infirmier, les leaders relationnels influencent positivement la santé et le bien-être de leur personnel et, en fin de compte, les résultats pour les patients » (Cummings et coll., 2009, p. 19).

Le style de leadership le plus significatif pour moi implique la formation de partenariats dans le cadre d’un leadership participatif qui, si tout va bien, conduira à l’autonomisation des gens avec qui je travaille, qu’il s’agisse de personnes ou de groupes, de membres du personnel ou de patients. Est-ce que cette approche commence à ressembler à des soins collaboratifs?

Clark et coll. (2008) suggèrent que la capacité du leader participatif à optimiser l’engagement, l’implication et le dévouement des employés devrait être attrayante pour tout gestionnaire qui souhaite soutenir l’engagement à l’égard de la qualité du service, ce à quoi nous aspirons tous dans le domaine des soins de santé. Je pense que l’accès au leadership est la dernière étape à franchir et implique un véritable partage de la vision et des valeurs entre les chefs et les employés afin d’optimiser la qualité des soins et des résultats pour les patients. Encore une fois, les soins collaboratifs prennent tout leur sens.

La philosophie que j’ai adoptée repose sur la compréhension des besoins et des attributs du ou des subordonnés et de la situation à prendre en main. Ce portrait est nécessaire pour déterminer quelle approche serait la plus utile. « Pour les chefs, les contingences les plus importantes sont la situation et les personnes qui relèvent d’eux » (Daft, 2011, p. 65). L’expérience m’a appris qu’il est bon de connaître les personnes ou les groupes pour savoir comment aborder le mieux possible une situation ou un environnement donné. Pour moi, cette approche est très proche de la collaboration interprofessionnelle en matière de leadership et de soins.

L’efficacité à un poste administratif demande d’être un leader efficace, ce qui conduit à des relations et des approches interprofessionnelles collaboratives dans la prestation de soins. Toutefois, un leadership efficace ne doit pas être tenu pour acquis. Ma philosophie personnelle du leadership a évolué au fil du temps; la littérature en confirme la valeur et, même à l’approche de la retraite, je continue d’apprendre et de progresser. N’oubliez jamais que le succès et l’échec sont de grands professeurs : soyez ouverts à en tirer des leçons.

– Colleen Toye, inf. aut., B. Sc. inf., M. Sc. inf.

Leadership interprofessionnel

Selon Santé Canada (2010), voici à quoi correspond la collaboration interprofessionnelle dans le contexte de la prestation des soins de santé :

Travailler avec un ou plusieurs membres de l’équipe de soins qui apportent chacun leur contribution unique à l’atteinte d’un objectif commun, en améliorant les bénéfices pour les patients. Chacun apporte sa contribution dans les limites de son champ de pratique. Il s’agit d’un processus de communication et de prise de décision qui permet aux connaissances et aux compétences distinctes et partagées des différents prestataires de soins d’influencer de manière synergique les soins fournis en modifiant les attitudes et les comportements, tout en mettant l’accent sur les valeurs et objectifs axés sur le patient.

Ce qui est important pour le leadership interprofessionnel, c’est le cadre dans lequel cette collaboration s’opère. Contrairement à certains modèles traditionnels de leadership (modèles hiérarchiques), le leadership interprofessionnel se réalise et se pratique dans le cadre d’une relation de collaboration horizontale, relationnelle et situationnelle. Ce modèle de leadership est favorisé par les compétences professionnelles et une dynamique d’équipe saine (Anonson et coll., 2009).

Le leadership interprofessionnel s’inscrit dans un style de leadership participatif. Le leadership interprofessionnel est quant à lui soutenu par la compréhension et le développement de l’intelligence émotionnelle et de l’autoréflexion, mais aussi par la compréhension des concepts de leadership partagé et d’analyse positive. Ces trois concepts sont décrits en détail dans les sections suivantes. Le gouvernement du Canada (2015) a décrit l’avenir des soins de santé auquel il aspire comme « des équipes interprofessionnelles de fournisseurs [qui] collaborent afin de “fournir un continuum de services coordonnés” aux patients individuels, soutenus par les technologies de l’information qui relient les fournisseurs et les établissements » (p. 68).

Intelligence émotionnelle et pratique réflexive

L’intelligence émotionnelle (IE) et la pratique réflexive sont essentielles à la compréhension de soi dans le cadre d’un leadership interprofessionnel efficace et toutes deux font partie intégrante du travail avec les patients et les équipes. Bien que l’IE ait été abordée au chapitre 1, ce chapitre mettra l’accent sur sa valeur dans le travail avec les patients et les équipes.

Les nouveaux gestionnaires en soins infirmiers reçoivent rarement une orientation officielle en administration et leadership, alors qu’on attend de ces personnes qu’elles dirigent des employés, des équipes et des services souvent vulnérables aux émotions et au grand stress. Sur le plan de l’influence, les chefs qui font preuve d’une IE élevée ont un effet sur la manière dont les gens suivent les instructions, interagissent les uns avec les autres et font face aux situations stressantes. L’IE conduit à la confiance dans le leadership et à l’établissement de relations, favorisant ainsi le travail d’équipe et la résolution des conflits (Eason, 2009; Mackay, Pearson, Hogg, Fawcett et Mercer, 2010; Samad, 2009). Les gestionnaires qui ont une IE élevée exercent une influence en écoutant les employés, en se concentrant sur leurs forces et en consacrant plus de temps aux réalisations, ce qui a pour effet de dynamiser le personnel et d’améliorer l’humeur, en particulier dans les périodes difficiles de changement et d’incertitude (Bisaria, 2011).

Daft (2011) soutient qu’avoir une grande IE, soit d’être sensible à ses propres émotions et à celles des autres, aide les chefs à reconnaître l’effet qu’ils ont sur leurs subordonnés et à optimiser leur capacité à ajuster leur approche afin d’obtenir des résultats positifs. C’est ainsi que les chefs développent une expertise pour lire une situation et adapter leur style en conséquence. Dans le système de santé, l’environnement peut changer à tout instant. Les chefs qui savent lire la situation et réagir à l’environnement du moment aident leurs subordonnés à donner le meilleur d’eux-mêmes.

L’IE se développe souvent au fil de l’expérience. Cependant, les compétences en IE ne peuvent être tenues pour acquises et chacun d’entre nous doit tâcher de continuer à les mettre en pratique. L’IE est une compétence essentielle à apprendre et à exploiter, que l’on dirige, collabore ou suive des directives. Quel que soit le rôle que vous assumez, dans une situation donnée, cette compétence favorisera le bon déroulement des choses pour le patient, l’équipe et vous-même.

Expérience sur le terrain

Toutes les relations collégiales ne sont pas faciles, et certaines sont plus difficiles que d’autres. Il y a quelques années, alors que je commençais à travailler avec une nouvelle infirmière coordinatrice et subordonnée directe, il est devenu évident que cette relation serait particulièrement difficile. Nous avions des valeurs et des points de vue divergents, nos approches en gestion et leadership étaient aux antipodes et, surtout, nos stratégies de communication avec l’équipe et les autres professionnels étaient incompatibles. À l’époque, je pensais que mes stratégies et mes approches étaient supérieures et, au lieu d’écouter, de me concentrer et de tirer parti des forces et des réalisations de cette personne, je me suis concentrée sur ses lacunes et ses faiblesses. Nos différences ont conduit à une sorte de combat quotidien. Je pensais que le conflit entre nous n’était pas évident pour le reste de l’équipe, mais je ne pouvais pas être plus dans l’erreur. Il a fallu un employé plutôt courageux pour m’informer que nos différences avaient un effet négatif sur l’équipe et que le moral serait bientôt au plus bas.

En rétrospective, aurait-il été préférable que cet employé courageux vienne me voir plus tôt? Je ne peux que supposer que son intervention aurait pu transformer une situation négative en une situation positive. J’aurais peut-être aussi revu mon approche pour me montrer beaucoup plus avenante envers la nouvelle coordinatrice. Cette autre approche aurait pu éviter de plomber le moral de l’équipe. Cependant, rien de tout ceci n’a eu lieu, et la coordinatrice a quitté l’unité au cours de l’année. Une autre surprise pour moi, et l’une des leçons les plus importantes que j’ai retenues en tant que chef, a été que l’impact négatif sur l’équipe a pris plusieurs mois à se résorber.

– Colleen Toye, inf. aut., B. Sc. inf., M. Sc. inf.

La pratique réflexive présente de nombreux parallèles avec l’intelligence émotionnelle. La pratique réflexive est la capacité d’examiner les actions et les expériences dans le but de développer la pratique et d’améliorer les connaissances cliniques (Caldwell et Grobbel, 2013). Selon l’Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario (2015), la pratique réflexive profite non seulement au personnel infirmier, mais aussi aux patients. Pour le personnel infirmier, la pratique réflexive optimise la responsabilisation, améliore la pensée critique, permet une meilleure connaissance de soi et favorise le développement personnel et professionnel. Pour les patients, la pratique réflexive améliore la qualité des soins et les résultats cliniques (Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario, 2015).

La pratique réflexive enseigne l’importance de l’écoute active, ce qui n’est pas facile pour bien des gens. En réfléchissant aux réunions auxquelles vous avez participé, vous commencerez peut-être à comprendre que, même si vous vous êtes empressé de donner votre point de vue et vos suggestions, vous n’avez pas été aussi attentif aux points de vue et aux idées des autres, qui auraient pu présenter des approches diverses, précieuses et créatives pour résoudre des problèmes. La pratique consciencieuse de l’écoute active ouvre la voie à une planification globale, qu’il s’agisse des soins à prodiguer ou de la programmation.

Lors d’un entretien paru dans la revue Infirmière canadienne, David Byres, infirmier en chef autorisé ayant de l’expérience en soins directs et à des postes de direction de haut niveau, s’est fait poser la question suivante : « Quel est le meilleur conseil que vous ayez reçu pour votre carrière? », ce à quoi il a répondu : « Écoute pour apprendre et apprends à écouter » (Huron, 2017, p. 31).

La pratique réflexive et l’écoute active aident à établir des relations plus étroites avec le personnel, les autres disciplines, les patients et les familles. La capacité d’écoute est souvent sous-estimée, alors qu’il s’agit de l’une des composantes les plus importantes de la communication dans un contexte de leadership et collaboration interprofessionnels. En développant l’intelligence émotionnelle et la pratique réflexive, on acquiert une profonde conscience de soi et des autres. Ces éléments clés du leadership interprofessionnel soutiennent les relations avec les autres professionnels et les patients.

Leadership partagé

Dans le cadre d’une pratique fondée sur le travail d’équipe et la collaboration, le leadership interprofessionnel est un leadership partagé. Tous les prestataires de soins doivent reconnaître la nécessité d’un leadership situationnel, adapté aux besoins des patients et des familles, et des compétences professionnelles pour répondre à ces besoins (Anonson et coll., 2009).

Le partage du leadership peut se compliquer lorsque le chef de l’équipe interprofessionnelle doit changer en raison d’une modification des besoins et des soins du patient (Sanford et Moore, 2015). Cette situation se produit souvent dans les cas complexes, et ce, dans tous les milieux, mais surtout dans le milieu communautaire. Par exemple, les besoins médicaux d’un patient peuvent être stables et simples, mais ses besoins émotionnels ou sociaux demeurent bien présents. Idéalement, dans cette situation, le leadership de l’équipe interprofessionnelle passe de la médecine aux services de santé mentale ou de travail social (Sanford et Moore, 2015).

Anonson et coll. (2009) ont étudié des participants qui étaient tous d’avis qu’une pratique interprofessionnelle efficace fondée sur le travail d’équipe était le cadre le plus bénéfique pour obtenir de bons résultats cliniques, en particulier en cas de situation et besoins complexes. De plus, ces auteurs ont constaté que le leadership était considéré comme une responsabilité partagée par toute l’équipe. Compte tenu de la nature de cette approche collaborative basée sur le travail d’équipe, idéale pour le nombre croissant de patients aux besoins complexes, tous les prestataires doivent posséder des connaissances, des compétences et des aptitudes en leadership, ainsi qu’une connaissance de la pratique du leadership partagé.

En fin de compte, l’objectif des équipes de soins de santé axées sur la collaboration est de s’engager à obtenir des résultats pour le patient, sans prioriser sa propre discipline professionnelle (Anonson et coll., 2009). C’est là que l’écoute active, la confiance, l’établissement de relations, l’intelligence émotionnelle et la pratique réflexive deviennent essentiels dans la pratique du leader pour comprendre réellement les besoins distincts des patients et ce que chaque discipline a à offrir à chacun d’entre eux.

Analyse positive

Le leader participatif encourage l’implication du groupe dans la prise de décision. Cette participation favorise la compréhension des problèmes par ceux qui doivent prendre les décisions, car les membres de l’équipe adhèrent davantage aux mesures adoptées lorsqu’ils ont participé à la prise de décision (Darvish et Faezeh, 2011; Daft, 2011). Le leadership participatif convient à la stratégie de l’analyse positive, car il engage les personnes, les équipes et l’organisation (Daft, 2011). Un changement significatif a plus de chances de se produire lorsque les personnes les plus concernées ont l’occasion de décider elles-mêmes des changements à mettre en place (Pan et Howard, 2010).

L’analyse positive renforce les actions positives en se concentrant sur les leçons à tirer des réussites et sur ce qui fonctionne bien afin de concrétiser la vision d’avenir souhaitée (Browne, 2008; Daft, 2011). Faure (2006) la définit comme une méthode de changement positif où l’on met l’accent sur ce qui fonctionne plutôt que sur ce qui ne fonctionne pas et suggère que l’effort de changement doit commencer en se demandant : « Qu’est-ce qui fonctionne le mieux et que devrions-nous faire plus souvent? » Selon Browne (2008),

L’analyse positive repose sur l’idée simple que les êtres humains vont dans la direction de leurs demandes. Lorsque des groupes s’interrogent sur des problèmes et des conflits humains, ils amplifient souvent par inadvertance ces mêmes problèmes qu’ils espéraient résoudre. À l’inverse, lorsque des groupes étudient des valeurs nobles et de grandes réalisations humaines, comme des expériences euphorisantes, des pratiques exemplaires et des réalisations dignes d’intérêt, il n’en ressort que du positif (p. 1).

L’analyse positive optimise l’amélioration continue et a de nombreuses applications, notamment le renforcement d’équipe, le travail d’équipe entre différents organismes, l’engagement des utilisateurs d’un service, les projets organisationnels et le changement positif de culture (McAllister et Luckcock, 2009). Elle permet à chacun de s’exprimer par un processus en quatre phases :

  1. La découverte ou l’appréciation, où les personnes relèvent le meilleur de ce qui existe.
  2. Le rêve ou la vision, où le groupe imagine ce qui pourrait être et crée une vision commune du meilleur avenir possible en dehors des limites traditionnelles de ce qui a été fait par le passé.
  3. La conception, où des plans sont élaborés sur ce que l’organisation doit faire pour atteindre ses objectifs. Cette phase ouvre la voie à des pratiques nouvelles et innovantes.
  4. Le destin ou le maintien, où le groupe traduit les plans en mesures concrètes et s’engage à mettre en œuvre et à évaluer la nouvelle vision ou les changements prônés (Daft, 2011; McAllister et Luckcock, 2009; Pan et Howard, 2010; Richer, Ritchie et Marchionni, 2010). Le groupe aime l’aspect positif de l’analyse et souhaite collaborer en recourant à une telle stratégie. Une fois le processus entamé, il se déroule sur plusieurs séances.

Application de l’analyse positive

La section suivante fournit un exemple qui illustre comment bien mettre en œuvre les quatre phases de l’analyse positive.

Découverte. Un groupe multidisciplinaire comportant un représentant des patients et un animateur a été constitué. Le groupe a commencé à relever les points forts en pensant notamment aux forces et meilleures pratiques de l’organisation et aux expériences positives des patients. Les points de discussions et questions ci-dessous, adaptés de Lewis et coll. (2006) et Jones (2010) ont été présentés au groupe.

Quand vous impliquez-vous le plus au travail et à quels aspects de votre personne et de l’organisation accordez-vous le plus de valeur? Décrivez un séjour hospitalier positif du point de vue du patient. Décrivez une expérience positive concernant un plan de congé et son exécution (du point de vue du personnel et du point de vue du patient). Faites part d’un processus dont vous avez entendu parler ou que vous avez découvert dans vos lectures qui, selon vous, pourrait améliorer la planification du congé.

Chaque idée ou question a été présentée sur une grande affiche et les participants étaient invités à exprimer leurs réponses sur des papillons adhésifs, qui étaient ensuite apposés sur les affiches. Les thèmes suivants s’en sont dégagés :

  1. L’engagement du personnel est optimal lorsque l’équipe et tous les prestataires de soins impliqués dans les soins d’un patient communiquent et travaillent bien ensemble, lorsque les délais de diagnostic et de traitement sont respectés et lorsqu’il y a du temps pour discuter des préoccupations avec le patient et sa famille.
  2. Le personnel accorde une grande importance à la capacité de fournir des soins de qualité. Le personnel valorise l’autonomie, la bonne communication et les services où règnent la confiance et le respect mutuel. Il n’y a rien de tel que de recevoir un appel d’un autre service qui nous remercie pour les excellentes informations sur un transfert.
  3. Il en est ressorti qu’il est important pour un patient d’être informé, de se sentir écouté par les prestataires de soins, dont son médecin, et d’être très impliqué dans les décisions relatives à la planification des soins, y compris les plans pour les soins après le congé ou les soins de longue durée.
  4. Le personnel et les patients ont décrit une expérience de congé efficace comme une expérience à laquelle participent le patient et tous les prestataires de soins concernés, dont les instructions sont écrites et comprises par le patient et qui est entamée peu après l’admission à l’hôpital. Le groupe a décrit deux situations semblables.
  5. Deux personnes ont mentionné avoir pris connaissance d’un nouveau processus qui consiste à déterminer si le patient est prêt à obtenir son congé dans les trois jours.

Au cours de la phase de découverte, le groupe a appris à se connaître et a forgé des relations positives.

Rêve. Le groupe est passé à l’étape suivante et a commencé à réfléchir aux « possibilités » si les thèmes dégagés à l’étape de découverte devenaient la norme (Daft, 2011). Le groupe a rapidement conclu et convenu que la situation souhaitée à l’avenir consiste en des soins sûrs et de haute qualité avec des diagnostics et des traitements rapides tout au long de l’hospitalisation et au-delà du congé ou du transfert vers un autre établissement. La vision souhaitée comporte une équipe bien informée, un patient bien informé qui comprend l’évolution de son état et la durée prévue de son hospitalisation ainsi qu’un plan de congé élaboré avec le patient. Cette vision repose sur la dignité et le respect de chacun. Les relations et la confiance au sein du groupe ont continué à se développer.

Conception. C’est à cette étape que la planification a commencé pour transformer la vision en réalité. Le groupe est parvenu à un consensus et a ainsi convenu que le personnel de tous les services de l’hôpital et des soins à domicile doit travailler en étroite collaboration et communiquer régulièrement, mais aussi que le patient doit être très impliqué dans ses activités de soins et dans la planification de son congé. Le groupe a aussi convenu que le médecin fait partie intégrante de l’équipe et qu’il doit assumer les mêmes responsabilités en matière de communication et de relations que le reste de l’équipe. Les idées pour améliorer les processus se sont concrétisées.

Destin. Les responsables du processus ont été nommés et le groupe s’est engagé à instaurer et évaluer les mesures suivantes :

  • Mettre en œuvre chaque jour des séances scientifiques multidisciplinaires dans l’unité médicale en s’attardant à l’évolution de l’état du patient et à la planification de son congé. Un responsable du congé sera désigné pour chaque patient et une communication étroite sera établie avec le patient et l’équipe de soins. Le plan de soins après le congé est mis à l’écrit et à la disposition du patient et de tous les membres de l’équipe des soins à l’hôpital et des soins à domicile.
  • Créer une brochure d’information à l’intention du patient pour lui présenter de l’information utile et des questions auxquelles réfléchir en vue de son congé.
  • La nécessité d’une évaluation de soins de longue durée sera établie par le patient et l’équipe multidisciplinaire une fois que le patient sera stable et que ses besoins en matière de soins seront évidents. Si les besoins du patient peuvent être satisfaits à domicile, l’évaluation sera réalisée à son domicile, où il restera en attendant d’être admis dans un établissement. Si le patient doit continuer de recevoir des soins 24 heures sur 24, le transfert vers un établissement périphérique fera l’objet d’une discussion avec le patient et sa famille bien avant le transfert.
  • L’unité médicale rétablira l’utilisation des lignes directrices relatives à la durée d’hospitalisation prévue. Le représentant des médecins du groupe apportera un soutien éducatif à tous les médecins chargés des admissions.
  • Le processus pour évaluer la possibilité de congé dans les trois jours sera étudié par des représentants des soins à l’hôpital et des soins à domicile.

Après la mise en œuvre des mesures, il faut réentreprendre la phase de découverte pour assurer la durabilité et la réflexion continue (Richer et coll., 2010).

L’hôpital en était au début de ses démarches et c’est ainsi qu’a commencé le changement positif dans la planification du congé en ce qui concerne le patient, la famille et le travail de l’équipe multidisciplinaire. La clé du succès a été de formuler les problèmes de manière positive, de nouer des relations, d’établir la confiance et de miser sur le potentiel humain pour collaborer à la création d’un avenir meilleur (Daft, 2011; Richer et coll., 2010).

6.3 Collaboration et travail d’équipe

Pratique collaborative

« De nombreux théoriciens et praticiens du leadership ont reconnu la valeur des équipes dans la prise de décision et dans l’accomplissement du travail de l’organisation » (Sanford et Moore, 2015). La collaboration désigne une action collective axée sur l’atteinte d’un objectif commun « dans un esprit d’harmonie et de confiance » (Franklin, Bernhardt, Lopez, Long-Middleton et Davis, 2015, p. 2). La question est de savoir ce qui rend ce processus efficace et ce qui potentialise l’influence synergique.

Activité d’apprentissage essentielle 6.3.1

  1. Cliquez ici pour lire un article sur dix leçons de collaboration (Gardner, 2005). Bien que Gardner (2005) soit une publication plus ancienne, l’auteur fournit une description approfondie de la pratique collaborative et, plus important encore, une exploration complète de dix leçons importantes à prendre en compte dans les relations et la pratique collaboratives. La discussion reflète les nombreuses composantes de la collaboration qui font partie intégrante du leadership et du travail d’équipe interprofessionnelle de la pratique infirmière.
  2. En 2012, l’Association des infirmières et infirmiers du Canada a commandé un document intitulé « Interprofessional Collaborative Teams ». Lisez le document, puis répondez aux questions suivantes :
    a) Citez cinq types d’équipes de collaboration interprofessionnelle.
    b) Quels sont les types d’équipes que vous avez connus dans votre pratique clinique?
    c) Formulez au moins une recommandation pour améliorer le travail d’équipe interprofessionnelle, selon votre expérience.
  3. Pour un bref tour d’horizon, regardez la vidéo sur la collaboration interdisciplinaire dans les équipes de soins (10:01) avec Alanna Branton, puis répondez à la question suivante : Quels sont les obstacles et les facteurs favorables à la collaboration interdisciplinaire dans les équipes de soins au Canada?

Dynamique du travail d’équipe

Il faut acquérir une compréhension et développer un sens du moment où il est important d’être le leader, le collaborateur et même, parfois, l’exécutant. De même, il est essentiel de bien comprendre ce qu’est un mentoré et quand il faut passer du statut de mentoré à celui de mentor. En fin de compte, on passe de l’un à l’autre de ces rôles dans le cadre de nos relations, y compris la relation avec le patient et les relations au sein des équipes de collaboration interprofessionnelle. Les vidéos présentées à l’activité suivante illustrent la dynamique relationnelle des équipes performantes.

Activité d’apprentissage essentielle 6.3.2

Pour en savoir plus sur le travail d’équipe, regardez les vidéos suivantes puis répondez aux questions :

  1. Conférence TED de Tom Wujec intitulée « Bâtissez une tour, bâtissez une équipe » (7:22).
    a) Quelle équipe a fait un bon travail du début à la fin?
    b) Quelle équipe s’en est le mieux tirée?
    c) Pourquoi les assistants administratifs sont-ils importants pour l’équipe des directeurs techniques?
    d) Les incitatifs financiers ont-ils favorisé la réussite?
  2. Vidéo de Praveen Verma sur le travail d’équipe intitulée « Motivational Video on Teamwork, Smart Work » (6:38).
    a) Quelle est la morale de l’histoire?

Résumé

Compte tenu de la complexité croissante des besoins des patients et du passage aux soins de proximité, le leadership et la collaboration interprofessionnelle sont primordiaux dans notre système de santé actuel. Un leadership interprofessionnel éclairé et une bonne pratique collaborative devraient être la pierre angulaire de toute pratique de leadership en soins infirmiers, que l’on travaille avec un groupe d’employés ou que l’on encadre un tel groupe, ou que l’on participe aux soins d’un patient dans un cas complexe en collaboration avec une équipe multidisciplinaire.

L’engagement des patients et des familles n’a jamais été aussi important dans notre système de santé. En tant que prestataires de soins et responsables du personnel infirmier, notre rôle ultime est de répondre aux besoins de nos patients en adoptant une philosophie axée sur le patient et sa famille afin de comprendre son état. Il nous incombe de faire en sorte que cet engagement se concrétise. Faites-en la promotion et entretenez-le. C’est le droit du patient. Soulignons que le patient peut être l’une de vos plus grandes ressources dans la détermination d’un plan de soins qui assurera de bons résultats cliniques.

Le leadership et la collaboration interprofessionnelle sont renforcés par les connaissances et les compétences de l’intelligence émotionnelle, de la pratique réflexive, du leadership partagé, de l’analyse positive et des dix leçons de collaboration décrites avec grande éloquence par Gardner (2005). Une dynamique d’équipe saine et positive est essentielle pour établir des relations de collaboration interprofessionnelle optimales. Il faut déterminer et comprendre les difficultés qui entourent ces dynamiques. L’équipe doit avoir des discussions transparentes sur ces difficultés dès le début des relations.

Cherchez toujours à comprendre les autres, mettez l’accent sur les forces, réfléchissez sans cesse et tirez des leçons des situations où tout ne va pas comme prévu. Votre monde infirmier s’ouvrira ainsi à des possibilités infinies pour le patient, pour votre équipe et pour vous plus personnellement.

Des ressources supplémentaires sur la collaboration interprofessionnelle sont disponibles sur le site Web de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada.

À la fin du chapitre, vous devriez être en mesure de faire ce qui suit :

  1. Décrire la complexité croissante des besoins en soins de santé dans la communauté et ses implications dans notre système de santé actuel.
  2. Illustrer la nécessité d’une collaboration interprofessionnelle dans les soins de proximité.
  3. Expliquer l’importance de l’engagement du patient et de sa famille dans les soins.
  4. Établir des parallèles entre les caractéristiques ou les styles de leadership et le leadership interprofessionnel dans le cadre d’une pratique collaborative.
  5. Décrire les compétences et les pratiques spécifiques qui favorisent le leadership et la collaboration interprofessionnels.
  6. Reconnaître les principaux ingrédients d’une collaboration réussie.
  7. Décrire la dynamique relationnelle des équipes positives.

Exercices

  1. Discuter d’un cas clinique où une approche de collaboration interprofessionnelle pourrait être utile.
  2. Dans le scénario ci-dessus, discutez de la manière dont vous prépareriez le terrain pour une collaboration interprofessionnelle, y compris l’engagement du patient et de sa famille.
  3. Déterminez les éléments de l’analyse positive et la manière dont cette méthode soutient les responsables du personnel infirmier dans la pratique communautaire.
  4. Discutez de ce que la pratique réflexive signifie pour vous et de la manière dont elle vous a aidé ou vous aidera dans votre pratique infirmière.
  5. Créez un scénario où une partie ou l’ensemble des dix leçons de collaboration (Gardner, 2005) pourraient être utiles dans une situation clinique complexe.
  6. Qu’avez-vous appris de la vidéo « Bâtissez une tour, bâtissez une équipe »? Comment la dynamique de l’équipe a-t-elle un effet sur l’équipe et sur sa réussite?

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7

Leadership en sécurité et gestion de la qualité

Joan Wagner

Les symptômes ou souffrances généralement considérés comme inévitables et concomitants à la maladie ne sont très souvent pas des symptômes de la maladie, mais plutôt quelque chose de tout à fait différent.

– Florence Nightingale (1860, p. 12)

Introduction

Ce chapitre porte sur la gestion de la qualité (GQ) et le maintien de la sécurité dans le cadre de la gestion des soins de santé. Vous découvrirez des événements importants liés à la gestion de la qualité qui se sont produits récemment au Royaume-Uni et aux États-Unis et qui ont attiré l’attention de la communauté internationale sur les questions de sécurité des patients. Enfin, la méthode Lean, une stratégie de gestion de la qualité, et le cycle planifier-faire-étudier-agir (PFEA) seront présentés afin de vous familiariser avec les termes et les techniques de gestion de la qualité souvent utilisés dans la province de la Saskatchewan.

La gestion de la qualité désigne « la philosophie d’une culture des soins de santé qui met l’accent sur la satisfaction des patients, l’innovation et l’implication des employés » (Folse, adapté par Wong, 2015, p. 392). L’assurance de la qualité fait référence à la surveillance et l’évaluation régulières des services afin de s’assurer qu’ils répondent aux normes de pratique établies. L’amélioration de la qualité fait référence au travail continu nécessaire pour assurer une santé optimale aux patients, soit par l’examen et la révision en continu des processus et procédures conformément aux pratiques exemplaires en mettant l’accent sur la satisfaction des patients, l’innovation et l’implication du personnel (Folse, adapté par Wong, 2015).

Figure 7.1 Une formation rigoureuse assure des soins et des résultats de la plus haute qualité
pour les patients 

[s. d.], « Infusion Protocol Display », photo gracieusement fournie par la Saskatchewan Health Authority (anciennement Regina Qu’Appelle Health Region), numéro de collection 2003.8-1304, sous licence Creative Commons Attribution 4.0 International.

L’amélioration de la qualité est une responsabilité fondamentale de tous les prestataires de soins. Florence Nightingale, l’une des premières expertes en amélioration de la qualité, a changé la prestation de soins dans le monde entier. Par sa vision des soins infirmiers hospitaliers, elle « a prédit ce qui, plus d’un siècle plus tard, serait désigné comme un hôpital-aimant » (Shiller, 2013, p. 1).

Objectifs d’apprentissage

  1. Décrire les principaux enjeux qui ont mené au développement des hôpitaux-aimants.
  2. Déterminer comment les hôpitaux-aimants ont changé les soins de santé aux États-Unis.
  3. Décrire les principaux enjeux qui ont conduit à la publication du rapport Francis au Royaume-Uni.
  4. Décrire les caractéristiques d’une « culture de sécurité ».
  5. Évaluer l’utilisation de la méthode Lean dans les soins de santé.
  6. Évaluer le cycle planifier-faire-étudier-agir (PFEA) comme base du travail d’amélioration de la qualité.
  7. Définir les aspects critiques de votre leadership pour créer un environnement de travail sûr et soutenir le travail d’amélioration de la qualité.

7.1 Hôpitaux-aimants

Émergence des hôpitaux-aimant

Les hôpitaux constituent une ressource vitale en matière de soins de santé pour la collectivité. Les membres de la collectivité passent généralement les premiers et derniers jours de leur vie dans ces bâtiments, et ils considèrent l’hôpital comme une ressource sanitaire importante qui les soutiendra en cas de blessure ou de maladie grave. Ainsi, lorsque les hôpitaux sont contraints de fermer des lits et de refuser l’admission de malades, on fait face à une crise communautaire. Une telle crise s’est d’ailleurs produite aux États-Unis dans les années 1980 et 1990, lorsqu’un grand nombre de lits ont été fermés en raison d’une pénurie de personnel infirmier. Cependant, les hôpitaux n’ont pas tous été frappés par la catastrophe. Certains hôpitaux avaient tout le personnel nécessaire et n’ont pas été touchés par cette pénurie. En 1982, une équipe de recherche de l’American Academy of Nursing a identifié 41 de ces hôpitaux sans problèmes d’embauche ou de rétention du personnel infirmier. Ces hôpitaux sont devenus des hôpitaux-aimants.

Une étude des hôpitaux-aimant (McClure, Poulin, Sovie et Wandelt, 1983) a révélé 14 attributs ou « forces d’attractivité » (Goode, Blegen, Park, Vaughn et Spetz, 2011) propres aux hôpitaux-aimants. Ces « forces » ou influences environnementales ont été associées à une meilleure satisfaction au travail et à une réduction de l’épuisement professionnel chez le personnel infirmier (McHugh et coll., 2013). Les hôpitaux-aimants affichent également de meilleurs résultats pour les patients, notamment un plus faible taux de chutes, un plus faible taux global de mortalité et un plus faible taux de mortalité pour les nourrissons de très faible poids à la naissance (McHugh et coll., 2013).

Le programme de reconnaissance de l’attractivité (Magnet Recognition Program), officialisé dans les années 1990, exigeait des hôpitaux souhaitant obtenir le statut aimant qu’ils démontrent une réforme organisationnelle de l’environnement de travail du personnel infirmier qui faciliterait l’obtention des résultats souhaités pour les patients. Les 14 forces d’attractivité décrites par McClureet coll. (1983) se sont traduites en 5 objectifs : 1) leadership transformationnel; 2) autonomisation structurelle; 3) pratique professionnelle exemplaire; 4) nouvelles connaissances et améliorations; et 5) résultats empiriques qui s’inscrivent dans chacun des 4 domaines précédents (McHugh et coll., 2013). À l’heure actuelle, 389 hôpitaux aux États-Unis ont réformé l’environnement de travail du personnel infirmier et détiennent le statut d’hôpital-aimant.

Activité d’apprentissage essentielle 7.1.1

Regardez cette vidéo de Mouayad Mohtar, qui donne un tour d’horizon du programme de reconnaissance de l’attractivité (5:55), pour en savoir plus sur les cinq exigences des hôpitaux-aimants, puis répondez aux questions suivantes :

  1. Quelles sont les cinq exigences du modèle d’attractivité?
  2. Quelles sont les principales caractéristiques de chacune des cinq exigences?

Hôpitaux-aimants et résultats pour les patients

Le modèle d’attractivité a été développé à l’origine pour améliorer le recrutement et la rétention du personnel infirmier. En étudiant les hôpitaux-aimant, les chercheurs se sont rapidement rendu compte que l’amélioration des résultats pour les patients était un résultat positif direct de la réforme organisationnelle de l’environnement de travail du personnel infirmier. Une méta-analyse de la littérature de 2006 à 2012 réalisée par Krueger, Funk, Greenet Kuznar (2013) indique que huit catégories de variables liées au personnel infirmier (environnement de travail hospitalier, statut d’attractivité, communication infirmière-médecin, exigences du travail, dotation en personnel, formation, années d’expérience et certification) ont un effet sur les résultats pour les patients. Seize études retenues dans la revue ont révélé qu’il existe un lien significatif entre ces variables et trois résultats pour les patients : événements indésirables (infections, escarres, séjour prolongé, taux de mortalité, échec de sauvetage, erreurs de médication, chutes, hémorragie postopératoire, infarctus aigu du myocarde, insuffisance cardiaque congestive, accident vasculaire cérébral et craniotomie); coût des soins aux patients; et résultats attendus pour les patients (autogestion de la santé et préparation au congé) (Krueger et coll., 2013). L’examen de la recherche sur les hôpitaux-aimants a révélé que la dotation en personnel était la plus stable des variables relatives au personnel infirmier pour prédire les résultats des patients (Krueger et coll., 2013). Les recherches sur les hôpitaux-aimants pour la période de 2006 à 2015 ont permis de démontrer l’association entre l’amélioration des variables relatives au personnel infirmier et les résultats positifs pour le personnel infirmier et les patients. De plus, une comparaison entre les hôpitaux-aimants et les autres hôpitaux a montré des améliorations bien plus importantes de l’environnement de travail et des résultats pour le personnel infirmier et les patients dans les hôpitaux-aimants (Kutney-Lee et coll., 2015).

Note de recherche

Ma, C. et Park, S. H. (2015). Hospital Magnet status, unit work environment and pressure ulcers. Journal of Nursing Scholarship, 47(6), 565-573.

But

Déterminer comment les facteurs organisationnels des soins infirmiers à différents niveaux structurels (c.-à-d., l’environnement de travail au niveau de l’unité et le statut d’attractivité de l’hôpital) sont associés aux escarres de décubitus acquises à l’hôpital (EDAH) dans les hôpitaux de soins de courte durée aux États-Unis (Ma et Park, 2015, p. 565).

Discussion

Une étude transversale observationnelle a utilisé les réponses de 33 485 membres du personnel infirmier pour évaluer les environnements de travail.

L’unité d’analyse était l’unité de soins infirmiers, et l’étude porte sur 1 381 unités dans 373 hôpitaux aux États-Unis. Il s’avère que les environnements de l’hôpital et de l’unité sont significativement associés aux EDAH, et l’environnement de travail de l’unité peut avoir une plus grande influence sur la réduction des EDAH (Ma et Park, 2015, p. 565).

Application dans la pratique

L’investissement dans l’environnement de travail du personnel infirmier, tant au niveau de l’hôpital que de l’unité, a le potentiel de réduire les EDAH, et en plus des initiatives au niveau de l’hôpital (ex., programme de reconnaissance de l’attractivité), les efforts ciblant les environnements de travail au sein de l’unité méritent une meilleure attention (Ma et Park, 2015, p. 565).

7.2 Rapport Francis

Une enquête publique sur les soins de piètre qualité au Mid Staffordshire NHS Foundation Trust, au Royaume-Uni, a révélé qu’il y avait eu 1 200 morts évitables pour la période de 2005 à 2009 (Francis, 2013). Le premier rapport (Francis, 2010) issu de l’enquête décrit une organisation axée sur les économies et les gains d’efficacité dans le système au lieu de se concentrer sur la prestation de soins sûrs et de qualité aux patients. Le deuxième rapport (Francis, 2013) préconisait de modifier la culture organisationnelle pour instaurer une culture où la sécurité et le bien-être des patients sont au cœur des préoccupations de la direction et du personnel (Muls et coll., 2015). L’onde de choc s’est propagée dans tout le Royaume-Uni à mesure que le public a pris connaissance des soins abusifs. Les principaux organismes de réglementation et toutes les fiducies du Royaume-Uni ont passé en revue leurs politiques, procédures et processus de prestation de soins. Des plans d’action ont été élaborés pour susciter le changement et faire en sorte que les organisations aient une culture qui répond aux besoins et préférences des patients, en mettant l’accent sur la sécurité des patients.

Activité d’apprentissage essentielle 7.2.1

Regardez cette vidéo où Catherine Foot s’entretient avec Robert Francis QC (9:47), président de l’enquête Francis, puis répondez aux questions suivantes :

  1. Décrivez une des histoires de patient que Francis a racontées. Pourquoi la commission ou le coroner n’ont-ils pas entendu parler de cette histoire?
  2. Pourquoi le personnel ne s’est-il pas manifesté pour donner des exemples de piètres soins aux patients?

Regardez cette courte vidéo de Diane Eltringham sur les réponses des infirmières au rapport Francis (3:04), puis répondez aux questions suivantes :

  1. Qu’est-il advenu de la prestation de soins après le rapport Francis?
  2. Comment la culture organisationnelle a-t-elle changé?
  3. Quel est le changement qui a eu la plus grande influence dans la prestation de soins?

7.3 Culture de sécurité des patients

Les systèmes de santé du monde entier ont pris conscience que la culture de sécurité des patients au sein de chaque établissement est essentielle pour assurer des soins de grande qualité et empreints de compassion (Institute of Medicine, 2000; OMS, 2008). L’amélioration de la sécurité des patients est aussi considérée comme une intervention rentable puisqu’elle réduit les coûts associés aux maladies iatrogènes. Les erreurs de médication constituent un exemple attesté où la réduction de coûts est possible en mettant l’accent sur la sécurité des patients. Aux États-Unis, les erreurs de médication ont coûté environ 19,5 G$ et étaient en cause dans 2 500 décès en 2008 (Shreve et coll., 2010, cité dans Saleh, Darawad et Al-Hussami, 2015). Ulrich et Kear (2015) résument les résultats pour les patients trouvés dans la littérature sur la sécurité en déclarant qu’il y a de plus en plus de données empiriques démontrant un lien direct entre la culture de sécurité des patients et les résultats pour les patients, les résultats financiers, la satisfaction des patients, le comportement des cliniciens et la sécurité des professionnels de la santé. Autrement dit, pour qu’un établissement de soins soit performant, il doit valoriser la culture positive de sécurité des patients.

Définition d’une culture de sécurité des patients

Une première analyse de la littérature indique que le thème de culture de sécurité des patients est apparu récemment dans le cadre des travaux sur l’amélioration de la qualité des soins de santé. Saleh, Darawad et Al-Hussami (2015) suggèrent que le concept de culture de la sécurité est apparu pour la première fois en réponse à la catastrophe nucléaire de Tchernobyl (1986), laquelle a directement été causée par des actions humaines, non pas d’une défaillance mécanique. La société européenne pour la qualité des soins de santé (ESQH) définit la culture de sécurité comme suit :

Un modèle intégré des comportements individuels et organisationnels qui, fondé sur des croyances et valeurs communes, vise à toujours limiter les risques de préjudice aux patients pouvant résulter des processus de prestation de soins (European Union Network for Patient Safety, 2010, p. 4).

Aperçu des cultures de sécurité des patients

Le rapport Francis de 2013 souligne la nécessité pour les organisations d’entretenir une culture à l’écoute des patients, ou centrée sur chaque patient(e). Le ministère de la Santé du Royaume-Uni a élaboré et publié les 6 C pour orienter sa vision et sa stratégie en matière de leadership chez le personnel infirmier, les sages-femmes et le personnel soignant. Les 6 C (soins [care], compassion, compétence, communication, courage et conviction [commitment]) n’avaient rien de nouveau; la nouveauté était de les utiliser comme principes directeurs dans les établissements (Mulset et coll., 2015).

Activité d’apprentissage essentielle 7.3.1

Regardez la vidéo sur les 6 C en soins infirmiers (3:32) pour en savoir plus, puis répondez aux questions suivantes :

  1. Énumérez et décrivez les 6 C en soins infirmiers qui encouragent l’innovation et le changement dans les milieux de soins au Royaume-Uni.
  2. Pensez-vous que ces 6 C sont présents dans les milieux de soins au Canada? Veuillez élaborer.

Les établissements de soins du monde entier s’efforcent de renforcer leur culture de sécurité. La culture n’est pas une chose qui se change facilement; elle s’adapte plutôt aux conditions existantes et tend à refléter son environnement. Plusieurs aspects différents d’une organisation peuvent jouer un rôle dans le développement et le maintien d’une culture de sécurité. Sammer et coll. ont décrit la culture de sécurité comme étant constituée de « sept sous-cultures, à savoir le leadership, le travail d’équipe, la pratique fondée sur des données probantes, la communication, l’apprentissage, l’équité (une culture qui reconnaît les erreurs comme des défaillances systémiques plutôt qu’individuelles) et les soins centrés sur chaque patient(e) » (dans Saleh et coll., 2015, p. 340).

Une récente étude sur la culture de la sécurité des patients dans les milieux de pratique en néphrologie aux États-Unis illustre la manière dont ces sous-cultures peuvent interagir ou non. Cette étude révèle que la sécurité des patients est vue différemment par le personnel infirmier comparativement aux gestionnaires et administrateurs. Les résultats de la recherche mettent en évidence la nécessité d’une discussion approfondie entre les prestataires de soins et les gestionnaires au sujet de la sécurité des patients ainsi que la nécessité de transparence globale et de communication ouverte dans l’ensemble de l’organisation (Ulrich et Kear, 2015).

Les caractéristiques des soins infirmiers, telles que l’épuisement professionnel et le sentiment de cohérence, ont aussi une association directe connue avec la culture de sécurité des patients. Une étude norvégienne a confirmé ce lien en indiquant qu’il existe « une association de la culture de sécurité positive avec l’absence d’épuisement professionnel [chez le personnel infirmier] et la grande capacité à faire face aux situations stressantes » (Vifladt, Simonsen, Lydersen et Farup, 2016, p. 33).

Activité d’apprentissage essentielle 7.3.2

Explorez les outils et ressources sur la page Leader du site Web de l’Institut canadien pour la sécurité des patients.

Examinez le cadre The measurement and monitoring of safety (mesure et surveillance de la sécurité) proposé par le système de santé publique du Royaume-Uni.

Répondez maintenant aux questions suivantes :

  1. Quelles sont les cinq dimensions nécessaires pour mesurer et surveiller la sécurité?
  2. Comment mesureriez-vous chaque dimension du cadre proposé dans les hôpitaux canadiens?

7.4 Méthode Lean

La méthode Lean est née de la réussite de Toyota dans les années 1960. Il s’agit d’une stratégie de gestion utilisée pour évaluer les processus organisationnels, en déterminant ceux qui ajoutent de la valeur à l’entreprise, en éliminant le gaspillage et en améliorant le flux, dans le but de créer une meilleure valeur en matière de temps et d’argent (Crema et Verbano, 2015; Johnson, Smith, et Mastro, 2012). Crema et Verbano (2015) soutiennent que cette stratégie met l’accent sur la normalisation des processus afin de faciliter la détection des événements inattendus qui peuvent être corrigés rapidement.

La méthode Lean est utilisée dans divers domaines des soins de santé : recrutement et embauche, informatique en soins infirmiers, fonctions des laboratoires, milieux de soins, radiologie, sécurité des patients, traumatologie et réduction des coûts. De plus, elle contribue à l’amélioration des processus en ce qui concerne les interventions cliniques, le respect des rendez-vous, le flux des patients, les orientations de patients, les temps d’attente et de sortie et les réhospitalisations. Johnson, Smith et Mastro (2012) soulignent le fait qu’elle est de plus en plus utilisée comme cadre de fonctionnement systémique.

Le gouvernement provincial de la Saskatchewan a instauré la méthode Lean comme approche d’amélioration de la qualité dans tous ses établissements de santé en 2010. Au cours des dernières années, la méthode Lean a dû affronter bien des défis. Cela dit, malgré ces défis, elle continue de fournir aux responsables des soins d’excellents outils et processus qui soutiennent l’amélioration continue de la qualité.

Activité d’apprentissage essentielle 7.4.1

Pour voir un exemple de la méthode Lean en action, regardez la vidéo YouTube du Lucile Packard Children’s Hospital de Stanford sur la méthode Lean en soins de santé (3:08), puis répondez aux questions suivantes :

  1. Quel est l’objectif de la méthode Lean?
  2. Comment améliore-t-elle le flux de patients?
  3. Qui ou qu’est-ce qui est au centre de la méthode Lean?

La méthode Lean s’attarde à l’optimisation des ressources plutôt qu’à l’excellence ou la qualité des soins. Des inquiétudes ont été exprimées quant à l’accent que met la méthode Lean sur « faire plus avec moins » et sur la nécessité d’apporter des changements significatifs. La communauté des soins s’est également montrée préoccupée par les priorités mal placées et la sécurité des patients dans un environnement de soins Lean.

La prestation de soins centrés sur chaque patient(e) découle de la base de connaissances spécialisées que les membres du personnel infirmier mettent en pratique dans leurs différents rôles, de la gestion aux soins directs. Si les méthodes Lean d’amélioration de l’efficacité et les stratégies de réduction des coûts sont importantes pour les hôpitaux et les gouvernements, certaines personnes, en recherche et chez les responsables des soins, estiment que les méthodes Lean ignorent le travail réel du personnel infirmier (Wagner, Brooks et Urban, 2018, p. 22).

Cependant, bien des chercheurs, notamment Simons et coll. (2015), estiment que la gestion selon la méthode Lean peut contribuer à la culture de sécurité des patients. La méthode Lean, par sa philosophie de gestion de la qualité, est centrée sur chaque patient.e, et ses outils sont utilisés pour motiver le personnel et augmenter l’efficacité de l’organisation tout en améliorant la qualité des soins et la sécurité des patients. D’autres chercheurs, comme Crema et Verbano (2015), suggèrent que la méthode Lean, une stratégie de gestion d’entreprise qui permet d’analyser, de concevoir et de gérer des processus, est un excellent outil pour renforcer la prévention des erreurs médicales. Enfin, Kaplan, Patterson, Chinget Blackmore (2014) soulignent que les outils Lean ne sont pas la seule réponse aux préoccupations organisationnelles et qu’il est préférable de les utiliser dans le cadre d’un système de gestion global avec un engagement en faveur du changement organisationnel et d’un leadership innovant.

Johnson, Smith et Mastro (2012) affirment que les membres du personnel infirmier sont les leaders idéaux pour les travaux novateurs de la méthode Lean et de l’amélioration de la qualité. Les membres du personnel infirmier combinent l’expérience de la gestion d’équipes interdisciplinaires, la connaissance des systèmes et de solides compétences en évaluation avec la défense des intérêts des patients et l’engagement en faveur de la qualité des soins. Ces attributs combinés sont nécessaires pour orienter un établissement vers des changements d’assurance qualité axés à la fois sur le rapport coût-efficacité et sur le maintien d’une solide culture de sécurité des patients. Les soins de santé exigent que les membres du personnel infirmier, grâce à leurs compétences polyvalentes, connaissances et expériences, prennent les devants de l’innovation en amélioration de la qualité.

7.5 Planifier, faire, étudier et agir

Le cycle planifier-faire-étudier-agir (PFEA) est l’un des nombreux outils ou techniques d’amélioration de la qualité utilisés pour améliorer les soins. Ce cycle est facilement utilisable à tous les niveaux organisationnels et mise sur le développement, l’essai, l’évaluation et la mise en œuvre de solutions d’amélioration de la qualité. Le cycle PFEA consiste à planifier (décider du changement à essayer), à faire (effectuer le changement), à étudier (examiner les données avant et après le changement et déterminer ce qui a été appris) et à agir (planifier un autre cycle de changement avec les modifications nécessaires ou passer à la mise en œuvre complète). Les changements à grande échelle ne sont mis en œuvre qu’après un cycle PFEA consistant en de rapides essais séquentiels ou parallèles à petite échelle, afin d’étudier les changements proposés et d’en déterminer le bon fonctionnement (Gillam et Siriwardena, 2013). Le PFEA est décrit comme un outil pouvant être utilisé pour évaluer la prestation de services actuelle et pour essayer et développer des idées novatrices (Byrne, Xu et Carr, 2015).

Activité d’apprentissage essentielle 7.5.1

Regardez ces deux vidéos pour obtenir des renseignements détaillés sur l’utilisation de la méthode PFEA : partie 1 (4:45) et partie 2 (3:45).

Résumé

Ce chapitre a présenté la philosophie de la gestion de la qualité dans les soins de santé et a mis en lumière les événements survenus à l’international dans le monde des soins de santé, lesquels ont mis l’accent sur la culture de sécurité des patients, par exemple le développement des hôpitaux-aimants aux États-Unis et l’enquête Francis au Royaume-Uni. De plus, des approches communes d’amélioration de la qualité, comme les hôpitaux-aimants et la méthode Lean, ont été décrites et examinées sous le prisme de leur contribution à la sécurité des patients. Enfin, le cycle PFEA, un outil d’amélioration de la qualité très répandu, a aussi été présenté.

À la fin du chapitre, vous devriez être en mesure de faire ce qui suit :

  1. Décrire les principaux enjeux qui ont mené au développement des hôpitaux-aimants.
  2. Déterminer comment les hôpitaux-aimants ont changé les soins de santé aux États-Unis.
  3. Décrire les principaux enjeux qui ont conduit à la publication du rapport Francis au Royaume-Uni.
  4. Décrire les caractéristiques d’une « culture de sécurité ».
  5. Évaluer l’utilisation de la méthode Lean dans les soins de santé.
  6. Évaluer le cycle planifier-faire-étudier-agir (PFEA) comme base du travail d’amélioration de la qualité.
  7. Définir les aspects critiques de votre leadership pour créer un environnement de travail sûr et soutenir le travail d’amélioration de la qualité.

Exercices

  1. Appliquer le cadre proposé par les services de santé publique du Royaume-Uni en 2014 pour mesurer et surveiller la sécurité dans un hôpital où vous avez effectué un stage clinique. Pouvez-vous cerner des domaines qui pourraient être améliorés en matière de mesure et de surveillance de la sécurité?
  2. Vous êtes à la direction des soins infirmiers d’un établissement de soins de longue durée. Lorsqu’une femme âgée tombe de son lit pendant la nuit et se fracture la hanche, vous consultez les rapports d’incidents récents et remarquez qu’il y a eu une augmentation des chutes nocturnes des résidents. Aux fins d’amélioration de la qualité, utilisez le cycle PFEA pour trouver une solution qui réduira les chutes nocturnes.

Références

Byrne, J., Xu, G. et Carr, L. (2015). Developing an intervention to prevent acute kidney injury: Using the plan, do, study, act (PDSA) service improvement approach. Journal of Renal Care, 41(1), p. 3-8. https://doi.org/10.1111/jorc.12090

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8

Leaders et prise de décision éclairée par des preuves

Maura MacPhee

La pratique éprouvée n’est possible que si les leaders planifient et mettent en place les structures et les processus organisationnels nécessaires. Le succès consiste à faire en sorte que ces structures et processus soient « transparents » et intégrés au travail quotidien du personnel clinicien.

– R.P. Newhouse (2007, p. 21)

Introduction

Ce chapitre montrera comment les leaders incitent leur entourage à prendre des décisions et à fournir des soins éclairés par des preuves. Ces soins sont associés à des résultats positifs pour les patient.e.s, tels que des taux inférieurs de blessures et de mortalité, ainsi qu’une diminution de l’épuisement professionnel et du roulement du personnel infirmier. Dans les milieux de soins, les leaders influencent la culture organisationnelle en encourageant l’utilisation de preuves et la réflexion critique. Leur quête d’une excellence éprouvée se bute souvent à d’autres préoccupations, telles que les finances, qui peuvent mettre en péril les patient.e.s et le personnel infirmier. Les leaders braves recherchent les meilleures preuves pour se guider.

Objectifs d’apprentissage

  1. Justifier l’importance de la pratique infirmière éprouvée.
  2. Expliquer comment les leaders qui prennent des décisions éclairées par des preuves contribuent à la qualité et à la sécurité de la prestation des soins aux patient.e.s.
  3. Cerner les obstacles à l’utilisation des preuves dans les établissements de soins de santé.

8.1 Leadership éclairé par des preuves

Commençons par un examen de la pratique éprouvée, également appelée pratique éclairée par des preuves. Que vous soyez étudiant.e.s, infirmier.ère.s praticien.ne.s ou responsables du personnel infirmier ayant une autorité formelle dans un établissement de soins de santé, vous devez fonder vos décisions et vos actions sur des preuves.

Activité d’apprentissage essentielle 8.1.1

Lisez l’énoncé de position de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada intitulé « Prise de décision et pratique infirmière éclairées par des preuves », puis répondez à la question suivante :

  1. De quels types de preuves le personnel infirmier et ses responsables ont-ils besoin pour prendre des décisions?

L’énoncé de position de l’AIIC indique qu’il est important d’évaluer la qualité des preuves. Le personnel infirmier et ses responsables doivent savoir où trouver les différents types de preuves, s’il s’agit de preuves dignes de confiance (c.-à-d. valides, fiables) et comment en tirer parti dans leur pratique, qu’il s’agisse de soigner des patient.e.s ou de diriger un établissement de soins de santé. Les écoles de soins infirmiers, dans leurs programmes de premier et de deuxième cycle, enseignent la pensée critique, l’évaluation et l’utilisation des preuves comme des compétences importantes pour les apprenant.e.s.

8.2 Innovation, leadership et groupes d’influence

Activité d’apprentissage essentielle 8.2.1

Regardez les vidéos suivantes sur YouTube :

  1. « What is Evidence-Based Practice? » avec Ann Dabrow Woods (3:27)
  2. « Evidence-Informed Practice » par le Centre d’excellence de l’Ontario en santé mentale des enfants et des adolescents (4:14)

Dans la première vidéo, M. Dabrow déclare que le Joanna Briggs Institute est une excellente source de preuves sur les soins de santé. Consultez le site Web de l’Institut. Des ressources comme celle-ci sont essentielles aux responsables du personnel infirmier éclairés par des preuves. L’orateur de la première vidéo explique comment l’Université McMaster, au Canada, a inventé l’expression « pratique éclairée par des preuves ».

La deuxième vidéo souligne l’importance d’utiliser les meilleures données disponibles dans la prestation de services.

Après avoir visionné les deux vidéos, répondez aux questions suivantes : Que doivent faire les leaders d’organisations pour promouvoir les pratiques éprouvées? Que doit faire le personnel infirmier pour optimiser l’utilisation des preuves dans sa pratique?

Que vous soyez étudiant.e en soins infirmiers ou que vous occupiez un poste officiel (par exemple, responsable d’unité, directeur d’établissement, infirmière en chef), vos décisions doivent être éclairées par des preuves. Pourtant, comme le souligne la première vidéo, seul un faible pourcentage (20 %) des décisions prises dans le domaine des soins de santé sont éclairées par des preuves. De plus, Dabrow Woods affirme qu’« il faut de 15 à 20 ans pour que les preuves soient mises en pratique ». Que se passe-t-il?

Activité d’apprentissage essentielle 8.2.2

Lire l’article du Dr Donald Berwick de 2003 intitulé « Disseminating Innovations in Health Care ». Ce document classique explique pourquoi l’innovation, ou le changement positif, est difficile à intégrer dans les établissements de soins de santé.

Selon des experts en innovation tels que le Dr Donald Berwick, « l’inutilisation des données scientifiques disponibles est coûteuse et préjudiciable; elle entraîne une surutilisation des soins inutiles, une sous-utilisation des soins efficaces et des erreurs d’exécution » (2003, p. 1969). Pour le personnel infirmier et les médecins, nos erreurs peuvent entraîner des blessures, voire des décès. Le Dr Berwick pose les questions suivantes :

Pourquoi l’écart entre les connaissances et la pratique est-il si important?

Pourquoi le personnel des systèmes de soins cliniques n’intègre-t-il pas les résultats de la science clinique ou ne copient-ils pas les « meilleures pratiques connues » de manière fiable, rapide et même avec gratitude dans son travail quotidien, tout simplement (p. 1969)?

Pour que l’innovation soit adoptée avec succès, trois groupes d’influence fondamentaux doivent être pris en compte par les leaders à tous les niveaux d’une organisation de soins de santé : les perceptions de l’innovation, la composition du personnel et les informations contextuelles.

Perception de l’innovation

Le premier groupe est celui des perceptions de l’innovation. Les leaders doivent réfléchir à la manière de présenter une nouvelle politique, un nouveau protocole, une nouvelle technologie ou un nouveau médicament : la première impression compte. Les leaders doivent tenir compte de cinq caractéristiques d’une innovation en posant les questions suivantes avant de la présenter au personnel :

  1. Le personnel percevra-t-il l’innovation comme un avantage pour lui?
  2. L’innovation correspond-elle à ses besoins actuels? (p. ex., l’innovation améliorera-t-elle la prestation des soins?)
  3. L’innovation est-elle facile à comprendre? Est-ce simple à faire? La complexité (p. ex., plusieurs parties, plusieurs étapes) ralentit l’innovation. La simplicité favorise la « diffusion ».
  4. Est-il possible de réaliser un projet pilote à petite échelle? La possibilité de faire des essais améliore le taux d’innovation.
  5. Est-il possible pour le personnel d’observer l’innovation en cours, d’en prendre connaissance et d’obtenir des réponses à ses questions ou préoccupations? L’observabilité et l’expérimentabilité vont souvent de pair.

Les leaders doivent donc prévoir comment ils influenceront les premières impressions du personnel à l’égard d’une innovation. Les changements font peur aux gens; en général, nous y résistons parce qu’ils exigent des efforts, des ressources et du temps supplémentaires. Étant donné nos vies occupées, nous avons besoin de savoir que les leaders prennent des décisions éclairées par des preuves concernant les changements proposés. Pourquoi devrions-nous changer le statu quo?

Composition du personnel

Le deuxième groupe d’influence auquel les leaders doivent penser est la composition du personnel. Ils ne peuvent pas imposer l’innovation seuls; ils ont besoin de l’appui du personnel adéquat. Sinon, leurs tentatives d’innovation sont vouées à l’échec. Consultez la figure 2 de l’article de Berwick (2003, p. 1972). Pour que l’innovation réussisse, il vous faut des personnes innovatrices, des primo adoptant.e.s et une majorité précoce.

Les personnes innovatrices sont à l’origine des améliorations proposées. Ce sont celles qui, au sein d’une organisation, lisent des revues scientifiques, assistent à des conférences et se tiennent informées des meilleures pratiques. Elles sont en contact avec des sources d’information extérieures et suggèrent des idées à l’organisation.

Les primo adoptant.e.s ont de bonnes relations au sein de l’organisation. Ce sont les leaders qui ont de l’influence et de l’autorité. Ils peuvent bousculer l’organisation grâce à leur pouvoir officiel. Ces leaders croient en la valeur de l’innovation et soutiennent les personnes innovatrices. À titre d’exemple, un.e leader primo adoptant.e offre du temps libre et du soutien financier à un.e infirmier.ère enseignant.e pour qu’il ou elle assiste à une conférence sur les innovations en matière de pratiques médicochirurgicales. À son retour, l’infirmier.ère enseignant.e présente d’excellentes nouvelles idées à la direction et au personnel.

Après avoir reconnu le potentiel d’une innovation, un.e leader primo adoptant.e se prépare à en parler au personnel, c’est-à-dire à en donner la première impression. Il ou elle propose un projet pilote à des membres du personnel. Les volontaires qui testeront l’innovation constituent la majorité précoce. Dans de nombreux cas, ils ou elles sont fraîchement diplômé.e.s et ont hâte de faire l’essai des nouveautés.

Si le projet pilote est couronné de succès, le reste du personnel, qui en a observé les résultats positifs, adoptera volontiers l’innovation. Ces membres du personnel forment la majorité tardive. Enfin, certains membres du personnel, les retardataires, restent réfractaires au changement. Les leaders doivent écouter leurs préoccupations, mais au bout du compte, il est peut-être temps pour ces personnes de se tourner vers une autre unité ou un autre lieu de travail. Les retardataires ne représentent généralement qu’un faible pourcentage des employés (16 %) et pourtant, les leaders tentent souvent en vain de les convaincre de changer. En fait, ces personnes ne changeront peut-être jamais.

Les leaders devraient donc miser sur les 20 % du personnel au début de la courbe d’innovation (c’est-à-dire les personnes innovatrices, les primo adoptant.e.s, la majorité précoce) qui ont besoin de leur soutien : il s’agit de la masse critique d’un changement positif.

Renseignements contextuels

Le troisième groupe d’influence est constitué de facteurs contextuels qui facilitent ou entravent l’innovation au sein de l’organisation. Le leadership et la culture organisationnelle ont tous deux une influence majeure sur la diffusion de l’innovation. Vous avez besoin de leaders éclairé.e.s par des preuves (c’est-à-dire de primo adoptant.e.s) qui vont, dans l’ensemble de l’organisation : (1) promouvoir les interactions, les discussions et le réseautage du personnel dans l’ensemble de l’organisation (vous souvenez-vous de l’observabilité?); (2) faire confiance au personnel et lui permettre d’adapter les nouvelles idées à ses besoins; (3) consacrer des ressources essentielles, du soutien et du temps à l’innovation; et (4) « passer de la parole aux actes » ou adopter rapidement les innovations. Comme l’a écrit le Dr Berwick (2003) à propos du capitaine James Cook, un des premiers explorateurs, innovateurs et primo adoptants : « James Cook a dû manger sa propre choucroute, et les responsables des soins de santé qui veulent répandre le changement doivent d’abord changer eux-mêmes » (p. 1974).

Activité d’apprentissage essentielle 8.2.3

Répondez aux questions suivantes :

  1. Avec quel type de leaders aimeriez-vous travailler? Pourquoi?
  2. Dans quel type d’organisation souhaiteriez-vous travailler? Pourquoi?

Expérience sur le terrain

Examinons ce qui se passe lorsque le leadership n’est pas éclairé par des preuves.

En Angleterre, il existe un système à payeur unique, le National Health Service (NHS), qui est très similaire à notre système de santé au Canada. Le NHS est composé de régions sanitaires appelées « fiducies », des « trusts ». Pendant plusieurs années, les leaders d’une fiducie NHS, le Mid Staffordshire Trust, n’ont pas tenu compte des données relatives à la dotation sécuritaire de personnel. Pour équilibrer leur budget, les leaders de la fiducie ont commencé à remplacer le personnel infirmier par des aides-soignant.e.s non agréé.e.s. À la suite d’un tollé provoqué par les proches de patient.e.s blessés ou décédés à la suite de négligences, une enquête indépendante a été menée par le NHS afin de déterminer ce qui se passait au sein du Mid Staffordshire Trust. L’enquête a révélé des conditions de soins épouvantables dues à un manque de personnel infirmier. Le NHS a été « humilié » par cette enquête et s’est engagé à appliquer les politiques et les procédures en place dans toutes les fiducies afin de rétablir la qualité et la sécurité des soins de santé publique.

Les leaders du Mid Staffordshire Trust ont choisi d’ignorer plus de deux décennies de recherches sur la dotation sécuritaire de personnel. Par exemple, le nombre (ratio patient.e.s/infirmier.ère.s) et le type de membres du personnel infirmier (mélange de compétences) sont directement liés aux taux de morbidité des patient.e.s (p. ex., infections contractées en milieu hospitalier, chutes évitables et plaies de pression), à la mortalité des patient.e.s et au défaut d’assistance. La lourdeur de la charge de travail du personnel infirmier, caractérisée par des ratios patient.e.s et infirmier.ère.s élevés (p. ex., 10 patient.e.s par infirmière), entraîne des événements indésirables pour les patient.e.s et l’incapacité du personnel infirmier à détecter les changements ou la détérioration de l’état des patient.e.s (Berry et Curry, 2012). Un mélange de compétences plus riche et une plus grande proportion de personnel infirmier autorisé parmi les prestataires de soins directs sont associés à de meilleurs résultats pour les patient.e.s (Needleman, 2016).

La direction du NHS était perplexe : qu’est-ce qui n’allait pas? Pourquoi les leaders du Mid Staffordshire Trust n’ont-ils pas fondé leurs décisions en matière de personnel sur des preuves? Le Dr Berwick, auteur d’un article sur l’innovation en 2003, est considéré comme un expert de renommée internationale en matière de qualité et de sécurité. Il a été mandaté par le NHS d’examiner le rapport d’enquête et de recommander des changements de politique en matière de qualité et de sécurité. Il a présenté ses recommandations dans un document intitulé « A promise to learn – a commitment to act ». Il a tout de suite compris qu’il régnait une culture du secret et de l’oppression au Mid Staffordshire Trust ainsi qu’un manque important de leadership dans l’ensemble de l’organisation. En fait, les médecins et le personnel infirmier avaient peur de s’exprimer. Il a été prouvé que les leaders intimidaient et menaçaient les médecins et le personnel infirmier qui se plaignaient de conditions de travail dangereuses.

Renseignements tirés de « Valoriser la sécurité des patients : Structure responsable de la main-d’œuvre » (MacPhee, 2014).

L’une des principales recommandations du Dr Berwick au NHS (évoquée dans la rubrique Expérience sur le terrain) concernait le leadership. Les leaders sont essentiel.le.s pour créer une culture d’apprentissage ouverte et transparente, où chacun.e est censé.e utiliser les preuves pour garantir les meilleures pratiques et la meilleure prestation possible de soins aux patient.e.s. Ils jouent un rôle essentiel, car ils montrent l’exemple et fournissent aux infirmier.ère.s et autres membres du personnel les informations, les ressources et le soutien dont ils ont besoin pour fournir des soins sûrs et de qualité aux patient.e.s. Ils favorisent une culture d’apprentissage continu, d’ouverture et de transparence en vue de tirer parti de preuves déterminantes : la culture d’une organisation apprenante.

Jetez un coup d’œil au tableau suivant, extrait de « A promise to learn » du Dr Berwick. Dans ses recommandations sur le leadership, il définit la principale responsabilité de l’ensemble du personnel et des leaders.

Tableau 8.2.1 Responsabilités du personnel et des leaders (Source des données : Tableau basé sur des données de Berwick, 2013, p. 16.)
Responsables Responsabilités

Tous les membres du personnel et les leaders des organisations financées par le NHS

Toute personne du secteur des soins financés par le NHS a le devoir d’acquérir les compétences qui lui permettent de cerner et de réduire les risques pour les patient.e.s au travail en collaboration avec son équipe et ses équipes adjacentes. Leaders d’organisations de prestataires de soins de santé, gestionnaires, responsables des cliniques. . . ont le devoir de fournir l’environnement, les ressources et le temps nécessaires pour permettre au personnel d’acquérir ces compétences.

Tous les membres d’une organisation, qu’ils soient employés ou leaders, sont censés contribuer à une culture d’organisation apprenante.

Activité d’apprentissage essentielle 8.2.4

Regardez les trois vidéos suivantes sur les organisations apprenantes, puis répondez aux questions qui suivent :

« What is a Learning Organization? » (Qu’est-ce qu’une organisation apprenante?) (4:56) par le Centre d’excellence de l’Ontario en santé mentale des enfants et des adolescents

« Introduction to Organizational Learning » (Introduction à l’apprentissage organisationnel) (3:13) par Peter Senge

« Learning Organisation » (Organisation de l’apprentissage) (2:01)

  1. Imaginez que vous êtes un.e infirmier.ère d’une organisation apprenante, telle que le Centre d’excellence de l’Ontario en santé mentale des enfants et des adolescents. Décrivez comment vous contribuerez à la culture de l’apprentissage continu.
  2. Le Centre d’excellence de l’Ontario en santé mentale des enfants et des adolescents a adopté des valeurs fondamentales associées aux organisations apprenantes et à l’apprentissage continu. Pourquoi pensez-vous qu’il a choisi ces valeurs fondamentales?

8.3 La recherche au service d’une organisation saine

Les recherches menées sur des organisations de tous les secteurs (y compris l’industrie, les entreprises et les soins de santé) ont montré que les organisations qui encouragent les pratiques d’organisations apprenantes obtiennent des résultats nettement supérieurs, tels qu’une hausse de la qualité, de l’efficience et de l’efficacité. Les organisations et leurs leaders font donc des investissements judicieux lorsqu’ils soutiennent des cultures qui favorisent l’apprentissage continu (Robbins, Garman, Song et McAlearney, 2012).

Comme vous l’avez peut-être deviné en regardant la vidéo de Peter Senge, les organisations obtiennent de meilleurs résultats lorsqu’elles s’attendent à ce que tout le monde « s’engage sincèrement à apprendre ». Dans sa présentation, le « fort effet de levier » fait référence à la capacité d’apporter des améliorations, à l’esprit d’innovation. Lorsque nous nous restreignons à une seule façon de penser et de faire (habitude), nous ratons des occasions d’améliorer notre collaboration. Senge nous incite à sortir de nos anciens « modèles mentaux », à échanger des connaissances et des idées afin d’obtenir des perspectives multiples. Il souligne également qu’il faut du temps pour « développer, adapter et mettre en œuvre des apprentissages ». Les leaders éclairé.e.s par des preuves doivent « passer de la parole aux actes ». Les leaders doivent constamment remettre en question le statu quo et inviter le personnel, les patient.e.s, les familles et les collègues à adopter des points de vue différents afin d’explorer de meilleures façons de fournir des soins sûrs et de qualité au sein des organisations.

Revenons au Mid Staffordshire Trust. Dans ce cas-ci, les leaders ont ignoré les données d’évaluation d’événements indésirables, ainsi que les plaintes des patient.e.s et du personnel. Ils se sont presque exclusivement concentrés sur les objectifs financiers fixés par le gouvernement pour présenter des budgets équilibrés. Le NHS a finalement demandé une enquête publique sur le Mid Staffordshire Trust après qu’un groupe de familles s’est adressé aux médias pour raconter les terribles blessures subies par leurs proches. Julie Bailey, l’une des organisatrices du mouvement, a perdu sa mère. Le public et les médias sont responsables de l’action du gouvernement.

Activité d’apprentissage essentielle 8.3.1

Regardez cette vidéo de Channel 4 News intitulée « Mid Staffs: Julie Bailey and Jeremy Hunt » (7:51)  » (personnel du Mid Staffordshire Trust : Julie Bailey et Jeremy Hunt). Le journaliste interroge Julie Bailey, qui a perdu sa mère et qui est l’une des organisatrices du mouvement public, et Jeremy Hunt, le ministre de la Santé. La vidéo est datée du 6 février 2013, peu après la publication du rapport Francis sur le Mid Staffordshire Trust.

Dans la vidéo, Mme Bailey conclut que nous avons besoin d’un.e leader pour apporter les changements nécessaires qui garantiront la qualité et la sécurité des soins. Mme Bailey affirme également que le changement ne se produira pas sans un nouveau leadership. Le journaliste met toutefois en doute le fait que la démission de l’actuel leader puisse régler le problème. Qu’en pensez-vous?

Activité d’apprentissage essentielle 8.3.2

Lire le document « Position Statement on Harm Reduction », soit l’énoncé de position sur la réduction des méfaits de 2017 du syndicat des infirmières et infirmiers de la Colombie-Britannique (BCNU). Le contexte de cet énoncé de position souligne que les approches éprouvées de réduction des méfaits représentent des principes de soins infirmiers. Définir les concepts de réduction des méfaits qui sont associés aux normes professionnelles et aux codes de déontologie du personnel infirmier.

Pour en savoir plus sur les médicaments injectables et les risques liés aux soins infirmiers éprouvés, consultez la page Web de l’Organisation mondiale de la santé sur le VIH et le sida.

8.4 Soins infirmiers éprouvés : Montrer la voie

En Colombie-Britannique, le nombre de décès par surdose de drogues illicites a atteint 914 en 2016, et en Alberta, 343 décès ont été causés par des surdoses de fentanyl en 2016 (Presse canadienne, 2017). La crise des opioïdes qui sévit au Canada et aux États-Unis a incité les décideurs politiques et les prestataires de soins de santé à s’inspirer de la recherche sur la santé mentale et le traitement des dépendances.

Les énoncés de position sont généralement des documents fondés sur des preuves disponibles sur les sites Web des organisations professionnelles, des ordres de réglementation, des syndicats et du gouvernement. Bien que ces documents soient souvent cités et vérifiés, ils peuvent également inclure des principes directeurs qui reflètent la mission, la vision et les valeurs de l’organisation. Il est donc important que le personnel infirmier demande conseil aux organisations qui reflètent les normes professionnelles et les codes de déontologie de sa profession. Pour les étudiant.e.s, ces documents sont d’excellentes ressources qui servent également d’introduction aux principes professionnels qui nous définissent en tant que membres du personnel infirmier.

L’énoncé de position du BCNU mentionné dans l’activité d’apprentissage essentielle ci-dessus commence par une liste à puces des principes, notamment celui-ci : « Le BCNU croit que les politiques et programmes de réduction des méfaits peuvent aider les gens aux prises avec des problèmes de consommation de substances » [traduction libre] (BCNU, 2017). Notez les références et l’utilisation des résultats de la recherche pour décrire les principales stratégies de réduction des méfaits éclairées par des preuves. Cet énoncé inclut un certain nombre d’études récentes. Vous constaterez que les références incluent des recherches qualitatives, quantitatives et économiques (coût-efficacité).

Quelles en sont les répercussions du point de vue du leadership? En tant que membres du personnel infirmier, nous devons montrer l’exemple, c’est-à-dire connaître les données de recherche sur les sujets qui concernent nos patient.e.s et, plus généralement, la santé et le bien-être de la population canadienne. La réduction des méfaits est importante pour le personnel infirmier à l’échelle locale, provinciale, nationale et même mondiale. Si vous voulez en savoir plus, vous pouvez consulter la perspective globale de l’Organisation mondiale de la santé sur la réduction des méfaits pour toute personne consommant des drogues injectables ici.

Note de recherche

L’étude SALOME, un essai de recherche clinique sur l’efficacité à long terme de médicaments de remplacement, a été menée à Vancouver pour déterminer si un opioïde légalement prescrit, l’hydromorphone, pouvait être un substitut efficace à l’héroïne injectable illicite. Un autre volet de l’étude a comparé l’efficacité de l’héroïne et de l’hydromorphone injectables à celle de leurs versions orales.

Une équipe interdisciplinaire composée de médecins, de membres du personnel infirmier, en travail social et de conseiller.ère.s a participé à cette étude. Elle a démontré que l’héroïne injectable pouvait être remplacée par l’hydromorphone injectable, un opioïde moins stigmatisé que l’héroïne. Les versions orales des deux médicaments n’ont pas permis de réduire la consommation de drogues illicites. Les sites d’injection supervisés, gérés par des équipes incluant des membres du personnel infirmier, peuvent désormais proposer des traitements légaux éprouvés (p. ex., méthadone, suboxone, hydromorphone) aux personnes souffrant de dépendances chroniques. Ces solutions réduisent les méfaits potentiels et les décès des personnes chez les plus vulnérables de notre société.

Vous pouvez consulter un aperçu de la recherche sur la réduction des méfaits sur le site des questions et réponses au sujet des essais cliniques SALOME.

Résumé

Repensez à la citation au début de ce chapitre en fonction de tout ce que vous venez de lire.

La pratique éprouvée n’est possible que si les leaders planifient et mettent en place les structures et les processus organisationnels nécessaires. Le succès consiste à faire en sorte que ces structures et processus soient « transparents » et intégrés au travail quotidien du personnel clinicien.

– R.P. Newhouse (2007, p. 21)

Les leaders éclairé.e.s par des preuves sont des primo adoptant.e.s qui cherchent les meilleures données et encouragent les pratiques éprouvées au sein du personnel. Ils mettent en place les structures et les processus nécessaires pour répandre l’utilisation des preuves et l’innovation dans l’ensemble de l’organisation. Les leaders éclairé.e.s par des preuves ne se contentent pas de chercher les données les plus fiables, ils s’en servent pour prendre des décisions, c’est-à-dire « passer de la parole aux actes ». En outre, ils favorisent les cultures d’organisation apprenante, la transparence et l’apprentissage continu.

Les leaders qui ignorent les preuves sont souvent les plus grands obstacles à la prestation de soins sûrs et de qualité. Comme l’illustre la tragédie du Mid Staffordshire Trust, le leadership éclairé par des preuves ne se limite pas à l’accès aux preuves, ni même à leur utilisation. Sir David Nicholson, qui dirigeait le NHS à l’époque, avait accès à de nombreuses preuves, mais il a choisi de se concentrer sur les données financières et, ses subordonnés immédiats, sur les objectifs financiers. Les leaders, en raison des autres attributs de leadership qu’ils possèdent, influencent comment les autres interprètent et partagent les preuves. Comme nous l’avons vu tout au long de cet ouvrage, d’autres qualités de leadership, telles que l’authenticité, l’intégrité morale et l’utilisation efficace du pouvoir, sont nécessaires pour faire un grand leader.

À la fin du chapitre, vous devriez être en mesure de faire ce qui suit :

  1. Faire valoir l’importance de la pratique éprouvée pour les soins infirmiers.
  2. Expliquer comment les leaders qui prennent des décisions éclairées par des preuves contribuent à la qualité et à la sécurité de la prestation des soins aux patient.e.s.
  3. Cerner les obstacles à l’utilisation des preuves dans les établissements de soins de santé.

Exercices

Débattez de la question suivante avec vos camarades de classe : Faut-il donner une autre chance à un.e leader qui laisse de graves manquements à la qualité ou à la sécurité se produire parce qu’il ou elle ignore les preuves?

Références

Berry, L. et Curry, P. (2012). Charge de travail du personnel infirmier et soins aux patients Ottawa : Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et infirmiers.

Berwick, D. (2003). Disseminating innovations in health care. Journal of the American Medical Association, 289(15), p. 1969 à 1975.

Berwick, D. (2013). A promise to learn—a commitment to act.Improving the safety of patients in England. Groupe consultatif national sur la sécurité des patient.e.s en Angleterre. https://www.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/226703/Berwick_Report.pdf

Syndicat des infirmières et infirmiers de la Colombie-Britannique. (2017). Harm Reduction Position Statement. https://www.bcnu.org/AboutBcnu/Documents/PS_HarmReduction.pdf

Presse canadienne (2017). Severity of opioid crisis in Canada, U.S. prompted inclusion in joint statement: Goodale. Toronto Star, 14 février. https://www.thestar.com/news/canada/2017/02/14/severity-of-opioid-crisis-in-canada-us-prompted-inclusion-in-joint-statement-goodale.html

MacPhee, M. (2014). Valoriser la sécurité des patients : Structure responsable de la main-d’œuvre. Ottawa : Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et infirmiers. https://fcsii.ca/wp-content/uploads/2018/02/Valuing-Patient-Safety-WEB-June-17-2014_FR.pdf

Needleman, J. (2016). The economic case for fundamental nursing care. Nursing Leadership, 29(1), p. 26 à 36.

Newhouse, R.P. (2007). Creating infrastructure supportive of evidence-based nursing practice: Leadership strategies. Worldviews on Evidence-based Nursing, premier trimestre, p. 21-29.

Robbins, J., Garman, A.N., Song, P.H. et McAlearney, A.S. (2012). How high-performance work systems drive health care value: an examination of leading process improvement strategies. Quality Management in Healthcare21(3), p. 188 à 202.

9

Théories courantes sur le changement et application à différentes situations en soins infirmiers

Sonia Udod et Joan Wagner

Les leaders nous emmènent à des endroits où nous ne sommes jamais allés auparavant. Mais il n’y a pas d’autoroutes vers l’avenir ni de routes pavées vers des destinations inconnues et inexplorées. Il n’y a que la nature sauvage. Pour plonger dans l’inconnu, il faut commencer par explorer son territoire intérieur. Nous continuons à découvrir que ce qui est le plus important pour chacun d’entre nous, et pour les leaders en particulier, s’avère être la connaissance de soi. (Kouzes et Posner, 2007, p. 346)

Introduction

Le changement est une composante essentielle de la pratique infirmière. Diriger le changement est un défi pour les gestionnaires en soins infirmiers en raison de la complexité et des défis de l’évolution de l’environnement de prestation de soins de qualité aux patient.e.s. Ce chapitre leur présente des cadres et théories qui appuient efficacement le processus de changement et créent des environnements de travail sains. En outre, ils apprendront ce qu’est la résistance au changement pour y réagir de manière constructive. Ce chapitre propose des lignes directrices aux gestionnaires en soins infirmiers concernant les comportements et pratiques qui facilitent le changement dans le milieu des soins.

Objectifs d’apprentissage

  1. Expliquer pourquoi les membres du personnel infirmier peuvent être des agent.e.s de changement.
  2. Décrire les différentes théories de changement.
  3. Discuter de la similitude entre le processus de soins infirmiers et le processus de changement.
  4. Discuter de la roue de médecine en tant que modèle de changement.
  5. Décrire le rôle des gestionnaires en soins infirmiers dans la mise en œuvre du changement et l’appel à l’action.
  6. Distinguer les stratégies de changement.
  7. Savoir gérer la résistance au changement.

L’évolution rapide du système de santé canadien offre aux gestionnaires en soins infirmiers la possibilité de perfectionner leurs compétences en matière de leadership et de gestion pour contribuer au changement. L’augmentation du coût des traitements, les nouvelles technologies, les progrès de la science, la pénurie de main-d’œuvre et le vieillissement de la population sont autant de facteurs de changement des soins. Les initiatives de changement doivent toujours être mises en œuvre pour de bonnes raisons afin de contribuer à l’atteinte des buts et objectifs de l’établissement. L’adaptation au changement est un défi majeur dans un modèle de prestation de soins sûrs et fiables centré sur les patient.e.s et la famille (Stefancyk, Hancock et Meadows, 2013; ministère de la Santé de la Saskatchewan, 2011).

9.1 Les leaders en soins infirmiers en tant qu’agent.e.s de changement

Les leaders en soins infirmiers doivent veiller au fonctionnement quotidien de leurs unités dans un système de soins qui évolue rapidement. Ils sont souvent appelés à être des agent.e.s de changement responsables de la réussite d’un projet. Pourtant, la littérature indique que les leaders continuent à lutter contre le changement même s’ils y prennent part dans bien des cas (Gilley, Gilley et McMillan, 2009; Quinn, 2004). Les agent.e.s de changement sont des personnes qui disposent d’un pouvoir légitime formel ou informel et dont l’objectif est de diriger et d’orienter le changement (Sullivan, 2012). Ils définissent la vision et les raisons du changement, en plus de servir de modèle aux membres du personnel infirmier et au reste du personnel soignant.

Les comportements des gestionnaires en soins infirmiers influencent les actions du personnel qui contribuent au changement (Drucker, 1999; Yukl, 2013). Les gestionnaires en soins infirmiers doivent trouver de nouvelles façons de mener les nombreux changements et s’adapter à de nouvelles méthodes de travail. En outre, les leaders collaborent étroitement avec les fournisseurs de soins de première ligne pour définir les améliorations nécessaires aux processus de travail et les soins aux patient.e.s sur le lieu de travail. Par conséquent, pour guider le processus, les leaders en soins infirmiers doivent posséder les compétences requises pour influencer le comportement humain, notamment la capacité de supervision, l’intelligence, le besoin de réussite, l’esprit de décision et la persévérance (Gilley et coll., 2009). Pour gérer efficacement le changement, les leaders doivent connaître le processus, les outils et les techniques nécessaires pour améliorer les résultats (Shirey, 2013).

9.2 Théories et modèles de changement

Il est essentiel de connaître les théories de changement pour modifier les systèmes organisationnels. Elles peuvent servir de cadre à la mise en œuvre, à la gestion et à l’évaluation du changement dans le contexte du comportement humain. Qu’elles soient linéaires ou non, elles ne se déroulent pas selon un schéma systématique et organisé. Dans la section suivante, nous définissons le rôle du leader et le schéma typique des événements qui se produisent lors d’un changement.

Modèle des champs de force et modèle Décongeler-Changer-Recongeler

Kurt Lewin (1951) est reconnu comme un pionnier dans l’étude de la dynamique de groupe et du développement organisationnel. Il a établi un modèle de changement en trois étapes (Décongeler-Changer-Recongeler) afin de déterminer et d’examiner les facteurs et les forces qui influencent une situation. Sa théorie exige que les leaders remplacent leurs anciennes connaissances par de nouvelles. Elle repose sur l’idée que si la puissance des forces peut être déterminée, il est possible de savoir lesquelles diminuer ou augmenter pour provoquer le changement (Burnes, 2004).

Lewin décrit le comportement comme « un équilibre dynamique de forces travaillant dans des directions opposées » (cité dans Shirey, 2013, p. 1). Le modèle des champs de force s’applique mieux aux environnements stables et définit deux types de forces : les forces motrices et les forces restrictives. Les forces motrices poussent une personne dans la direction souhaitée, ce qui provoque ou facilite le changement. Les forces restrictives s’opposent aux forces motrices et entravent le changement parce qu’elles détournent la personne de la direction souhaitée. Enfin, le changement peut se produire si les forces motrices dominent ou affaiblissent les forces restrictives.

Cet important modèle de champ de forces constitue le fondement de la théorie de changement en trois étapes de Lewin (1951) (voir figure 9.2.1). La première étape est Décongeler, ce qui consiste à déterminer comment aider les individus à se défaire d’un ancien modèle de comportement, à surmonter les résistances et à braver le conformisme du groupe (Kritsonis, 2005). À cette étape, le déséquilibre qui perturbe le système permet de cerner les forces motrices qui favorisent le changement et les forces restrictives qui pourraient l’empêcher. Il faut donc accroître les forces motrices et affaiblir des forces restrictives pour réaliser le changement (Shirey, 2013). Trois méthodes permettent d’atteindre cet objectif : (1) augmenter les forces motrices qui modifient le comportement par rapport à la situation ou à l’équilibre existant; (2) diminuer les forces restrictives qui empêchent de rompre l’équilibre actuel; ou (3) combiner les deux premières méthodes.

La deuxième étape, Bouger ou Changer, suppose de modifier des pensées, des sentiments ou des comportements. Lewin (1951) décrit trois actions qui peuvent y contribuer : (1) persuader les autres que le statu quo est désavantageux et les encourager à envisager un problème sous un angle nouveau; (2) collaborer avec eux pour trouver des informations nouvelles et pertinentes susceptibles de contribuer au changement souhaité; et (3) établir des liens avec des leaders puissants qui soutiennent également le changement (Kristonis, 2005). Cette deuxième étape est souvent la plus difficile en raison du niveau d’incertitude et de peur associé au changement (Shirey, 2013). Il est donc important de compter sur une équipe solidaire et sur une communication claire pour parvenir au changement souhaité.

Enfin, la troisième étape, que Lewin a appelée « Recongeler », consiste à établir le changement comme nouvelle habitude. Elle est nécessaire pour que le changement mis en œuvre à la deuxième étape se maintienne (Kristonis, 2005). La réussite à ce stade créera un nouvel équilibre qui deviendra la nouvelle norme ou établira des attentes de rendement supérieur (Shirey, 2013).

Bien que le modèle de changement de Lewin soit bien connu et largement accepté dans les milieux de soins, il est souvent critiqué parce qu’il est considéré comme trop simpliste et linéaire. Le changement est souvent imprévisible et complexe, et les leaders efficaces doivent connaître de nombreux modèles de changement.

Figure 9.2.1 Les étapes du modèle Décongeler-Changer-Recongeler

décongeler, changer, recongeler, équilibre, forces motrices, forces restrictives

Le document « The Steps of the Unfreezing-Change-Refreezing Model » de Sonia Udod et Joan Wagner, conçu par JVDW Designs, est protégé par une licence internationale CC BY 4.0.

9.3 Changement planifié

Lippitt, Watson et Westley (1958) se concentrent davantage sur le rôle et la responsabilité des agent.e.s de changement que sur le processus de changement lui-même. Leur théorie, qui élargit le modèle de changement de Lewin à un processus en sept étapes, mise sur la participation des personnes touchées par le changement pendant les étapes de planification (Kritsonis, 2005; Lippitt et coll., 1958). Voici les sept étapes du modèle de changement planifié : (1) diagnostiquer le problème; (2) évaluer la motivation du groupe et la capacité de changement du système; (3) évaluer les ressources et la motivation des agent.e.s de changement; (4) établir des objectifs et des stratégies de changement; (5) déterminer le rôle des agent.e.s de changement; (6) maintenir le changement; et (7) mettre fin à la relation d’aide à mesure que le changement s’intègre à la culture organisationnelle (voir tableau 9.3.1).

Les étapes de ce modèle, qui ciblent les personnes touchées par le changement, misent sur les compétences de communication, l’établissement de relations, les stratégies de résolution de problèmes et la mise en œuvre de mécanismes de rétroaction (Kritsonis, 2005; Lehman, 2008).

Phases de changement

Ronald Havelock (1973) a quant à lui ajouté six phases de changement, de la planification au suivi, au modèle de changement de Lewin (voir tableau 9.3.1). Il aurait adapté le modèle « Décongeler-Changer-Recongeler » à deux forces sociales qui prenaient de l’ampleur dans la société de l’époque, soit l’explosion des connaissances scientifiques et l’exigence croissante que celles-ci soient utiles aux décideurs politiques, aux gouvernements, aux entreprises et à la société (Estabrooks, Thompson, Lovely et Hofmeyer, 2006, p. 29 et 30). Havelock a soutenu que le modèle de changement de Lewin répondrait plus efficacement aux situations réelles de gestion du changement s’il incluait le renforcement des connaissances, qui se concentre sur une intégration systématique des théories plutôt que sur des approches distinctes (Estabrooks et coll., 2006).

Voici les six phases du modèle de Havelock :

  1. Établir une relation. Havelock considérait que le besoin d’un changement dans le système est constaté à la première étape, la précontemplation.
  2. Diagnostiquer le problème. Au cours de cette phase de contemplation, les agent.e.s de changement doivent déterminer si le changement est nécessaire ou souhaité. Parfois, ils interrompent le processus parce qu’ils décident que le changement n’est pas nécessaire ou n’en vaut pas la peine.
  3. Acquérir les ressources nécessaires au changement. À cette étape, il est entendu que le changement est requis. L’élaboration de solutions commence lorsque les agent.e.s de changement recueillent autant d’informations que possible sur la situation à modifier.
  4. Choisir le cheminement de la solution. Un cheminement de changement est sélectionné parmi les options disponibles, puis il est mis en œuvre.
  5. Établir et accepter le changement. Les individus et les organisations résistent souvent au changement. Il faut donc intégrer celui-ci à une nouvelle routine. Des stratégies de communication, des stratégies d’intervention à l’intention du personnel, de la formation et des systèmes de soutien efficaces doivent être intégrés à la mise en œuvre.
  6. Entretien et séparation. Les agent.e.s de changement doivent surveiller le système touché pour stabiliser et maintenir le changement. Les agent.e.s de changement peuvent se retirer dès que le changement devient la nouvelle norme. (Tyson, 2010)

Théorie de la diffusion de l’innovation

La théorie en cinq étapes de Rogers explique comment un individu passe de la découverte d’une innovation à la décision de l’adopter ou de la rejeter (voir figure 9.3.1) (Kritsonis, 2005; Wonglimpiyarat et Yuberk, 2005). Ce qui distingue cette théorie, c’est que même si les agent.e.s de changement ne réalisent pas le changement souhaité, ils peuvent le reprendre ultérieurement à un moment plus opportun ou sous une forme mieux adaptée (Kritsonis, 2005). Rogers souligne également l’importance d’inclure les personnes clés (c’est-à-dire les décideurs politiques) qui veulent profiter de l’innovation, de miser sur les forces du groupe et de gérer les facteurs qui entravent le processus. Voici les cinq étapes de la théorie de Rogers :

  1. Connaissances. Une personne découvre une innovation, mais il manque d’informations.
  2. Persuasion. Une personne s’intéresse à l’innovation et s’informe.
  3. Décision. Une personne considère les avantages et inconvénients de procéder au changement.
  4. Mise en œuvre. Une personne adopte l’innovation et l’adapte à la situation. Au cours de cette étape, elle évalue également l’utilité de l’innovation, par exemple en continuant de s’informer.
  5. Confirmation. Une personne décide de conserver l’innovation. (Rogers, 1995)

Activité d’apprentissage essentielle 9.3.1

Regardez la vidéo « Lewin’s 3-Stage Model of Change: Unfreezing, Changing & Refreezing » (8:06) du site Education-Portal.com pour en savoir plus sur le modèle de changement de Lewin.

Regardez la vidéo « Rogers Diffusion of Innovation » (3:15) de Kendal Pho, Yuri Dorovskikh et Natalia Lara (Digital Pixels) pour en savoir plus sur la théorie de l’innovation de Rogers.

Figure 9.3.1 Les cinq étapes du processus de décision en matière d’innovation

cinq étapes, innovation, décision

Le document « The Five Steps of the Innovation Decision Process » de Sonia Udod et Joan Wagner, conçu par JVDW Designs, est protégé par une licence internationale CC BY 4.0.

La théorie de la diffusion de l’innovation de Rogers explique comment, pourquoi et à quel rythme les nouvelles idées sont adoptées par les personnes. En matière d’adoption d’innovation, Rogers classe les individus en cinq catégories. Les individus innovateurs sont prêts à prendre des risques; ils sont enthousiastes et s’épanouissent dans le changement. Ils jouent un rôle clé dans la diffusion de l’innovation en introduisant de nouvelles idées provenant du système externe (Rogers, 1995). Les premiers adoptants sont des individus plus discrets dans leurs choix d’adoption que les individus innovateurs. Ils adoptent le changement avec prudence. La majorité précoce désigne les individus qui adoptent une innovation beaucoup plus lentement que les individus innovateurs et les primo adoptants. La majorité tardive fait référence aux individus très sceptiques quant à l’adoption d’un changement. Enfin, les individus retardataires sont les derniers à adopter un changement ou une innovation. Ils ont généralement une aversion pour le changement, alors ils sont susceptibles de s’attacher aux traditions et d’éviter les tendances (Rogers, 1995).

Tableau 9.3.1. Comparaison des théories et modèles traditionnels de changement
Théories et modèles traditionnels de changement Processus
Processus de soins infirmiers
  • Examiner
  • Planifier
  • Mettre en œuvre
  • Évaluer
Lewin
  • Décongeler
  • Changer
  • Recongeler
Lippitt, Watson et Westley
  • Diagnostiquer le problème
  • Évaluer la motivation et la capacité de changement
  • Évaluer la motivation et les ressources des agent.e.s de changement
  • Sélectionner des objectifs de changement progressif
  • Choisir le rôle approprié des agent.e.s de changement
  • Maintenir le changement
  • Mettre fin aux relations d’aide
Havelock
  • Établir une relation
  • Diagnostiquer le problème
  • Acquérir des ressources
  • Choisir la solution
  • Obtenir l’acceptation
  • Maintenir et se retirer
Rogers
  • Connaissances
  • Persuasion
  • Décision
  • Mise en œuvre
  • Confirmation

9.4 Modèles de changement non linéaire

La plupart des organisations considèrent que le changement est séquentiel, linéaire, et qu’il se produit étape par étape. Cependant, le secteur des soins infirmiers a commencé à se pencher sur des modèles non linéaires pour effectuer des changements plus imprévisibles qui ne suivent pas un schéma ordonné.

Théorie du chaos

La théorie du chaos, considérée comme un sous-ensemble de la science de la complexité, est issue des premiers travaux d’Edward Lorenz dans les années 1960. Son objectif était d’améliorer les techniques de prévision météorologique. Les réponses non induites par l’homme dans l’environnement indiquent qu’il existe une certaine prévisibilité dans les modèles aléatoires (Thietart et Forgues, 1995; Wagner et Huber, 2003). Lorenz a découvert que même de légères modifications des facteurs aléatoires d’un système en évolution constante peuvent avoir des répercussions considérables sur le comportement de celui-ci à long terme et compliquer la prédiction des résultats futurs. Il est intéressant de noter que ce modèle non linéaire fait référence à des facteurs aléatoires contrôlés, ce qui peut être associé à des modèles reconnaissables et relativement prévisibles.

La théorie du chaos peut elle aussi structurer les processus de changement dans un environnement de soins extrêmement complexe en évolution. Malgré le désir sincère d’améliorer le fonctionnement de l’organisation ainsi que la qualité et la sécurité des soins aux patient.e.s, il est possible que le processus de changement néglige des facteurs contextuels. Par exemple, le modèle de prestation de soins d’une unité peut s’avérer inefficace si le personnel ne dispose pas des ressources nécessaires à sa mise en œuvre. Comprendre le fonctionnement des théories non linéaires peut accroître l’efficacité des organisations et des systèmes de soins au XXIe siècle.

Activité d’apprentissage essentielle 9.4.1

Regardez la vidéo TEDx Talk de Claire Burge intitulée « The Future of Work is Chaos » (13:43) pour mieux comprendre la théorie du chaos.

Activité d’apprentissage essentielle 9.4.2

Cindy est une infirmière diplômée qui a travaillé trois ans dans une unité chirurgicale très active d’un grand hôpital urbain. Elle aime son travail et souhaite suivre la formation requise pour travailler dans l’unité de soins intensifs du même hôpital. Elle a reçu une subvention d’un an pour mettre en place un programme de cardiologie à l’intention des patient.e.s et du personnel soignant. Ce projet sera évalué à la fin de l’année. Cindy, en tant qu’agente de changement, est responsable de l’exécution du changement. Stephanie, la gestionnaire en soins infirmiers, est d’un grand soutien, mais certains membres du personnel infirmier n’ont pas le temps ni la volonté de contribuer au succès du programme.

Comment Cindy devrait-elle procéder au changement? La théorie de changement de Lewin pourrait-elle la guider? Si oui, comment envisageriez-vous le changement?

Comment peut-elle persuader les autres membres du personnel infirmier d’y adhérer? Quelles stratégies de leadership et de suivi efficaces pourrait-elle intégrer au processus de changement?

9.5 Le processus infirmier en tant que processus de changement

Le processus de changement peut être lié au processus de soins infirmiers décrit en quatre étapes par Sullivan (2012). L’évaluation, la première étape, consiste à cerner le problème. Il s’agit de la collecte et de l’analyse des données. La définition du problème permet aux personnes concernées par une proposition de changement de comprendre le problème de manière claire et précise.

Ensuite, les agent.e.s de changement recueillent les données externes et internes requises (par exemple, au moyen de questionnaires sur la satisfaction des patient.e.s ou d’enquêtes auprès du personnel). Une analyse critique des données confirme la nécessité d’un changement. Les agent.e.s de changement cernent alors les résistances, proposent des solutions et commencent à développer un consensus au sujet du changement. Crédibles et respectés par le personnel, ils évalueront le climat politique, c’est-à-dire qu’ils détermineront qui bénéficiera du changement en accédant aux ressources, ce qui renforcera la capacité des leaders d’accroître les forces motrices et de réduire les forces restrictives (Lewin, 1951). Sullivan (2012) recommande de convertir les données en tableaux ou en graphiques, ce qui permet au personnel administratif et aux fournisseurs de soins de première ligne de comprendre et peut-être d’accepter plus facilement le changement.

La planification nécessite la participation du personnel qui sera touché par le changement. Les relations entre les membres du personnel peuvent être modifiées si les structures, les règles et les pratiques le sont. Celles-ci influencent à leur tour les besoins en main-d’œuvre, ce qui peut mener à l’embauche de nouvelles personnes ayant des compétences, des connaissances, des attitudes et des motivations différentes (Sullivan, 2012). Il devrait y avoir moins de résistance si le personnel participe à la planification, car les attitudes, les façons de penser et les comportements doivent changer pour s’adapter à une nouvelle méthode de travail.

Weiss et Tappen (2015) recommandent trois tactiques pour « décongeler » les membres du personnel. Tout d’abord, le partage d’informations aide le personnel à mieux comprendre pourquoi un changement est proposé. Deuxièmement, discréditer des croyances actuelles permet de démontrer qu’un objectif actuel du système cible doit être modifié parce qu’il est inadéquat, incorrect ou inefficace. Troisièmement, fournir une sécurité psychologique suffisante au personnel réduit les risques au minimum. Cette tactique est très utile, car elle rassure les membres, leur inspire confiance et les aide à accepter le changement. Ces trois tactiques permettent de réduire l’anxiété liée au changement. L’établissement de dates cibles et d’échéanciers pour évaluer les progrès accomplis et la possibilité pour les membres de faire part de leurs commentaires faciliteront le changement.

Au cours de la phase de mise en œuvre, les plans sont exécutés. Les agent.e.s de changement favoriseront l’établissement d’un climat positif et continueront de persuader les membres de prendre part au changement par divers moyens (information, formation, appui au personnel relatif aux changements). Ils mettront en œuvre des stratégies en vue de modifier la dynamique du groupe et d’encourager les membres à agir en fonction des décisions du groupe.

Au cours de l’évaluation, ils surveillent les indicateurs afin de déterminer si les objectifs ont été atteints et, le cas échéant, quels sont les résultats indésirables et les mesures à prendre face aux conséquences imprévues. Une fois le résultat souhaité obtenu, les agent.e.s de changement délèguent leurs responsabilités aux membres. Des politiques et des procédures peuvent être nécessaires pour stabiliser le changement dans le cadre de la pratique quotidienne. Les leaders, par leur enthousiasme, leur appui et leur rétroaction permanente, continuent de renforcer les comportements.

9.6 La roue de médecine comme modèle de changement

La roue de médecine, un cercle à quatre quadrants, représente un ensemble holistique de croyances englobant la raison, le corps, les émotions et l’esprit, qui sont à la base de l’être humain. Ces croyances ont été observées chez les cultures autochtones du monde pendant des milliers d’années (McCabe, 2008). Carl Jung et d’autres ont mis l’accent sur cette relation entre les quatre aspects de l’être humain comme moyen de se comprendre et de rester en bonne santé (McCabe, 2008). Les psychologues reconnaissent la roue de médecine comme « le mandala jungien – un symbole de plénitude » (Dapice, 2006, p. 251).

Figure 9.6.1 Roue de médecine

roue de médecine, corps, émotions, esprit, raison

Le document « Medicine Wheel as a Change Model » de Joan Wagner, conçu par JVDW Designs, est protégé par une licence internationale CC BY 4.0.

La roue de médecine est intégrée aux enseignements des personnes aînées de plus de 500 nations autochtones du Canada. Les enseignements sont similaires d’une nation à l’autre, mais l’emplacement des quatre dimensions sur la roue diffère légèrement (Clarke et Holtslander, 2010). La roue de médecine, au sein de la communauté, correspond à « un processus (guérison), à une cérémonie (sueries, cercles de partage) et à des enseignements (un code de vie) » (McCabe, 2008, p. 34). Les populations autochtones considèrent que la participation communautaire aux cérémonies est un élément important du processus de guérison (McCabe, 2008). La roue de médecine aide les membres de la communauté à établir des liens entre eux. Elle favorise aussi l’équilibre et l’harmonie entre les quatre dimensions, soit la raison, le corps, les émotions et l’esprit, tant pour la personne et que pour la communauté élargie (Clarke et Holtslander, 2010).

La littérature récente se concentre sur l’utilisation de la roue de médecine pour guérir d’une maladie et retrouver la santé. La roue de médecine, qui vise un changement sain, peut être adaptée aux besoins spécifiques de la clientèle ou de la communauté en tenant compte du contexte culturel, du statut socioéconomique, de la situation familiale, du processus de la maladie et d’autres facteurs importants pour aboutir à l’équilibre, à la guérison et à la croissance dans les quatre aspects. La littérature scientifique décrit l’utilisation de la roue de médecine dans la formation sur le diabète (Kattelmann, Conti et Ren, 2010), les soins de fin de vie pour les peuples autochtones (Clarke et Holtslander, 2010), les programmes de prévention de la toxicomanie (Walsh-Buhl, 2017), l’orientation de groupes d’adolescent.e.s (Garner, Bruce et Stellern, 2011) et l’élaboration d’un programme de rétention des étudiant.e.s diversifié.e.s en soins infirmiers (Charbonneau-Dahlen, 2015). La roue de médecine est un guide qui vise le changement holistique de l’individu et de la communauté.

Activité d’apprentissage essentielle 9.6.1

Regardez la vidéo « Medicine Wheel: Beyond the Tradition » (9:20) pour une explication et une vue d’ensemble de la roue de médecine Lakota (Sioux), selon Don Warne, puis répondez aux questions suivantes :

  1. Que représente la roue de médecine?
  2. Comment l’utilisation de la roue de médecine s’étend-elle de l’époque traditionnelle à l’époque moderne?
  3. Quels sont les cadeaux qui viennent de chacune des quatre directions?

9.7 Le rôle des leaders en soins infirmiers dans la gestion du changement organisationnel

Le rôle des leaders en soins infirmiers en tant qu’agent.e.s de changement, complexe et varié, représente des défis importants en matière de leadership. Les changements organisationnels novateurs peuvent être gérés efficacement à l’aide de stratégies et d’outils de leadership éprouvés (MacPhee, 2007). Les agent.e.s de changement ont deux responsabilités principales : changer eux-mêmes et renforcer les capacités des autres. Stefancyk et coll. (2013) ont proposé le concept de mentor de changement, qui s’appuie sur le rôle traditionnel des leaders en soins infirmiers. Les mentors ou leaders de changement font appel à des comportements de mentorat, par exemple l’orientation, la formation et l’inspiration (Stefancyk et coll., 2013). Les leaders aident à définir les comportements attendus relatifs au rendement du personnel et donnent de la rétroaction sur le progrès du projet de changement. Par la formation, les mentors de changement encouragent le personnel à participer à la prise de décision, ce qui crée et entretient une culture qui favorise l’apport des autres, la pensée créative et le processus de recherche des meilleures solutions pour relever les défis. Les leaders ont pour rôle d’inspirer, ils expriment leur confiance et leur reconnaissance envers les contributions importantes que le personnel apporte au processus de changement.

L’établissement de partenariats avec le personnel, notamment une communication bidirectionnelle interne et externe, est essentiel pour instaurer la confiance et le travail d’équipe (Gilley et coll., 2009; Yukl, 2013). Les stratégies de communication peuvent consister à expliquer aux personnes touchées les répercussions du changement sur leur travail et à les informer en temps opportun pour les aider à prendre des décisions efficaces. Les chercheur.euse.s en soins infirmiers (MacPhee, 2007; Morjikian, Kimball et Joynt, 2007; Stefanyk et coll., 2013) suggèrent que, pour communiquer efficacement, les leaders doivent développer la confiance en démontrant leur accessibilité, en établissant un lien, en écoutant l’opinion des autres et en la reformulant même lorsqu’ils ne sont pas d’accord. Être à l’écoute du personnel signifie également être à l’affût de la fatigue du changement, un état dont souffrent les personnes soumises à des changements incessants et accablants dans leur environnement de travail (Bowers, 2011). Les compétences et les comportements de leadership et de gestion peuvent influencer positivement l’exécution des initiatives de changement (Gilley et coll., 2009).

Un appel à l’action signifie que les leaders savent quand les stratégies de changement doivent être modifiées pour favoriser un suivi efficace. Il est essentiel de parcourir les structures organisationnelles complexes des réseaux de pouvoir formels et informels pour préparer la réussite d’un changement. L’agilité organisationnelle exige que les leaders comprennent le fonctionnement de l’organisation de même que ses principales politiques, pratiques et procédures.

9.8 Stratégies de changement

Selon le modèle classique développé par Bennis, Benne et Chinn (1960), trois stratégies peuvent faciliter le changement. Les caractéristiques des agent.e.s de changement et l’ampleur de la résistance manifestée détermineront laquelle suivre.

  1. Les stratégies de pouvoir-coercition sont basées sur l’application du pouvoir par le biais d’une autorité légitime (Sullivan, 2012). Les leaders en soins infirmiers font peu d’efforts pour imposer le changement, et le personnel n’a pas la possibilité de modifier le processus de changement. Les stratégies de pouvoir-coercition peuvent être utiles lorsque le changement est crucial, que le temps est limité, que les niveaux de résistance sont élevés et que les chances de parvenir à un consensus organisationnel sont faibles, voire inexistantes (Sullivan, 2012).
  2. Les stratégies empiriques-rationnelles partent du principe que la présentation de l’information est la principale condition du changement (Sullivan, 2012). Elles tiennent pour acquis que les gens sont rationnels et qu’ils agissent dans leur propre intérêt s’ils comprennent que le changement leur sera bénéfique. Elles peuvent être efficaces si le changement est perçu comme raisonnable ou bénéfique pour les individus.
  3. Les stratégies normatives-rééducatives considèrent que l’acceptation du changement par les individus est influencée par les normes et valeurs sociales (Sullivan, 2012). Les leaders en soins infirmiers se concentrent sur les motivations comportementales des individus, par exemple les rôles, les attitudes, les sentiments et les relations interpersonnelles, pour mettre en œuvre le changement dans le milieu de soins de manière efficace.

9. 9. Réaction et résistance au changement

Plusieurs facteurs peuvent influencer la résistance au changement. Il n’est pas rare que le personnel déclare qu’il n’a pas été consulté pendant la prise de décision concernant les changements dans sa pratique et que, par conséquent, il résiste vigoureusement au changement. Bien que tout le monde n’adhère pas au changement, les réactions varient du manque d’enthousiasme au sabotage manifeste (Gaudine et Lamb, 2015). La résistance peut être liée à une perte personnelle, à des sentiments d’inadéquation, à un manque de compétence et à un manque de confiance en ses capacités (Austin et Claassen, 2008). Les leaders qui peuvent aider les membres à s’approprier psychologiquement le changement ont plus de chances de voir cette initiative soutenue et intégrée dans la pratique.

Nous proposons les stratégies suivantes pour contrer la résistance :

  • Comprendre que la résistance est un élément naturel du processus, mais qu’elle doit être abordée de manière constructive pour que le changement s’effectue.
  • Apprenez pourquoi une personne résiste au changement. La résistance peut être liée à un manque de compréhension du processus de changement, ce qui nécessite de soutenir sa capacité à s’adapter au changement.
  • Associez certaines des anciennes méthodes de travail au changement afin d’y apporter une certaine familiarité (Austin et Claassen, 2008).
  • Ciblez les personnes prêtes à essayer de nouvelles pratiques, ce qui peut réduire la résistance éventuelle des autres lorsque le changement est présenté (Bowers, 2011).
  • Aidez le personnel à comprendre la valeur que le changement apportera à sa pratique et à s’approprier le changement afin que celui-ci soit accepté et maintenu.
  • Communiquez clairement les avantages du changement (Yukl, 2013). Une communication structurée et transparente favorise la participation du personnel.

Résumé

L’une des tâches les plus difficiles des leaders en soins infirmiers est de diriger le changement au sein d’une organisation. Ils doivent posséder d’excellentes compétences en matière de leadership, connaître les théories de changement et collaborer efficacement avec le personnel pour concrétiser la vision. Mentorer le changement consiste à guider le changement, à mobiliser des ressources en vue de l’innovation et à améliorer les résultats.

À la fin du chapitre, vous devriez être en mesure de faire ce qui suit :

  1. Expliquer pourquoi les membres du personnel infirmier peuvent être des agent.e.s de changement.
  2. Décrire les différentes théories de changement.
  3. Discuter de la similitude entre le processus de soins infirmiers et le processus de changement.
  4. Discuter de la roue de médecine en tant que modèle de changement.
  5. Décrire le rôle des gestionnaires en soins infirmiers dans la mise en œuvre du changement et l’appel à l’action.
  6. Distinguer les stratégies de changement.
  7. Savoir gérer la résistance au changement.

Exercices

  1. Habituellement, comment réagissez-vous au changement dans votre vie personnelle? Comment avez-vous réagi à votre première situation clinique?
  2. Déterminez les compétences de leadership que les leaders en soins infirmiers doivent démontrer lors de la mise en œuvre d’un changement.
  3. Relevez un changement qui se produit sur votre lieu de travail. Analysez le fonctionnement du processus de changement selon l’une des théories de changement présentées dans ce chapitre.
  4. Pouvez-vous nommer des facteurs qui favorisent l’échec des projets de changement?
  5. Réfléchissez à la contribution que vous pouvez apporter à un processus de changement.

Références

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10

S’appuyer sur la défense d’une cause pour agir de manière éthique

Joan Wagner

Selon moi, avec sa richesse et son dynamisme, notre beau pays peut devenir un modèle de société juste dans laquelle chaque citoyen jouit de ses droits fondamentaux.

-Pierre Elliott Trudeau, 1968

Introduction

Le Code de déontologie de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada vise à guider le personnel infirmier du Canada tout au long de sa carrière. Selon ce code, « L’éthique infirmière s’intéresse aux grandes questions sociales touchant la santé et le bien-être. Cela signifie que les infirmières et infirmiers s’efforcent de se tenir au courant des aspects de la justice sociale qui touchent les déterminants sociaux de la santé et le bien-être et de préconiser des améliorations dans ce sens » (AIIC, 2017, p. 4). La première partie du Code de déontologie décrit les responsabilités éthiques fondamentales de la pratique infirmière. Le Code de déontologie repose sur les relations professionnelles du personnel infirmier avec les personnes recevant des soins ainsi qu’avec les étudiants, les collègues infirmiers et les autres prestataires de soins de santé. Les sept valeurs primaires sont les suivantes :

  1. Fournir des soins sécuritaires et éthiques, avec compétence et compassion
  2. Promouvoir la santé et le bien-être
  3. Promouvoir et respecter la prise de décision éclairée
  4. Honorer la dignité
  5. Respecter la vie privée et protéger la confidentialité
  6. Promouvoir la justice
  7. Accepter l’obligation de rendre compte

La deuxième partie du Code de déontologie de l’AIIC « décrit les mesures que peuvent prendre les infirmières et infirmiers pour lutter contre les injustices sociales. La pratique infirmière respectueuse de l’éthique consiste à traiter des grands aspects de la justice sociale qui sont associés à la santé et au bien-être » (AIIC, 2017, p. 4). Un aperçu des responsabilités éthiques responsables du personnel infirmier converge vers la défense des intérêts, telle que dictée par le Code de déontologie de l’AIIC et nécessaire pour favoriser la santé optimale des citoyens du monde entier.

Objectifs d’apprentissage

  1. Apprendre l’importance de l’éthique dans le leadership infirmier.
  2. Décrire ce qu’est la défense des intérêts.
  3. Comparer l’approche militante à l’approche paternaliste dans la lutte contre les inégalités en santé.
  4. Étudier comment les responsables du personnel infirmier utilisent la défense des intérêts pour donner lieu à des changements qui s’attaquent aux inégalités en santé.
  5. Énumérer les différents types de pouvoir.
  6. Reconnaître le rôle que les responsables du personnel infirmier peuvent jouer dans l’action politique.
  7. Réfléchir à votre propre réaction au changement.

10.1 Intégration de l’éthique dans le leadership infirmier

Il incombe aux responsables du personnel infirmier d’intégrer les directives professionnelles (p. ex., le code de déontologie de l’AIIC) à l’éthique de leur organisme de soins de santé (p. ex., la mission, la vision, les valeurs) afin d’offrir des conseils sur l’éthique aux prestataires de soins. Par la même occasion, ils sont tenus d’analyser de manière critique les situations et de prendre les mesures appropriées en ce qui concerne les pratiques susceptibles de menacer la santé et la sécurité d’un patient. Les responsables du personnel infirmier doivent adopter des comportements justes et bienveillants qui favorisent le bien commun pour les bénéficiaires des soins ainsi que pour les étudiants, les collègues infirmiers et les autres prestataires de soins de santé. La citation suivante souligne le lien entre l’éthique et les patients : Le but ultime de l’éthique infirmière est de promouvoir le bien-être des patients par la prestation de bons soins infirmiers (Johnstone, 2017, p. 19). Les soins infirmiers éthiques et les bons soins infirmiers sont, par définition, des termes similaires qui décrivent les actions requises pour obtenir des soins de santé de qualité.

Des recherches récentes menées en Australie ont porté sur les principes éthiques qui guident le leadership dans la pratique infirmière clinique (Mannix, Wilkes et Daly, 2015). Elles ont révélé trois grands principes qui façonnent la pratique clinique au quotidien. Ces principes sont pertinents pour les prestataires et la pratique infirmière dans le monde entier. Les principes qui ont été examinés sont les suivants :

  1. Le personnel infirmier reste fidèle à ses convictions, en incarnant une pratique fondée sur des principes;
  2. Le personnel infirmier reconnaît que toutes les pratiques ne conviennent pas à tous les patients, ce qui permet de faire preuve de jugement éthique dans les situations ambiguës;
  3. Le personnel infirmier est ouvert aux préoccupations des gens et propose des solutions justes et équitables (Mannix et coll., p.1605).

Ces principes traduisent un sentiment de fierté à l’égard de la pratique infirmière, une volonté de défendre des pratiques qui répondent aux besoins de la patientèle et une compréhension de la manière de favoriser le changement en écoutant les gens et en leur donnant les moyens d’y participer. En vertu du Code de déontologie et des principes éthiques qui façonnent leur pratique quotidienne, les responsables du personnel infirmier sont tenus de défendre, au nom de leurs collègues et du grand public, des conditions de vie saines au sein de communautés saines.

10.2 Défense des intérêts

Figure 10.2.1 Défense des intérêts des étudiants à l’extérieur de l’édifice de l’Assemblée législative de la Saskatchewan

défense des étudiants, politique, activisme, formation en soins infirmiers

L’image « Photo Students Legislative Building, Nursing Education 2004 » du College of Registered Nurses of Saskatchewan est sous licence Creative Commons Attribution 4.0 International.

Le dictionnaire en ligne Merriam–Webster dictionary définit la défense des intérêts comme « l’acte ou le processus de soutien d’une cause ou d’une proposition [ou] l’acte ou le processus de défense de quelque chose ». Il convient d’examiner la manière dont l’AIIC décrit la défense des intérêts pour mieux comprendre la responsabilité de l’infirmière professionnelle en la matière :

La défense des intérêts consiste à inciter d’autres personnes à participer, à faire entendre sa voix et à rassembler des preuves pour influencer les politiques et les pratiques, autrement dit, à s’élever contre l’iniquité et l’inégalité. Elle implique une participation directe et indirecte aux processus politiques et reconnaît les rôles importants des preuves, du pouvoir et de la politique dans l’avancement des solutions politiques (AIIC, 2018).

Pour en savoir plus sur la défense des intérêts, consultez la page Web de l’AIIC intitulée Représentation et politiques.

Sensibilisation

La description courte, mais complète de la défense des intérêts par l’AIIC exige que l’infirmière professionnelle soit consciente de l’iniquité et de l’inégalité dans la pratique auprès de la patientèle, entre collègues et au sein des communautés locales, nationales et internationales. Un simple manquement aux pratiques exemplaires dans la pratique auprès des patients est un exemple d’iniquité ou de traitement injuste, p. ex., le traitement d’un ulcère chronique compliqué nécessite un pansement spécialisé, mais l’établissement de soins où le patient est traité n’a pas le pansement requis en raison de restrictions financières. Par conséquent, un pansement moins coûteux est utilisé et la cicatrisation est ralentie. L’infirmière responsable, compétente et respectueuse de l’éthique, comprend les conséquences d’un traitement inapproprié des plaies et est prête à prendre les mesures qui s’imposent pour respecter les pratiques exemplaires.

Elle est consciente de la nécessité de maintenir le moral et l’enthousiasme au travail du personnel des soins de santé. Contrairement aux actions décrites dans l’expression « le personnel infirmier mange ses petits », une infirmière responsable qui réussit encadre les nouvelles recrues en travaillant de pair les autres membres de l’équipe pour les intégrer et les aider à se réaliser pleinement dans la profession.

La conscience des responsables en ce qui a trait à la santé, au bien-être et à la justice sociale va au-delà du lieu de travail et s’étend à ses communautés locales, nationales et mondiales. Un leader s’efforce de favoriser une vie saine et le bien-être des personnes de tous âges, comme le prévoient les objectifs de développement durable des Nations Unies (OMS, 2015). Un responsable ne travaille peut-être pas directement avec chaque communauté, mais peut avoir une influence indirecte à grande échelle par des actions et communications axées sur la santé au sein de sa propre communauté.

Communauté, communication et action fondée sur des données probantes

La défense des intérêts nécessite l’engagement ou la participation de plusieurs personnes. Il ne s’agit pas d’un acte qui relève d’une seule personne. La personne responsable doit communiquer avec les autres et faire participer la communauté à la mise au point de plans et de solutions potentielles aux problèmes liés à la santé. Son habileté à accéder à la recherche pertinente garantit que les projets de défense des intérêts reposent sur des données probantes qui renforcent l’action communautaire.

Activité d’apprentissage essentielle 10.2.1

L’AIIC a mené une étude de milieu en 2016 pour cerner les préoccupations des Canadiens en santé. Les études de milieu permettent de cerner les principales tendances et questions susceptibles d’avoir une incidence sur les politiques et les programmes de l’AIIC et de ses membres, pour ainsi sensibiliser les leaders infirmiers au Canada. Les conclusions visent à éclairer la prise de décision stratégique du conseil d’administration de l’AIIC.

Lisez le résumé de l’étude de milieu de l’AIIC « June 2016 Environmental Scan Summary » et passez en revue les principales tendances et questions relatives aux soins de santé pour les Canadiens.

  1. Nommez et décrivez une tendance ou un problème dans chacune des catégories suivantes :
    •  Politique
    •  Économique
    •  Social
    •  Technologique
    •  Gestion
  2. Sélectionnez trois thèmes de l’étude de milieu de l’AIIC qui, selon vous, auront la plus grande incidence sur ses politiques. Justifiez le choix de ces trois thèmes.

10.3 Défense des intérêts des clients : La frontière ténue entre la défense des intérêts et le paternalisme

La défense des intérêts est irrévocablement liée au changement. En fait, la « défense d’une cause » suggère que les personnes et les communautés s’efforcent de promouvoir le changement. La littérature sur la défense des intérêts des patients offre davantage de renseignements sur le sujet.

Virginia Henderson a décrit la défense des intérêts comme le fait de fournir aux personnes des soins de santé qu’elles feraient elles-mêmes si elles avaient « la force, la volonté ou les connaissances nécessaires pour s’occuper d’elles-mêmes » (Halloran, 1996, p. 18). Cependant, d’autres théoriciens comme Kohnke (1982) ont suggéré que le rôle principal du prestataire qui participe à la défense des intérêts est d’informer le patient et l’aider à prendre des décisions. Gadow (1980) et Curtin (1979) ont mis en garde les prestataires de soins, affirmant que les professionnels ne peuvent pas décider ce qui est dans l’intérêt supérieur du patient s’ils ne comprennent pas les valeurs de ce dernier. Zomorodi et Foley (2009) ont en outre indiqué que la frontière ténue entre la défense des intérêts et le paternalisme peut être franchie (p. 1748) lorsque les patients sont incapables de communiquer ou d’être autonomes en raison d’une maladie ou d’intimidation.

Le paternalisme est défini comme l’annulation intentionnelle des préférences ou des actions connues d’une personne par une autre personne, lorsque cette dernière justifie l’action dans le but de bénéficier ou d’éviter de nuire à la personne dont la volonté est annulée (Johnson, cité dans Zomorodi et Foley, 2009, p. 1747). Le paternalisme est contraire aux valeurs exprimées par l’Organisation mondiale de la santé dans la Charte d’Ottawa pour la promotion de la santé (OMS, 1986), notamment où celle-ci affirme que toute personne a le droit de contrôler tous les facteurs qui contribuent à sa santé. Des auteurs récents soulignent que les patients ont le droit de prendre leurs propres décisions, même lorsque les soignants professionnels présents sont d’avis que ces décisions sont mauvaises (McKinnon, 2014; Zomorodi et Foley, 2009; Griffith, 2015; Risjord, 2013). Ce débat entre autonomie et paternalisme fait rage depuis des siècles. John Stuart Mill s’est clairement prononcé en faveur de l’autonomie il y a près de deux siècles :

La seule raison pour laquelle un pouvoir peut être légitimement exercé sur un membre d’une communauté civilisée contre sa volonté est d’empêcher que d’autres personnes ne subissent un préjudice. Son propre bien, physique ou moral, n’est pas un motif suffisant (cité dans McKinnon, 2014, p. 677 ).

10.4 Justice sociale et défense des intérêts

Le Code de déontologie de l’AIIC soutient le principe de justice sociale, lequel stipule que tous les peuples, sans discrimination, « ont le droit de vivre dignement et de jouir librement des fruits du progrès social, et doivent, pour leur part, contribuer à ce progrès » (Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, 1969, partie 1, article 1).

Les soins infirmiers éthiques abordent les aspects de la justice sociale qui sont considérés comme essentiels pour la santé et le bien-être des personnes, des communautés et des populations dans le monde entier. Selon l’AIIC,

la défense des intérêts désigne l’action de soutenir ou de recommander une cause ou une ligne de conduite, entreprise au nom de personnes ou d’enjeux. Elle est liée à la nécessité d’améliorer les structures sociétales et les systèmes afin d’accroitre l’équité et améliorer la santé de tous. Individuellement et collectivement, le personnel infirmier s’efforce de combattre les inégalités sociales pour les éliminer (AIIC, 2017, p. 5).

Les responsables du personnel infirmier œuvrent pour la santé de tous en s’efforçant d’obtenir les ressources fondamentales essentielles à la santé, quel que soit le système social, culturel ou économique dominant. Les ressources fondamentales dont toutes les personnes ont besoin sont la paix, un toit, une éducation, de la nourriture, un revenu, un écosystème stable, des ressources durables, de la justice sociale et de l’équité (gouvernement d’Australie-Méridionale et Organisation mondiale de la santé, 2017).

Il est important de se rappeler que les personnes en santé participent au développement social et économique de la communauté ou de la nation. La défense de la santé favorise les facteurs politiques, économiques, sociaux, culturels, environnementaux, comportementaux et biologiques qui améliorent la santé au lieu de la faire se dégrader. La gestion des facteurs qui déterminent la santé d’une personne permet à tout le monde de réaliser pleinement leur potentiel de santé (OMS, 2017).

Activité d’apprentissage essentielle 10.4.1

La défense de la justice sociale exige que nous nous penchions sur les inégalités sociales, tant au Canada qu’à l’étranger. Nombreux sont les groupes au Canada aux prises avec des inégalités sociales. Les populations autochtones, par exemple, ont été victimes de la colonisation pendant des siècles. Ce n’est que récemment que la population canadienne a pris conscience des problèmes liés aux pensionnats.

Veuillez regarder la conférence TEDx de Dawn Tisdale sur les conséquences des pensionnats sur les soins de santé autochtones (The Impact of Residential Schools on Aboriginal Healthcare, 13:04).

Après le visionnement, répondez aux questions suivantes sous l’angle de la justice sociale :

  1. Quelles sont les conséquences des pensionnats sur la santé des Autochtones?
  2. Quelles mesures ont été prises pour résoudre les problèmes de santé liés aux pensionnats?
  3. Quelles autres mesures recommanderiez-vous?

10.5 Pouvoir et défense d’une cause

Qu’est-ce que le pouvoir?

Des universitaires de nombreuses disciplines ont étudié le concept insaisissable du pouvoir. Hokanson Hawks (1991) lui a donné deux significations : (1) le pouvoir ou la capacité d’accomplir des choses, et (2) le pouvoir sur le comportement ou les décisions d’autrui ou la capacité de les influencer. La définition du pouvoir, celle que l’on trouve généralement dans les recherches sur le leadership, est la capacité d’accomplir des choses, de mobiliser des ressources, d’obtenir et d’utiliser tout ce dont une personne a besoin pour tenter d’atteindre les objectifs qu’elle s’est fixés (Kanter, 1993, p. 166). Le pouvoir est une force inhérente et personnelle qui entre en jeu lorsque les cliniciens influencent la prise de décision d’autrui en santé (Milton, 2016). Lorsque le pouvoir est défini comme la capacité d’accomplir des choses, il s’agit d’une ressource importante pour le personnel infirmier et elle mérite qu’on l’étudie à fond.

Sullivan (2013) a adapté la description classique du pouvoir social au point de vue des soins infirmiers. Selon MacPhee (2015), les cinq types de pouvoir social en soins infirmiers sont les suivants : (1) le pouvoir personnel d’après la réputation et la crédibilité d’une personne; (2) le pouvoir d’expert [notamment la possession de compétences et de connaissances] dont les autres ont besoin (p. 188); (3) le pouvoir lié au rang qui découle du poste occupé au sein d’un organisme ou groupe; (4) le pouvoir perçu lié au statut d’une personne puissante; et (5) le pouvoir lié aux contacts qui découle d’une association avec des personnes puissantes ou des liens entretenus avec eux. Les leaders infirmiers qui comprennent ces versions du pouvoir social, adaptées aux soins infirmiers, peuvent comprendre la dynamique du pouvoir qui influence la prise de décision en milieu de travail.

Cependant, la complexité croissante des organismes de santé exige que les leaders infirmiers envisagent le pouvoir sous d’autres angles. Certains auteurs envisagent le pouvoir comme s’il était dans les relations (Davidson, 2015). Davidson affirme que, par la nature même des êtres humains, les gens ont toujours des relations où une dynamique du pouvoir est en jeu. Stacey (2006, mentionné dans Davidson, 2015) souligne l’importance des relations en tant que pouvoir donnant lieu à des possibilités et à des limites :

Une personne qui souhaite établir et entretenir une relation avec une autre personne ne peut pas faire ce qu’elle veut. Dès le début d’une relation, des limites sont imposées par les deux parties… . et des possibilités s’offrent aux deux parties aussi (p. 134).

Udod (2008) s’appuie sur les travaux de Michel Foucault pour explorer le pouvoir du personnel cadre infirmier. Foucault indique aussi que le pouvoir n’est pas une propriété, mais plutôt une relation ou une situation… . . . Un pouvoir exercé par rapport à d’autres provoque des réactions et des effets (voir Udod, p. 81). Le pouvoir est considéré comme une stratégie, ce qui suggère que le personnel infirmier déploie des tactiques pour se conformer au pouvoir et éviter de le combattre. Enfin, le pouvoir ne se manifeste pas que dans les actions des leaders. Il se manifeste aussi dans les actions des personnes qui y résistent (pensons aux dénonciateurs). En résumé,

le personnel infirmier doit travailler avec le pouvoir plutôt que contre lui et reconnaître que sa tâche n’est pas de passer par-dessus les personnes plus puissantes que lui. . Il doit plutôt comprendre le fonctionnement du pouvoir et ses effets pour améliorer son sentiment d’autonomie et, par conséquent, sa pratique (Udod, 2008, p. 88).

Activité d’apprentissage essentielle 10.5.1

Lisez l’article suivant pour vous renseigner sur le pouvoir, puis répondez aux questions suivantes.

Davidson, S. J. (2015). Shifting the balance: Relationship as power in organizational life. Nursing Forum, 50(4), p. 258-264.

  1. Quelles sont les trois hypothèses qu’un rationaliste ou positiviste formule à propos du pouvoir?
  2. Quelles sont les limites de l’étude du pouvoir selon l’approche rationaliste ou positiviste?
  3. Quelle est la principale hypothèse sur le pouvoir dans l’utilisation de l’analyse des processus complexes de réaction?
  4. Pourquoi devrait-on étudier les relations de pouvoir dans les organismes et y porter attention?

Pouvoir et soins de santé pour les Autochtones

Reconnaître les conséquences de la colonisation et des pensionnats sur la santé et le bien-être des populations autochtones demande aux leaders infirmiers d’examiner attentivement le lien entre le pouvoir et les diverses populations et, plus particulièrement, la relation entre le pouvoir et la population autochtone. Les travaux de Foucault exigent que nous reconnaissions la façon dont les relations de pouvoir façonnent la production de la vérité (Macias, 2015, p. 225) et dont le discours définit et limite la liberté du sujet (p. 231). Foucault suggère également qu’un changement de discours peut donner lieu à la liberté.

Madeleine Dion Stout (2015), une locutrice du cri originaire de l’Alberta devenue infirmière autorisée il y a environ 46 ans, a travaillé pour améliorer la santé des Autochtones en changeant le discours sur le pouvoir. Elle a abordé le besoin pour les Autochtones de développer leurs propres déterminants de la santé, plutôt que d’accepter les valeurs de la société colonisatrice. Elle a expliqué avec grande éloquence, en cri et en anglais, comment les Autochtones feront pour reprendre leurs droits sur leur santé et leur bien-être. Selon ses propres dires :

kaskitamasowinmiýw-āyāwin est la santé et le bien-être que nous avons créé pour nous-mêmes. kaskitamasowinmiýw-āyāwin signifie l’état de santé que nous nous souhaitons, soit à nous-mêmes ainsi qu’à nos familles, collectivités et nations. Nous obtenons kaskitamasowin miýw-āyāwin par notre propre volonté, nos propres capacités et avec les ressources à notre disposition immédiate. kaskitamasowinmiýw-āyāwin provient de notre volonté intérieure, de nos forces intérieures et de nos voix intérieures (p. 145).

Les changements en matière de propriété de la santé et du bien-être des Autochtones deviennent rapidement de plus en plus évidents dans la relation entre Santé Canada et la population autochtone. Conformément aux souhaits des peuples autochtones du Canada de disposer d’un plan de santé qui répond à leurs besoins, le gouvernement du Canada a conçu le plan suivant : Soins à domicile et en milieu communautaire des Premières Nations et des Inuits (SDMCPNI) : plan décennal (2013-2023) (Santé Canada, 2015). Ce plan fournit un modèle de collaboration avec les partenaires des Premières Nations et des Inuits dans les soins de santé. Il sera mis à jour tous les ans ou au besoin. Le plan est conçu pour répondre aux besoins uniques des peuples autochtones et représente « [u]n continuum de services de soins à domicile et en milieu communautaire qui sont complets, sensibles à la culture, accessibles, efficaces et équivalents à ce que reçoivent les autres citoyens canadiens, et adaptés aux besoins particuliers des Premières Nations et des Inuits en matière de santé et de services sociaux. » (Santé Canada, 2015, p. 1).

Figure 10.5.1 Première infirmière autochtone dans le Nord de la Saskatchewan

Première infirmière autochtone, Saskatchewan

[janvier 1958], photo reproduite avec l’autorisation des archives provinciales de la Saskatchewan, Photographic Services Branch Collection, numéro de collection R-B6805. Tous droits réservés. À propos de la photo : Jean (Cuthand) Goodwill a été la première infirmière autochtone du Nord de la Saskatchewan. La photo a été prise au poste de soins infirmiers Indian Health à La Ronge, en Saskatchewan. Jean Goodwill et sa collègue Jocelyn Bruyere ont créé un registre du personnel infirmier autochtone, qui est devenu le registre canadien du personnel infirmier autorisé d’ascendance autochtone, et a ainsi jeté les fondations de la création de l’Association des infirmières et infirmiers autochtones du Canada en 1975.

10.6 Autonomisation et défense d’une cause

Les discussions sur l’autonomisation du personnel infirmier dans le milieu de la santé sont présentes dans l’ensemble de la littérature mondiale sur les soins infirmiers. L’autonomisation est le fait de donner officiellement l’autorité ou le pouvoir au sens de la loi de promouvoir le plein épanouissement ou son influence (inspiré de la définition du terme empowerment dans le dictionnaire Merriam-Webster, s.d.). Pour mieux comprendre le concept, tournons-nous vers la définition de Conger et Kanungo(1988) : processus par lequel on renforce les sentiments d’efficacité personnelle des membres d’une organisation en relevant les conditions qui favorisent l’impuissance et en les supprimant au moyen de pratiques organisationnelles officielles et des techniques officieuses permettant de fournir de l’information sur l’efficacité (p. 474). De nombreux.euses chercheur.euse.s infirmier.ère.s ont étudié ce concept pour tenter de mieux comprendre la relation entre l’autonomisation, les travailleurs et le milieu de travail.

Activité d’apprentissage essentielle 10.6.1

Des chercheur.euse.s infirmier.ère.s ont effectué de nombreuses études sur ce concept en milieu de travail. La Dre Heather Laschinger de l’Université Western en Ontario a joué un rôle important dans bon nombre de ces études.

Cherchez le terme « structural empowerment » et l’auteur « Laschinger » dans la base de données du CINAHL. Combien d’études trouvez-vous?

La Dre Laschinger est décédée en 2016. Cherchez des articles que des chercheur.euse.s infrmier.ère.s. canadien.ne.s auraient publiés après 2016 portant sur l’autonomisation des prestataires de soins aux patient.e.s, tels que les infirmier.ère.s, les ergothérapeutes et les aides-soignant.e.s. Combien d’études trouvez-vous?

Autonomisation structurelle

Bien des recherches sur l’autonomisation dans la littérature récente sur les soins infirmiers portent sur le travail ethnographique de Kanter (1993) sur l’autonomisation structurelle. Ce travail porte sur les aspects contextuels ou sociostructurels d’un organisme qui favorisent l’autonomisation. L’autonomisation structurelle signifie le partage du pouvoir et le transfert éventuel du pouvoir de décision des gestionnaires aux subalternes dans la hiérarchie organisationnelle. L’applicabilité du pouvoir partagé aux besoins des employés est la clé du succès de l’autonomisation structurelle qui permet aux employés de prendre des décisions liées à leur travail ou à leur rôle (Spreitzer, 2008).

L’autonomisation structurelle comporte quatre dimensions (Havens et Laschinger, 1997). Les employés d’un organisme profitent de l’autonomisation structurelle lorsqu’ils ont accès à ce qui suit : (1) des occasions (avancement ou nouvelles expériences); (2) de l’information (connaissances sur l’organisation nécessaires pour être efficace); (3) des ressources telles que l’équipement, les fournitures et le personnel nécessaires pour effectuer le travail quotidien; et (4) un soutien (de la part des collègues et des supérieurs, si nécessaire, pour accomplir le travail et prendre des décisions). L’accès à l’autonomisation structurelle se fait par le biais du pouvoir officiel (le poste d’une personne dans l’organisation) et du pouvoir officieux (réseaux et alliances avec les superviseurs, les pairs et les collègues, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’organisation). La présence des dimensions structurelles des occasions, de l’information, des ressources et du soutien fait que l’effectif devient autonome, est satisfait au travail et demeure en poste (Wagner et coll., 2010).

Autonomisation psychologique

L’autonomisation psychologique est un autre point de vue de l’autonomisation que l’on trouve dans la littérature récente. Elle porte davantage sur des aspects plus petits que l’autonomisation structurelle, notamment sur l’autonomisation psychologique d’une personne ou sur ses perceptions du pouvoir; Spreitzer (2008) parle des réactions d’une personne aux structures, politiques et pratiques avec lesquelles il doit travailler (p. 55). L’autonomisation psychologique ne porte pas sur le fait de partager le pouvoir organisationnel du gestionnaire, mais plutôt sur la façon dont les employés expérimentent leur travail. L’autonomisation psychologique se compose des éléments suivants : (1) le sens (l’adéquation entre les exigences du travail et les idéaux ou les standards de la personne); (2) la compétence (la confiance d’une personne dans sa capacité à accomplir correctement le travail demandé); (3) l’autodétermination (le sentiment de contrôle sur son travail); et (4) les retombées (le sentiment d’avoir une incidence sur les résultats importants au travail) (Spreitzer, 2008).

Activité d’apprentissage essentielle 10.6.2

On estime que l’autonomisation structurelle et l’autonomisation psychologique sont étroitement liées dans le milieu des soins de santé. Les leaders qui comprennent et mettent en œuvre des changements fondés sur la théorie de l’autonomisation structurelle peuvent apporter des changements positifs dans les milieux de travail. Lisez la revue systématique suivante pour bien comprendre, puis répondez aux questions suivantes.

Wagner, J., Cummings, G., Smith, D. L., Olson, J., Anderson, L. et Warren, S. (2010). The relationship between structural empowerment and psychological empowerment for nurses: a systematic review. Journal of Nursing Management, 18 (4), p. 448-462.

  1. Quel est le lien entre l’autonomisation structurelle et l’autonomisation psychologique?
  2. Pourquoi les auteurs de cette revue systématique pensent-ils qu’il n’y a aucun lien entre la sous-échelle de compétence de l’autonomisation psychologique et l’autonomisation structurelle globale dans l’exemple du personnel infirmier cadre de l’Ontario?
  3. Pourquoi les auteurs recommandent-ils aux leaders de déléguer ou décentraliser le pouvoir officiel?

Théorie sociale critique et autonomisation

Les leaders en soins infirmiers sont également conscients de l’importance de la théorie sociale critique pour l’autonomisation en soins infirmiers. La théorie sociale critique s’efforce de faire prendre conscience de la manière dont la culture et les normes au quotidien contraignent les gens ou leur enlèvent tout pouvoir. Elle s’efforce de démanteler les obstacles oppressifs qui se révèlent dans les échanges qui comportent des valeurs et des normes cachées, lesquelles diffèrent en fonction de la situation et des participants (Sumner et Danielson, 2007). Selon Clune et Gregory, une personne qui remet en question le statu quo dans le monde social adopte une approche sociale critique (2015, p. 202).

Manias et Street (2000) décrivent quatre grands domaines théoriques de la théorie sociale critique :

  1. La théorie de la fausse conscience montre qu’un groupe de personnes peut entretenir un ensemble commun de fausses croyances (les personnes qui n’ont pas la peau blanche sont inférieures).
  2. La théorie de la crise exige que les gens examinent la façon dont leur mécontentement menace la cohésion d’une société (les actions terroristes de l’ÉIIS).
  3. La théorie de l’éducation selon laquelle les personnes reçoivent un avantage de la scolarisation (information sur les conséquences du terrorisme sur le bien-être des personnes).
  4. La théorie de l’action transformatrice qui s’appuie sur la préparation de plans pour changer les choses (l’OMS détermine des objectifs de développement durable).

La théorie sociale critique est importante pour le personnel infirmier qui est dans une relation de soins et de communication unidirectionnelle avec la patientèle. La majorité de la littérature sur les soins infirmiers parle des attentes de la patientèle à l’égard du personnel infirmier. Par contre, les besoins humains du personnel infirmier qui doivent être satisfaits dans sa relation avec la patientèle sont rarement, voire jamais, étudiés (Sumner et Danielson, 2007, p. 30). Peut-être est-il temps d’examiner la structure de pouvoir de ces relations unidirectionnelles entre le personnel infirmier et la patientèle. De la même manière, à titre d’aspirants leaders infirmiers, il est nécessaire de porter un regard critique sur les relations entre ces responsables et leurs subordonnés et avec l’organisme de soins de santé. La théorie sociale critique permet d’examiner les besoins du personnel infirmier et de réfléchir à la manière dont ces besoins peuvent être satisfaits, tout en réfléchissant à l’asymétrie inhérente aux relations (Sumner et Danielson, 2007).

La théorie critique de la race, la théorie queer et la théorie féministe sont des exemples de théories critiques sociales bien connues. Une autre théorie sociale critique importante pour la profession infirmière porte sur les groupes opprimés. MacPhee (2015) affirme que le personnel infirmier est considéré par les sociologues comme un groupe opprimé ou un groupe dont les libertés et les droits sont restreints par des inégalités imposées par la société (p. 189). MacPhee souligne que les membres d’un groupe opprimé ne réalisent pas qu’ils sont impuissants dans une situation issue d’une construction sociale et qu’elle peut être remise en question. Sans surprise, les membres des groupes opprimés ont tendance à dominer ou à opprimer les autres (intimidation et violence envers les pairs). Cependant, la théorie critique sociale peut aider les membres des groupes opprimés, comme le personnel infirmier, à mieux comprendre son comportement grâce à la réflexion et à l’éducation. Cette nouvelle compréhension peut les motiver à s’engager dans une action transformatrice qui remet en question leur impuissance socialement programmée.

10.7 Dénonciation et défense d’une cause

La dénonciation est un acte conscient de divulgation de pratiques et de comportements organisationnels ou individuels à ceux susceptibles d’apporter un changement (Jackson et coll., 2011, p. 656). Le code de déontologie de l’AIIC appuie la dénonciation en cas de manquement à l’éthique : « Les infirmières et infirmiers appuient un climat de confiance qui favorise l’ouverture, encouragent la remise en question du statu quo et soutiennent les personnes qui prennent la parole pour traiter en toute bonne foi de questions préoccupantes (comme la dénonciation) (2017, p. 20). » Toutefois, la dénonciation peut s’avérer très difficile pour un membre du personnel infirmier, car elle signifie une accusation publique qui peut faire que cette personne soit perçue comme déloyale envers l’organisme. Malgré cette difficulté, le personnel infirmier a la responsabilité de dénoncer et de signaler aux responsables les cas où la patientèle risque de subir un préjudice ou s’il observe une expérience de mauvaise qualité liée à un environnement de soins inadéquat.

La façon dont les responsables organisationnels répondent aux préoccupations liées aux manquements à l’éthique dépend souvent de l’organisme. Le personnel infirmier peut craindre que les contrats de travail comportant des clauses de confidentialité donnent la priorité aux problèmes organisationnels plutôt qu’aux préoccupations du personnel et de la patientèle (Jackson et coll., 2011). Ces clauses de confidentialité mènent parfois au secret et au refus de divulguer des renseignements risqués ou susceptibles de mener à la stigmatisation (Ellenchild Pinch, 2000). La perception voulant que les gestionnaires et les leaders organisationnels ne répondent pas aux préoccupations de la clientèle peut pousser le personnel infirmier à porter ces problèmes à l’attention des personnes en position de pouvoir à l’extérieur de l’organisme. La personne qui divulgue les problèmes à l’extérieur de l’organisme afin de régler les préoccupations de la patientèle et de protéger le bien-être du personnel peut ne pas respecter la confidentialité et risquer d’en subir les conséquences. La dénonciation est toujours le dernier recours (Reid, 2013).

Activité d’apprentissage essentielle 10.7.1

Pour obtenir de plus amples renseignements sur la dénonciation, consultez les textes de loi suivants conçus pour protéger les personnes qui signalent un problème pour répondre à des préoccupations de bonne foi.

Extrait du Code criminel du Canada :

425.1(1) Commet une infraction quiconque, étant l’employeur ou une personne agissant au nom de l’employeur, ou une personne en situation d’autorité à l’égard d’un employé, prend des sanctions disciplinaires, rétrograde ou congédie un employé ou prend d’autres mesures portant atteinte à son emploi — ou menace de le faire :

a) soit avec l’intention de forcer l’employé à s’abstenir de fournir, à une personne dont les attributions comportent le contrôle d’application d’une loi fédérale ou provinciale, des renseignements portant sur une infraction à la présente loi, à toute autre loi fédérale ou à une loi provinciale — ou à leurs règlements — qu’il croit avoir été ou être en train d’être commise par l’employeur ou l’un de ses dirigeants ou employés ou, dans le cas d’une personne morale, l’un de ses administrateurs;

b) soit à titre de représailles parce que l’employé a fourni de tels renseignements à une telle personne. (Code criminel, 1985.)

Extrait du préambule de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles :

“. . « que la confiance dans les institutions publiques ne peut que profiter de la création de mécanismes efficaces de divulgation des actes répréhensibles et de protection des fonctionnaires divulgateurs, et de l’adoption d’un code de conduite du secteur public; » (Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles, 2005.)

Le site Web du gouvernement de la Saskatchewan indique que la Public Interest Disclosure Act (loi sur la divulgation dans l’intérêt du public) protège le personnel du gouvernement de la Saskatchewan contre les représailles pour avoir divulgué un acte répréhensible au travail (gouvernement de la Saskatchewan, 2013). Consultez le site Web du gouvernement de la Saskatchewan pour lire ce texte de loi.

Note de recherche

Jackson, D., Peters, K., Hutchinson, M., Edenborough, M., Luck, L. et Wilkes, L. (2011). Exploring confidentiality in the context of nurse whistle blowing: Issues for nurse managers. Journal of Nursing Management, 19(5), p. 655-663.

But

Le but principal de l’article est de révéler les expériences et la signification de la confidentialité pour le personnel infirmier australien dans le contexte de la dénonciation (Jackson et coll., p. 655).

Discussion

Malgré l’importance éthique, juridique et morale de la confidentialité dans le contexte des soins de santé, peu de recherches se sont penchées sur les conséquences de la confidentialité liées aux actes de dénonciation.

La recherche est une enquête narrative qualitative. Dix-huit infirmier.ère.s australien.ne.s ayant eu une expérience directe de la dénonciation ont accepté de participer à des entretiens semi-structurés en personne. Quatre thèmes émergents relatifs à la confidentialité ont été relevés : (1) la confidentialité est un silence imposé; (2) la confidentialité favorise l’isolement et la marginalisation; (3) la confidentialité favorise la propagation de rumeurs; et (4) la confidentialité dans le contexte du droit du public de savoir.

L’interprétation et l’application de la confidentialité influencent les résultats de la dénonciation dans le contexte des services de soins de santé. Inversement, la confidentialité peut être un mécanisme de protection pour les établissements de santé (Jackson et coll., p. 655).

Application à la pratique

Il incombe aux gestionnaires en soins infirmiers de gérer soigneusement les risques liés aux dénonciations. Il est également important que ces gestionnaires soient conscients des conséquences de leur interprétation et de leur application de la confidentialité aux cas de dénonciation, et des résultats potentiellement contradictoires pour les personnes et l’établissement (Jackson et coll., p. 655).

10.8 Activisme politique et défense d’une cause

Le dictionnaire en ligne Merriam-Webster définit l’activisme comme une doctrine ou une pratique qui met l’accent sur une vigoureuse action directe, en particulier pour soutenir un des aspects d’une question controversée ou s’y opposer. L’activisme politique oriente l’action vers la création d’un changement lié à l’élaboration d’une politique gouvernementale. Tout au long du chapitre, nous avons discuté de la nécessité pour le personnel infirmier de défendre les intérêts de la patientèle. La discussion sur l’autonomisation au travail dans le secteur de la santé suggère qu’il est également nécessaire de défendre les intérêts du personnel infirmier afin de confirmer leur différence en tant que professionnels de la santé et défenseurs avisés de la patientèle.

Figure 10.8.1 Campagne des 99 paires de chaussures

défense des intérêts, politique, activisme, chaussures du personnel infirmier

L’image « Campagne des 99 paires de chaussures » de la Saskatchewan Union of Nurses est sous licence CC BY 4.0 International.

La défense des intérêts de tous les patients est un élément important de la garantie de la qualité des soins de santé. Le personnel infirmier peut réagir au contexte social, politique et économique de leur environnement pour défendre les patients et leurs familles par le biais d’un activisme politique invisible. Cet activisme invisible est lié à de solides partenariats avec le public, les résidents, le gouvernement et d’autres structures de pouvoir. Une communication constante avec les groupes communautaires, y compris le gouvernement et les médias, est nécessaire pour entretenir ces partenariats (Paterson, Duffet-Leger et Cruttenden, 2009). Le travail visant à entretenir des relations positives avec la communauté peut éloigner le personnel infirmier de ses responsabilités en santé centrées sur la patientèle. Par conséquent, il est important de penser que la défense collective des intérêts, laquelle serait réalisée par les associations professionnelles et les syndicats, peut étendre la portée du personnel infirmier afin d’aborder les problèmes systémiques dans les établissements de santé et la bureaucratie (Mahlin, 2010, p. 247). Mahlin insiste sur le fait que de nombreuses difficultés de la patientèle sont le résultat direct de problèmes systémiques liés à l’attribution inappropriée des ressources en santé, pensons aux médicaments coûteux que la patientèle ne peut pas se permettre à sa sortie de l’hôpital, et à la dotation inadéquate en santé. Agir et trouver des solutions à ces problèmes systémiques sont des actions souvent hors de portée du personnel infirmier, mais elles relèvent certainement de celle des groupes de professionnels de la santé.

Résumé

Le présent chapitre porte sur les responsabilités éthiques des leaders en soins infirmiers à défendre la santé. Un leader qui comprend comment utiliser le pouvoir est plus susceptible de bien mener la défense des intérêts. Selon les travaux de Foucault, nous savons que nous devons étudier la relation entre la santé, le pouvoir et la diversité des populations. Au Canada, il faut porter une attention aux populations autochtones si l’on veut changer la donne.

Les responsables du personnel infirmier doivent également se pencher sur le lieu de travail et examiner comment la présence ou l’absence de l’autonomisation structurelle et psychologique des professionnels de la santé joue sur les soins prodigués aux patients. La théorie sociale critique suggère que la réflexion sur les rôles du personnel infirmier dans les systèmes de santé donne les moyens au personnel infirmier de faire la défense d’une cause avec efficacité. Les leaders infirmiers qui souhaitent ardemment défendre la santé peuvent se joindre à d’autres membres du personnel infirmier pour mener une action politique visant à modifier les pratiques actuelles en santé. Lorsqu’il ne reste plus aucune solution pour défendre la santé des personnes vulnérables, la dénonciation peut être utilisée en dernier recours.

À la fin du chapitre, vous devriez être en mesure de faire ce qui suit :

  1. Apprendre l’importance de l’éthique dans le leadership infirmier.
  2. Décrire ce qu’est la défense des intérêts.
  3. Comparer la méthode de défense des intérêts à l’approche paternaliste dans la lutte contre les inégalités en santé.
  4. Étudier comment les responsables du personnel infirmier utilisent la défense des intérêts pour donner lieu à des changements qui s’attaquent aux inégalités en santé.
  5. Énumérer les différents types de pouvoir.
  6. Reconnaître le rôle que les responsables du personnel infirmier peuvent jouer dans l’action politique.
  7. Exprimer votre propre réaction au changement.

Exercices

  1. Choisissez un quart de travail de l’un de vos derniers stages cliniques. Examinez les actions du personnel infirmier pendant votre quart de travail et cherchez des exemples des cinq différents types de pouvoir infirmier. Avez-vous, ou un collègue aux études en soins infirmiers a-t-il, fait preuve d’un pouvoir personnel, d’un pouvoir d’expert, d’un pouvoir lié au rang, d’un pouvoir perçu ou d’un pouvoir lié aux contacts? De quels types de pouvoir votre formateur a-t-il fait preuve? Qu’en est-il du personnel infirmier? Et de l’infirmière responsable? Selon vous, quel membre du personnel infirmier détenait le plus de pouvoir dans l’unité? Pourquoi?
  2. Consultez le Résumé de l’analyse de l’environnement de juin 2016 de l’ANC, dont il a été question dans l’activité d’apprentissage essentielle 10.2.1. Choisissez une question de l’analyse de l’environnement qui, selon vous, aura une grande incidence sur la santé des Canadiens lorsque vous obtiendrez votre diplôme dans un ou deux ans. Élaborez un plan de défense de la santé de la population canadienne au moyen des outils de défense fournis sur le site Web de l’AIIC.
  3. Lisez l’article de recherche Exploring confidentiality in the context of nurse whistle blowing: issues for nurse managers (Jackson et coll., 2011) sur la dénonciation (susmentionné dans la note de recherche du présent chapitre). Indiquez comment la confidentialité a été utilisée pour réduire au silence et isoler le personnel infirmier.
  4. Réfléchissez à l’expression « le personnel infirmier mange ses petits ». Quelle théorie explique cette phrase? En tant qu’infirmière diplômée, quelles mesures prendrez-vous pour vous assurer que les gens ne vous décriront pas comme une personne qui « mange ses petits »?

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11

Cerner et comprendre la gestion des conflits

Bureau de règlement des différends du ministère de la Justice (gouvernement de la Saskatchewan)

La paix n’est pas l’absence de conflits, mais la capacité d’y faire face par des moyens pacifiques.

—Ronald Reagan (1982)

Introduction

Le chapitre 11 est une synthèse de la théorie et des connaissances concrètes dans les domaines de la résolution des différends et des conflits, du dialogue, des négociations selon les intérêts et de la résolution collaborative des problèmes. Le contenu s’inspire de l’expérience des médiateurs du Bureau de règlement des différends du ministère de la Justice de la Saskatchewan, de CDR Associates (Boulder, Colorado), de l’Oregon Mediation Association, du Justice Institute of British Columbia, de Kilmann Diagnostics et du Center for Congregational Health. Le modèle de résolution des conflits mis de l’avant a été utilisé par des responsables du personnel infirmier, officiels ou officieux, dans de nombreux environnements de soins de santé en Saskatchewan. Outre la description du modèle, le chapitre permet de comprendre les conflits et cinq approches différentes de gestion des conflits. Chacune est ensuite appliquée à des situations ou environnements en soins infirmiers hypothétiques afin de faire transparaître la mise en œuvre de la théorie sur le terrain. Le chapitre se conclut par une analyse des données probantes.

Remarque : Le chapitre 11 est rédigé par Stacy Muller et Amanda Willcox du Bureau de règlement des différends du ministère de la Justice de la Saskatchewan (gouvernement de la Saskatchewan).

Objectifs d’apprentissage

  1. Décrire les différentes causes des conflits.
  2. Analyser les différentes approches de gestion des conflits.
  3. Reconnaître l’aggravation des conflits.
  4. Adapter les approches de gestion de conflit.

11.1 La théorie du conflit

Conflit : lutte, opposition, incompatibilité. (adapté du Oxford Dictionary, n. d.)

Des siècles durant, les gens ont soutenu que les disputes et les conflits hostiles découlaient de la nature humaine. À cause d’une telle perception, on a uniquement mis l’accent sur la résolution des conflits, c’est-à-dire la manière de les faire disparaître. Néanmoins, au cours des vingt dernières années, plusieurs se sont penchés sur les façons de résoudre des conflits et sur de meilleures issues.

Si l’on entend résoudre les conflits plus efficacement, il est primordial d’en comprendre l’origine et de savoir comment au fil du temps, les gens y ont fait face. Une analyse plus approfondie des causes des différends permettra de déterminer les stratégies à mettre en œuvre pour trouver de meilleures solutions.

11.2 Quatre grands types de conflits

Afin d’analyser comment transformer un conflit néfaste en un différend dont l’issue est positive, quatre principaux types de conflits (classés par cause) sont présentés : les conflits liés au manque d’information, les conflits relationnels, les conflits de valeurs et les conflits organisationnels.

Conflits liés au manque d’information

Ils surviennent lorsque les personnes ne disposent pas des renseignements pour prendre des décisions judicieuses, sont mal informées, ne s’accordent pas sur les éléments pertinents, interprètent l’information différemment ou ont différentes procédures d’évaluation. Ce type de conflit est généralement le plus simple à résoudre, en adoptant une stratégie qui garantit une compréhension commune des données.

Conflits relationnels

Ils entraînent souvent ce que l’on a appelé des conflits absurdes ou superflus, car ils surviennent même en l’absence de conditions objectives propices comme des ressources limitées ou des objectifs mutuellement exclusifs. Ils éclatent entre autres à cause de fortes émotions (jalousie, méfiance ou haine p. ex.), des perceptions, d’une mauvaise communication ou des stéréotypes. Les conflits relationnels alimentent souvent les disputes en plus de les envenimer.

Conflits de valeurs

Ils surviennent à cause de systèmes de valeurs perçues ou réelles incompatibles. Les valeurs sont des croyances qui donnent un sens à la vie et qui définissent le bon, le mauvais, le bien ou le mal. Les conflits de valeurs surviennent lorsque des personnes tentent d’imposer leurs propres valeurs ou en revendiquent l’exclusivité, fermant la porte à toute autre croyance.

Conflits organisationnels

Ils tirent leur origine des modèles oppressifs de relations humaines et son souvent façonnés par des forces extérieures aux personnes en conflit. Souvent, les parties opposées n’ont aucune raison d’être en désaccord, si ce n’est le problème organisationnel imposé à leur relation. De tels conflits peuvent être réglés en cernant le problème structurel et mettant tout en œuvre pour apporter des changements. Par ailleurs, l’acceptation d’un statu quo peut perpétuer les conflits organisationnels.

Figure 11.2.1 Types de conflits

Il est important de comprendre le type de conflit (lié au manque d’information, de valeurs, relationnel ou organisationnel) en jeu avant d’essayer de le résoudre. La solution pour chaque type de conflit est différente et doit être adaptée à la situation. Par exemple, il est peu probable de résoudre un problème relationnel par une solution axée sur des données.

Les conflits structurels et liés au manque d’information ont des sources externes et sont généralement moins complexes; la résolution passe par un changement dans l’environnement externe. À l’inverse, les conflits relationnels et de valeurs sont liés à des sources internes et peuvent être beaucoup plus difficiles à résoudre. La compréhension des conflits relationnels et de valeurs nécessite une profonde introspection et de l’empathie. La résolution de tels conflits peut remettre en cause de manière significative les perceptions individuelles, ce qui complexifie généralement la démarche. Généralement, en cas de stress ou d’envenimement d’un conflit, des données ou des solutions structurelles sont mises à profit pour trouver des solutions, car elles sont moins énergivores et chronophages.

11.3 Différentes approches de gestion des conflits

Chaque personne ou groupe gère les conflits différemment. Dans les années 1970, les consultants Kenneth W. Thomas et Ralph H. Kilmann ont conçu un outil d’analyse des stratégies de résolution des conflits, le Thomas-Kilmann Conflict Mode Instrument (TKI) (Kilmann Diagnostics, 2017).

Activité d’apprentissage essentielle 11.3.1

Pour en savoir plus sur l’outil Thomas-Kilmann Conflict Mode, visitez la page KilmannDiagnostics.

D’après Thomas et Kilmann, dans un conflit, le comportement d’une personne peut être évalué selon deux facteurs :

  1. Le souci des objectifs ou l’affirmation de soi : la mesure dans laquelle une personne (ou un groupe) tente de satisfaire ses propres ambitions ou objectifs.
  2. Le souci des relations ou la coopération : la mesure dans laquelle une personne (ou un groupe) tente de satisfaire les ambitions de l’autre partie et met l’accent sur la relation avec l’autre partie.

Thomas et Kilmann utilisent les facteurs pour expliquer cinq différentes approches de gestion de conflits :

Évitement Confrontation Accommodement Compromis Collaboration

Il faut utiliser chaque approche au bon moment. Bien que la plupart des gens appliquent différentes stratégies dans diverses circonstances, ils ont tendance à adopter une approche plus dominante et qui leur convient le mieux. Une approche n’est pas forcément meilleure qu’une autre et toutes peuvent être apprises et utilisées. Pour gérer au mieux un conflit, il est important d’analyser la situation et de déterminer l’approche à privilégier.

Examinons de plus près chaque approche et le moment propice pour l’appliquer.

Évitement

L’évitement témoigne d’un faible intérêt à l’égard des objectifs et des relations et est l’approche plus courante pour gérer les conflits, en particulier pour les personnes qui les perçoivent de manière négative.

Tableau 11.3.1 Évitement

Types d’évitement

Conséquences

Mise en contexte

  • Fuir la situation.
  • Se replier sur soi-même.
  • Changer de sujet.
  • Blâmer ou minimiser la situation.
  • Nier le problème.
  • Remettre les choses à plus tard (sans y donner suite).
  • Manifester de vives émotions (colère, tristesse, etc.)
  • Le conflit n’est pas résolu.
  • Les différends s’accumulent souvent et finissent par exploser.
  • Une faible satisfaction se traduit par des plaintes, du mécontentement et de la confrontation.
  • Le stress se propage ailleurs (par exemple, au travail ou dans la famille).
  • Le problème est banal ou sans importance, ou une autre situation nécessite plus d’attention.
  • Les dommages occasionnés l’emportent sur les avantages.
  • Le moment choisi pour résoudre le conflit n’est pas idéal (en raison d’émotions trop fortes ou d’un manque de détails).

Mise en situation en soins infirmiers — Évitement

Quand l’évitement est-il une approche appropriée dans un hôpital ou une clinique?

Dans un hôpital ou un milieu clinique, il faut parfois éviter les conflits. Par exemple, lors d’une journée très occupée, alors qu’une personne en danger de mort est admise aux urgences. Le médecin traitant vocifère des directives au personnel infirmier auxiliaire pour qu’il aillent chercher du matériel. Ces personnes peuvent se sentir offensées par les actions du médecin. Cela dit, il peut être approprié d’éviter un conflit à ce moment-là, étant donné la situation critique. Si le personnel estime que le comportement du médecin est inapproprié, il peut aborder le conflit après que la personne a été stabilisée.

Quand l’évitement est-il inapproprié dans un hôpital ou une clinique?

Éviter le conflit peut être problématique si le même médecin continue de crier des directives au personnel infirmier dans des situations normales, comme lors d’un bilan d’une intervention chirurgicale ou lorsqu’il donne des instructions qui ne concernent pas une situation d’urgence. Lorsque les infirmières et le médecin doivent poursuivre leur collaboration, il n’est plus possible d’éviter un conflit persistant.

Confrontation

La confrontation se caractérise par un fort intérêt envers des objectifs et non des relations. Les personnes qui utilisent l’approche privilégient leurs ambitions aux dépens des autres et tenteront le tout pour le tout pour avoir le dernier mot. Il peut s’agir de défendre des opinions, valeurs ou intérêts jugés légitimes. Une telle approche est souvent soutenue par des structures (tribunaux, lois, quotas de vente, etc.) et peut être initiée par les actions d’une partie. Elle peut être appropriée ou pas (selon les attentes dans la relation).

Tableau 11.3.2 Confrontation

Types de confrontation

Conséquences

Mise en contexte

  • Utiliser le pouvoir de l’autorité, du poste ou de la majorité.
  • Utiliser le pouvoir de persuasion.
  • Utiliser des moyens de pression (par exemple, menaces, autorité, intimidation).
  • Dissimuler le problème.
  • Lier les questions relationnelles aux questions essentielles.
  • Le conflit peut s’aggraver ou l’autre partie peut jeter l’éponge.
  • La qualité et la durabilité d’un accord sont peu viables.
  • Les gens supposent que l’autre partie ne réagira pas et ont tendance à utiliser tout leur pouvoir lorsqu’ils sont menacés.
  • Le nombre de problèmes entre les parties risque d’augmenter.
  • La communication est brouillée et la confiance s’effrite.
  • Les délais sont courts et il faut agir rapidement.
  • Traiter de problèmes banaux.
  • Les décisions difficiles nécessitent du leadership (par exemple, l’application de règles impopulaires, la réduction des coûts, la discipline).

Mise en situation en soins infirmiers  Confrontation

Quand la confrontation est-elle appropriée dans un hôpital ou une clinique?

Elle a lieu d’être dans un hôpital ou une clinique si un membre du personnel infirmier se trompe de dose à administrer à un.e patient.e. Vous décelez l’erreur avant que le membre du personnel infirmier entre dans la chambre de la personne, vous lui prenez le médicament des mains et lui remettez la bonne dose. Dans la situation, la sécurité de la personne prévaut sur la relation avec l’employé.

Quand une confrontation est-elle inappropriée dans un hôpital ou une clinique?

Il serait futile de continuer d’insister sur l’erreur de l’employé lors d’un rappel sur les dangers des erreurs de médication et sur la contre-vérification des doses. L’objectif, au présent stade, est d’améliorer l’apprentissage et d’instaurer une relation de confiance entre collègues. Une approche différente est donc de mise.

Accommodement

Les personnes accommodantes se soucient davantage des relations que des objectifs. L’accommodement se dissocie de la confrontation, car la personne ignore ou passe outre ses propres préoccupations et privilégie celles d’autrui. Une telle stratégie est utilisée pour établir des adaptations ou des ajustements réciproques. Le résultat peut être encourageant pour ceux qui l’adoptent, mais lorsque l’autre partie ne renvoie pas l’ascenseur, un conflit peut en résulter. D’autres peuvent considérer que les personnes qui adoptent le modèle se contentent de montrer qu’elles restent fidèles à leur personnalité et n’ont besoin de rien en retour. Les personnes accommodantes n’attendent en effet rien en retour, mais ont tendance à éprouver du ressentiment en l’absence d’une relation de réciprocité. Lorsque ce sentiment grandit, les personnes accommodantes optent alors pour une approche de confrontation parce qu’elles en ont assez de se sentir « utilisées ». Une telle situation est donc source de confusion et de conflit.

Tableau 11.3.3 Accommodement

Types
d’accommodements

Conséquences

Mise en contexte

  • Atténuer le conflit pour maintenir l’harmonie en apparence.
  • Se sacrifier.
  • Céder au point de vue de l’autre.

  • Des relations favorisent la résolution efficace de problèmes futurs.
  • À l’avenir, la partie opposée serait plus réceptive aux besoins de l’autre.
  • La communication ne s’améliore pas.
  • Si l’issue importe peu ou si l’enjeu est plus important pour l’autre partie.
  • L’harmonie prévaut sur le résultat.
  • Il faut agir de bonne foi pour résoudre les problèmes à l’avenir.
  • Quelqu’un est en tort ou est dans une posture où la confrontation peut nuire.

Mise en situation en soins infirmiers — Accommodement

Dans quels cas l’accommodement est-il approprié dans un hôpital ou une clinique?

Il peut être judicieux d’adopter une approche accommodante lorsqu’une personne de l’équipe doit s’occuper d’un.e patient.e particulièrement difficile qui lui demande beaucoup de temps et d’énergie. Au regard de la situation, vous la délestez de certaines de ses tâches. Votre charge de travail augmente pendant un certain temps certes, mais votre collègue peut maintenant mieux prendre en charge la personne.

Dans quels cas l’accommodement est-il inapproprié dans un hôpital ou une clinique?

L’approche peut être problématique si la même personne s’attend à ce que vous fassiez toujours ainsi même si la situation avec le ou la patient.e difficile a été résolue.

Compromis

Le compromis permet de trouver un équilibre entre le souci des objectifs et des relations. L’objectif est de trouver rapidement une solution convenable aux deux parties, qui en général renoncent à quelque chose et réussissent à s’entendre. Le compromis est souvent utilisé dans les négociations collectives, car généralement il faut résoudre plusieurs questions en peu de temps.

Tableau 11.3.4 Compromis

Types de
compromis

Conséquences

Mise en contexte

  • Reconnaître les différences.
  • Faire des concessions.
  • Trouver un terrain d’entente.
  • Les deux parties peuvent avoir l’impression d’avoir perdu une bataille et ressentiraient donc un désir de vengeance.
  • Aucune relation n’est forgée, mais la situation ne doit pas s’envenimer pour autant.
  • Une impasse pourrait persister.
  • Le problème n’est pas approfondi.
  • Il faut régler rapidement la situation à cause des contraintes de temps.
  • La collaboration ou la confrontation n’ont pas abouti.
  • Des solutions à court terme sont de mise dans l’attente de renseignements supplémentaires.

Mise en situation en soins infirmiers — Compromis

Dans quels cas le compromis est-il approprié dans un hôpital ou une clinique?

Vous travaillez avec un membre du personnel infirmier qui fait le strict minimum et n’aime pas aider ses collègues. Deux heures se sont écoulées depuis le déjeuner, mais une personne en hyperglycémie n’a toujours pas reçu son repas. Vous demandez à votre collègue de lui amener à manger pendant que vous prélevez le sang de la personne en échange. Elle est d’accord, car elle a eu des difficultés avec ce dernier.

Dans quelles circonstances le compromis serait-il inapproprié lors d’un conflit dans un hôpital ou une clinique?

Il serait inapproprié de toujours demander à un membre du personnel infirmier d’effectuer vos tâches les moins intéressantes.

Collaboration

La collaboration est une approche qui témoigne d’un souci manifeste des objectifs et des relations. Elle est utilisée pour tenter de répondre aux préoccupations de toutes les parties. La confiance et la volonté de prendre des risques sont essentielles pour qu’elle soit efficace.

Tableau 11.3. Collaboration

Type de
collaboration

Conséquences

Mise en contexte

  • Optimiser les ressources déterminées.
  • Augmenter les ressources.
  • Écouter et communiquer pour favoriser la compréhension des intérêts et des valeurs.
  • Apprendre de l’expérience des autres.
  • Établir des relations et augmenter les chances de résoudre des problèmes futurs.
  • Promouvoir des solutions créatives.
  • Les parties participent activement dans la démarche et disposent de suffisamment de temps.
  • L’enjeu est trop important pour faire l’objet d’un compromis.
  • De nouvelles perspectives peuvent être bénéfiques pour trouver des solutions créatives.
  • Le désir de surmonter les ressentiments qui ont nui à la résolution des problèmes est palpable.
  • Des intérêts et des problèmes divers sont en jeu.
  • Les parties en cause peuvent passer à autre chose.

Mise en situation en soins infirmiers — Collaboration

Dans quelles situations la collaboration est-elle appropriée dans un hôpital ou une clinique?

Il peut être judicieux d’utiliser l’approche collaborative lorsque l’on aborde la prise en charge lors des congés avec les membres de l’équipe lors d’une réunion. La rencontre est consacrée aux échanges et à l’examen des priorités de tout le monde.

Dans quelles situations la collaboration serait-elle inappropriée pour résoudre un conflit dans un hôpital ou une clinique?

La collaboration serait inappropriée lors d’une discussion sur une nouvelle politique mise en place si l’équipe a peu d’influence sur les ajustements à apporter.

11.4 Comment mettre en œuvre une approche?

Il arrive parfois que certains optent pour une approche défavorable à la situation. Cependant, les seuls actes que vous pouvez contrôler sont les vôtres. Il est important de faire preuve de souplesse et de changer d’approche selon la situation et les collègues. Lorsque quelqu’un adopte une approche nuisible à la situation, il est important de comprendre les motivations sous-jacentes. Voici quelques exemples :

Les personnes qui évitent les conflits ont sans doute besoin de se sentir physiquement et émotionnellement en sécurité. En ce qui les concerne, on doit leur montrer qu’on prendra le temps de les écouter et de les comprendre.

Les personnes dissidentes souhaitent voir des progrès en vue d’atteindre leurs objectifs. En ce qui les concerne, on dirait par exemple : « Nous trouverons une solution, mais il se peut que nous mettions un peu de temps à y arriver. »

Les adeptes du compromis veulent savoir s’ils recevront quelque chose en retour. En ce qui les concerne, on dirait par exemple : « Nous regardons ce film ce soir, mais tu choisiras le prochain. » (Respectez vos promesses.)

Les personnes accommodantes veulent que les relations demeurent cordiales, peu importe l’issue de la situation. En ce qui les concerne, on peut dire par exemple : « Il n’y aura aucune incidence sur notre relation ou notre façon de travailler. »

Les adeptes de la collaboration veulent connaître les attentes des autres avant de faire part de leurs besoins. En ce qui les concerne, on peut dire : « Je m’attends à telle ou telle chose. . . . Et vous? »

Activité d’apprentissage essentielle 11.4.1

Faites le test Conflict Quizzes and Assessments sur le site Web de Bacal & Associates pour connaître votre style d’approche du conflit.

Toute approche de gestion de conflit est appropriée ou défavorable selon le moment ou la situation. Il est important de réfléchir à l’approche la plus bénéfique pour le problème en question. Une mauvaise stratégie risque d’envenimer les conflits, de nuire aux relations et d’entraver la capacité à atteindre efficacement les objectifs. Une bonne démarche permet d’instaurer la confiance dans les relations, d’atteindre les objectifs et de désamorcer les conflits.

Toute personne est en mesure d’utiliser une approche du conflit et de dévier de son style naturel si nécessaire. Les gens abordent les conflits avec leur style le plus dominant lorsqu’ils sont stressés, mais peuvent apprendre et mettre en application d’autres stratégies avec de la pratique et de la conscience de soi. Lorsque l’on fait face à des personnes qui n’ont peut-être pas appris à s’écarter de leur style de conflit préféré, il est important de comprendre les motifs qui ont engendré la situation. Ce faisant, toutes les parties concernées peuvent mettre la main à la pâte pour atteindre un objectif commun.

11.5 Escalade des conflits

Remarque : Le contenu de la prochaine section est adapté de l’ouvrage Levels of Conflict, de Speed Leas publié par le Center for Congregational Health.

Bon nombre d’universitaires et de spécialistes en résolution des conflits ont observé des schèmes prévisibles dans l’envenimement des conflits. On parle souvent du conflit comme une entité distincte; il est vrai qu’un différend qui s’aggrave peut sembler prendre vie. Les conflits s’enveniment souvent à outrance, à moins qu’on décide de tout mettre en œuvre pour y mettre fin.

Voici un exemple d’escalade d’un conflit. La plupart des gens se reconnaîtront dans la description.

Un conflit survient. . .

  • Les parties prennent connaissance du problème et tentent de le gérer raisonnablement. Souvent, elles l’attribuent à un « malentendu » et indiquent qu’elles « trouveront une solution ».
  • La coopération fait tranquillement place à une confrontation. (« Je lâcherai le morceau s’ils le font d’abord. ») Les protagonistes pensent petit à petit que le conflit résulte d’une action délibérée de la part de l’autre. (« Ils savaient que ça arriverait. ») Le ton durcit et chacun reste campé sur ses positions, ce qui crée des échanges conflictuels. Les parties commencent à prendre des mesures pour renforcer leur point de vue et se tournent vers les autres pour obtenir leur appui. (« Ne trouvez-vous pas que c’est déraisonnable? » Avez-vous vu à quel point cet idiot me manque de respect? »)
  • À mesure que la communication se détériore, chaque partie juge l’autre et lui prête de mauvaises intentions. (« Je suis certain qu’il va. . . » « Ce genre de personne fait . . » « Son jugement est tellement aveuglé. Il pense sans doute que. . . ») La pensée de groupe prend le dessus, car chaque protagoniste tente d’obtenir l’appui des autres. (« Nous devons être forts et faire front commun. » Les parties tentent de dénicher d’autres problèmes; elles sont aveuglées par leurs observations.
  • Les parties finissent par croire que la coopération ne permettra pas de résoudre le problème en raison des actions de l’autre. Chacun devient de plus en plus agressif. (« J’ai tout essayé pour lui faire entendre raison. » « Il est temps de durcir le ton. » « Je vais mettre fin à toute cette situation. »)
  • Chaque partie estime être dans son droit et se rejette la faute. Surviennent ensuite de la généralisation et des stéréotypes. (« Je connais ce genre de personnes. . . . Elle ne s’en tirera pas à bon compte. Les parties se jugent et se font la morale, chacune estimant être dans son droit. (« C’est une question de principe. » Que penseront les gens si on se laisse faire? »)
  • Le conflit s’envenime et implique de plus en plus de personnes. Les protagonistes anticipent ou prévoient de vives confrontations, ce qui les rend inévitables. Chaque partie considère son geste valable, car l’autre a, selon elle, clairement fait preuve d’un manque de qualités humaines. (« Quel con! Il va falloir frapper fort. »
  • Toutes les parties impliquées semblent désormais croire que l’objectif du conflit est de porter en premier préjudice aux autres par prévention. (« Tu vas me le payer cher, coûte que coûte. ») Le conflit dépasse l’entendement; l’objectif principal est de nuire à l’autre, même à ses propres frais. (« Tous les coups sont permis . . » « On a atteint un point de non-retour. » « Il me prend pour un imbécile ou quoi? »)
  • Enfin, la destruction de l’autre, même si elle implique l’autodestruction, est la force motrice. (« Je parviendrai à mes fins, même si je dois y passer ma vie. . . »)

La figure 11.5.1, intitulée « spirale infernale du conflit », montre comment un conflit peut rapidement devenir hors de contrôle. Observer et écouter les personnes en conflit permet généralement de déterminer où elles se situent dans l’escalade et d’anticiper la suite des choses. Ce faisant, il est possible de trouver rapidement des approches adéquates pour apaiser la situation.

Figure 11.5.1 Spirale infernale du conflit

Spirale infernale du conflit

La « spirale infernale du conflit », créée par le Bureau de règlement des différends du ministère de la Justice (gouvernement de la Saskatchewan), réadaptée par JVDW Designs, est distribuée sous licence CC BY 4.0 International.

11.6 Sortir de la spirale infernale Calmer les tensions

Les personnes impliquées dans un conflit doivent accepter de faire la part des choses pour apaiser les tensions, ce qui peut être effrayant, car il faut montrer sa vulnérabilité et verbaliser ses émotions. L’intelligence émotionnelle du responsable en soins infirmiers joue un rôle important dans la gestion des conflits. En prenant des initiatives pour apaiser un différend, et ce, peu importe l’issue, le responsable montre sa volonté de rétablir la confiance, le respect et une bonne communication. Agir de la sorte favorise également la mise en œuvre de changements en apprenant et en adoptant de nouveaux comportements et de nouvelles habiletés pour collaborer efficacement, tant sur le plan individuel que collectif.

Généralement, lorsqu’un conflit n’est pas désamorcé et résolu adéquatement, s’ensuit une relation de plus en plus conflictuelle. Chacun est très sensible aux actions de l’autre et émet rapidement des hypothèses. Des actions considérées auparavant comme innocentes ou acceptables peuvent être perçues comme menaçantes. Chaque conflit non résolu réduit le temps nécessaire pour mettre fin à cette spirale en raison de cette sensibilité accrue. Les recommandations suivantes sont des suggestions pour atténuer chaque étape de l’escalade du conflit. La capacité à maîtriser la peur et à être vulnérable est une étape essentielle de la désescalade.

Figure 11.6.1 Étapes pour désamorcer un conflit

Étapes pour désamorcer un conflit : prendre conscience, signaler le problème et faire un suivi si la situation ne s’améliore pas.

« Étapes pour désamorcer un conflit », par le Bureau de règlement des différends du ministère de la Justice (gouvernement de la Saskatchewan), conçu par JVDW Designs, est distribué sous licence CC BY 4.0 International.

Note de recherche

Amestoy, S. C., Bakes, V. M. S., Thofehrn, M. B., Martini, J. G., Meirelles, B. H. S., et Trindade, L. L. (2014). Conflict in nursing management in the hospital. Revista Gaúchade Enfermagem, 35(2), p. 79–85. doi:10.1590/1983-1447.2014.02.40155

Revue d’articles

L’étude décrite dans l’article adopte une approche qualitative et descriptive, qui comprend des études de cas utilisées comme stratégie de recherche pour cerner les principaux conflits rencontrés par les responsables du personnel infirmier en milieu hospitalier, ainsi que les stratégies pour y faire face. L’étude a porté sur 25 employés de trois hôpitaux à Florianopolis, à Santa Catarina au Brésil. Des entrevues semi-structurées, des observations non participantes et des ateliers de communication ont été utilisés pour collecter les données. Une analyse thématique a été entreprise pour traiter les données recueillies. L’étude a révélé que les conflits les plus fréquents dans le secteur de la santé étaient liés aux relations interpersonnelles entre collègues. Elle a également mis l’accent sur la dynamique du pouvoir, parfois en cause lors de tels conflits.

Par ailleurs, elle a démontré la nécessité de gérer les conflits interpersonnels et de trouver des stratégies pour les désamorcer. La gestion des conflits interpersonnels est primordiale dans le secteur de la santé en raison des entraves au travail ou des fardeaux engendrés au sein des équipes infirmières et entre le personnel infirmier et d’autres professionnels de la santé, comme les médecins par exemple. La stratégie qui se démarque dans l’étude est l’adoption d’un style démocratique et collaboratif dans lequel les membres de l’équipe participent à la prise de décision. Les retombées sur le domaine des soins infirmiers sont encourageantes. Cependant, les auteurs pointent une limite de l’étude : la disponibilité et les horaires de travail du personnel infirmier complexifient la réalisation du type de recherche menée dans cette étude. Nous espérons que l’information favorisera l’intégration d’une formation à la gestion des conflits interpersonnels dans les guides de travail et de formation proposés au personnel infirmier dans le cadre de leur formation.

Résumé

Les conflits sont inévitables, surtout pour les responsables. Les responsables du personnel infirmier compétents prennent le temps de comprendre les causes des conflits, apprennent à les gérer et à les résoudre. La première étape de la gestion des conflits est de réfléchir à ses propres expériences et de comprendre son approche personnelle. Après avoir développé un style de prédilection, les responsables efficaces apprennent à comprendre celui des autres personnes et à adapter leurs approches en conséquence. Bons observateurs, ils s’exercent à désamorcer des situations et aident les personnes à trouver une solution. À ce propos, il ne faut pas appréhender la gestion des conflits, au contraire, elle s’apprend et se pratique. La patience est de mise.

Changez votre perception des désaccords et vos stratégies en cas de conflit. Soyez à l’écoute et intervenez de manière constructive et en collaboration avec vos collègues.

—Cloke et Goldsmith, 2011

À la fin du chapitre, vous devriez être en mesure de faire ce qui suit :

  1. Décrire les différentes causes des conflits.
  2. Expliquer les différentes approches de gestion des conflits.
  3. Reconnaître l’aggravation des conflits.
  4. Adapter les approches de gestion de conflit.

Exercices

1. Lisez le scénario et répondez aux questions.

Jill et Neil font partie du personnel infirmier et travaillent dans la même équipe. Jill s’occupe des patient.e.s des chambres 1 à 6 et Neil des patient.e.s des chambres 7 à 12. Au cours de leur quart, ils mesurent régulièrement les signes vitaux des patient.e.s et administrent les médicaments.

Lors d’une tournée, Neil visite la personne dans la chambre 8. Il lit le dossier et remarque les initiales de Jill, ce qui indique qu’elle a déjà pris en charge cette personne. Un peu perplexe, il passe à la personne suivante. Une heure plus tard, Neil repasse dans la chambre 8 et voit à nouveau les initiales de Jill sur le tableau. Neil se demande : « Qu’est-ce qu’elle fait? C’est mon patient. Elle vérifie mon travail. Elle pense que je suis incompétent. » Neil décide de demander des explications à Jill.

 Questions :

a) Quelle serait la cause principale du conflit?

b) Quel type de conflit est survenu?

c) Si Neil remet à Jill une liste d’attribution des chambres, le conflit sera-t-il résolu?

2. Lisez le scénario et répondez aux questions.

Une équipe des soins infirmiers tient une réunion de routine. Un des membres, Stephen, termine une garde de 12 heures et une collègue, Tanya, prend le relais. Tanya est une infirmière en chef et cumule plus de dix ans d’expérience dans l’unité. Stephen est nouveau et a moins de trois ans d’expérience. Tanya doit faire une présentation à l’équipe sur la gestion efficace du temps au sein de l’unité. Au cours de la séance, Stephen roule des yeux et bavarde avec d’autres personnes. Tanya interrompt la présentation pour demander à Stephen s’il souhaite ajouter quelque chose. Stephen répond : « Il n’y a rien, mais je ne comprends pas pourquoi on en reparle. » Tanya choisit d’ignorer la remarque et termine la présentation. Mais, Stephen ne cesse pas de déranger ses collègues.

À la fin de la réunion, Tanya s’approche de Stephen et lui demande s’il a quelque chose à dire. Stephen répond : « Non, rien du tout. Je pense simplement que nous connaissons tous la procédure parce que nous l’avons apprise lors de la formation d’orientation. Peut-être que toi, si tu ne t’en souviens pas, tu devrais suivre à nouveau la formation. » Tanya est sidérée par sa réponse, mais se ressaisit rapidement. Elle rétorque : « Écoute, je travaille dans cette unité depuis plus de dix ans. On m’a demandé de présenter les instructions, car il y a des problèmes au sein du personnel. La prochaine fois, respecte mon autorité et écoute ta supérieure. »

 Questions :

 a) Quels sont les types de conflits en cours?

 b) Comment peut-on résoudre le problème entre Tanya et Stephen?

3. Réfléchissez à l’approche que vous adopteriez en cas de conflit. Comment pourriez-vous adapter cette approche lorsque vous travaillez avec d’autres personnes?

4. Lisez le scénario et répondez aux questions.

Connie, l’infirmière en chef de l’unité 7, est très estimée par l’équipe. Elle y travaille depuis des années et est considérée par ses collègues comme la personne-ressource en cas de questions ou de conseils. Connie est très soucieuse des patient.e.s, se démarque et fait un travail de qualité. Le Dr Smith est très respecté dans le milieu de la santé et une sommité dans son domaine. Il est réputé pour sa rigueur et son attitude exemplaire auprès des patient.e.s.

Quatre heures après le début d’une garde de 12 heures, Connie se fait aborder par le Dr Smith. Il lui demande : « Connie, pourquoi le patient de la chambre 2 n’a pas reçu ses médicaments pour la tension artérielle au cours des derniers jours? Je n’étais pas au courant! »

Connie tente de trouver rapidement une solution et répond : « Je ne le savais pas. Je vérifie de ce pas et je vous reviens. »

Le Dr Smith insiste : « Ce n’est vraiment pas nécessaire. Je connais le patient et on aurait dû m’informer de cette situation et m’en expliquer la raison. »

Connie, qui réfléchit toujours à une solution, explique : « Il doit sûrement avoir une note à ce sujet. . . »

« Il n’y en a aucune! », réplique le Dr Smith.

Connie s’énerve et met fin à la conversation, non sans riposter : « Très bien monsieur je-sais-tout, alors arrangez-vous sans moi. Dans le fond, c’est vous le diplômé en médecine! » Elle s’éloigne en trombe.

Connie se rend au poste des infirmières où Dan et Elise évaluent les dossiers et leur dit : « Imaginez ce que le Dr Smith vient de me dire! »

Dan et Elise, l’air stupéfait, répondent : « Quoi? »

Connie leur explique : « Il pense que je ne fais pas mon travail, alors qu’en réalité, c’est grâce à nous, les infirmières, que l’unité fonctionne. Pour qui prend-il? Douter de ma capacité à soigner les patients? Je suis la personne la plus compétente dans l’unité! »

Dan et Elise ne savent pas quoi répondre et tentent d’éviter le sujet par un simple : « Ah bon. »

Entre-temps, le Dr Smith s’est rendu dans la salle des médecins et y trouve son collègue, le Dr Lee. Il lui dit : « L’infirmière en chef de l’unité 7 est nulle. Elle ne sait pas ce qu’elle fait et ne comprend pas qu’il faut nous aviser des changements de médicaments des patient.e.s. » Le Dr Lee acquiesce rapidement et replonge dans son dossier.

Environ trois heures plus tard, Connie et le Dr Smith se sont plaints à plusieurs personnes. Connie croise une autre infirmière, Jessie, l’une de ses meilleures amies. Elle l’amène à l’écart et lui dit : « Tu ne vas pas croire ce qui vient de se passer. J’allais dans le bureau d’administration pour déposer mes demandes de congés et du coin de l’œil, j’ai aperçu le Dr Smith, tapi discrètement en faisant semblant de regarder un dossier pour m’espionner! »

« Pardon! Sérieusement? Ce n’est pas correct », répond Jessie.

Connie est soulagée que Jessie prenne son parti, car elle avait l’impression de perdre la tête. « Ça me stresse vraiment. D’abord, ce taré m’accuse de mal faire mon travail, ensuite il perd son temps à m’épier. Quel con! Je devrais porter plainte. Cette personne condescendante va comprendre qu’il n’est pas le roi ici et va redescendre de son piédestal. »

Jessie lui jette un regard angoissé. Elle la rassure : «  Ne t’inquiète pas. Je suis une employée exemplaire. Ça ne m’affectera pas. Même si ce n’est pas le cas, j’aurai fait quelque chose de positif pour toutes les autres infirmières. C’est une question de principe. »

Pendant ce temps, le Dr Smith tombe sur un ancien collègue de classe, le Dr Drucker, et s’exclame : « Wow! Tu as été embauché! On est très heureux que tu fasses partie de l’équipe. Mais attention, méfie-toi de l’infirmière en chef de l’unité 7. . . » Le Dr Smith lui décrit son imbroglio avec Connie et ajoute : « Elle chiale tout le temps et crée des problèmes à partir de rien. J’étais en train d’examiner un tableau dans le couloir du bureau administratif. Je m’occupais de mes affaires et je faisais mon travail, quand je l’ai vu foncer dans le bureau pour se plaindre de moi aux grands patrons! Il faut que tu fasses attention! Il ne faut pas que les gens balancent des médecins à l’administration pour un rien. Je pense que je vais faire un rapport et faire une tache sur son dossier parfait. Tout ira bien, tout le monde sait que j’ai raison. Elle va assumer les conséquences de ces actes. »

 Questions :

 a) Énumérez les étapes de la spirale infernale de ce conflit.

 b) Que devraient répondre Dan, Elise, Jessie, le Dr Lee et le Dr Drucker à Connie et au Dr Smith?

 c) Quelles seraient les solutions à ce conflit?

Références

Amestoy, S. C., Bakes, V. M. S., Thofehrn, M. B., Martini, J. G., Meirelles, B. H. S., et Trindade, L. L. (2014). Conflict management : Challenges experienced by nurse-leaders in the hospital environment. Revista Gaúchade Enfermagem, 35(2). p. 79-85. doi:10.1590/1983-1447.2014.02.40155

Cloke, K. et J. Goldsmith, (2011). Resolving conflicts at work : Ten strategies for everyone on the job (3e édition.). San Francisco : John Wiley & Sons inc.

Leas, S. (2011). Levels of conflict. Center for Congregational Health. https://cntr4conghealth.wordpress.com/2011/09/01/levels-of-conflict-by-speed-leas/

Oxford Dictionaries (en ligne). (n.d.). https://www.oxforddictionaries.com/

Ronald Reagan. (1982). Prononcée lors d’un discours de remise de diplôme au Eureka College (Eureka, Illinois). Bibliothèque présidentielle Ronald-Reagan. https://www.reaganlibrary.gov/sites/default/files/archives/speeches/1982/50982a.htm

Association des infirmières et infirmiers autorisés de l’Ontario. (2012). Lignes directrices surles pratiques exemplairespour les milieuxde travail sains  La gestionet l’atténuation des conflitsdans les équipes de soins de santé. https://rnao.ca/sites/rnao-ca/files/HWE_BPG_CONFLICT_FR_0.pdf

Thomas, K. W.,et R. H. Kilmann, (2017). An overview of the Thomas-Kilmann Conflict Mode Instrument (TKI). Kilmann Diagnostics. http://www.kilmanndiagnostics.com/overview-thomas-kilmann-conflict-mode-instrument-tki

12

Responsabilités et autorité des leaders infirmiers

Lisa Little, Joan Wagner et Anne Sutherland Boal

Toute personne responsable doit surtout se demander : comment faire en sorte qu’une bonne mesure demeure permanente, et non comment toujours mettre en place de bonnes mesures?

—Florence Nightingale (1860, p. 37)

Introduction

Selon l’Association des infirmières et infirmiers du Canada, le leadership infirmier repose sur la réflexion critique, l’action et la défense des intérêts, et il s’exerce dans tous les rôles et domaines de la discipline. Il se manifeste dans toutes les sphères des soins infirmiers (milieu clinique, universitaire et administratif, dans la recherche et les politiques), dans un éventail de contextes et à différents paliers. Le leadership se reflète dans des postes officiels, spécifiques ou dans des rôles officieux du personnel infirmier. Dans le champ administratif, on parle

d’administrateurs novateurs et avant-gardistes, du premier échelon aux cadres infirmiers les plus chevronnés. Ce sont des leaders réfléchis, soucieux de créer des environnements de pratique dynamiques et stimulants où le personnel infirmier prodigue des soins sûrs, accessibles, appropriés et rigoureux à la population canadienne (AIIC, 2009a, p.1).

Le chapitre porte sur les outils et les ressources à la disposition des gestionnaires sur le plancher (infirmière gestionnaire p. ex.) et s’appuie sur les pratiques infirmières éthiques et les valeurs professionnelles abordées au chapitre 10.

Objectifs d’apprentissage

  1. Comprendre le rôle des leaders infirmiers et des gestionnaires en soins infirmiers.
  2. Assimiler le rôle de l’infirmière professionnelle à celui du leader infirmier ou du gestionnaire.
  3. Souligner l’importance de réfléchir aux valeurs personnelles, professionnelles et organisationnelles dans la pratique infirmière.
  4. Expliquer la mise en application du code de déontologie de l’AIIC dans la pratique infirmière pour faire face aux risques du milieu.

12.1 Leadership infirmier

Le leadership infirmier joue un rôle charnière dans la réalité professionnelle du personnel et a des effets sur l’ensemble du système de santé et de la population canadienne (AIIC, 2009a, p 1). Cela dit, il joue peut-être un rôle encore plus crucial dans le cas des gestionnaires en soins infirmiers, car ils chapeautent les activités quotidiennes au travail. Les tâches s’articulent entre autres autour de la sélection des employés, du recrutement, de l’orientation, du perfectionnement et de l’évaluation du personnel, de l’affectation et de la gestion des ressources, de la gestion des risques, de la sécurité de la patientèle et des responsabilités financières. Les gestionnaires en soins infirmiers sont également censés inspirer, guider et orienter le personnel et les autres professionnels de la santé. Ils supervisent et inspirent la pratique du plus grand nombre de professionnels de première ligne et, par conséquent, des plus grands groupes du système de santé. En 2015, plus de 80 % du réseau était composé de personnel infirmier (ICIS, 2016). En moyenne, les gestionnaires en soins infirmiers supervisent près de 56,9 employés, et certains plus de 100 (OHA, 2011). Les gestionnaires qui soutiennent avoir une grande marge de manœuvre sont plus susceptibles d’avoir :

  • plus de 80 membres du personnel sous leur responsabilité;
  • la responsabilité de trois unités ou plus (espaces physiques dans différents secteurs géographiques);
  • la responsabilité budgétaire;
  • des allocations budgétaires supérieures à 7 millions de dollars.

À ce titre, les gestionnaires en soins infirmiers sont les mieux outillés pour inculquer les principes des soins infirmiers professionnels au personnel. Au début des années 1980, des études en milieux hospitaliers américains explorent l’importance de la relation entre personnel infirmier et leaders. Elles ont d’ailleurs démontré que l’obtention du statut d’hôpital magnétique favorisait une plus grande satisfaction des effectifs et des environnements de travail très dynamiques avec des résultats positifs pour la patientèle. Le Magnet Recognition Program® (ou programme de reconnaissance de l’attractivité) met en lumière les établissements de soins de santé qui (1) améliorent leur environnement de travail pour créer une culture qui valorise l’excellence dans les soins infirmiers et la pratique professionnelle et (2) démontrent leur capacité à attirer et à retenir le personnel infirmier professionnel.

De plus, les gestionnaires en soins infirmiers sont spécialistes de la transmission du savoir. Ils mettent en application les directives politiques de l’organisation à l’avant-plan des soins de santé tout en apportant à la haute direction de l’information sur la prestation des soins et les exigences de la pratique afin d’orienter les politiques. Par conséquent, ils jouent un rôle d’intermédiaire essentiel et l’application des directives organisationnelles repose sur leurs épaules. Néanmoins, cette position unique ne confère pas que des avantages. La tâche est exigeante, car il faut répondre aux besoins et aux priorités de l’organisation tout en gérant les ressources afin que le personnel prodigue des soins d’une excellente qualité. Les gestionnaires en soins infirmiers doivent constamment concilier responsabilités et obligations de rendre compte entre le personnel et les responsables dont ils relèvent. Accroître la satisfaction au travail, réduire le roulement du personnel, gérer une main-d’œuvre multigénérationnelle, appuyer la recherche et atteindre les objectifs satisfaisants sont autant de fonctions à remplir dans un contexte d’amélioration continue de la qualité et, souvent, de restrictions budgétaires.

12.2 Transformation du système de santé

Le cadre à trois volets de l’Institute for Healthcare Improvement

Les soins de santé sont en constante évolution, souvent grâce à de multiples projets novateurs à différentes échelles menés simultanément. Bien que certains aboutissent, contrairement à d’autres, ils sont tous conçus pour trouver des solutions aux problèmes complexes présents dans le système de santé. Bon nombre des améliorations sont conformes au cadre à trois volets de l’Institute for Healthcare Improvement, dont les objectifs sont les suivants : (1) améliorer l’expérience du patient; (2) améliorer la santé de la population et (3) réduire le coût des soins de santé par habitant (IHI, n. d.). La triade d’objectifs, souvent désignés « meilleure santé », « meilleurs soins » et meilleure valeur », a été la pierre d’assise de l’enquête de la Commission nationale d’experts et du rapport final, Un appel à l’action infirmière : La santé de notre nation, l’avenir de notre système de santé (2012). La commission a tout mis en œuvre pour trouver les solutions les plus fructueuses, efficaces et durables pour répondre aux besoins de santé changeants et criants de la population canadienne des Canadiens au 21e siècle. Selon la commission :

Soucieux de la santé et de la prestation de soins appropriés, le personnel infirmier autorisé participe activement à l’amélioration du système. Mais bien au-delà, il doit assumer un leadership fort au nom de la population canadienne, car il s’agit d’une responsabilité professionnelle et sociale. (p. 1)

Les responsables des politiques et les décideurs, inspirés par le cadre à trois volets, ont reconnu qu’une transformation de grande envergure du système de santé était de mise pour répondre au souci d’offrir aux Canadien.ne.s des soins de santé durables et de grande qualité.

Transformation du système de soins de santé canadien (principaux thèmes)

Les préoccupations concernant la viabilité financière du système de santé canadien, ainsi que la baisse de rendement comparé aux autres pays du Commonwealth et les besoins grandissant en services de soins, ont incité les gouvernements à lancer la transformation du système au moyen de diverses politiques de financement, de structure et d’organisation. Ci-dessous sont présentés sept éléments fondamentaux de la transformation.

Soins de santé primaires Le système évolue petit à petit vers un modèle fondé sur les soins de santé primaires et les déterminants sociaux de la santé. En 1978, l’OMS a adopté l’approche des soins de santé primaires comme assise conceptuelle d’une prestation efficace de soins de santé. Voici les cinq principes des soins de santé primaires :

  1. accessibilité;
  2. participation du public;
  3. promotion de la santé;
  4. technologies appropriées;
  5. collaboration intersectorielle.

Communauté. Des efforts sont déployés pour déplacer progressivement les services de soins de santé du milieu hospitalier vers les milieux communautaires, pour offrir un meilleur accès.

Prestation des soins de santé. Le mode de prestation des soins de santé évolue également. Les politiques sociales actuelles du Canada, qui mettent l’accent sur les populations marginalisées et les recommandations de la Commission de vérité et réconciliation, exigent une plus grande inclusivité, un atout pour la prestation des soins.

Pratique interprofessionnelle Le personnel infirmier évolue de plus en plus au sein d’équipes interprofessionnelles et en est responsable.

Établissement des limites professionnelles. Dans le cadre des équipes interprofessionnelles, les responsables en soins infirmiers exercent dans les limites de leur profession et les définissent aux autres professionnels. Elles sont explicitement décrites dans la législation provinciale relative au personnel infirmier autorisé, par exemple dans la Registered Nurses Act (loi sur les infirmières autorisées de 1988), ainsi que dans les documents relatifs aux normes et aux compétences (voir le College of Registered Nurses of Saskatchewan, 2013). Le personnel infirmier autorisé se porte également « garant des normes de pratique et des valeurs infirmières décrites dans le code de déontologie » (CRNS, anciennement la SRNA, 2018).

Gestion des maladies chroniques. La gestion des maladies chroniques est désormais une priorité compte tenu de l’augmentation des taux de maladies chroniques et du vieillissement de la population. Les taux de cancer, de diabète et d’hypertension ont augmenté chez les personnes âgées entre 2003 et 2009 (ICIS, 2011). Des études ont montré que la patientèle nécessitant des soins de santé dispendieux ne représente qu’une faible proportion de la population; or elle monopolise une grande partie du financement. Par exemple, « près de 1,5 % de la population ontarienne correspond aux 5 % d’usagers les plus coûteux des services hospitaliers et de soins à domicile de l’Ontario, ce qui représentait 61 % des coûts » (Rais et coll., 2013). Sans grande surprise, les personnes âgées représentent la majorité des usagers les plus coûteux pour le système de santé.

Technologies. Les technologies, utilisées tant par les prestataires de soins de santé que par la population en général, influencent les interactions au sein du système. Elles permettent également de fournir des analyses de mégadonnées afin de favoriser la prise de décisions éclairées.

Expérience sur le terrain

Les mégadonnées offrent une nouvelle voie de stockage et de classification des données auparavant inutilisables, cloisonnées et désorganisées, au bénéfice des acteurs du milieu de la santé. L’analyse génère une nouvelle valeur commerciale en dégageant des données autrefois inexploitables, de nouvelles prévisions et des connaissances utiles.

Pour en savoir plus, consultez le livre blanc d’Inforoute Santé du Canada, « analyse de mégadonnées en santé » (en anglais seulement).

Activité d’apprentissage essentielle 12.2.1

Pour en apprendre davantage sur les soins de santé primaires, regardez la vidéo intitulée « The Five Elements of Primary Health Care » (2:45) et répondez ensuite à la question suivante :

  1. Quelles sont les cinq composantes des soins de santé primaires?

Pour approfondir votre compréhension, voici deux autres suggestions. Répondez ensuite aux prochaines questions.

« Hand in Hand: Interdisciplinary Teams in Community Health Centres » (13:45)

  1. Quelle est la pierre d’assise des soins interdisciplinaires?
  2. Quel est le rôle des promoteurs de la santé?
  3. Comment assurer la communication au sein d’une équipe interdisciplinaire?

« Teams Manage Chronic Disease in Canada » (5:00)

  1. Pourquoi Ross s’estime-t-il « chanceux »?

12.3 Diriger et gérer dans l’environnement actuel des soins de santé

Pour diriger efficacement dans un environnement en constante évolution, les responsables du personnel infirmier doivent être novateurs, dynamiques et à l’avant-garde. Exercer de bonnes compétences en matière de gestion est le b.a.-ba d’un bon leader et les habiletés de leadership sont nécessaires pour une bonne gestion (AIIC, 2009a, p.2). Si les gestionnaires en soins infirmiers doivent acquérir de solides compétences en matière d’organisation et de gestion, des habiletés de leadership efficaces sont également de mise pour évoluer dans les environnements de travail difficiles d’aujourd’hui, marqués par des contraintes humaines, financières, temporelles et liées à d’autres ressources. Les leaders infirmiers sont

des gestionnaires novateurs et avant-gardistes, du premier échelon aux cadres infirmiers les plus chevronnés. Ce sont des chefs de file réfléchis, soucieux de créer des environnements de pratique dynamiques et stimulants où le personnel infirmier prodigue des soins sûrs, accessibles, appropriés et rigoureux à la population canadienne. (AIIC, 2009a, p.1)

Il existe diverses ressources pour définir et façonner le leadership en soins infirmiers. L’Association des infirmières et infirmiers autorisés de l’Ontario (2013) a élaboré un guide de pratiques exemplaires sur le développement et la viabilité du leadership. De plus, Huston (2008) propose huit aptitudes, des compétences essentielles pour les responsables du personnel infirmier

en 2020 :

  1. Une vision ou une approche holistique en ce qui concerne les soins de santé et les enjeux professionnels en soins infirmiers.
  2. Des compétences technologiques, qui favorisent des relations, interactions et processus opérationnels fluides et flexibles.
  3. Des compétences décisionnelles pointues fondées sur la science empirique.
  4. La capacité à créer des cultures organisationnelles qui mettent en avant la qualité des soins de santé et la sécurité des patients et du personnel.
  5. Comprendre et intervenir de manière appropriée dans les processus politiques.
  6. Des compétences élargies en matière de collaboration et de création d’équipes.
  7. Trouver un équilibre entre l’authenticité et les attentes en matière de performances.
  8. La capacité de prévoir et de s’adapter rapidement à un système de soins de santé caractérisé par des changements rapides et la désorganisation.

Diverses théories et approches du leadership ont défilé au fil des ans, en raison d’une variété de contextes et de valeurs sociétales et générationnelles. Le leadership est moins hiérarchisé, moins porté sur les tâches, mais davantage sur les relations, avec des cadres de collaboration qui ont évolué (voir chapitre 1). Les leaders infirmiers, y compris les gestionnaires, doivent toujours prêcher par l’exemple en adoptant un comportement professionnel, avant-gardiste, collaborateur et empreint de compassion, tout en s’appuyant sur des données probantes. Pour ce faire, ils doivent définir les valeurs personnelles, professionnelles et organisationnelles. Ils doivent d’ailleurs trouver leur propre voie, puis exprimer de façon claire et nette leurs valeurs. Les valeurs professionnelles figurent dans le Code de déontologie de l’AIIC (2017a), auquel sont soumis les leaders infirmiers dans tous les champs d’activité (voir chapitre 10). Le personnel infirmier et les gestionnaires peuvent être confrontés à des problèmes éthiques lorsqu’ils tentent de gérer et de diriger dans un environnement en constante évolution et où les ressources sont limitées. Faire preuve d’un leadership éthique est essentiel au rôle du personnel infirmier professionnel. Les deux prochaines sections décrivent les responsabilités éthiques des leaders infirmiers en matière de dotation et d’aide médicale à mourir.

Dotation sécuritaire en personnel infirmier

L’une des principales fonctions des gestionnaires en soins infirmiers est la gestion des ressources, du budget et du personnel. Une dotation appropriée, fondée sur des données probantes et sûres, est une responsabilité cruciale, qui peut souvent provoquer une détresse morale. Une dotation sécuritaire en personnel infirmier est essentielle pour les retombées pour la patientèle, les prestataires, l’organisation et le système (Berry et Curry, 2012). L’AIIC et la Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et d’infirmiers (FCSII) ont mis au point une boîte à outils en ligne sur la dotation sécuritaire en personnel infirmier, fondée sur des données éprouvées et composée de quatre modules. Elle propose aux gestionnaires ou à tout membre du personnel infirmier responsables de la dotation les connaissances, les outils et les ressources pour s’acquitter de la tâche dans divers contextes.

Figure 12.3.1 Dotation sécuritaire en personnel infirmier — Personnel infirmier s’occupant d’un patient gravement malade

[n. d.], « Personnel infirmier s’occupant d’un patient gravement malade », photo gracieusement fournie par la Saskatchewan Health Authority (anciennement Regina Qu’Appelle Health Region), numéro de collection 2003.8-1578, distribuée sous la licence Creative Commons Attribution 4.0 International.

L’approche de l’AIIC et de la FCSII en matière de dotation en personnel infirmier exige une attention particulière à différents éléments :

  • l’évaluation en temps réel des besoins des patients;
  • les modèles de prestation de soins infirmiers;
  • les décisions sur la composition du personnel;
  • l’évaluation de la charge de travail;
  • des environnements de travail de qualité;
  • la rétention et le recrutement.

Expérience sur le terrain

La détresse éthique (ou morale) survient dans des situations où le personnel infirmier sait ou a l’impression de savoir comment agir, mais, pour diverses raisons (y compris la peur ou des circonstances imprévues), ne prennent pas ou ne peuvent pas prendre les mesures nécessaires ou prévenir un préjudice. Lorsque les valeurs et les volontés sont donc compromises, l’identité et l’intégrité des infirmier.ère.s en tant qu’agents moraux sont affectées et ils ressentent une détresse morale.

Les sites suggérés proposent d’excellents outils et ressources essentielles en matière de dotation en personnel fondée sur des données probantes :

Énoncés de position de l’AIIC sur l’infirmière clinicienne spécialisée

Trousse d’outils sur la dotation sécuritaire en personnel infirmier fondée sur les données probantes de l’AIIC et la FCSII

Développement et maintien de pratiques sûres et efficaces en matière de dotation en personnel et de charge de travail : rapport de l’AIIO

Énoncés de position de l’AIIC sur la collaboration interprofessionnelle

Énoncés de position de l’AIIC sur la sécurité des patients

Utilisation de la boîte à outils destinée au personnel infirmier et praticien autorisé (dans le cadre d’un projet de ressources humaines en Ontario)

Cadre décisionnel de la composition du personnel pour des soins infirmiers de qualité : rapport de l’AIIC

Prendre des mesures contre la fatigue des infirmières, énoncé de position de l’AIIC

Énoncés de position de l’AIIC sur l’infirmière praticienne

Site Web du programme de certification de l’AIIC

Aide médicale à mourir

En juin 2016, le Code criminel a été modifié pour permettre aux personnes admissibles de bénéficier d’une aide médicale à mourir (AMM) au Canada. Le personnel infirmier canadien joue un rôle important dans la prestation de soins de fin de vie de premier choix, centrés sur la personne, qui comprennent les soins palliatifs et la mort naturelle et, dans certaines provinces, l’AMM. Il s’agit d’un domaine vital de la pratique infirmière dans lequel les gestionnaires du personnel infirmier mettent en avant leurs valeurs et leur éthique personnelles et professionnelles. Ils s’occupent entre autres des aspects opérationnels comme l’élaboration de la politique, la coordination et la gestion de la mise en œuvre de l’AMM au sein des unités ou des lieux de travail. Ils peuvent également offrir des conseils d’éthique aux membres du personnel qui choisissent de participer ou non à l’AMM. L’Association des infirmières et infirmiers du Canada a publié un cadre infirmier national sur l’AMM qui comprend sept valeurs et responsabilités fondamentales inspirées du Code de déontologie et servant de boussole pour toute orientation et décision éthique concernant l’AMM.

Le cadre vise plusieurs objectifs; en voici quelques-uns :

  • Renforcer une bonne pratique éthique des soins infirmiers.
  • Définir le rôle du personnel (c’est-à-dire des praticiens par rapport au personnel infirmier autorisé, aux infirmier.ère.s auxiliaires et aux infirmier.ère.s psychiatriques autorisé.e.s) dans l’AMM et soutenir les effectifs dans la pratique lorsqu’ils accompagnent une patientèle recevant l’aide ainsi que les familles et les équipes interprofessionnelles de soins de santé (en conformité avec les orientations réglementaires des instances concernées).
  • Aider les organismes de réglementation du personnel infirmier et clinicien, les administrateurs, les employeurs et les équipes interprofessionnelles de soins de santé à élaborer des politiques, des lignes directrices, des processus et des services qui mettent à profit les connaissances et les compétences du personnel infirmier pour offrir l’AMM.

En 2016, le College of Registered Nurses Association a publié un document intitulé Guideline for RN Involvement in Medical Assistance in Dying qui décrit les différents rôles du personnel infirmier et praticien autorisé qui participe à l’AMM.

Note de recherche

Makaroff, K., J. Storch, B. Pauly et L. Newton. (2014). Searching for ethical leadership in nursing. Nursing Ethics, 21(6), p. 642-658.

But

L’étude analyse la perception du personnel infirmier de première ligne et des leaders officiels à l’égard du leadership infirmier éthique.

Discussion

Les chercheurs ont appliqué une méthodologie de la méta-ethnographie pour faire l’analyse et la synthèse de quatre études menées auprès de 601 personnes au Canada (de 1999 à 2008) qui ont exploré la notion de leadership infirmier éthique. Il fallait déterminer ce que le personnel infirmier de première ligne attend de leurs leaders en matière de leadership éthique et, surtout, comment ces derniers perçoivent le leadership éthique. Deux thèmes principaux se dégagent des quatre études. En premier lieu, le leadership infirmier éthique doit répondre aux besoins des praticiens et du système dans lequel leaders officiels et personnel évoluent. Ensuite, le principe exige de recevoir et d’offrir un soutien pour accroître la capacité à exercer et à discuter de l’éthique dans le contexte quotidien. De plus, l’étude braque les projecteurs sur l’importance, certes quelque peu négligée, pour les responsables du personnel infirmier de recevoir un soutien de l’administration afin d’exercer un leadership éthique.

Mise en application de la pratique du leadership

Le personnel infirmier de première ligne ne perçoit pas nécessairement les leaders officiels comme disponibles, garants et solidaires, d’où un écart flagrant entre les perceptions et les actions qui nécessite plus d’attention. Les leaders infirmiers officiels peuvent être confrontés à des difficultés dans leur capacité à exercer un leadership éthique en soins infirmiers, un aspect important de la création d’un climat éthique dans lequel les retombées pour le personnel et la patientèle sont positives. Or, ils peuvent être pris entre les obligations éthiques de la profession et les priorités et besoins des établissements de soins de santé et des administrateurs. Le principal défi est d’évoluer dans le système actuel, dans lequel les valeurs liées à la qualité des soins peuvent être reléguées au second plan par rapport à l’efficacité et la rentabilité des entreprises et du marché. Les ressources organisationnelles comme la vision, la mission, les valeurs et les codes de déontologie peuvent être utilisées par les responsables pour assumer les responsabilités et les compétences associées au leadership infirmier éthique. Il est donc nécessaire de mettre l’accent sur les compétences éthiques des leaders officiels et de les développer dans le cadre de la direction de l’organisation. La promotion d’une pratique éthique des soins infirmiers en tant que preuve d’excellence des soins aux patients est une des principales raisons de renforcer le leadership éthique.

L’Institute for Healthcare Improvement (2017) a ciblé quatre responsabilités principales des gestionnaires pour atteindre une excellence opérationnelle sûre, fiable et efficace. Elles sont en adéquation avec des styles de leadership plus récents et habilitants, comme le style transformationnel et le style authentique. On pourrait ajouter que la conformité avec les valeurs nécessite également la mise en application de valeurs professionnelles comme celles qui figurent dans le code de déontologie de l’AIIC.

Assurer la pérennité du système d’apprentissage. Participer activement dans l’autoréflexion qui mène à la transparence, comprendre et appliquer la science de l’amélioration, la science de la fiabilité et l’apprentissage continu et faire transparaître les réalisations dans l’ensemble de l’organisation.

Garantir la sécurité psychologique. Veiller à ce que membres de l’organisation, patients et familles puissent exprimer confortablement leurs préoccupations, leurs suggestions et leurs idées de changement.

Nourrir la confiance. Créer un environnement où le respect est roi, en veillant à ce que les personnes sentent que leurs opinions sont appréciées et que tout comportement négatif ou abusif soit rapidement sanctionné.

Assurer la conformité des valeurs. Appliquer les valeurs de l’organisation à chaque décision, que ce soit en matière de sécurité, d’efficacité, de la patientèle, de rapidité, d’efficience ou d’équité.

Expérience sur le terrain

Passez en revue les différentes ressources sur les principes éthiques de l’AIIC à l’intention des gestionnaires en soins infirmiers :

Détresse éthique dans le milieu de la santé

Enjeux éthiques liés à la composition du personnel adéquate

Relations éthiques et qualité du milieu de travail

Modules d’apprentissage en ligne sur le code d’éthique de l’AIIC (accès uniquement aux membres de l’AIIC)

Cadre infirmier national sur l’aide médicale à mourir au Canada

12.4 Favoriser et promouvoir la santé environnementale

Les leaders infirmiers visionnaires sont également chargés de favoriser la présence des déterminants de la santé de la population, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des établissements de soins de santé. Le code de déontologie 2017 de l’AIIC oriente infirmiers et infirmières dans un rôle de responsable par le truchement d’interventions sanitaires individuelles et communautaires visant à éliminer les menaces environnementales et à améliorer la santé dans le monde entier. Dans une prise de position commune en 2009, l’AIIC et l’Association médicale canadienne soutenaient que l’environnement physique est un déterminant important de la santé (AIIC, 2009b). Chaque personne est responsable de l’environnement à l’échelle individuelle, communautaire, nationale et internationale. Les prestataires de soins de santé peuvent jouer un rôle très important afin d’encourager des pratiques et des politiques respectueuses de l’environnement. Le leadership et la promotion comprennent entre autres :

  • Évaluer et communiquer les risques environnementaux pour les personnes, les familles et les communautés;
  • Promouvoir des politiques qui protègent la santé en prévenant l’exposition aux dangers et en mettant en avant la durabilité;
  • Faire avancer les sciences infirmières, y compris la recherche interdisciplinaire, en rapport avec les questions de santé environnementale. (AIIC, 2009c, p. 1)

Le personnel infirmier doit être aux premières loges en matière de santé environnementale dans tous les domaines de la pratique infirmière.

12.5 Développement du leadership

Le développement du leadership peut se faire dans plusieurs contextes, notamment l’autoréflexion, le réseautage, l’apprentissage, la formation et le mentorat. De nombreuses universités, dont la DeGroote School of Business de l’Université McMaster, proposent des cours et des programmes de développement du leadership dans le secteur de la santé. Plusieurs programmes de développement du leadership s’appuient sur le modèle de Kouzes et Posner, comme celui proposé par le Dorothy Wylie Health Leaders Institute en collaboration avec l’AIIC. Il s’agit d’un programme de leadership canadien unique créé en 2001 pour renforcer le leadership infirmier. Au fil du temps, il a évolué et s’adresse également aux responsables du secteur de la santé de toutes les disciplines au pays. Plus de 75 % des anciens étudiants de l’institut ont affirmé que leur expérience a eu une incidence positive ou profonde sur leur vie et leur carrière. D’ailleurs, la participation à un tel programme est perçue comme un catalyseur de changement (Purdy, 2016).

Les gestionnaires en soins infirmiers disposent de diverses ressources, notamment la possibilité de travailler en réseau, d’échanger, de collaborer et d’apprendre des pairs et des collègues. Voici quelques ressources de réseautage :

  • l’Académie des chefs de direction en soins infirmiers qui représente les intérêts des responsables du personnel infirmier au Canada et offre une plateforme de discussion, d’échange de stratégies et de possibilités de collaboration et de partenariats;
  • le Collège canadien des leaders en santé, un organisme national sans but lucratif, dirigé par les membres, dont la mission est de renforcer le système de soins de santé du pays grâce à des gestionnaires chevronnés, compétents et efficaces.

Résumé

Dans le chapitre, les responsabilités des gestionnaires et des leaders du personnel infirmier sont examinées et mises en lumière sous différents angles. Les gestionnaires chapeautent les activités quotidiennes au travail, tout en inspirant et en guidant collègues et autres professionnels de la santé. Le personnel infirmier et même les gestionnaires ne sont pas à l’abri de la détresse morale et éthique sur le lieu de travail. Le code d’éthique de l’AIIC est une ressource précieuse destinée aux gestionnaires en soins infirmiers soucieux de faire preuve de leadership éthique dans les situations liées à la sécurité du personnel infirmier, à l’aide médicale à mourir (AMM) et à la santé environnementale. Par ailleurs, il existe au Canada de nombreuses ressources et possibilités de réseautage pour promouvoir le leadership infirmier. Les leaders infirmiers, notamment les gestionnaires, jouent un rôle crucial dans le quotidien du personnel, ainsi que dans le système de soins et la santé de la population canadienne.

Voici quelques apprentissages tirés du chapitre :

  • La connaissance des valeurs personnelles et professionnelles et des valeurs organisationnelles.
  • L’application des valeurs personnelles et professionnelles est très pertinente dans l’adoption de styles de leadership collaboratifs et habilitants, comme le leadership transformationnel (voir Kouzes et Posner, 2012) et le leadership authentique.
  • Les leaders infirmiers sont des administrateurs novateurs et à l’avant-garde. En plus de s’en porter garants, ils comprennent la création de cadres de pratique dynamiques et stimulants dans lesquels le personnel infirmier prodigue des soins sûrs, accessibles, en temps opportun et de grande qualité à la population canadienne (AIIC, 2009a, p.1).
  • Les gestionnaires en soins infirmiers occupent une position centrale pour influencer la pratique du personnel en créant des environnements de pratique professionnelle.
  • S’ils doivent acquérir de solides compétences en matière d’organisation et de gestion, des habiletés de leadership efficaces sont également de mise pour évoluer dans les environnements de travail difficiles d’aujourd’hui, marqués par des contraintes humaines, financières, temporelles et liées à d’autres ressources.

À la fin du chapitre, vous devriez être en mesure de faire ce qui suit :

  1. Comprendre le rôle des leaders infirmiers et des gestionnaires en soins infirmiers.
  2. Assimiler le rôle de l’infirmière professionnelle à celui du leader infirmier ou du gestionnaire.
  3. Souligner l’importance de réfléchir aux valeurs personnelles, professionnelles et organisationnelles dans la pratique infirmière.
  4. Expliquer la mise en application du code de déontologie de l’AIIC dans la pratique infirmière pour faire face aux risques du milieu.

Exercices

  1. Linda est infirmière gestionnaire dans une unité de soins intensifs. Il a été porté à son attention que le personnel de l’équipe de nuit dort souvent dans la salle des visiteurs. Linda prévoit d’en discuter avec l’équipe. Quels éléments du code de déontologie de l’AIIC Linda peut-elle appliquer pour alimenter la discussion avec le personnel?
  2. Trouvez un problème clinique ou de gestion qui nécessite une intervention. Vous disposez de six semaines pour changer la donne. Élaborez un plan général qui témoigne d’un leadership efficace.
  3. Comment les données, l’information et la recherche orientent-elles la prise de décision en matière de gestion?
  4. Vous êtes gestionnaire d’un petit groupe d’infirmières qui s’intéressent de près aux soins du diabète et qui proposent de réviser les politiques et les procédures relatives aux soins des pieds des patients diabétiques. Que pouvez-vous faire pour leur donner les moyens d’agir?
  5. Une personne diabétique, vivant dans un ranch de la région rurale de la Saskatchewan, souffre d’un ulcère à la jambe qui semble être infecté. Le médecin traitant lui a conseillé de laver la plaie avec du savon Sunlight tous les jours pour assécher l’exsudat. Vous rendez visite au patient à son domicile et vous savez que le traitement n’est pas la meilleure recommandation pour soigner des plaies. Que faites-vous? Décrivez comment vos prochaines actions s’inscrivent dans les limites professionnelles de la pratique du personnel infirmier autorisé.

Références

Berry, L. et P. Curry, (2012). Charge de travaildu personnel infirmieret soinsaux patients. Ottawa : Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et infirmiers. https://fcsii.ca/wp-content/uploads/2018/02/Workload-French.pdf

Institut canadien d’information sur la santé [ICIS]. (2016). Le personnel infirmierréglementé, 2016. Ottawa : Auteur. https://www.cihi.ca/sites/default/files/document/regulated-nurses-2016-report-fr-web.pdf

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AIIC et Association médicale canadienne. (2009). Le respect de l’environnementdansle secteur de la santé [énoncé de position commun]. https://hl-prod-ca-oc-download.s3-ca-central-1.amazonaws.com/CNA/66561cd1-45c8-41be-92f6-e34b74e5ef99/UploadedImages/documents/JPS99_Environmental_f.pdf

Gouvernement de la Saskatchewan. (1988). TheRegistered Nurses Act, 1988. http://www.publications.gov.sk.ca/freelaw/documents/English/Statutes/Statutes/R12-2.pdf

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Purdy, N. (2016). Impact of a leadership development institute on professional lives and careers. Nursing Leadership, 29(2), p. 10-30.

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13

Préparation et réponse aux situations d’urgence

Yvonne Harris

Le personnel infirmier voit plusieurs types de patient.e.s., de la personne simplement inquiète à la personne gravement malade, de la naissance à la mort, et pour des pathologies touchant toutes les parties de l’esprit, du corps et de l’âme, du traumatisme cérébral à l’ongle incarné. Les patient.e.s viennent nous voir en ayant confiance que nous respecterons leurs préoccupations et que nous leur fournirons des soins. En tant qu’infirmier.ère.s d’urgence, nous avons la responsabilité de respecter cette confiance et de leur fournir des soins avec toutes les compétences et connaissances nécessaires.

– Jean Proehl (2009, p. xi)

Introduction

Le personnel infirmier d’urgence en voit de toutes les couleurs. Au cours des dernières décennies, les catastrophes ont fait des millions de victimes partout dans le monde et coûté des milliards de dollars. Goodwin Veenema suggère que chaque semaine, en moyenne, une catastrophe requiert une aide internationale (2013). Des tragédies telles que l’attentat du 11 septembre au World Trade Centre, l’ouragan Katrina et le tremblement de terre de 2010 en Haïti ont conduit les prestataires de soins de santé à revoir d’un œil critique leurs processus afin de faire face à de tels événements.

Figure 13.1 Attente des secours après l’ouragan Katrina, Nouvelle-Orléans.

Ouragan Katrina, Nouvelle-Orléans, août 2005

« Photographie de Jocelyn Augustino prise le 30 août 2005 en Louisiane » par Jocelyn Augustino, FEMA/FEMA Photo Library, distribuée dans le domaine public par le biais de Wikimedia Commons. À propos de cette photo : Vue aérienne des dommages causés par l’ouragan Katrina au lendemain au passage de l’ouragan en Nouvelle-Orléans, en Louisianne.

Le personnel infirmier doit comprendre son rôle dans la préparation aux situations d’urgence et la planification en cas de catastrophes en raison des nombreuses responsabilités qui lui reviennent en matière de préparation et d’intervention tant sur le plan communautaire que dans les hôpitaux. Ce chapitre porte sur la définition d’une catastrophe, qu’elle soit naturelle ou anthropique (causée par l’humain), ainsi que sur la préparation, la planification et l’intervention en cas de catastrophe.

Objectifs d’apprentissage

  1. Explorer les quatre domaines d’intervention de la planification des urgences et des catastrophes, c’est-à-dire l’atténuation, la préparation, l’intervention et le rétablissement.
  2. Décrire les principales mesures de préparation.
  3. Reconnaître les situations qui peuvent exiger une planification générale supplémentaire.

13.1 Catastrophe

Les catastrophes peuvent être définies de plusieurs façons. L’Organisation mondiale de la santé (OMS, s.d.) définit une catastrophe comme une situation ou un événement qui dépasse les capacités locales et requiert une demande d’aide extérieure nationale ou internationale. Pour le Department of Homeland Security des États-Unis, une catastrophe est une urgence qui demande des mesures d’intervention pour protéger la vie ou les biens (USDHS, 2008, p. 138). Hammond, Arbon, Gebbie et Hutton (2012 ) résument ces définitions comme suit :

Une catastrophe est une perturbation grave du fonctionnement d’une communauté ou d’une société entraînant des pertes et des répercussions humaines, matérielles, économiques ou environnementales étendues, qui dépassent la capacité de la communauté ou de la société touchée à y faire face avec ses propres ressources (p. 236).

Tout simplement, une catastrophe est un événement désastreux qui surpasse les ressources disponibles. Les catastrophes peuvent être naturelles ou anthropiques (causées par l’humain). En mai 2016, un incendie à Fort McMurray, en Alberta, a détruit 2 400 structures dans la région, entraînant l’évacuation de 90 000 personnes.

L’incendie a pris une telle ampleur qu’à un certain moment, il a créé ses propres conditions météorologiques et a exigé l’aide de pompiers venus des quatre coins du pays. Tous les magasins et services de Fort McMurray ont dû fermer leurs portes et la population était encouragée à faire bouillir son eau. (Morgan, 2016)

Figure 13.1.1 Autoroute 63 près de Fort McMurray, Alberta, 3 mai 2016

Fort McMurray, feu de forêt, catastrophe, autoroute 63

« Paysage du feu de forêt près de l’autoroute 63 à Fort McMurray Sud », par DarrenRD, est sous licence CC BY-SA 4.0 International, sur Wikimedia Commons.

Les catastrophes naturelles comme les tornades, les tremblements de terre, les inondations et les conditions hivernales extrêmes sont plus fréquentes que les catastrophes anthropiques comme les troubles civils, le terrorisme et les conflits armés. En 2015, 376 catastrophes naturelles ont été enregistrées (Guha-Sapir, Hoyois et Below, 2015). Les catastrophes sont généralement considérées comme des événements « à faible probabilité et à fort impact » (Saunderson Cohen, 2013, p. 21).

La planification en cas de tout type de catastrophe requiert la prise en compte d’étapes communes, notamment l’atténuation, la préparation, l’intervention et le rétablissement. La Loi sur la gestion des urgences au Canada reconnaît les rôles de toutes les parties prenantes dans le système de gestion des urgences au Canada, notamment « en coordonnant, au sein des institutions fédérales et en collaboration avec les gouvernements provinciaux et d’autres entités, les activités de gestion des urgences » (Loi sur la gestion des urgences, 2007).

13.2 Atténuation des catastrophes

Les mesures d’atténuation des catastrophes éliminent ou réduisent les impacts et les risques des dangers grâce à des mesures prises avant qu’une urgence ou une catastrophe ne se produise. Ce processus commence par l’identification des risques. Les responsables des soins de santé doivent évaluer les situations d’urgence ou les catastrophes potentielles pouvant avoir une incidence sur la demande de services et de fournitures et élaborer un plan pour répondre à ces besoins. Sécurité publique Canada décrit le canal de dérivation de la rivière Rouge comme un exemple d’atténuation des catastrophes.

La construction du canal de dérivation a été un projet conjoint provincial et fédéral visant à protéger la ville de Winnipeg et à réduire l’impact des inondations dans le bassin de la rivière Rouge. Sa construction a coûté 60 millions de dollars dans les années 1960. Depuis, le canal a été utilisé plus d’une vingtaine de fois. Son utilisation lors de l’inondation de la rivière Rouge en 1997 a permis d’économiser environ 6 milliards de dollars. Le canal de dérivation a été élargi en 2006 dans le cadre d’une collaboration provinciale et fédérale (2015).

Hendrickson & Horowitz (2016) expliquent que les planificateurs d’établissements de santé et les responsables de la santé devraient se pencher sur les catastrophes les plus susceptibles de se produire dans leur communauté et leur zone géographique et effectuer une analyse de risques et vulnérabilités afin de déterminer les vulnérabilités probables qui pourraient survenir dans leur établissement à la suite de ces catastrophes.

Une analyse de risques et vulnérabilités est définie comme une approche systématique qui :

  • relève tous les risques susceptibles d’affecter une communauté;
  • détermine la probabilité du risque;
  • détermine les conséquences du risque;
  • analyse les résultats pour déterminer les risques prioritaires (Saunderson Cohen, 2013; Hendrickson et Horowitz, 2016).

Par exemple, les sites industriels qui stockent de grandes quantités de produits chimiques potentiellement dangereux représentent une menace liée aux matières dangereuses qui pourrait nécessiter une décontamination massive. Les hôpitaux locaux devraient disposer d’unités de décontamination fonctionnelles ainsi que d’un bon approvisionnement de ventilateurs, d’oxygène et d’antidotes spécifiques qui ne sont généralement pas disponibles en grandes quantités. Les catastrophes naturelles entraînent souvent une augmentation du nombre de sans-abri ou de personnes déplacées dont les besoins médicaux quotidiens peuvent être exacerbés par un accès limité aux soins de santé courants. Les services d’urgence peuvent être confrontés à une augmentation du nombre de patient.e.s en quête de médicaments, de traitements et d’évaluations.

Les résultats de cette analyse peuvent être utilisés pour développer et uniformiser les plans d’urgence. Ces plans doivent être conçus selon une approche interdisciplinaire, avec des partenaires des services de polices, d’urgences et d’incendie locaux. Les évaluations de risques et vulnérabilités doivent être réalisées chaque année ou chaque fois que des changements démographiques ou d’infrastructure sont susceptibles d’avoir une incidence sur le risque de catastrophe.

13.3. Préparation aux catastrophes

Figure 13.3.1 L’équipe médicale effectue une simulation d’accident avec plusieurs victimes

exercice, exercice avec grand nombre de blessé.e.s

« Le navire Mercy réalise un exercice avec un grand nombre de blessé.e.s dans le cadre du partenariat du Pacifique 2015 [image 12 de 12] », par Mayra Conde, nommé par DVIDS, distribué dans le domaine public par le biais de Wikimedia Commons. À propos de cette photo : MER DES PHILIPPINES (16 juillet 2015) Les membres de l’équipage à bord du navire-hôpital USNS Mercy (T-AH 19) effectuent un exercice d’accident impliquant un grand nombre de blessé.e.s dans le cadre du partenariat du Pacifique 2015.

L’objectif de la préparation aux catastrophes est de planifier une intervention qui réduira les dommages et favorisera le rétablissement après une catastrophe (Stopford, 2007). Le personnel infirmier, grâce à son expertise en soins de santé primaires, à sa grande expérience du travail en équipe interdisciplinaire et à ses solides compétences en collaboration, est un leader idéal dans la préparation aux catastrophes. La première étape de la préparation en cas de catastrophe est de mettre en place un plan stratégique de gestion des urgences (PSGU) (Sécurité publique Canada, 2016) en prévision non seulement des catastrophes les plus susceptibles de survenir, mais aussi de celles qui sont inattendues (Saunderson Cohen, 2013).

Le PSGU a une large portée et guide et renseigne les partenaires internes et externes sur la manière de répondre aux catastrophes. Il comprend des processus spécifiques pour :

  • établir les principaux objectifs du plan et les façons d’atteindre ces objectifs;
  • obtenir des renseignements sur les menaces;
  • planifier des interventions de bases en réponse aux menaces.

Activité d’apprentissage essentielle 13.3.1

Pour obtenir plus d’information sur le PSGU, consulter l’annexe A du Guide pour la planification de la gestion des urgences de Sécurité publique Canada.

Stopford (2007) fournit une liste détaillée de processus supplémentaires, par exemple :

1. Déterminer un plan de commandement et de contrôle. Quand vient le temps de déterminer la voie hiérarchique, il est essentiel de s’assurer d’avoir un commandant et un commandant en second, au cas où le commandant ne pourrait pas s’acquitter de ses fonctions. Le plan de contrôle doit également prévoir la désignation d’un emplacement spécifique pour le centre de commandement.

2. Déterminer les rôles et responsabilités fonctionnels des agences internes et externes. Les services internes et externes doivent bien comprendre leurs rôles et responsabilités et ceux des autres parties en cas de catastrophe. Les coordonnées des personnes à contacter en cas d’urgence, ainsi que leur rôle, doivent être facilement accessibles. Il est nécessaire de définir le personnel des services essentiels pour garantir une couverture cohérente du personnel d’urgence pendant la catastrophe.

3. Mettre en place un système de communication. Un processus de communication doit être mis en place pour faire face à l’éventualité d’une défaillance du système. Le processus d’urgence doit comprendre l’utilisation de lignes terrestres, de téléphones cellulaires et de radios comme équipes de communication standard.

4. Confirmer les questions juridiques pour une intervention comprenant des stratégies d’isolement pour le contrôle de l’infection. La préparation aux catastrophes doit comprendre des détails sur les processus d’isolement, le contrôle des infections et l’allocation de médicaments tels que les vaccins, les antibiotiques et les agents antiviraux en cas de pénurie. De plus, s’il est nécessaire de fermer l’établissement et d’en contrôler l’accès, les questions juridiques et éthiques doivent être prises en compte lors de l’élaboration de cette partie du plan.

5. Élaborer un plan en cas de maladies infectieuses. Le processus standard doit tenir compte de la possibilité d’une épidémie ou d’une pandémie de maladies infectieuses. Différentes maladies nécessitent des niveaux d’isolement et des équipements de protection individuelle (EPI) différents. La préparation aux catastrophes tient compte de la possibilité de besoins en équipements d’isolement de haut niveau et assure la disponibilité de fournitures et d’équipements adéquats. Les prestataires de soins d’urgence doivent connaître les signes cliniques des différentes maladies et un plan méthodologique de surveillance doit être mis en place pour faire face à une éventuelle progression de la maladie.

6. Obtenir et entretenir les équipements, installations et fournitures d’urgence. La préparation aux situations d’urgence requiert une procédure standard pour l’acquisition et l’entretien des équipements et fournitures d’urgence, notamment un calendrier d’entretien standard, un calendrier de suivi de l’emplacement des équipements et des renseignements sur les endroits où l’on peut se procurer des équipements et des fournitures supplémentaires.

7. Offrir de la formation sur la préparation aux catastrophes en cas d’urgence. La formation peut comprendre les aspects suivants :

  • le rôle du personnel en situation d’urgence;
  • la façon de mettre et enlever l’EPI;
  • les procédures de décontamination;
  • le triage.

La formation doit avoir lieu régulièrement et doit être incluse dans l’orientation régionale de l’ensemble du personnel. Les installations individuelles nécessitent une planification supplémentaire en matière de mesures à prendre si une catastrophe perturbe le fonctionnement quotidien. Cette planification s’adresse à la direction et au personnel de l’établissement et fournit un processus standard pour s’assurer que les établissements peuvent continuer à fournir les services essentiels habituels (Saunderson Cohen, 2013). Stopford (2007) propose d’autres éléments à prendre en compte, comme la planification de la mise en quarantaine de l’établissement. Le personnel peut être tenu de rester dans l’établissement et, dans ce cas, il doit être formé à l’élaboration d’un plan d’urgence familial.

13.4 Intervention

La première étape d’intervention lors d’un incident consiste à reconnaître que l’événement se produit et à mettre en œuvre les plans élaborés lors de la phase de préparation. Les interventions externes peuvent être entre autres les opérations de recherche et de sauvetage, la lutte contre les incendies et la construction d’abris pour les personnes déplacées. Le personnel infirmier doit avoir une bonne compréhension du plan en cas de catastrophe ainsi qu’une connaissance concrète des événements liés à l’incident afin de fournir les meilleurs soins à la patientèle. Par exemple, lors des feux de forêt à Fort McMurray en 2016, les hôpitaux environnants ont dû se préparer à prendre en charge un grand nombre de patient.e.s souffrant de brûlures et des problèmes respiratoires. Ce bassin de patients comprenait non seulement la population, mais aussi les pompiers et les premier.ère.s répondant.e.s.

Les réponses efficaces internes des établissements aux catastrophes comprennent le triage en cas de catastrophe et la répartition des victimes (Saunderson Cohen, 2013). Lors des catastrophes, les soins infirmiers sont souvent axés sur la prestation de soins aux patients qui entrent dans l’établissement et qui ont des degrés variés de blessures et de maladies en plus du stress émotionnel lié à l’événement. Le triage en cas de catastrophe consiste à en faire le plus possible pour le plus grand nombre possible de victimes et il a été caractérisé comme la pierre angulaire de la gestion de masse des victimes (Saunderson Cohen, 2013, p. 26).

Les priorités de traitement peuvent varier en fonction des fournitures et des ressources accessibles et du type de catastrophe (Stopford, 2007).

Différents systèmes de triage en cas de catastrophe ont été conçus pour les incidents où le nombre de blessé.e.s est élevé. Par conséquent, il est important pour les établissements de déterminer d’avance le système à utiliser. La méthode de triage simple et de transport rapide (START, simple triage and rapid transport) est possible en cas de catastrophe. Elle a été élaborée dans les années 1980 dans l’Orange County, en Californie, et depuis plusieurs pays l’ont adoptée (Saunderson Cohen, 2013, p. 27).

Quand le personnel infirmier utilise la méthode START lors du triage, les patients sont rapidement évalués (moins d’une minute) et classés selon les catégories rouge, jaune, vert ou noir.

Figure 13.4.1 Évaluation des patient.e.s à l’aide de la méthode START (Source des données : Tableau basé sur les données de Saunderson Cohen, 2013.)
ROUGE

Des soins immédiats sont nécessaires. Ces patient.e.s font partie d’une catégorie de traitement prioritaire et souffrent de maladies ou de blessures pouvant entraîner la perte d’un membre ou causer la mort.

JAUNE

Des soins urgents sont requis. Ces patient.e.s nécessitent un traitement urgent, mais peuvent attendre que les patients « rouges » soient stabilisés.

VERT

Des soins minimaux sont requis. Ces patient.e.s ont besoin de soins, mais sont jugés suffisamment stables pour attendre plusieurs heures avant d’être traités.

NOIR

Des soins de fin de vie sont nécessaires. Les patients de la catégorie « noir » sont considérés comme des personnes que l’équipe de soins ne peut pas sauver. Ils sont mourants ou déjà décédés.

Activité d’apprentissage essentielle 13.4.1

Le système JumpSTART est utilisé lors d’incidents impliquant un grand nombre de patients pédiatriques. Découvrez le processus de triage des jeunes enfants à l’aide de l’algorithme de triage pédiatrique JumpSTART du US Department of Health and Human Services.

13.5 Rétablissement à la suite d’une catastrophe

Figure 13.5.1 Reconnaissance envers le personnel infirmier

Après la réponse à la catastrophe vient le rétablissement qui se définit par les actions à court et à long terme nécessaires pour ramener la collectivité à la normale. Le rétablissement à court terme comprend la réparation des appareils essentiels au maintien des fonctions vitales pour qu’ils soient opérationnels et le rapatriement des patient.e.s. La mise en place d’un protocole de transport sécuritaire des patient.e.s vers leur établissement désigné dès que possible diminue le traumatisme psychologique lié au fait d’être séparé de sa famille. De plus, le retour diminue le fardeau des établissements de santé secondaires et du personnel qui ont répondu à la catastrophe (Assid, 2014).

Le rétablissement à long terme comprend la réparation des infrastructures et propriétés endommagées ainsi que le soutien physique et psychologique des victimes, des familles et des répondants (Upton, 2013). Les dommages physiques, bien qu’il n’y en ait pas toujours, sont un indice visuel facile à reconnaître lors d’une catastrophe (Saunderson Cohen, 2013). Les pandémies, le bioterrorisme ou le cyberterrorisme sont des exemples de catastrophes dont l’empreinte visuelle est minime ou inexistante. Par contre, les conséquences psychologiques peuvent durer des années, tant pour la patientèle que pour le personnel. Les personnes qui vivent une expérience traumatisante courent le risque de souffrir d’effets à long terme, qu’ils soient physiques, émotionnels, spirituels ou mentaux. Les caractéristiques des réponses comprennent les points suivants :

  • réactions émotionnelles aux événements;
  • perte de la capacité de fonctionner;
  • sentiment d’être dépassé par les événements;
  • utilisation accrue des ressources.

Activité d’apprentissage essentielle 13.5.1

Au cours des quelques dernières années, le Canada a connu un certain nombre de grandes catastrophes.

  1. Le personnel infirmier a joué un important rôle de leadership pendant les incendies de Fort McMurray (susmentionné) et dans le rétablissement après la crise. Consultez les liens ci-dessous, puis répondez aux questions.

« ‘We got the job done’: Nurse describes Fort McMurray hospital evacuation » par Rob Drinkwater (CanadianPress, 5 mai 2016).

« A year after the fire, Fort McMurray residents report an uneven recovery » par Keith Gerein (Edmonton Sun, 25 avril 2017).

(a) Quels ont été les principaux problèmes des infirmier.ère.s qui ont évacué les hôpitaux de Fort McMurray?

(b) À quels principaux problèmes de santé la population de Fort McMurray a-t-elle été confrontée alors qu’elle se rétablissait des feux?

2. Lisez les articles suivants sur le déraillement du train de Lac-Mégantic, intitulés « The public health response during and after the Lac-Mégantic train derailment tragedy: a case study », puis répondez aux questions.

Généreux, M., Petit, G., Maltais, D., Roy, M., Simard, R., Boivin, S., Shultz, J. M. et Pinsonneault, L. (2014). The public health response during and after the Lac-Mégantic train derailment tragedy: A case study. Disaster Health, 2(3-4), 113-120. https://doi.org/10.1080/21665044.2014.11031

(a) Décrivez les sept leçons tirées par les professionnel.le.s de la santé publique.

(b) Pourquoi les mesures de santé publique se poursuivent-elles longtemps après la fin des opérations d’intervention d’urgence?

3. Consultez les sources suivantes pour obtenir des renseignements sur le rôle joué par les infirmier.ère.s lors de la pandémie de SRAS à Toronto en 2003 et sur le rôle joué par les leaders infirmiers dans la prévention de la propagation de la maladie, puis répondez aux questions.

« Lessons learned from SARS » par Melissa Di Costanzo (Registered Nurse Journal, mai-juin 2013).

« SARS, 10 years later: One family’s remarkable story », d’Amy Dempsey (Toronto Star, 2 mars 2013).

(a) Quels sont les effets à long terme signalés par les infirmier.ère.s à la suite de l’événement traumatique?

(b) Quels ont été les principaux apprentissages tirés de la situation?

Note de recherche

Goodwin Veenema, T., Andrews, D, Losinski, S., Newton, S. M. et Seal, S. (2016). Exploration and development of standardized nursing leadership competencies during disasters. Health Emergency and Disaster Nursing, 4, p. 26-38.

Nash, T. J. (2016). A guide to emergency preparedness and disaster nursing education resources. Health Emergency and Disaster Nursing, 4, p. 12-25.

Association des infirmières et infirmiers du Canada. (2010). Prise de décision et pratique infirmière éclairées par des preuves [Énoncé de position] https://hl-prod-ca-oc-download.s3-ca-central-1.amazonaws.com/CNA/66561cd1-45c8-41be-92f6-e34b74e5ef99/UploadedImages/documents/PS113_Evidence_informed_2010_f.pdf

Imaginez que vous finissez votre journée de travail au service des urgences lorsque la radio vous informe qu’une tornade s’est abattue sur une collectivité à 50 kilomètres de la ville. De nombreuses maisons et entreprises ont été complètement détruites. Les services médicaux d’urgence, les pompiers et la police sont sur les lieux et ils ont commencé à transporter les personnes vers votre service des urgences. Êtes-vous prêt? Avez-vous les connaissances nécessaires pour prodiguer les meilleurs soins aux victimes?

La pratique fondée sur des données probantes a toujours fait partie du lexique infirmier; au cours des dernières décennies, elle a pris une place plus importante dans la formation des infirmier.ère.s (AIIC, 2010). Pour être membre du personnel infirmier au service des urgences, il faut avoir de vastes connaissances, ce qui signifie qu’il faut se tenir au courant des dernières recherches sur les soins infirmiers et les soins de santé. Cependant, la recherche montre que bon nombre des membres du personnel infirmier n’ont pas les connaissances de base nécessaires pour se préparer à une catastrophe. Nash (2016) a fait une analyse documentaire et il suggère que les membres du personnel infirmier ne se sentent pas à l’aise de répondre aux catastrophes en raison de la rareté des ressources liées à la préparation aux situations d’urgence (p. 12). La difficulté réside dans le manque de documentation actuelle sur les soins infirmiers dans les services des urgences et la préparation aux catastrophes. D’autres analyses documentaires renforcent ce point et soutiennent que les recherches sur le leadership fondé sur des données probantes sont peu nombreuses (Goodwin Veenema, Andrews, Losinski, Newton et Seal, 2016, p. 36). La recherche clinique sur les soins infirmiers dans les services d’urgence sous-tend l’élaboration de directives cliniques. Pensons au laps de temps entre l’arrivée et l’injection et entre l’arrivée et l’installation d’un ballonnet dans le traitement des syndromes coronariens aigus et la présence de la famille au moment du réveil. La recherche sur la préparation aux situations d’urgence ne fait pas exception.

Le caractère inévitable des catastrophes à venir, tant naturelles qu’anthropiques, combiné aux ressources actuellement limitées en formation, signifie qu’il faut mettre davantage l’accent sur la préparation aux catastrophes dans les programmes de formation en soins infirmiers. Il est possible pour la formation en soins infirmiers de tracer la voie en faisant des recherches en continu et de s’attaquer à cette difficulté sans fin.

Résumé

Les catastrophes sont imprévisibles et peuvent survenir partout et en tout temps. Dans les cas de catastrophes, les soins infirmiers doivent être coordonnés entre tous les professionnels de la santé des secteurs des soins de santé, privés et publics.

Le personnel infirmier d’aujourd’hui doit répondre aux catastrophes naturelles, anthropiques et technologiques. Il faut avoir un fort leadership pour régler ces problèmes uniques et avoir la préparation nécessaire à de tels événements. Lorsqu’une catastrophe frappe une communauté, qu’il s’agisse d’un accident d’autobus, d’une tornade, d’un ouragan ou d’une attaque terroriste, le personnel infirmier est la première ligne qui aide les personnes dans le besoin (Knebel, tel que mentionné dans Goodwin Veenema, 2013, p. xxvi). La fréquence, l’ampleur et la variété des catastrophes, tant anthropiques que naturelles, continuent de s’intensifier. Par conséquent, les leaders infirmiers devront répondre à ces situations en faisant preuve de connaissance, de préparation, de prouesse politique et surtout de travail d’équipe à tous les niveaux (Ford, tel que mentionné dans Goodwin Veenema, 2013, p. xxix).

À la fin du chapitre, vous devriez être en mesure de faire ce qui suit :

  1. Explorer les quatre domaines d’intervention de la planification des urgences et des catastrophes, c’est-à-dire l’atténuation, la préparation, l’intervention et le rétablissement.
  2. Décrire les principales mesures de préparation.
  3. Reconnaître les situations qui peuvent nécessiter une planification générale supplémentaire.

Exercices

1. Regardez la vidéo « START Simple Triage and Rapid Treatment » (18 min 19 s) pour comprendre les bases de la méthode START, puis lisez la mise en situation suivante :

Vous accompagnez les services d’urgence et vous êtes les premiers sur les lieux d’une collision entre plusieurs véhicules sur l’autoroute 1, impliquant cinq véhicules de tourisme et un semi-remorque transportant des matières non dangereuses. Il y a 10 victimes, lesquelles présentent différents degrés de blessures.

Procédez au triage des victimes suivantes en utilisant les catégories de la méthode START pour les adultes : vert, jaune, rouge et noir.

(a) Femme, 77 ans, avulsion du cuir chevelu, pas de respiration spontanée.

(b) Homme, 45 ans, ambulatoire, fréquence respiratoire de 20, saignement du cuir chevelu, offre son aide.

(c) Homme, 30 ans, pas de respiration spontanée, tuyau empalé dans la poitrine.

(d) Homme, 55 ans, respiration haletante, fréquence respiratoire de 32, saignements aux deux bras.

(e) Femme, 27 ans, non ambulatoire, fréquence respiratoire de 18, obéit aux commandes.

(f) Homme, 23 ans, fréquence respiratoire de 28 par minute, large lacération à la tête, perte de conscience, ne réponds pas aux commandes.

(g) Femme, 44 ans, boitant, se plaignant de douleurs au genou gauche, bras gauche douloureux. Déformation évidente du bras gauche, temps de remplissage capillaire < 2 secondes, fréquence respiratoire de 24 par minute.

(h) Homme, 79 ans, se promenant entre les véhicules et en cherchant sa femme, pas de blessures apparentes.

(i) Femme, 19 ans, ambulatoire, en proie à des vertiges, fréquence respiratoire de 16, pas de blessures apparentes.

(j) Femme, 18 ans, ambulatoire, en pleurs, fréquence respiratoire de 22, saignements de nez

2. Plusieurs hôpitaux municipaux créent un réseau de politiques et d’ententes régissant la réorientation des patient.e.s au cas où un service d’urgence serait débordé au-delà de sa capacité. À quelle phase de la planification de la gestion des urgences cette mesure correspond-elle?

(a) atténuation

(b) préparation

(c) intervention

(d) rétablissement

3. Choisissez l’énoncé qui décrit le mieux la phase d’atténuation d’une catastrophe.

(a) La mise en place d’un protocole pour le transport en toute sécurité des patient.e.s vers leur établissement désigné dès que possible se déroule au cours de la phase d’atténuation.

(b) La phase d’atténuation de la catastrophe comprend l’évaluation des dommages physiques et structurels.

(c) L’atténuation commence par l’identification des risques.

(d) La phase d’atténuation d’une catastrophe est la phase finale de l’expérience d’une catastrophe.

RÉPONSES

1. (a) Femme, 77 ans, avulsion du cuir chevelu, pas de respiration spontanée (noir).

(b) Homme, 45 ans, ambulatoire, fréquence respiratoire de 20, saignement du cuir chevelu, offre son aide (vert).

(c) Homme, 30 ans, pas de respiration spontanée, tuyau empalé dans la poitrine (noir).

(d) Homme, 55 ans, respiration haletante, fréquence respiratoire de 32, saignements aux deux bras (rouge).

(e) Femme, 27 ans, non ambulatoire, fréquence respiratoire de 18, obéit aux commandes (jaune).

(f) Homme, 23 ans, fréquence respiratoire de 28 par minute, large lacération à la tête, perte de conscience, ne réponds pas aux commandes (rouge).

(g) Femme, 44 ans, boitant, se plaignant de douleurs au genou gauche, bras gauche douloureux. Déformation évidente du bras gauche, temps de remplissage capillaire < 2 secondes, fréquence respiratoire de 24 par minute (jaune).

(h) Homme, 79 ans, se promenant entre les véhicules et en cherchant sa femme, pas de blessures apparentes (vert).

(i) Femme, 19 ans, ambulatoire, en proie à des vertiges, fréquence respiratoire de 16, pas de blessures apparentes (vert).

(j) Femme, 18 ans, ambulatoire, en pleurs, fréquence respiratoire de 22, saignements de nez (vert).

2. (b) Préparation. Raisonnement : La mise en place d’ententes entre hôpitaux et d’ententes de coordination avant une catastrophe fait partie de la phase de préparation.

3. (c) L’atténuation commence par l’identification des risques. Raisonnement : Les mesures d’atténuation des catastrophes éliminent ou réduisent les impacts et les risques des dangers grâce à des mesures prises avant qu’une urgence ou une catastrophe ne se produise, ce qui commence par l’identification des risques.

Références

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Loi sur la gestion des urgences. L.C. 2007, ch. 15. https://laws-lois.justice.gc.ca/PDF/E-4.56.pdf Généreux, M., Petit, G., Maltais, D., Roy, M., Simard, R., Boivin, S., Shultz, J. M. et Pinsonneault, L. (2014) The public health response during and after the Lac-Mégantic train derailment tragedy: A case study. Disaster Health, 2, (3-4), p. 113-120. https://doi.org/10.1080/21665044.2014.11031

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Leadership infirmier et informatique

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Twitter n’est pas une simple technologie, c’est une conversation – qu’on le veuille ou non.

Charlene Li (2014 )

Introduction

L’information joue un rôle essentiel dans le processus de soins infirmiers. Le personnel infirmier recueille de l’information sur la patientèle pour élaborer des plans de soins, les mettre en œuvre et communiquer des conclusions à d’autres prestataires de soins de santé. Les progrès technologiques permettent au personnel et aux personnes étudiantes en soins infirmiers d’accéder à l’information essentielle en quelques clics. Par exemple, dans les hôpitaux et les cliniques, les prestataires de soins de santé ont accès, dans un environnement sécurisé, aux dossiers médicaux électroniques, qui contiennent des données de santé privées et confidentielles. Les services de télésanté permettent d’informer le public et d’offrir des soins de santé, notamment des suivis et des diagnostics cliniques. Le public utilise les médias sociaux pour partager des expériences et obtenir de l’information en matière de santé.

Aujourd’hui, les progrès technologiques permettent au personnel infirmier de communiquer et de planifier les soins plus efficacement que jamais en collaboration avec les bénéficiaires et les autres prestataires de soins de santé. Ce chapitre vous permettra d’approfondir votre compréhension des outils technologiques en soins infirmiers. Il sera également question du rôle du personnel infirmier en lien avec les dossiers médicaux électroniques, la télésanté, les télésoins à domicile et les médias sociaux.

Objectifs d’apprentissage

  1. Définir les termes « informatique infirmière », « cybersanté » et « santé mobile.
  2. Comprendre les risques et les avantages de l’utilisation des dossiers médicaux électroniques.
  3. Comprendre l’importance de la terminologie normalisée.
  4. Comprendre l’importance de la télésanté et des télésoins à domicile.
  5. Distinguer la télésanté des télésoins à domicile.
  6. Explorer les outils Web 2.0 utilisés dans le domaine de la santé.
  7. Discuter du rôle du personnel infirmier dans le développement de la culture de la santé du public.
  8. Décrire les mesures nécessaires pour garantir la confidentialité et la sécurité des données de santé à caractère personnel.

14.1 Informatique de la santé

Informatique infirmière

Les systèmes d’information sur la santé servent au stockage, à la gestion, à la saisie et à la transmission de données sur la santé des personnes et sur toutes les activités des organisations du secteur de la santé (ACESI, 2012). L’informatique infirmière est une spécialité qui combine les soins infirmiers et l’utilisation de l’informatique et des sciences de l’information pour fournir de l’information sur la prestation des soins. L’Association canadienne des écoles de sciences infirmières (ACESI) a développé une ressource qui définit les compétences attendues des personnes étudiant en sciences infirmières à l’obtention de leur diplôme (voir ACESI, 2012). À leur entrée sur le marché du travail, les personnes diplômées en sciences infirmières doivent 1) utiliser l’information pour prodiguer des soins sécuritaires, efficaces et fondés sur des données probantes; 2) respecter les normes du lieu de travail, de l’association professionnelle et des organismes de réglementation en matière de technologies de l’information et de la communication; 3) être en mesure d’utiliser les technologies de l’information et de la communication dans leur pratique. Les compétences requises comprennent notamment la recherche d’une information crédible et fiable sur la santé en ligne ainsi que le soutien de la clientèle et des familles dans la recherche d’information sur la santé et l’évaluation de la crédibilité et de la fiabilité de l’information trouvée en ligne.

Expérience sur le terrain

Il est important que les personnes qui étudient en sciences infirmières comprennent les principes liés à l’informatique infirmière, puisqu’elles seront exposées à de nombreux exemples d’utilisation de la technologie par la clientèle pendant leur carrière. En voici quelques-uns :

  • Travailler en milieu rural et orienter une personne vers un spécialiste au moyen d’un rendez-vous en télésanté;
  • Utiliser des dossiers médicaux électroniques dans sa pratique quotidienne;
  • Utiliser une application médicale pour aider à prodiguer des soins sécuritaires et efficaces.

Cybersanté

La cybersanté est un terme utilisé par Santé Canada pour décrire l’application des technologies de l’information et des communications dans le secteur de la santé. Il englobe une diversité de services tels que les systèmes électroniques d’administration des patients, les tests de laboratoire et de diagnostic, les services d’information et les dispositifs de télésanté et de télésoins à domicile (y compris la surveillance à distance des signes vitaux).

Santé mobile

Pour les prestataires de soins de santé, la technologie mobile a changé la façon d’assurer des suivis et de communiquer avec la patientèle, les familles et les autres prestataires de soins de santé. Tout appareil mobile intelligent permet de télécharger des applications, c’est-à-dire des programmes informatiques autonomes fonctionnant directement à partir de l’écran d’accueil de l’appareil. Les technologies de santé mobile englobent différents types d’applications médicales et liées à la santé gratuites ou payantes.

Les applications liées à la santé et au conditionnement physique sont généralement destinées à un usage individuel quotidien pour le suivi ou l’information sur une variété d’activités saines comme le suivi des calories et l’exercice (Aungst, Clauson, Misra, Lewis et Husain, 2014; Martinez-Pérez, de la Torre-Diez et López-Coronado, 2013). Les applications médicales sont plutôt axées sur les pratiques de soins de santé et peuvent aider à la communication ou à la représentation graphique de l’état de santé ou à l’enregistrement de la tension artérielle ou de la glycémie chez les personnes atteintes d’hypertension ou de diabète.

L’utilisation des technologies de santé mobile peut poser des problèmes de sécurité. De nombreuses applications de santé nécessitent la saisie de données de santé personnelles (Cummings, Borycki et Roehrer, 2013). L’équipe de développement informe la personne utilisatrice des conditions d’utilisation (y compris l’utilisation de données de santé personnelles) et la personne doit accepter ces conditions avant de pouvoir utiliser l’application. Si la personne accepte les conditions d’utilisation, elle doit savoir qui a accès à ses données dans l’application. La personne doit aussi savoir si ces informations seront surveillées par son prestataire de soins de santé ou si une tierce partie aura accès à ces données de santé en dehors du contexte de soins, comme l’équipe de développement. Tous les prestataires de soins de santé doivent respecter les lois en matière de confidentialité de l’information comme HIPA (Health Information Protection Act) lors de l’utilisation d’applications pour plusieurs personnes, afin que toute information personnelle soit dépersonnalisée. Si plusieurs personnes accèdent à un appareil mobile dans le cadre d’un séjour à l’hôpital ou d’une consultation médicale, il est important d’élaborer des politiques de confidentialité afin d’empêcher l’accès aux renseignements de santé d’une autre personne dans l’application.

Des procédures de prévention des infections doivent être mises en place selon le type de dispositifs utilisés dans l’établissement de soins. Les prestataires de soins de santé doivent respecter les procédures de prévention des infections lorsque les dispositifs sont partagés.

Au moment de choisir des applications de soins de santé, les prestataires doivent tenir compte de facteurs tels que l’âge du public cible, le coût de l’application et ses fonctions spécifiques (comme le courrier électronique, la messagerie instantanée et les groupes de soutien) afin de déterminer si elle répondra aux besoins de la clientèle (Ristau, Yang et White, 2013). Si la personne doit utiliser l’application à sa sortie de l’hôpital ou à domicile, elle doit avoir un bon rapport coût-efficacité. Certaines applications nécessitent une connexion à Internet; la personne doit donc y avoir accès, que ce soit de façon régulière ou intermittente. L’application doit également être facile à utiliser et mise à jour régulièrement pour fournir une information actuelle et fiable.

Activité d’apprentissage essentielle 14.1.1

Pour en savoir plus sur l’informatique infirmière, consultez le rapport de l’ACESI intitulé « Compétences en informatique infirmière requises par les infirmières autorisées pour accéder à la pratique », puis répondez aux questions suivantes :

  1. Quelles sont les trois compétences en informatique définies par l’ACESI requises pour accéder à la pratique?
  2. Sélectionnez l’une de ces compétences et dressez la liste des indicateurs.

Pour en savoir plus sur la protection de la vie privée, consultez les sites ci-dessous, puis répondez aux questions suivantes :

Health Insurance Portability and Accountability Act for Professionals, US Department of Health and Human Services

  1. Les renseignements sur la santé peuvent-ils être partagés en cas de catastrophe grave?
  2. Qui a le droit de consentir à l’échange électronique par une entité couverte des données de santé protégées d’une personne mineure avec ou par l’intermédiaire d’une organisation d’information sur la santé?

Vos renseignements personnels sur la santé et la protection de la vie privée (en anglais, gouvernement de la Saskatchewan)

  1. Qui sont les dépositaires en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels sur la santé?
  2. Quels sont vos droits en ce qui concerne vos données personnelles?

Comment accéder à l’information? (en anglais, Bureau du commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de la Saskatchewan)

  1. Comment obtenir le type d’information dont vous avez besoin auprès du Bureau du commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de la Saskatchewan?

14.2 Risques et avantages des dossiers médicaux électroniques

Dossiers médicaux électroniques

Les systèmes de dossiers médicaux électroniques sont utilisés dans divers hôpitaux, centres de santé communautaires et cabinets médicaux pour saisir et consulter les renseignements relatifs à la patientèle. Des identifiants uniques sont utilisés pour garantir que l’information d’une personne est liée au bon prestataire de soins de santé, et qu’elle contient ses résultats les plus récents des tests de laboratoire et de diagnostic et sa liste de prescriptions la plus à jour. De l’information sur l’historique de vaccination, les allergies, les consultations, les rapports de chirurgie et les sommaires de congé de la patientèle est également fournie. L’un des avantages des dossiers de santé électroniques est que les prestataires de soins de santé ont un accès rapide aux renseignements médicaux. La gestion des maladies chroniques est améliorée grâce à des fonctions comme l’envoi de rappels de tests de suivi aux prestataires de soins de santé. Les dossiers de santé électroniques permettent également de réduire la redondance des tests de laboratoire et de diagnostic, ce qui se traduit par des économies. Un des risques associés aux dossiers de santé électroniques est que des personnes extérieures au cercle de soins puissent accéder à de l’information confidentielle. Les autorités sanitaires régionales ont pris des mesures pour surveiller ces risques. Ces mesures comprennent la limitation et la surveillance des accès à ces données de santé confidentielles.

Les dossiers de santé électroniques peuvent également inclure l’utilisation de protocoles standardisés fondés sur des données probantes pour les soins infirmiers. Le personnel infirmier peut accéder au protocole le plus récent fondé sur des données probantes pour voir les interventions infirmières potentielles, ce qui peut améliorer la documentation des évaluations et des interventions en fournissant des rappels pour la consignation des symptômes spécifiques ou de l’administration de médicaments au besoin.

Terminologie normalisée

Aperçu

Les systèmes de documentation électroniques utilisent une terminologie clinique normalisée qui permet à tous les prestataires de soins de santé de communiquer des résultats et de l’information dans leur cadre de pratique spécifique. La terminologie clinique normalisée fait référence à un ensemble de termes communs qui décrivent les états de santé, les plans de traitement et les interventions nécessaires. Deux exemples de terminologie clinique normalisée couramment utilisée sont la SNOMED CT (nomenclature systématisée de la médecine — termes cliniques) et les C-RSAIS (résultats dans le domaine de la santé pour l’amélioration de l’information et des soins)
. Le recours à une terminologie clinique normalisée facilite la mesure et la consignation de données et de soins infirmiers d’une manière compréhensible par les autres prestataires de soins de santé. La surveillance du temps nécessaire à l’exécution d’une procédure de soins infirmiers est un exemple de consignation des données dans une optique d’organisation des soins. Ces données peuvent être utilisées pour décrire des activités infirmières spécifiques et leur incidence sur l’issue clinique, notamment la progression de la patientèle vers le congé.

Avantages de la terminologie clinique normalisée pour les soins infirmiers

Les lignes directrices de la pratique infirmière élaborées par l’Association des infirmières et infirmiers autorisés de l’Ontario sont fondées sur les résultats d’études systématiques et révisées par un groupe de spécialistes et des parties prenantes. Ces lignes directrices peuvent être intégrées électroniquement à tout plan de soins infirmiers afin de réduire les écarts dans les soins pour un état pathologique donné. En utilisant une terminologie commune et en suivant un plan d’action spécifique, le personnel de recherche peut utiliser l’information et comparer les résultats plus efficacement à l’échelle mondiale. Les interventions infirmières peuvent ensuite être décrites et comprises par d’autres prestataires de soins de santé dans le cadre de la transition de la patientèle de l’hôpital vers la communauté ou le domicile.

Expérience sur le terrain

Il est important de préserver la confidentialité de la clientèle et de respecter les politiques du lieu de travail et des organismes de réglementation lors de l’utilisation des technologies de l’information et de la communication.

Activité d’apprentissage essentielle 14.2.1

Lisez la page Web d’Inforoute Santé du Canada sur les dossiers médicaux électroniques, puis répondez aux questions suivantes.

  1. Pourquoi les dossiers numériques doivent-ils être accessibles à tous les prestataires de soins de santé autorisés?
  2. Quels sont les défis et les solutions pour mettre en place un cadre global de partage d’information sur la santé dans tout le pays?
  3. L’Architecture de la santé numérique de 2016 a identifié dix environnements informatiques. Lesquels?
  4. Afin de déterminer comment mettre en œuvre une solution de santé numérique donnée, les concepteurs doivent prendre de nombreuses décisions. Nommez-en trois.

14.3 Télésanté et télésoins à domicile

La télésanté est une technologie de l’information et de la communication qui permet de fournir des services de santé à distance à l’aide d’appareils électroniques ou de télécommunication. L’avantage de la télésanté est l’accessibilité des soins de santé à toutes les personnes, quel que soit leur lieu de résidence. Par exemple, elle permet de consulter un spécialiste en restant chez soi, ce qui évite aux personnes en région éloignée de devoir se déplacer dans un grand centre. Des soins infirmiers sont offerts pendant le rendez-vous, qu’il s’agisse d’une évaluation ou de sensibilisation. Les résultats de l’évaluation physique peuvent être transmis au médecin par télésanté. Le personnel infirmier soutient et informe la personne qui consulte à toutes les étapes de la consultation, que ce soit le diagnostic, la planification, la mise en œuvre ou l’évaluation. Tous les soins sont documentés conformément au protocole de l’agence. La sécurité de la clientèle est une considération importante pour chaque interaction. Le personnel infirmier doit respecter les normes et les compétences de l’association professionnelle rattachée à la province du lieu de travail, quel que soit le lieu de résidence de la clientèle. Les soins à distance requièrent une attention particulière et des compétences d’évaluation de haut niveau de la part du personnel infirmier, puisque l’évaluation physique n’a pas lieu en direct, ce qui augmente le risque de sécurité lié aux évaluations incomplètes. Le protocole de l’agence assure le maintien du respect de la vie privée et de la confidentialité entre le personnel infirmier et la patientèle.

Les télésoins à domicile sont similaires à la télésanté. Les télésoins à domicile se distinguent par le fait qu’ils sont offerts à domicile. La personne reçoit des appareils et une formation lui permettant de surveiller ses propres signes vitaux à domicile. Ces signes vitaux sont transmis à un prestataire de soins de santé par téléphone ou par Internet. Les prestataires de soins de santé surveillent les tendances dans les données afin d’alerter le personnel médical ou le personnel infirmier praticien si un suivi est nécessaire. Le principal avantage des télésoins à domicile est que la patientèle et les personnes soignantes bénéficient d’un soutien supplémentaire, ce qui leur donne un sentiment d’indépendance accru et réduit le nombre de crises et de visites à l’urgence.

Activité d’apprentissage essentielle 14.3.1

  1. Comment les télésoins à domicile peuvent-ils contribuer aux soins?
  2. Comment les télésoins à domicile peuvent-ils aider les personnes proches aidantes à prendre soin d’une personne atteinte de MPOC ou d’insuffisance cardiaque?

14.4 Réseaux sociaux

Types

Les réseaux sociaux désignent toute plateforme Web ou mobile qui permet de publier et de partager des messages ou du contenu publiquement ou auprès de personnes choisies. De nombreux réseaux sociaux, comme Facebook et X (anciennement Twitter), sont axés sur la communication avec un groupe de personnes établies, souvent déjà connues les unes des autres. D’autres, comme LinkedIn, permettent d’élargir son réseau de contacts professionnels par l’établissement de nouvelles relations en ligne. D’autres outils populaires, comme YouTube, permettent de diffuser des vidéos au public. Chacun de ces outils est utilisé dans le milieu de la santé, soit pour : 1) permettre aux personnes de communiquer avec d’autres personnes atteintes du même problème de santé; 2) permettre aux prestataires de soins de santé d’entrer en contact les uns avec les autres; 3) mettre les prestataires de soins de santé en contact avec la patientèle et les familles. Par exemple, les prestataires de soins de santé peuvent utiliser X pour surveiller les épidémies (en faisant des recherches axées sur le mot-clé « influenza »). YouTube peut être utilisé pour sensibiliser le public à une saine alimentation ou offrir des conseils pour se préparer à une intervention chirurgicale. Ce ne sont là que quelques exemples de l’utilité des réseaux sociaux pour soutenir la prise en charge de la patientèle.

Préoccupations en matière de protection de la vie privée

Il est important de tenir compte des obstacles, risques et responsabilités juridiques et éthiques associés à l’intégration des médias sociaux dans la pratique infirmière. Les réseaux sociaux doivent être utilisés de manière appropriée, respectueuse et sécuritaire. Le personnel infirmier autorisé doit garder en tête le Code de déontologie des infirmières et infirmiers autorisés de l’AIIC (2017), qui stipule que les infirmier.ère.s « respectent la vie privée et protègent la confidentialité des bénéficiaires de soins et d’autres collègues » (p. 18). Le personnel infirmier doit être au courant de toute législation fédérale et provinciale ayant cours, comme le droit à la vie privée et à la confidentialité des renseignements personnels et de santé (Sewell, 2016). La Health Information Protection Act (Loi sur la protection des renseignements personnels sur la santé) de la Saskatchewan aborde la protection des renseignements de santé électroniques (gouvernement de la Saskatchewan, 2003).

La publication en ligne de commentaires, photos ou vidéos permettant l’identification d’une personne par du personnel infirmier a causé d’importantes brèches de confidentialité. Les prestataires de soins de santé doivent savoir que la publication anonyme ou derrière un pseudonyme ne les protège pas contre une accusation de violation de la confidentialité ou de diffamation (SPIIC, 2012). En outre, les infirmier.ère.s doivent respecter les limites professionnelles en ajoutant une personne comme « ami » ou en communiquant des renseignements de santé, puisque leur responsabilité personnelle peut être engagée si elles ou ils s’identifient comme membre de la profession.

Note de recherche

Davies, S. (2016). Online Social Support in the Saskatchewan Heart Failure Network: An Interpretative Description Approach (thèse de doctorat). Université de la Saskatchewan : Saskatoon.

Résumé de la ressource

La prise en charge et la prévention des maladies cardiovasculaires constituent un défi important pour le système de santé à l’échelle nationale et internationale. De nombreux prestataires et organismes de santé utilisent des outils en ligne pour communiquer avec la patientèle, collaborer avec d’autres prestataires de soins de santé et fournir de l’information sur la santé. Cette étude descriptive interprétative explore les facteurs qui influencent ou encouragent l’utilisation des réseaux sociaux par le personnel soignant comme forme de soutien social lorsqu’un membre de la famille apprend à vivre avec une insuffisance cardiaque. La chercheuse a élaboré et mis au point un réseau social pour les personnes aidantes. À la suite de séances de discussion avec des prestataires de soins de santé, le site NING « Living Well with Heart Failure » a été examiné et son utilisation a été approuvée. Six personnes soignantes ont contribué au site Web et ont été interviewées avant et après leur participation.

Les résultats de cette étude sont importants pour les autorités sanitaires régionales, les prestataires de soins de santé et les personnes qui soignent des personnes atteintes d’insuffisance cardiaque. Les prestataires de soins de santé sont encouragés à offrir aux personnes soignantes et à la patientèle un éventail de matériel pédagogique en format imprimé et électronique. On doit les encourager à participer à des forums en ligne pour parler de leur expérience et apprendre d’autres prestataires, de personnes soignantes et de personnes atteintes d’insuffisance cardiaque. Puisque les autorités sanitaires régionales peuvent développer des réseaux liés à des domaines de pratique spécifiques, les témoignages des spécialistes peuvent aider le personnel infirmier fraîchement diplômé à apprendre du personnel plus expérimenté. Le partage de résultats de recherches médicales entre prestataires de soins de santé avec les personnes soignantes et la patientèle peut présenter de nombreux avantages.

Résumé

Les technologies de l’information ont fait progresser la prestation de services de santé. Les avantages sont nombreux, notamment un accès rapide à de l’information médicale à jour, une accessibilité pour les personnes qui devraient autrement parcourir de longues distances pour rencontrer des spécialistes, et une disponibilité des renseignements en tout temps, en quelques clics. Le personnel infirmier doit tenir compte des défis juridiques et éthiques liés à l’utilisation de la technologie en santé afin de fournir des soins sûrs et efficaces pour l’ensemble de la patientèle, en personne ou en ligne.

À la fin du chapitre, vous devriez être en mesure de faire ce qui suit :

  1. Définir les termes « informatique infirmière », « cybersanté » et « santé mobile ».
  2. Comprendre les risques et les avantages de l’utilisation des dossiers médicaux électroniques.
  3. Comprendre l’importance de la terminologie normalisée.
  4. Expliquer le rôle et l’importance de la télésanté et des télésoins à domicile.
  5. Distinguer la télésanté des télésoins à domicile.
  6. Reconnaître et expliquer les outils Web 2.0 utilisés dans le domaine de la santé.
  7. Discuter du rôle du personnel infirmier dans le développement de la culture de la santé du public.
  8. Décrire les mesures nécessaires pour garantir la confidentialité et la sécurité des données de santé à caractère personnel.

Exercices

  1. Examinez vos comptes dans les médias sociaux, puis décrivez les risques et les avantages d’utiliser les médias sociaux dans un cadre professionnel. Réfléchissez à vos conclusions. Pensez maintenant aux risques et aux avantages liés à votre image et à votre professionnalisme en tant que membre de la profession infirmière.
  2. Examinez les principes du code déontologique de Health on the Net (HONcode) pour les sites Web médicaux et de santé. Trouvez trois sites Web en rapport avec votre domaine d’intérêt clinique. Recommanderiez-vous ces sites à votre clientèle? Pourquoi ou pourquoi pas?
  3. Réfléchissez à une situation où un membre d’une équipe de soins de santé a été réprimandé pour avoir publié de l’information dans les médias sociaux. Comment vous assurerez-vous de respecter la confidentialité dans les médias sociaux?
  4. Examinez les lignes directrices énoncées dans les textes de loi suivants : Health Information Protection Act, Health Insurance Portability and Accountability Act et Freedom of Information and Protection of Privacy Act. Comment vous assurez-vous de respecter la confidentialité des renseignements de santé dans le cadre de votre pratique? Quelles sont les mesures prises par un organisme de soins de santé pour garantir la confidentialité des renseignements de santé? Quels renseignements une personne peut-elle consulter avant, pendant ou après une prestation de soins médicaux? Quelles démarches une personne doit-elle effectuer pour recevoir ses renseignements de santé personnels?

Références

Aungst, T. D., Clauson, K. A., Misra, S., Lewis, T. L. et Husain, I. (2014). How to identify, assess and utilise mobile medical applications in clinical practice. International Journal of Clinical Practice, 68(2), p. 155-162. https://doi.org/10.1111/ijcp.12375.

Inforoute Santé du Canada. (2011, 23 juin). Pourquoi les dossiers de santé électroniques? [vidéo]. https://www.youtube.com/watch?v=arAvND8hsvU.

Association canadienne des écoles de sciences infirmières [ACESI]. (2012). Compétences en informatique infirmière requises par les infirmières autorisées pour accéder à la pratique. https://casn.ca/wp-content/uploads/2014/12/EntrytoPracticeNursingInformaticsCompetenciesFINALFR.pdf.

Projet canadien C-RSAIS : Résultats dans le domaine de la santé pour l’amélioration de l’information et des soins. (s. d.). Inclusion des résultats pour les patients liés aux soins infirmiers dans les dossiers de santé électroniques. https://www.cna-aiic.ca/fr/soins-infirmiers/outils-et-ressources-sur-les-soins-infirmiers/informatique-infirmiere

Association des infirmières et infirmiers du Canada [AIIC]. (2017). Code de déontologie des infirmières et infirmiers autorisés, édition 2017. https://www.cna-aiic.ca/fr/soins-infirmiers/les-soins-infirmiers-reglementes-au-canada/ethique-infirmiere

Société de protection des infirmières et infirmiers du Canada [SPIIC]. (2012). InfoDROIT : Médias sociaux. 19(3). https://spiic.ca/article/medias-sociaux/.

Cummings, E., Borycki, E. M., et Roehrer, E. (2013). Issues and considerations for healthcare consumers using mobile applications. Enabling Health and Healthcare through ICT, p. 227-231. https://doi.org/10.3233/978-1-61499-203-5-227.

Gouvernement de l’Alberta. (2017). Guidelines and Practices: 2009 édition. https://www.servicealberta.ca/foip/resources/guidelines-and-practices.cfm.

Gouvernement de la Saskatchewan. (2003). The Health Information Protection Act quick reference sheet. http://www.health.gov.sk.ca/hipa-quick-reference.

Gouvernement de la Saskatchewan. (s. d.). Your personal health information and privacy. https://www.saskatchewan.ca/residents/health/accessing-health-care-services/your-personal-health-information-and-privacy

Fondation Health on the Net. (2017). The commitment to reliable health and medical information on the internet. https://www.hon.ch/HONcode/Pro/Visitor/visitor.html.

Li, C. (15 avril 2014). X (Twitter). https://twitter.com/charleneli?lang=en.

Martinez-Pérez, B., de la Torre-Diez, I. et López-Coronado, M. (2013). Mobile health applications for the most prevalent conditions by the world health organization: Review and analysis. Journal of Medical Internet Research, 15(6), p. e120.

Ristau, R. A., Yang, J. et White, J. R. (2013). Evaluation and evolution of diabetes mobile applications key factors for health care professionals seeking to guide patients. Diabetes Spectrum, 26(4), p. 211-214.

Sewell, J. (2016). Informatics and nursing: Opportunities and challenges. Philadelphie (Pennsylvanie) : Wolters Kluwer.

SNOMED International. (s. d.). SNOMED CT: The global language of healthcare. https://www.snomed.org/snomed-ct.

U.S. Department of Health and Human Services. (s. d.). Health Information Privacy. https://www.hhs.gov/hipaa/index.html.

15

Réglementation, lois, relations de travail et négociations

Beverly Balaski

L’éducation est un droit humain avec un immense pouvoir de transformation. Elle constitue les fondements des piliers que sont la liberté, la démocratie et le développement humain durable.

— Kofi Annan, ancien secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies (1999)

Introduction

Pendant votre baccalauréat de quatre ans en sciences infirmières et votre arrivée officielle dans la profession infirmière autorisée, plusieurs organisations joueront un rôle important dans le soutien de votre pratique. Au provincial, il s’agit de l’organisme de réglementation professionnelle et du syndicat des infirmières et infirmiers. Au niveau national, il existe l’Association des infirmières et infirmiers du Canada (AIIC), la Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et infirmiers (FCSII) et la Société de protection des infirmières et infirmiers du Canada (SPIIC). Il y a aussi l’Association des infirmières et infirmiers autochtones du Canada (AIIAC), qui travaille à améliorer la santé des Autochtones en soutenant les infirmières et infirmiers autochtones. Les mandats et missions de ces organismes sont tous axés sur le soutien et l’engagement des infirmières et infirmiers autorisés dans le développement d’une profession forte.

Le présent chapitre aborde le rôle de chaque organisme et le rôle que vous jouez en tant que membre informé.e participant à ces organismes qui ont un impact direct sur votre profession et votre capacité à prodiguer des soins infirmiers sûrs et de qualité.

Objectifs d’apprentissage

  1. Reconnaître les mandats de l’organisme de réglementation professionnelle provincial, du syndicat des infirmières et infirmiers autorisés et des quatre organismes nationaux (AIIC, FCSII, SPIIC et AIIAC).
  2. Comparer les missions et approches de chaque organisation en matière de soutien aux infirmières et infirmiers autorisés (IA) et de prestation de soins infirmiers de qualité.
  3. Tirer des conclusions quant à la pertinence actuelle de chaque organisme.
  4. Évaluer l’effet des tendances en matière de soins de santé sur la viabilité de ces organismes. 
  5. Comparer la manière dont ces organismes accomplissent leurs rôles et missions ou dont ils évoluent pour en adopter d’autres.

15.1 Accès à la profession infirmière autorisée

Pour exercer en tant qu’IA, vous devez suivre un programme d’études et réussir un examen national, programme et examen devant être reconnus par l’organisme de réglementation professionnelle des IA de votre province. Actuellement, dans la plupart des provinces et territoires du Canada, il faut avoir suivi un programme universitaire de quatre ans et réussi l’examen donnant droit au permis d’exercice du National Council Licensure pour les IA (NCLEX-RN). Ensuite, vous devez obtenir un permis d’exercice auprès d’un organisme de réglementation professionnelle provincial avant de pouvoir utiliser le titre d’IA et de travailler dans ce domaine.

15.2 Réglementation

Autoréglementation professionnelle

Au Canada, la profession infirmière autorisée est une profession autoréglementée. C’est grâce au cadre de l’autoréglementation professionnelle que les IA au Canada ont depuis longtemps la capacité d’informer et d’influencer la création et la mise en œuvre des politiques de santé, afin d’assurer la prestation de soins de qualité aux patients. L’autoréglementation signifie généralement que la profession s’autoréglemente par la création d’un organisme de réglementation professionnelle plutôt que par le gouvernement (AIIC, 2007) et repose sur la conviction que la profession a les connaissances spécialisées nécessaires pour établir des normes de pratique et évaluer la conduite de ses membres par évaluation par les pairs (Storch, 2010, p. 201).

Les dispositions régissant la profession infirmière autorisée se trouvent dans les lois provinciales et territoriales qui peuvent être spécifiques aux soins infirmiers, comme une loi sur les IA, ou être englobées dans une loi générale qui s’applique à plusieurs prestataires de soins différents (AIIC, 2007). Ce sont ces dispositions qui donnent aux IA le droit d’exercer et qui fournissent le cadre de gouvernance de la profession. Dans les accords d’autoréglementation professionnelle, les gouvernements délèguent à l’organisme de réglementation professionnelle la responsabilité de les mettre en œuvre de manière adéquate et efficace, transférant ainsi l’autorité légale de réglementer les membres dans l’intérêt du public sur la base des obligations législatives. L’un des aspects importants de l’autoréglementation professionnelle est de réserver le titre des membres. Cette restriction est généralement contenue dans la loi spécifique à la profession. Les titres réservés sont importants pour permettre au public de savoir quelles professions possèdent quelles compétences.

La principale responsabilité de tout organisme d’autoréglementation professionnelle est toujours d’assurer la protection du public. Par conséquent, l’organisme de réglementation professionnelle doit mener des activités et régir les membres agréés de manière efficace afin de protéger et de servir l’intérêt public, faute de quoi il risque de se voir retirer le privilège d’autoréglementation. La protection du public est assurée par les principes de promotion des bonnes pratiques, de prévention des mauvaises pratiques et d’intervention en cas de pratiques inacceptables (AIIC, 2007). Les organismes de réglementation professionnelle s’acquittent de ce mandat en veillant, par diverses activités réglementaires, à ce que les IA soient des prestataires faisant preuve de prudence, de compétence et d’éthique. En ce sens, l’organisme de réglementation doit définir la pratique et les limites de la profession infirmière, y compris les exigences et compétences requises pour exercer (AIIC, 2007).

Les principales fonctions d’un organisme de réglementation professionnelle sont : 1) définir les conditions d’accès à la profession; 2) définir les conditions d’exercice de la profession; 3) mettre en place un processus d’examen et de mesures disciplinaires; et 4) mettre en place un processus d’évaluation de la compétence continue des membres (Randall, 2000).

Un autre aspect important de l’établissement de normes pour une profession est la reconnaissance de l’ensemble unique et défini de connaissances que possèdent les membres. Ces connaissances sont obtenues par la formation spécifique et spécialisée et ne peuvent pas considérablement chevaucher celles d’un autre groupe professionnel. Si une grande partie du bassin de connaissances de la profession est déjà détenue par d’autres groupes professionnels, il devient difficile de fixer des normes de pratique pour la profession (Randall, 2000).

Expérience sur le terrain

En tant qu’organisme de réglementation professionnelle, le College of Registered Nurses of Saskatchewan (CRNS), anciennement la Saskatchewan Registered Nurses’ Association (SRNA), a les responsabilités suivantes :

  • Définir les conditions d’octroi du permis d’exercice;
  • Enregistrer et renouveler les permis d’exercice;
  • Établir, superviser et faire respecter les normes de pratique, le code de déontologie et un programme de formation continue;
  • Fournir des conseils pratiques et du soutien aux membres;
  • Approuver les programmes de soins infirmiers;
  • Établir et maintenir un processus de conduite professionnelle. (SRNA, 2015)

En 2017, le CRNS, alors la SRNA, a célébré son 100e anniversaire.

Figure 15.2.1 La SRNA fête ses 100 ans

SRNA, 100 ans, Assemblée législative

Annonce du 100e anniversaire en 2017, de la Saskatchewan Registered Nurses Association (désormais le CRNS), photo distribuée sous Creative Commons Attribution 4.0 International. À propos de cette photo : Joanne Petersen, présidente de la SRNA, et Carolyn Hoffman, directrice générale de la SRNA, devant l’Assemblée législative de la Saskatchewan, en compagnie de l’honorable David Marit, de l’honorable Lyle Stewart et de l’honorable Greg Ottenbreit.

Il est important de comprendre que l’autoréglementation professionnelle est bénéfique pour les deux parties. Dans cette relation, le gouvernement conserve un certain contrôle sur l’exercice de la profession par le biais de sa responsabilité ministérielle et de l’approbation des règlements professionnels, mais il n’a pas à supporter les dépenses et l’expertise spécialisée nécessaires pour régir en toute sécurité une profession qu’il connaît peu. Pour les professions, l’autoréglementation est un privilège exceptionnel, qui montre que le gouvernement fait confiance aux membres de la profession pour fournir des services en toute sécurité dans l’intérêt du public (Human Resources Professionals Association, 2016).

Activité d’apprentissage essentielle 15.2.1

Consultez les liens ci-dessous pour en savoir plus sur l’autoréglementation et les éléments nécessaires à l’obtention d’un permis d’exercice, puis répondez aux questions qui suivent.

Énoncé de position du CRNS sur la réglementation par la profession

Document du CRNS sur le rôle des IA dans l’intérêt public

  1. Pourquoi l’autoréglementation est-elle si importante pour la profession infirmière?
  2. Selon vous, qui réglementerait la profession infirmière si les infirmières et infirmiers ne la réglementaient pas?

Tendances en matière de réglementation de la profession infirmière

Traditionnellement, les organismes de réglementation jouent les rôles d’ordre professionnel (réglementation de la profession) et d’association (défense des intérêts des IA pour inspirer et influencer les soins de santé) en conciliant la gestion administrative de la profession et la nécessité de militer en faveur d’environnements, de politiques et de pratiques qui permettent à leurs membres de s’acquitter de leurs obligations et responsabilités. En général, la différence entre l’objectif et la fonction de chaque organisme de réglementation réside essentiellement dans le fait que les dispositions incluent ou non l’aspect d’autoréglementation de la profession infirmière (la fonction d’ordre) et l’aspect de défense des intérêts de la profession infirmière (la fonction d’association) ou que ces fonctions sont maintenues séparément (Schiller, 2014).

Ces dernières années, les gouvernements, les parties prenantes et le public ont commencé à s’interroger sur les avantages d’un organisme unique responsable à la fois de l’administration de la réglementation et de la défense des intérêts. Certains pensent que la séparation de ces fonctions est un changement positif, qui élimine toute perception de partialité, d’autopromotion ou de manquement; d’autres y voient une mesure visant à affaiblir la voix de la profession et à permettre l’adoption de politiques médiocres sans contestation.

L’adhésion à un ordre est obligatoire, tandis que la participation à une association se fait sur une base volontaire. À cet égard, les associations comptent sur les IA pour comprendre l’importance du rôle de défense des intérêts et choisir de s’impliquer par le biais d’une adhésion payante. Ainsi, la séparation entre le processus réglementaire et le rôle de défense des intérêts aboutit à un modèle d’ordre professionnel obligatoire où les aspects réglementaires sont administrés, tandis que le rôle de défense des intérêts est rempli par les IA désireuses de former une association. Si les IA ne sont pas disposées à former une telle association, la défense des intérêts, un aspect important de la profession, n’est pas assurée.

Activité d’apprentissage essentielle 15.2.2

Pour savoir comment le CRNS gouverne, fonctionne et inspire, consultez la page d’information à propos du CRNS. Veillez à cliquer sur les boutons sous chaque section pour en savoir plus, puis répondez aux questions suivantes :

  1. Comment la sélection des membres du conseil se fait-elle?
  2. Que doivent faire les étudiant.e.s en soins infirmiers pour assister à une réunion du conseil?

Lisez le plan stratégique du CRNS, puis répondez aux questions suivantes :

  1. Quels sont les grands thèmes du plan stratégique du CRNS?
  2. Pensez-vous qu’un thème est plus important que les autres? Pourquoi?

Comme nous l’avons vu plus haut, le CRNS a deux rôles principaux. Lire la section sur son rôle dans l’intérêt du public pour en savoir plus sur les rôles de la réglementation et des associations, puis répondez aux questions suivantes :

  1. Quelles sont les initiatives de réglementation?
  2. Quelles sont les initiatives d’association?
  3. Quels sont les résultats attendus en matière d’engagement du public et des membres?

Plusieurs croient qu’une profession très efficace peut seulement être réalisée par des fonctions administratives réglementaires, tandis que d’autres pensent que la double responsabilité de la réglementation et de la défense des intérêts est en contradiction avec le mandat général. Le Conseil international des infirmières (CII) déclare que l’autonomisation de la profession par l’autoréglementation professionnelle n’est légitime que si l’objectif premier de la réglementation est d’améliorer les services et de protéger le public (2013). À cet égard, l’amélioration des services passe par la capacité des IA à identifier les problèmes, à contribuer à l’élaboration des politiques et à garantir le respect des obligations et responsabilités professionnelles.

De même, l’Association of Registered Nurses of British Columbia (ARNBC) cerne l’effet négatif important que les IA ont subi lors de la transition d’une association à un ordre professionnel. Depuis la dissolution de la Registered Nurses Association of British Columbia, la profession ne disposait plus de mécanismes lui permettant de s’engager auprès du gouvernement sur des questions intéressant le personnel infirmier ou de militer pour la santé et les enjeux d’intérêt public touchant les Britanno-Colombiens à une époque d’importante restructuration du système de santé (Duncan, Thorne et Rodney, 2012, p. 5). Pour cette raison, la création d’une association a été entreprise dans le but de reconstruire la voix du personnel infirmier de la Colombie-Britannique en matière de politique publique afin de 1) représenter le point de vue professionnel des soins infirmiers dans les débats actuels sur les politiques de santé publique; 2) s’assurer que les talents du personnel infirmier sont efficacement déployés dans la résolution de défis majeurs, tels que la réforme des soins primaires et l’expansion des soins continus; et 3) retrouver une place significative pour la profession au sein du gouvernement et d’autres processus de politique publique, aux échelles provinciale, nationale et internationale (Duncan et coll., 2012, p. 8).

Bien que la littérature soit peu abondante sur le modèle le plus bénéfique pour la protection du public et l’élaboration de politiques de santé efficaces, il est clair que les IA ont besoin d’une voix forte et unie pour participer efficacement aux débats sur les soins de santé et contribuer au processus décisionnel. En raison de la séparation des fonctions de réglementation et de défense des intérêts, les IA ont l’impression de ne plus avoir de voix. De la perte de cette voix unie, trois questions ont émergé :

  1. Comment la profession infirmière utilisera-t-elle son leadership pour avoir les conversations courageuses qui éclaireront les grandes décisions sur l’avenir de la profession?
  2. Comment les IA vont-ils.elles se développer et continuer à contribuer aux structures organisationnelles qui répondent le mieux aux mandats actuels et futurs de la profession?
  3. Comment les IA sauront-ils.elles si les transitions organisationnelles actuelles et futures contribuent à l’avancement de la profession et sont dans l’intérêt du public? (Duncanet coll., 2012)

Quel que soit le modèle auquel l’IA adhère ou qui lui est imposé, il est clair qu’un mécanisme permettant de faire entendre la voix des IA est essentiel à la prestation de soins de qualité aux patients. Selon l’ARNBC,

nous partons du principe que la profession infirmière se développera dans l’intérêt du public si elle est bien soutenue par les fonctions efficaces d’un ordre professionnel, d’une association professionnelle et d’un syndicat, et nous croyons fermement que la disparition d’une de ces fonctions entraînera en fin de compte l’affaiblissement des autres. (Duncan et coll., 2012, p. 3)

Une profession, c’est plus qu’un travail; c’est une carrière avec des connaissances et un fonctionnement spécialisés. C’est grâce aux connaissances et aux services d’une profession que le public en est venu à croire que les membres d’une profession ont les compétences nécessaires et respectent l’éthique. C’est grâce à cette confiance que l’autoréglementation professionnelle est assurée. Les IA doivent donc reconnaître les avantages considérables qu’apporte l’autoréglementation, mais aussi les responsabilités qui incombent à chaque membre de la profession dans le respect des normes et la prestation de soins de qualité.

Activité d’apprentissage essentielle 15.2.3

Lisez la position de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada sur l’autoréglementation dans le Cadre de pratique des infirmières et infirmiers au Canada, puis répondez aux questions suivantes :

  1. Comment les infirmières et infirmiers en exercice participent-ils.elles à l’autoréglementation?
  2. Décrivez une façon dont la profession infirmière est réglementée au Canada.

Figure 15.2.2 Autoréglementation professionnelle

autoréglementation professionnelle, lois, délégation, responsabilités

« Professional Self-regulation », par Beverly Balaski, conçu par JVDW Designs, distribué sous licence CC BY 4.0 International.

15.3 Syndicats

Syndicalisation des infirmières et infirmiers autorisés

Les syndicats sont des organisations qui représentent les travailleur.euse.s dans les négociations avec l’employeur. Les syndicats reposent sur un concept simple : des personnes qui travaillent s’unissent en utilisant la force du nombre pour présenter une voix unie afin d’aborder les questions qui les préoccupent et de créer des environnements de travail sûrs. Les syndicats offrent à leurs membres de nombreux avantages et soutiens. L’objectif premier d’un syndicat est d’engager des négociations collectives avec l’employeur afin de déterminer les questions liées aux salaires, aux conditions de travail et à la sécurité du travail, et de soutenir les travailleur.euse.s en cas de conflit.

La négociation collective est un processus par lequel les membres d’une profession, avec le soutien de leur syndicat, rencontrent les représentants de l’employeur, discutent et négocient des accords sur des questions essentielles. Ces négociations aboutissent à un produit appelé convention collective. L’objectif global d’une convention collective est de garantir la définition et l’adoption d’un accord mutuel sur les questions de sécurité des employés et de traitement équitable au travail. En bref, un syndicat s’efforce de garantir de meilleures conditions de travail à ses membres et contribue ainsi à créer des milieux de soins où le personnel peut prodiguer des soins sûrs et de qualité.

Outre le rôle qu’il joue dans la négociation d’une convention collective et dans le respect des obligations administratives quotidiennes de la convention, le syndicat a deux autres fonctions importantes. Les syndicats font du lobbyisme auprès des gouvernements et collaborent avec eux pour améliorer le droit du travail et la santé et sécurité au travail, car des conditions de travail sûres contribuent à la sécurité des patients et du personnel. Les syndicats contribuent aussi à garantir le respect des normes. Par exemple, certaines personnes pensent que les droits des travailleur.euse.s sont déjà protégés par les lois sur les normes du travail. Bien qu’il existe des lois prévoyant des normes minimales sur le lieu de travail, les violations de ces normes sont très difficiles à faire respecter. Dans les situations de contestation des travailleur.euse.s (ex., lorsque les normes ne sont pas respectées), les employeurs ont un avantage financier, car ils sont en mesure d’engager des avocats pour représenter leur organisation tout au long du processus d’enquête. En revanche, les employé.e.s sont souvent laissés à eux-mêmes. Les syndicats contribuent à uniformiser les règles du jeu en aidant les employé.e.s par le biais de processus négociés entre les travailleur.euse.s et l’employeur. Les salarié.e.s ont souvent droit à une rémunération pour assister aux réunions et séances relatives à leurs préoccupations et bénéficient d’une représentation tout au long de la relation avec l’employeur.

Postes relevant du champ d’application ou hors champ d’application

Après l’obtention du diplôme, la plupart des IA occuperont un poste relevant du champ d’application, c’est-à-dire un poste syndiqué. Ces fonctions s’appliquent généralement à tous les prestataires de soins directs, y compris les IA instructeur.trice.s, les infirmier.ère.s-ressources, etc. En revanche, les postes hors champ d’application désignent généralement les rôles de gestionnaire et de cadre supérieur et ne font pas partie des postes syndiqués. Par conséquent, ils ne font pas partie de la convention collective et ne bénéficient pas des avantages et des protections prévus par la convention. Pour déterminer si un poste doit être hors du champ d’application, il faut prendre en compte les responsabilités du travail. Traditionnellement, les postes responsables de l’embauche, du licenciement et des mesures disciplinaires sont hors du champ d’application.

Convention collective

La convention collective contient essentiellement les « règles » du milieu de travail. On pense souvent à tort que la convention collective est un document qui appartient uniquement aux membres et à leur syndicat. En fait, la convention collective est un accord conjoint entre les membres du syndicat et l’employeur. À cet égard, l’accord touche la totalité des membres du syndicat et a un effet égal sur l’employeur. Par conséquent, l’application de la convention est essentielle pour faire respecter les termes de la convention et résoudre les problèmes dans le cadre d’une approche normalisée et convenue. Permettre à l’employeur ou aux membres de violer l’une des conditions de la convention nuit à l’application et l’utilisation de la convention pour toutes les parties concernées et met en péril la cohésion et l’administration du milieu de travail.

Réalisations de négociation collective

Avant la syndicalisation de la profession infirmière, les IA étaient très mal payé.e.s et travaillaient de très longues heures dans des environnements dangereux. Parmi les progrès réalisés par les syndicats en faveur des IA, on peut citer :

  • semaine de travail fixe et prévisible;
  • limites concernant l’obligation de travailler plus d’un certain nombre de quarts ou d’heures d’affilée;
  • reconnaissance du fait que le temps travaillé au-delà des heures ou quarts convenus dans la convention doit être payé au taux des heures supplémentaires;
  • primes pour les responsabilités de chef de service, les gardes de fin de semaine, etc.;
  • droit à des pauses programmées;
  • vacances, jours fériés et congés;
  • droit à la représentation dans les conflits avec les employeurs;
  • parité salariale avec les groupes de comparaison à prédominance masculine (ex., policier.ière.s, pompier.ière.s);
  • congés parentaux;
  • pension et avantages sociaux.

Les conventions collectives contiennent aussi souvent des dispositions visant à faciliter la résolution de problèmes :

  • griefs et arbitrage;
  • soutien à la pratique professionnelle et conseil en soins infirmiers;
  • santé et sécurité des membres;
  • formation continue, orientation, mentorat et perfectionnement professionnel.

Contexte de la Saskatchewan

La Saskatchewan Union of Nurses (SUN) a été créée en 1974 et représente les infirmier.ère.s autorisé.e.s, les infirmier.ère.s praticien.ne.s et les infirmier.ère.s psychiatriques autorisé.e.s. La mission de la SUN est d’améliorer le bien-être social, économique et général de ses membres et de protéger les services de santé publics et la prestation de haute qualité. Les membres d’un syndicat ont également un rôle à jouer, à savoir la solidarité et l’engagement actif, car la force d’un syndicat dépend de la qualité de leur engagement.

Figure 15.3.1 Une des premières assemblées de la SUN, 1974

Saskatchewan, syndicat, SUN, assemblée

« An early SUN meeting, 1974 », de la Saskatchewan Union of Nurses, est distribué sous licence CC BY 4.0 International.

Inclusion des soutiens à la pratique professionnelle

Outre le rôle fondamental de la négociation collective, la SUN a fait preuve d’innovation en développant d’autres moyens de soutenir ses membres. Il s’agit notamment de reconnaître que bon nombre des problèmes auxquels font face les IA dépassent les termes de la convention collective. Les préoccupations relatives à la charge de travail, à la dotation en personnel et à l’incapacité de respecter les normes professionnelles définies par l’organisme de réglementation professionnelle n’ont pas été directement abordées dans la convention collective. À cet égard, la nécessité d’un soutien à la pratique professionnelle a été reconnue. La SUN a créé une branche professionnelle de son syndicat pour travailler en collaboration avec le service des relations de travail de l’organisation. Il s’agissait notamment d’utiliser des IA pour aider les membres à respecter leurs normes professionnelles. L’équipe de pratique professionnelle rencontre souvent les membres et les employeurs pour discuter des exigences de l’organisme de réglementation professionnelle et s’efforce de trouver des moyens de soutenir la pratique professionnelle en se concentrant une fois de plus sur la sécurité des patients et les résultats en matière de qualité.

La SUN a également développé des partenariats de collaboration avec de nombreuses parties prenantes, notamment le gouvernement, les autorités sanitaires régionales et les établissements d’enseignement, afin d’influencer les politiques et les décisions en santé publique, de mettre en œuvre des lignes directrices sur les pratiques exemplaires et de travailler sur des innovations visant à améliorer l’efficacité des services de santé. Certaines des réussites comprennent la mise en œuvre d’outils d’évaluation de la gravité pour prodiguer les soins aux patients, de modèles sur les soins infirmiers, sur le flux de patients et sur l’utilisation ainsi que des mesures pour réduire le nombre d’heures supplémentaires que les IA effectuent.

Impact des syndicats

Un mythe répandu veut que les syndicats et leurs membres ne s’intéressent qu’à l’augmentation des salaires. Des études montrent que le salaire ne figure souvent pas parmi les trois premiers points de négociation (Akyeampong, 2005). C’est également le cas chez les IA en Saskatchewan. Au cours des dernières négociations collectives, les membres ont accordé la priorité à des sujets tels que la dotation sécuritaire, des charges de travail gérables et le respect des normes professionnelles.

Figure 15.3.2 SUN signe un accord de partenariat avec
le gouvernement de la Saskatchewan, 2008.

Gouvernement de la Saskatchewan, SUN, partenariat, accord, signature

L’image « SUN signe un accord de partenariat avec le gouvernement de la Saskatchewan, 2008 » de la Saskatchewan Union of Nurses est sous licence CC BY 4.0 International.

Les syndicats d’infirmier.ère.s ont une influence importante sur les membres, les patient.e.s et la société dans son ensemble, et les avantages de la syndicalisation vont bien au-delà de ce qui est perçu comme de simples points intéressés. En fait, la recherche montre que plus le nombre de salarié.e.s syndiqué.e.s est élevé dans un milieu de travail, meilleure est la santé générale des travailleur.euse.s et plus faibles sont les taux de pauvreté, tant pour les travailleur.euse.s syndiqué.e.s que non syndiqué.e.s (Mishel, 2012; Raphael, 2006). Les syndicats d’infirmier.ère.s garantissent des environnements de travail sécuritaires, ce qui se traduit par de meilleurs soins prodigués à la patientèle (Twarog,2005). Les normes établies dans les conventions collectives se traduisent par une augmentation de la productivité pour l’employeur grâce à une meilleure formation, à une diminution du roulement et au maintien prolongé des effectifs (Yetwin, 2016).

L’un des meilleurs avantages pour les patient.e.s est que les syndicats d’infirmier.ère.s représentent une voix collective unique pour les IA sur les lieux du travail. Ils permettent aux IA de participer activement à la réforme des soins de santé et de la prestation des soins en leur donnant le droit protégé de prendre position et de défendre leur patientèle, leur pratique et leur profession. Il n’y a pas de meilleur défenseur des droits de la patientèle que les IA syndiqué.e.s. En fin de compte, le travail du syndicat vise à donner aux IA une voix collective pour défendre leurs intérêts et ceux de la patientèle, ce qui profite à la société dans son ensemble.

Activité d’apprentissage essentielle 15.3.1

Pour obtenir de plus amples renseignements, veuillez consulter le tableau comparatif des avantages des syndicats et autres que les syndicats sur la page Web de l’association des infirmier.ère.s du Massachusetts (Massachusetts Nurses Association) sur les avantages et les droits liés aux syndicats et répondre à la question suivante :

Préféreriez-vous travailler dans une organisation où les infirmier.ère.s sont syndiqué.e.s ou non syndiqué.e.s? Expliquez votre réponse.

15.4 Similitudes et différences entre l’autoréglementation professionnelle et la syndicalisation

Mandats

Comme nous l’avons vu précédemment, le mandat de l’organisme de réglementation professionnelle et celui du syndicat sont très différents, mais ils ont un objectif commun : la prestation de soins sûrs aux patients en soutenant la pratique des IA. Les normes en soins infirmiers ne peuvent pas être respectées si les milieux ne disposent pas du leadership, des politiques, des effectifs et des charges de travail appropriés qui permettraient aux IA d’exercer le rôle professionnel que leur confère la loi. Par conséquent, les mandats de l’organisme de réglementation et du syndicat ne peuvent pas être réalisés si ces questions ne sont pas abordées.

Pour l’organisme de réglementation, la protection du public n’est pas possible si les membres exercent dans des milieux non sécuritaires et sans soutien qui ne s’appuient pas sur la recherche et les pratiques exemplaires pour prodiguer des soins. Pour les syndicats, les conventions collectives à elles seules ne peuvent pas régler les problèmes de pratique professionnelle. Les syndicats encouragent aussi vigoureusement l’utilisation de la recherche sur les pratiques exemplaires, car elle permet non seulement de créer des milieux de travail de qualité pour les membres, mais aussi de garantir un environnement sécuritaire dans lequel les patients reçoivent des soins. À cet égard, les IA doivent être très attentives aux mesures de ces deux organismes importants et y participer de manière active.

Cette participation se fait en déposant sa candidature pour siéger à un conseil quelconque ou un conseil d’administration, en siégeant à des comités organisationnels et en assistant aux assemblées générales annuelles, où les questions ayant une incidence directe sur la pratique et d’intérêt pour les membres sont soulevées, discutées, votées et mises en œuvre. De plus, les membres doivent se tenir au courant des nouvelles, de la correspondance et des projets de l’organisation. Les membres doivent également être disposés à communiquer directement avec l’organisme professionnel et le syndicat au sujet de préoccupations et d’obstacles liés au respect des normes professionnelles. Cette communication est un moyen important et efficace de soulever des problèmes et de les résoudre. Cette participation ne peut être laissée à d’autres, car la profession ne peut pas se maintenir sans outiller les IA ni renforcer la voix de chacun des membres du personnel IA.

Activité d’apprentissage essentielle 15.4.1

Pour obtenir de plus amples renseignements, suivez le lien menant au tableau comparatif des Trois piliers des soins infirmiers autorisés : l’organisme de réglementation, l’association professionnelle et le syndicat. Publié par le College of Registered Nurses of Manitoba. Nurse Link, hiver 2017, p. 10.

Répondez aux questions suivantes :

  1. Décrivez les différences entre les mandats de chacun des groupes.
  2. À quel groupe vous adresseriez-vous pour obtenir des renseignements sur les normes en soins infirmiers?

15.5 Autres organismes

Association des infirmières et infirmiers du Canada

L’Association des infirmières et infirmiers du Canada (AIIC) est la voix professionnelle nationale des IA et représente près de 139 000 IA. L’adhésion à l’AIIC varie en fonction des exigences provinciales et territoriales. Les membres comprennent des associations et des ordres provinciaux et territoriaux liés aux soins infirmiers et des IA de l’Ontario et du Québec, des infirmier.ère.s à la retraite, l’Association des étudiant(e)s infirmier(ère)s du Canada et le Réseau canadien des spécialités en soins infirmiers.

L’AIIC s’efforce de promouvoir l’excellence en soins infirmiers afin (1) d’obtenir des résultats positifs en santé dans l’intérêt du public; (2) de promouvoir une réglementation dirigée par la profession dans l’intérêt du public; (3) d’agir dans l’intérêt du public pour les IA au Canada en assurant un leadership national et international dans le domaine des soins infirmiers et de la santé; et (4) de défendre l’intérêt du public pour qu’il ait accès à un système de santé financé par l’État et sans but lucratif.

Figure 15.5.1 Le CRNS représente les IA de la Saskatchewan à l’échelle nationale.

Assemblée générale annuelle de l’AIIC en 2017, représentation provinciale, échelon national

L’image « IMG_2484 » de la Saskatchewan Registered Nurses Association, est soumise à la licence Creative Commons Attribution 4.0 International. À propos de la photo : Joanne Petersen, présidente du CRNS, participe à l’assemblée générale de l’AIIC, 2017.

En Saskatchewan, les IA sont membres de l’AIIC parce qu’ils et elles sont agréé.e.s auprès du CRNS. Une partie de votre cotisation annuelle est versée à l’AIIC en votre nom. L’un des avantages d’être membre de l’AIIC est que cet organisme vous représente dans ses activités nationales de défense des intérêts et de promotion de ses politiques. Veuillez consulter la page Web de l’AIIC « CNA on the Hill » pour tout savoir sur les projets politiques et de représentation de l’AIIC.

Activité d’apprentissage essentielle 15.5.1

Pour vous renseigner sur l’AIIC, veuillez consulter les sections À propos de nous et Avantages aux membres de son site Web et répondre aux questions suivantes :

  1. Quels sont les objectifs et les buts de l’AIIC?
  2. Quels sont les avantages d’être membre de l’AIIC?

Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et infirmiers

La Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et infirmiers (FCSII) est un autre organisme qui représente le personnel infirmier. Elle a pour mission de protéger les infirmier.ère.s et de parler au nom de la profession. Elle se compose de syndicats provinciaux et regroupe près de 200 000 membres du personnel infirmier. Lorsque vous êtes membre du syndicat provincial, la FCSII vous représente aussi. La FCSII sert de voix nationale sur les questions et préoccupations du personnel infirmier au Canada et elle appuie les activités des syndicats provinciaux. La FCSII travaille fort pour trouver des solutions et améliorer les soins aux patient.e.s et les conditions de travail. Elle milite pour le maintien d’un solide système de santé public. L’organisme participe aussi au développement, à l’utilisation et à la diffusion de données probantes pour éclairer les décisions politiques. Il sert également de source d’information. Elle tient le personnel infirmier au courant des enjeux de l’heure et elle fait la promotion de solutions viables.

Activité d’apprentissage essentielle 15.5.2

Pour tout savoir sur les activités de représentation de la FCSII, veuillez consulter son site Web et répondre à la question suivante :

Quels sont les projets d’actions politiques de la FCSII?

Société de protection des infirmières et infirmiers du Canada

La Société de protection des infirmières et infirmiers du Canada (SPIIC) est une société à but non lucratif qui offre des conseils juridiques, des services de gestion des risques, une aide juridique et une protection en matière de responsabilité aux IA qui en sont membres. En Saskatchewan, si vous avez un permis du CRNS, vous êtes membre de la SPIIC.

La mission de la SPIIC est d’exister pour que les infirmier.ère.s au Canada soient en mesure de gérer efficacement leurs risques juridiques professionnels et soient aidés de manière appropriée en cas d’ennuis juridiques au travail (2018). La SPIIC fournit des conseils sur les enjeux fondamentaux et nouveaux auxquels est confrontée la pratique des IA par le biais de diverses publications, webinaires, ateliers et présentations. Des ressources sont disponibles pour aborder les sujets généraux en soins infirmiers ainsi que les tendances émergentes qui touchent le quotidien des IA. Pensons à l’aide médicale à mourir et à la consommation de cannabis à des fins médicales.

Activité d’apprentissage essentielle 15.5.3

Vous pouvez vous renseigner sur le mandat, les services et les publications de la SPIIC ainsi que sur ses bulletins InfoDROIT.

Association des infirmières et infirmiers autochtones du Canada

L’Association des infirmières et infirmiers autochtones du Canada (AIIAC) est l’association canadienne la plus ancienne de professionnels de la santé autochtones. Il s’agit d’un organisme à but non lucratif voué à l’amélioration de la santé des Autochtones au Canada. Elle concrétise son objectif grâce à des activités de participation liées au recrutement, à la fidélisation et au soutien des infirmier.ère.s autochtones ainsi qu’aux connaissances, à la consultation, à la recherche et à la formation des infirmier.ère.s autochtones. Sa mission est d’améliorer la santé des populations autochtones en aidant les infirmier.ère.s autochtones et en faisant la promotion du perfectionnement et de la pratique des soins infirmiers en santé autochtone.

Toute personne qui porte un intérêt aux soins infirmiers autochtones ou aux enjeux de santé autochtones peut devenir membre de l’AIIAC. Le droit de vote est toutefois réservé aux IA, IA(IP), IPA et IAA d’origine autochtone.

Activité d’apprentissage essentielle 15.5.4

Lisez l’histoire de la création de l’AIIAC et répondez à la question suivante :

  1. Quels étaient les objectifs visionnaires de Jocelyn Bruyere et de Jean Goodwill, deux des fondateurs de l’organisation?

Lisez la section sur les projets de l’AIIAC et répondez à la question suivante :

  1. Décrivez quelques projets particuliers de l’AIIAC.

Résumé

Plusieurs organisations provinciales et nationales soutiennent l’exercice des soins infirmiers autorisés. Les organismes de réglementation professionnelle veillent à ce que seuls les membres ayant satisfait aux critères d’admission puissent obtenir la permission à titre d’IA et, par conséquent, exercer la profession. L’Association des infirmières et infirmiers du Canada est un organisme national qui représente les enjeux importants en soins infirmiers autorisés au palier national. Les syndicats provinciaux ainsi que la FCSII veillent à ce que les IA aient une voix et puissent parler des problèmes sans crainte de représailles. La Société de protection des infirmières et infirmiers du Canada joue également un rôle important dans le soutien de l’exercice de la profession infirmière autorisée en fournissant des conseils juridiques et une couverture de responsabilité.

Dans l’ensemble, les IA disposent d’un grand nombre d’organismes qui les aident à exercer leur profession dans le cadre de leurs responsabilités professionnelles. Il est important que chaque IA se tienne informé.e des enjeux prioritaires sur lesquels ces organismes travaillent. Ce n’est que grâce à la participation active et véritable des IA de tous les paliers que les normes professionnelles des IA et la prestation de soins sécuritaires et de qualité sont possibles.

À la fin du chapitre, vous devriez être en mesure de faire ce qui suit :

  1. Reconnaître les mandats de l’organisme de réglementation professionnelle provincial, du syndicat des IA et des quatre organismes nationaux (AIIC, FCSII, SPIIC et AIIAC).
  2. Décrire la mission et l’approche de chaque organisme en ce qui a trait au soutien aux IA et à la prestation de soins infirmiers de qualité.
  3. Formuler des conclusions quant à la pertinence de chaque organisation.
  4. Décrire la manière dont ces organismes accomplissent leurs rôles et missions ou dont ils évoluent pour en adopter d’autres.

Exercices

Questions sur les syndicats

1. Les IA devraient-ils.elles pouvoir choisir d’appartenir à un syndicat?

2. Le personnel syndiqué devrait-il pouvoir faire la grève?

Mise en situation 1

3. C’est votre premier emploi. Il n’y a pas de syndicat. Comment savoir quel salaire et quels avantages demander?

4. Vous avez négocié votre salaire et vos avantages sociaux et vous découvrez qu’ils sont inférieurs de 50 % à ceux de vos collègues et vous travaillez plus d’heures qu’eux.

(a) Comment vous sentez-vous?

(b) Quelle sera la conséquence de cette négociation sur le moral de l’unité?

(c) Quelles seront les conséquences de cette négociation sur le recrutement et la fidélisation des IA dans l’unité?

(d) Comment réussirez-vous à négocier une augmentation de salaire?

(e) De quelle façon aborderez-vous la situation?

(f) De quelle manière vos demandes à ce sujet affecteront-elles vos occasions à venir?

Mise en situation 2

5. Vous avez relevé dans l’unité de soins infirmiers plusieurs problèmes persistants qui affectent votre capacité à respecter les normes professionnelles, notamment :

  • une pénurie de personnel,
  • des IA sont remplacées par des prestataires de soins de santé moins qualifiés,
  • des heures supplémentaires à outrance et des conditions de travail non sécuritaires.

Vous avez discuté de ces préoccupations avec votre supérieur et avez fait tout ce que vous pouviez pour régler le problème à votre échelon. Vos efforts n’ont pas porté leurs fruits.

(a) Quelles sont les options qui s’offrent à vous pour parvenir à un accord avec l’employeur si vous êtes syndiqué?

(b) Quelles sont les options qui s’offrent à vous pour parvenir à un accord avec l’employeur si vous n’êtes pas syndiqué?

Mise en situation 3

6. La politique de l’hôpital veut que tous les IA s’appuient sur des principes adéquats de levage, de repositionnement et pour tourner la patientèle. L’équipement qui sert à lever de lourdes charges est cassé et il manque de personnel dans l’unité actuellement. Le responsable vous demande de déplacer manuellement le patient.

(a) Que faites-vous?

(b) Quel est votre recours si vous êtes syndiqué?

(c) Quel est votre recours si vous n’êtes pas syndiqué?

Mise en situation 4

7. Vous travaillez dans une unité qui, de plus en plus, ne remplace pas les personnes en congé de maladie ni en vacances. Par conséquent, l’unité n’a pas assez d’IA. Vous faites part de vos préoccupations au responsable de l’unité qui vous explique qu’il n’est pas en mesure, en raison de la pénurie de personnel et des restrictions budgétaires, de remplacer les IA absent.e.s.

(a) Que faites-vous?

(b) Quel est votre recours si vous êtes syndiqué?

(c) Quel est votre recours si vous n’êtes pas syndiqué?


Questions axées sur la réglementation

8. Quels sont les risques et les conséquences d’une révocation par le gouvernement de l’autoréglementation professionnelle des infirmier.ère.s autorisé.e.s?

9. (a) Quels sont les risques ou les avantages de la séparation de la fonction de l’Ordre et de celle de l’association (c’est-à-dire de retirer le rôle d’association de l’organisme de réglementation)?

(b) Qui assumerait le rôle de la défense des intérêts? Qu’est-ce qui se passerait?

(c) Dans quelle mesure pensez-vous qu’il serait efficace pour représenter les préoccupations des IA?

10. Quels sont les risques ou les avantages d’un organisme de réglementation unique représentant les trois catégories de prestataires de soins infirmiers (IA, IPA, IAA)?

Références

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16

Questions émergentes en leadership infirmier

Brendalynn Ens, Susan Bazylewski et Judy Boychuk Duchscher

De nos jours, faire preuve de leadership signifie agir en hôte, soit rassembler la diversité et convoquer tous les points de vue afin de tirer profit de l’intelligence collective dans le processus créatif.

– Margaret Wheatley

Introduction

Dans tous les secteurs, les soins de santé évoluent rapidement. Avec l’évolution du leadership et de la gestion en soins infirmiers, la nécessité d’adopter de nouvelles approches, stratégies et idées en leadership devient de plus en plus évidente. Cette évolution comporte deux grands aspects :

  • La réactivité, la responsabilité, l’imputabilité et l’engagement du personnel infirmier (quel que soit le poste) au sein du système de soins de santé;
  • Les mesures proactives, stratégiques et collaboratives des cadres et des gestionnaires en soins infirmiers pour faire évoluer les priorités en matière de soins.

Objectifs d’apprentissage

  1. Reconnaître l’évolution rapide des approches de gestion et de leadership infirmiers dans les unités de soins en Saskatchewan, au Canada et dans le monde entier.
  2. Évaluer l’évolution et les approches de gestion des priorités et des questions houleuses en matière de soins dans le système de santé actuel.
  3. Déterminer l’importance des concepts liés au sens des affaires et des attentes en la matière dans les rôles d’administration.
  4. Reconnaître le rôle essentiel des approches centrées sur la personne et la famille et de la prise de décision partagée pour une gestion collaborative et efficace des soins.
  5. Déterminer l’importance de la planification du parcours personnel des cadres pour une croissance professionnelle et un développement de carrière fructueux et satisfaisants.
  6. Reconnaître le choc de la transition.
  7. Décrire les cinq éléments fondamentaux de la transition du rôle professionnel pour la relève en soins infirmiers.

16.1 Leadership transformationnel et changement : portrait de la gestion des soins infirmiers

Le changement n’est pas près de s’essouffler. Au contraire, la concurrence dans la plupart des secteurs s’accélérera probablement encore plus au cours des prochaines décennies.

– John P. Kotter (1995)

Un paysage national et provincial en évolution

Au fil des ans, en raison de restructurations et de changements constants, les environnements de soins de santé sont devenus de plus en plus complexes et de moins en moins prévisibles. Cette situation découle de nombreux facteurs, les plus importants étant l’évolution des besoins de santé des populations desservies et les ressources du système de santé et sa capacité à répondre aux besoins. D’autres facteurs ont influencé les soins de santé dans les deux dernières décennies, notamment l’utilisation accrue de la technologie, une main-d’œuvre multigénérationnelle en évolution rapide, l’évolution des exigences en matière de responsabilité de gestion, l’importance accrue accordée à l’évaluation du rendement, le défi de la gestion de ressources limitées, la croissance rapide des équipes inter et intraprofessionnelles ayant des champs d’exercice changeants, et les attentes élevées de la patientèle. Ces facteurs ont influencé comme jamais le rôle des cadres et des gestionnaires en soins infirmiers dans les organisations.

En juillet 2011, l’Association des infirmières et infirmiers du Canada et l’Association médicale canadienne ont publié les « Principes devant guider la transformation des soins de santé au Canada ». En réponse à la transformation et à la restructuration du système de santé au Canada, ce document vise à fournir un cadre commun pour guider le changement dans les diverses régions et administrations. Il souligne l’importance de respecter les cinq principes de la Loi canadienne sur la santé et intègre le cadre à trois objectifs de l’Institute for Healthcare Improvement (IHI). Les principes énoncés dans ce document s’articulent autour de trois grands thèmes : 1) Améliorer l’expérience des soins de santé; 2) Améliorer la santé des populations, 3) Optimiser les ressources. Ces trois thèmes sont aujourd’hui au cœur de l’environnement de travail des gestionnaires en soins infirmiers (AIIC et AMC, 2011).

L’Association des infirmières et infirmiers du Canada a aussi publié le document « Registered Nurses: Stepping Up to Transform Health Care » (AIIC, 2012), qui présente de nombreux exemples de mise en œuvre par le personnel infirmier de principes clés basés sur ces trois thèmes. Ce document illustre comment le personnel infirmier innove pour améliorer le système de santé au Canada. À l’échelle nationale, ces deux documents guident les cadres et les gestionnaires en soins infirmiers dans le système de santé actuel, et présentent de nouvelles façons de s’unir au-delà des frontières pour mieux répondre aux besoins de santé des populations.

À l’échelle provinciale, la Saskatchewan entame actuellement une transformation à grande échelle de son système de santé. En décembre 2016, un groupe consultatif nommé par le gouvernement de la Saskatchewan a publié le rapport « Optimizing and Integrating Patient-Centered Care », qui traite de la restructuration du système. Ce groupe a publié 14 recommandations, dont l’une des principales porte sur la consolidation des autorités sanitaires existantes en une seule autorité provinciale afin « d’optimiser l’efficacité administrative et d’améliorer les soins aux patients » (Groupe consultatif de la Saskatchewan, 2016, p. 3).

Deux rapports antérieurs de la Saskatchewan influencent encore à ce jour le paysage de la gestion des soins infirmiers dans la province, soient le « Primary Health Care Framework Report » (Saskatchewan Health, 2012) et le « Patient First Review » (Saskatchewan Health, 2009), qui ciblent tous deux des occasions de transformer le système de santé et la gestion des soins infirmiers.

Importance pour la gestion et le leadership

Ces rapports soulignent la nécessité pour les cadres et les gestionnaires en soins infirmiers d’avoir les compétences nécessaires pour gérer la complexité croissante de ce paysage en évolution. Les gestionnaires doivent réfléchir au-delà des silos traditionnels et élargir leur vision pour se concentrer sur le parcours de la patientèle tout au long du continuum de soins. Puisque le système de santé canadien met de plus en plus l’accent sur la promotion de la santé, les soins primaires et les soins de proximité, les gestionnaires en soins infirmiers doivent passer d’organisations ayant un style de gestion contrôlant et directif à un système où la mobilisation, la responsabilisation et la reconnaissance des forces uniques de chaque personne sont essentielles. En raison de la transformation du système de santé, deux enjeux importants pour les gestionnaires en soins infirmiers sont l’incidence sur les ressources humaines et les changements dans le système de gestion.

Incidence sur les ressources humaines

Malgré les défis que posent l’évolution de la main-d’œuvre et la responsabilité accrue liée à la pénurie, les cadres et les gestionnaires en soins infirmiers jouent un rôle crucial dans la création d’environnements de travail sains. La littérature en sciences infirmières révèle de plus en plus l’incidence positive d’un environnement de travail sain sur la satisfaction et la rétention du personnel, les résultats de la patientèle et la performance de l’organisation (Sherman et Pross, 2010).

Aujourd’hui, un facteur important de l’évolution de la main-d’œuvre est l’aspect multigénérationnel des équipes dans les établissements de santé. La main-d’œuvre actuelle se compose de diverses générations à tous les échelons. Sherman (2006) distingue quatre générations ayant des attitudes, des croyances, des habitudes de travail et des attentes propres, et note que cette diversité des âges se maintiendra dans les années à venir. Spinks et Moore (2007) font état de la diversité générationnelle et de la diversité culturelle observée à tous les échelons des organisations canadiennes.

Un autre défi majeur pour les gestionnaires en soins infirmiers actuellement est la création d’environnements de travail sains dans le but d’assurer l’engagement et la rétention du personnel. Mate et Rakover (2016) ont étudié le concept d’amélioration durable des soins de santé en examinant les changements dans la région sanitaire de Saskatoon (qui fait maintenant partie de l’autorité de la santé de la province) pendant cette période de transformation, avec un accent particulier sur le rôle essentiel du leadership à l’échelle des unités comme en première ligne. Les auteurs soulignent que les gestionnaires en soins infirmiers sont des piliers locaux qui doivent travailler directement à la mobilisation du personnel par l’encadrement, la consolidation d’équipe, la communication au quotidien et la démonstration de leur capacité à fonctionner et à gérer de manière cohérente les nouvelles méthodes normalisées afin de pérenniser les succès.

L’évolution rapide de la nature des équipes inter et intraprofessionnelles a aussi une influence sur le personnel. Avec la transformation des systèmes de santé et une plus grande attention portée au continuum de soins et au parcours de la personne et de ses proches, un plus grand accent est mis sur le fonctionnement efficace de toutes les équipes en contact avec la patientèle et les familles. Les changements au champ d’exercice nécessaires pour répondre à l’évolution des besoins de la population ont eu des répercussions dans le rôle des prestataires de soins de santé dans les nombreuses équipes en contact avec la patientèle tout au long du continuum de soins. Vu la nature changeante des équipes, les gestionnaires doivent être au fait des modifications aux rôles et aux champs d’exercice afin de garantir une coordination et une intégration efficaces des soins tout au long du parcours de la patientèle.

En 1973, dans son rapport sur les soins de santé au Canada, Robertson recommande la formation et le déploiement de personnel infirmier praticien afin d’améliorer la continuité des soins et l’efficacité du système de santé (Stahlke, Rawson et Pituskin, 2017, p. 488). Les infirmier.ère.s praticien.ne.s (IP) sont des infirmier.ère.s autorisé.e.s qui possèdent une formation supplémentaire et de l’expérience en soins infirmiers leur permettant de :

  • poser des diagnostics et traiter les maladies de façon autonome;
  • prescrire et interpréter des tests diagnostiques;
  • émettre des ordonnances;
  • accomplir certains actes médicaux. (Association des infirmières et infirmiers du Canada, 2016)

Dorothy Pringle (2007) affirme que les IP permettent de répondre aux « besoins de la patientèle qui sont non comblés avec l’organisation actuelle des rôles dans le système de santé » ((p. 5). Leur formation supplémentaire et leurs compétences avancées leur permettent de jouer un rôle de leadership dans les soins de santé. Le rôle et la performance des IP sont comparables à ceux des médecins dans de nombreux aspects des soins (Stahlke et coll., 2017). Leur étude, citée en référence dans la note de recherche ci-dessous, examine le point de vue de la patientèle quant aux soins dispensés par des IP et met en évidence la valeur de ce rôle dans le système de santé.

Note de recherche

Stahlke, S., Rawson, K. et Pituskin, E. (2017). Patient perspectives on nurse practitioner care in oncology in Canada. Journal of Nursing Scholarship, 49(5), p. 487-495. https://doi.org/10.1111/jnu.12313

But

« L’objectif de cette étude était d’enrichir la documentation quant à la satisfaction de la patientèle à l’égard des soins dispensés par le personnel infirmier praticien (IP), du point de vue de patientes atteintes d’un cancer du sein qui ont été suivies par des IP » (Stahlke et coll., 2017, p. 487).

Discussion

Neuf patientes d’une clinique spécialisée dans le cancer du sein ont été interrogées sur leur expérience de soins dispensés par du personnel infirmier praticien. Ces expériences ont été très cohérentes parmi les patientes. Les patientes ont d’abord été surprises d’apprendre qu’elles recevraient leurs soins continus d’un.e infirmier.ère praticien.ne. Cependant, au fil des soins, plusieurs d’entre elles se sont dites soulagées d’être affectées à ces prestataires, car les patientes affectées au médecin étaient à un stade plus avancé de la maladie. Les répondantes ont été suivies par le personnel infirmier praticien pendant la quasi-totalité de leur traitement. Les patientes se sentaient à l’aise et confiantes par rapport aux soins prodigués par le personnel infirmier praticien, mais continuaient de croire que ces prestataires étaient sous la responsabilité du médecin. On a dit du personnel infirmier praticien « qu’il était plutôt “dans le concret”, qu’il avait “une vue d’ensemble… . tout en étant plus près de la personne” et qu’il se servait des forces et des ressources de la patiente pour la guérir » (Stahlke et coll., 2017, p. 491).

« Malgré les appréhensions et les malentendus au départ, les patientes ont été unanimement très positives à l’égard des soins dispensés par le personnel infirmier praticien, et ont dit considérer ces membres de l’équipe comme « un plus » (P6), affirmant que « l’expérience a été merveilleuse » (P5) et qu’ »elle a été formidable avec moi » (P5). Une répondante résume le sentiment général en déclarant : « J’ai eu beaucoup de chance. C’était un cadeau. Elle est un cadeau’ (P9) » (Stahlke et coll., p. 491).

Application dans la pratique

Malgré une confusion des rôles du médecin et du personnel infirmier praticien, la patientèle apprécie le leadership du personnel infirmier praticien dans les soins. Il est bien établi que la satisfaction de la patientèle est étroitement liée à une amélioration des résultats (Thrasher et Purc-Stephenson, 2008); aussi, la valeur du rôle du personnel infirmier praticien ne fait plus aucun doute. « Les membres du personnel infirmier praticien ont le potentiel de transformer l’expérience de la patientèle et de donner accès à d’excellents soins centrés sur la personne » (Stahlke et coll., p. 492).

Figure 16.1.1 Célébration de la fondation de la Saskatchewan Association of Nurse Practitioners

personnel infirmier praticien, association, soins infirmiers, célébration

L’image « Celebration of the birth of the Saskatchewan Association of Nurse Practitioners » par la Saskatchewan Registered Nurses Association est sous licence CC BY Attribution 4.0 International.

Mettre l’accent sur l’amélioration de la qualité : changements dans les systèmes de gestion

La Saskatchewan s’est engagée dans une approche transformationnelle des systèmes de gestion par la définition d’une stratégie provinciale « pour fixer des priorités, déterminer des objectifs pour le système, planifier l’atteinte des objectifs convenus à l’échelle locale et provinciale et mesurer les progrès accomplis vers ces objectifs » (Health Quality Council, 2010). Ces changements ont permis une meilleure inclusion du personnel infirmier dans la prise de décision à différents échelons. En date de 2013, tout le personnel de gestion de la Saskatchewan avait reçu une formation sur le système de gestion Lean, une approche d’assurance de la qualité. Cette formation proposait une approche de gestion cohérente pour tous les cadres et les gestionnaires de la province, et des processus standardisés qui se répercutaient dans tout l’organigramme de gestion. Le recours à cette approche et la transparence accrue des orientations organisationnelles ont obligé les cadres et les gestionnaires à perfectionner leurs compétences en communication et leur aptitude à mobiliser le personnel et à mener des initiatives de changement. L’importance accrue de la mesure du rendement a également obligé les cadres et les gestionnaires à développer des compétences en collecte de données pour faire le suivi de divers aspects du rendement de leur unité, à apprendre à présenter les données à l’aide de tableaux et de graphiques et à utiliser ces données pour expliquer comment les soins s’alignent sur les orientations stratégiques générales de la province et y contribuent. Cette approche comprend des activités concrètes comme l’affichage d’information, la tenue de réunions quotidiennes à tous les niveaux de l’organisation et la planification d’examens trimestriels et annuels. En tant que responsables de ces activités, les gestionnaires en soins infirmiers et les responsables d’unités locales ont la responsabilité de mobiliser le personnel au quotidien par la communication des orientations générales et de susciter la participation du personnel à l’égard des résultats. Ces nouveaux processus incluent tous les membres de l’équipe soignante, y compris la patientèle et les familles.

Incidence générale sur les styles de leadership

Le chapitre 1 de ce manuel décrit différents styles de leadership. Le leadership infirmier fondé sur les forces « redirige l’attention des déficits, problèmes et faiblesses vers l’utilisation des forces, des atouts et des ressources pour gérer les problèmes et combler les faiblesses » (Gottlieb, Gottlieb et Shamian, 2012, p. 1). Ce style est également considéré comme favorable à un environnement d’équipe intraprofessionnelle et place la personne et la famille au centre des soins.

Activité d’apprentissage essentielle 16.1.1

Pour obtenir plus d’information locale sur le rôle et le champ d’exercice du personnel infirmier, consultez la page Web sur les ressources relatives à la pratique infirmière du College of Registered Nurses of Saskatchewan (en anglais).

Expérience sur le terrain

Expliquez clairement au personnel à quoi ressemblera la nouvelle organisation et fournissez des renseignements concrets sur ce que vous savez et ne savez pas en tant que gestionnaire. Faites des suivis réguliers avec de l’information à jour et fiable pendant la période de changement.

Augmentez la fréquence et les canaux de communication avec le personnel pendant les périodes de changement, et diversifiez les méthodes pour communiquer le même message au moins sept fois.

16.2 Gérer les périodes de turbulences et les priorités concurrentes

Le chapitre 1 de ce manuel souligne la nécessité pour les gestionnaires en soins infirmiers et le personnel de recherche d’étudier les principes d’un système adaptatif complexe (Pangman et Pangman, 2010). En plus de ces principes, les gestionnaires en soins infirmiers doivent être au courant et à l’affût des facteurs environnementaux et des changements qui créent des turbulences dans les systèmes de santé locaux.

Comprendre les turbulences

Les turbulences peuvent être décrites comme des bouleversements ou des changements (soudains ou progressifs) par rapport à la normale. Dans le domaine de la santé, elles correspondent à des périodes d’incertitude soudaines ou continues, d’irrégularités dans les ressources, de budgets changeants ou de modifications aux priorités stratégiques. Elles impliquent des questions liées à l’évolution de la direction politique ou administrative, des politiques ou des modèles de financement, et à l’évolution des modes de prestation des soins, à une réorientation en matière de sécurité ou de risque, à l’introduction de nouvelles technologies ou de nouveaux traitements, ou encore à l’érosion et à l’adaptation de l’effectif dans un établissement. Pour les cadres et les gestionnaires en soins infirmiers, ces turbulences peuvent se traduire par des priorités concurrentes et des processus décisionnels complexes.

Dans les établissements de santé, il peut être plus facile pour les gestionnaires en soins infirmiers de distinguer deux niveaux de turbulences : 1) les grands changements de haut niveau (par exemple, aux politiques nationales ou à la démographie ou aux statistiques à l’échelle nationale ou provinciale); 2) les changements plus ciblés, plus près du terrain (par exemple, à l’échelle de la région, de l’hôpital ou de l’unité). Un changement de haut niveau se répercute inévitablement (et à terme) sur le terrain.

Les turbulences de haut niveau (à l’échelle fédérale) et au niveau local (à l’échelle régionale) s’entrecroisent souvent dans le domaine de la santé. Aux deux niveaux, les turbulences peuvent avoir une importante incidence directe et indirecte sur les soins locaux et la prise de décision des gestionnaires en soins infirmiers, même si, à première vue, elles ne semblent pas pertinentes. En fonction des besoins et de leur pouvoir décisionnel, les gestionnaires en soins infirmiers peuvent avoir à réagir rapidement en procédant à des ajustements de personnel, à la formation du personnel à de nouvelles compétences, à l’achat de nouveaux équipements, à la cessation de traitements ou d’équipements désuets, à la réorientation des priorités des programmes, à la modification des priorités budgétaires, voire à l’introduction de nouveaux programmes pour garantir la sécurité et la qualité. Les décisions prises en période de turbulences doivent être mûrement réfléchies et prises en temps utile et doivent s’appuyer sur les meilleures recherches, données locales et sources disponibles.

En faisant preuve de vigilance par rapport à la pertinence des turbulences et en sachant qui consulter pour obtenir de l’information et des données fiables, les gestionnaires en soins infirmiers peuvent s’informer et anticiper les turbulences, évitant ainsi les imprévus. La proactivité favorise le développement de relations de confiance et de collaboration avec le personnel et permet une transition en douceur dans les soins à la patientèle.

Proactivité : être au courant

Les turbulences inattendues qui nécessitent un changement immédiat ou une prise de décision rapide ne sont jamais idéales pour les cadres ou les gestionnaires en soins infirmiers. Dans la mesure du possible, il est préférable d’éviter d’avoir à réagir rapidement et à régler un problème local sans y avoir bien réfléchi. Pour passer de la réactivité à la proactivité, les cadres et les gestionnaires en soins infirmiers doivent comprendre les problèmes de haut niveau et sur le terrain qui affectent l’environnement de santé local.

Ces cadres et gestionnaires doivent donc bien s’informer et savoir où trouver les meilleures ressources. Le tableau 16.2.1 fournit des ressources et de l’information fiable sur les priorités émergentes.

Tableau 16.2.1 Priorités émergentes

Priorité

Ressources

Évolution démographique

Rapport de l’administrateur en chef de la santé publique sur l’état de la santé publique au Canada, 2014 La santé publique et l’avenir (Agence de la santé publique du Canada)

Priorités pour la santé des Autochtones

Aperçu de la santé des Autochtones au Canada (Centre de collaboration nationale de la santé autochtone)

Santé des Autochtones (gouvernement du Canada)

Problèmes émergents liés aux médicaments et aux dispositifs médicaux

Consumer Health Products Canada (Santé Canada)

Quoi de neuf : Médicaments (Approbation de nouveaux médicaments par Santé Canada)

Programme commun d’évaluation des médicaments de l’Agence des médicaments et des technologies de la santé au Canada

Déclaration conjointe sur les mesures visant à remédier à la crise des opioïdes (Santé Canada)

Sûreté des instruments médicaux vendus au Canada (Santé Canada)

Effet domino du changement

La simple arrivée d’un nouveau traitement médical, d’une innovation ou d’une technologie de santé (comme un appareil) dans un service d’un système de santé peut avoir des répercussions rapides dans d’autres services du système. Les services hospitaliers susceptibles d’être touchés (directement ou indirectement) comprennent les services d’hygiène et salubrité, de technologies de l’information et de gestion de l’information, d’archives médicales, d’imagerie diagnostique et de buanderie, entre autres départements. Un nouveau traitement peut s’accompagner de coûts inattendus ou nécessiter des mises à jour logicielles coûteuses, l’embauche de personnel ou la modification de processus ou protocoles. C’est pourquoi la communication ouverte et continue avec les autres départements est essentielle avant tout changement.

L’une des plus récentes turbulences pour de nombreux gestionnaires et systèmes de santé est le déplacement de l’attention de la maladie vers le bien-être et les stratégies préventives (ASPC, 2016). Les responsables de soins de santé encouragent les modèles de financement qui soutiennent les programmes et services de prévention, y compris les programmes de dépistage. Dans un contexte où les budgets sont limités, la gestion de cette évolution vers des approches préventives, qui peut être coûteuse, doit être équilibrée avec les services de soins d’urgence et de longue durée pour toute la patientèle (AIIC, 2012).

Expérience sur le terrain

Conseils

  • Soyez au fait des sources fiables et appropriées en ligne et utilisez-les pour vérifier les faits, les statistiques et les données.
  • Restez au courant de l’évolution démographique, tant à l’échelle locale que nationale, afin d’anticiper les changements et la nécessité de modifier les services.
  • Tenez compte des priorités des autorités locales en matière de financement pour soutenir le développement de programmes locaux et répondre aux changements de priorités (par exemple, les services de prévention).
  • Communiquez efficacement les changements prévus et les nouvelles idées aux autres afin de vous assurer d’avoir la collaboration et le soutien nécessaires pour aller de l’avant. Consultez des experts et les autres personnes susceptibles d’être affectées (directement ou indirectement) par les innovations ou les changements prévus.
  • Consultez le document « Registered Nurse Practice Standards » (en anglais).

Activité d’apprentissage essentielle 16.2.1

1. Imaginez que vous avez un poste de gestionnaire en soins infirmiers et êtes responsable d’acheter un nouvel équipement important pour votre service. Le personnel médical et infirmier de votre unité vient d’en entendre parler dans un salon professionnel en Angleterre. L’équipe aimerait que vous l’achetiez dès que possible pour le tester avec des patients d’ici, en Saskatchewan.

Lisez l’article « 13 Considerations for Making an Evidence-Informed Decision » (en anglais) sur le site de l’Agence des médicaments et des technologies de la santé au Canada et ressortez les facteurs les plus importants à évaluer avant de prendre une décision.

2. Que pensez-vous de la santé des personnes âgées dans votre communauté et du fait de vieillir (en général)?

Dressez une brève liste de ce que vous pensez de la santé des aînés, puis lisez la rubrique « Mythes associés à une population vieillissante » du « Rapport de l’administrateur en chef de la santé publique sur l’état de la santé publique au Canada, 2014 – La santé publique et l’avenir » sur le site Web de l’Agence de la santé publique du Canada. Comment vous comparez-vous?

16.3 Sens des affaires et compétences tangibles

Traditionnellement, le poste de gestionnaire en soins infirmiers dans une unité hospitalière consistait principalement à gérer les questions cliniques et à coordonner les soins avec le personnel approprié. Ces rôles évoluent rapidement avec l’évolution des soins de santé et des rôles de direction en soins infirmiers. Aujourd’hui plus que jamais, pour remplir leurs fonctions, les gestionnaires en soins infirmiers ont moins besoin d’une expertise clinique que de compétences pratiques, d’outils et de tactiques en gestion des affaires pour bien gérer les départements et s’assurer une réussite professionnelle.

Pour être des agents de changement efficaces, les cadres et les gestionnaires doivent acquérir et utiliser des compétences en gestion des affaires et développer leur perspicacité, soit leur capacité d’user de jugement de manière efficace et bien informée.

Compétences et tactiques en gestion des affaires

Le tableau 16.3.1 met en évidence les compétences pratiques et les tactiques spécifiques en gestion des affaires nécessaires pour que les cadres et les gestionnaires en soins infirmiers puissent remplir leur rôle efficacement. Au besoin, des ressources en ligne et des liens sont fournis pour approfondir le sujet.

Tableau 16.3.1 Compétences importantes en gestion des affaires

Compétences en gestion des affaires

Ressources

Comprendre la planification stratégique

http://leads.in1touch.org/site/framework?nav=02

Utiliser des statistiques et des données pour prouver un point

https://www.ahrq.gov/research/data/index.html

http://www.hqontario.ca/

https://www.saskhealthquality.ca/

http://www.qp.gov.sk.ca/documents/english/Statutes/Statutes/H0-021.pdf

Évaluer de manière critique les études publiées afin de s’assurer de la qualité et de la crédibilité des données qui les étayent

http://www.casp-uk.net/casp-tools-checklists

Le style de rédaction dans la communication au travail doit être approprié aux environnements de pratique professionnelle. Le tableau 16.3.2 présente quelques considérations relatives aux différentes méthodes de communication.

Tableau 16.3.2 Méthodes de communication professionnelle

Méthode de communication

Facteurs à considérer

Rapport écrit détaillé décrivant un plan complet (plusieurs pages, y compris les processus de planification)

  • Essentiel pour présenter des changements majeurs ou fournir des mises à jour annuelles sur l’état des services ou des dossiers.
  • Généralement reçu par les membres de la haute direction.
  • Souvent accompagné d’un résumé pour consultation rapide.

Analyse de rentabilité ou proposition d’affaires (3-4 pages maximum)

  • Idéale pour présenter une nouvelle idée ou un nouveau projet qui nécessitera des ressources supplémentaires (soit du financement) au-delà des besoins budgétaires habituels.
  • Approche professionnelle visant à demander des ressources supplémentaires pour soutenir un projet ou service nouveau ou en expansion.

Synthèse ou mémoire
(résumé d’une page)

  • Doit être court, ne comporter que les éléments essentiels et être adapté au public qui le reçoit.
  • Peut accompagner une présentation ou un compte rendu verbal.
  • Élément essentiel de l’information et de la participation continues des parties prenantes et des personnes directement ou indirectement touchées par les changements à venir.

Présentation

  • Approche verbale et visuelle pour faire le point sur la progression ou donner des détails sur de nouvelles propositions ou des analyses de rentabilité.
  • Éviter de lire les diapositives ou le document. La présentation orale doit servir de complément d’information aux documents distribués à l’auditoire. Les personnes qui présentent professionnellement doivent bien connaître le contenu de la présentation pour éviter de dépendre des diapositives.
  • Les présentations peuvent permettre d’inclure les parties prenantes à plusieurs niveaux et les personnes directement concernées par un changement.

Bulletin d’information ou note de service
(une demi-page à une page)

  • Utile pour transmettre des messages à des groupes ou à l’ensemble des membres d’une organisation, afin d’informer un grand nombre de personnes.
  • L’important est de présenter clairement les messages clés afin d’éviter les suppositions ou les questions inutiles dues à l’ambiguïté.

Courriel

  • Utile pour transmettre des messages à des groupes, mais mieux adapté pour fournir des extraits spécifiques d’une stratégie, d’un plan ou d’un mémoire.
  • Idéal pour faire des suivis ou fournir de l’information continue sur un projet.
  • Utile pour les parties prenantes dont l’intérêt pour un projet est limité et qui n’ont besoin que d’un minimum d’information.
  • Les MAJUSCULES, le soulignement et les caractères gras doivent être utilisés avec parcimonie, car il est difficile de discerner le ton d’un courriel.

Expérience sur le terrain

  • Développez votre sens des affaires.
  • Informez-vous et planifiez, même si l’avenir est imprévisible.
  • Votre planification budgétaire a des conséquences sur les autres. Coordonnez et partagez votre planification budgétaire avec les départements qui pourraient être touchés par vos plans en matière de changement et d’amélioration de la qualité, des services et des soins.
  • Mettez l’accent sur les résultats de la patientèle. Par exemple, « tel changement aux soins dans mon unité se traduira par une meilleure expérience pour la patientèle et une diminution de la durée des séjours ».

16.4 Collaboration avec la patientèle et les familles dans la prestation des soins

L’évolution des systèmes de santé d’une approche axée sur la maladie vers un modèle plus axé sur la prévention, le bien-être et la promotion de la santé s’est accompagnée d’une évolution de la façon de considérer la participation de la patientèle et des familles dans les soins. Traditionnellement, les prestataires de soins de santé observaient et acceptaient une participation de la patientèle et des familles dans les soins dans des domaines cliniques spécifiques comme la pédiatrie, l’obstétrique, l’oncologie et les soins palliatifs. Aujourd’hui, on retrouve ces attentes de la patientèle dans tous les secteurs du continuum de soins. Au cours des deux dernières décennies, le paysage des soins de santé s’est transformé pour mettre l’accent sur le concept de soins centrés sur le patient (ou la patiente) et la famille, aussi appelé soins centrés sur la personne (selon Canadian Partnership Against Cancer et Agrément Canada). Ces expressions sont aujourd’hui souvent utilisées pour décrire l’inclusion de la patientèle et des familles et la collaboration avec elles pour déterminer les soins et les résultats à divers moments dans le continuum de soins. Dans cette section du chapitre, les termes « patient.e », « patientèle » et « personne » sont utilisés indifféremment.

Définitions

L’Institute of Patient- and Family-Centered Care (IPFCC, 2017) définit les soins centrés sur la personne et la famille comme « une approche de la planification, de la prestation et de l’évaluation des soins de santé qui repose sur des partenariats mutuellement bénéfiques entre les prestataires de soins de santé, la patientèle et les familles ». Les quatre concepts clés adoptés par l’IPFCC et suivis au Canada et en Saskatchewan sont les suivants :

Dignité et respect. Les prestataires de soins de santé écoutent et respectent les points de vue et les choix de la personne et de la famille. Les connaissances, les valeurs, les croyances et le contexte culturel de la personne et de sa famille sont pris en compte dans la planification et la prestation des soins.

Partage de l’information. Les prestataires de soins de santé communiquent et partagent de façon positive et utile une information complète et impartiale avec la personne et la famille. La personne et la famille reçoivent en temps utile une information exacte et complète qui leur permet de participer efficacement à la prise de décision.

Participation. La personne et la famille sont encouragées et soutenues dans leur participation aux soins et à la prise de décision dans la mesure qu’elles le souhaitent.

Collaboration. La patientèle, les familles, les prestataires de soins de santé et les responsables des soins collaborent à l’élaboration, à la mise en œuvre et à l’évaluation des politiques et des programmes, à la recherche, à la conception des installations, à la formation professionnelle et à la prestation des soins.

Activité d’apprentissage essentielle 16.4.1

Pour en savoir plus sur l’historique du concept de soins centrés sur la personne, consultez le document « Partnering with Patients and Families To Design a Patient- and Family-Centered Health Care System: A Roadmap for the Future », publié par l’IPFCC.

La définition de l’IPFCC correspond à celle d’Agrément Canada, qui définit les soins centrés sur la personne comme une approche qui « favorise la prestation de soins respectueux, empathiques, culturellement adaptés, et compétents qui répondent aux besoins, valeurs, croyances et préférences des clients et des membres de leur famille. » (2015). Ici, le terme clients désigne à la fois les patient.e.s et les résident.e.s. Les soins centrés sur la personne s’articulent autour du concept de travail « avec » la personne plutôt que « pour » elle. Selon ce concept clé, la personne et sa famille sont au centre des soins, par opposition à un modèle où l’opinion des prestataires de soins prévaut; il existe donc un véritable partenariat entre les prestataires de soins et la patientèle.

La personne d’abord

En 2009, la Saskatchewan a publié le rapport « Patient First Review », qui a donné le coup d’envoi au processus de transformation ciblé visant à intégrer les soins centrés sur la personne à la culture des soins de santé de la province. La principale recommandation de ce rapport était la suivante :

Que la Saskatchewan fasse des soins centrés sur la personne et la famille son objectif principal pour son système de santé par l’adoption d’un cadre politique général pour l’ensemble du système. Élaboré en collaboration avec la patientèle, des familles, des prestataires de soins et des responsables du système de santé, ce cadre doit servir de guide à l’attention des organisations de soins de santé, des groupes professionnels et d’autres membres du milieu pour faire adopter la philosophie « la personne d’abord » dans tous les lieux de travail (Saskatchewan Health, 2009, p. 8).

La Saskatchewan est activement engagée dans des efforts stratégiques visant à faire progresser les soins centrés sur la personne et la famille dans la province, et a fixé des objectifs et des mesures pour réussir ce changement de culture.

Activité d’apprentissage essentielle 16.4.2

Pour en savoir plus sur les cibles et les objectifs spécifiques d’un travail de qualité dans le domaine de la santé en Saskatchewan, consultez les documents et sites Web suivants :

Le bulletin Putting Patients First de la Saskatchewan Patient- and Family-Centred Care Guiding Coalition (automne 2016).

Le rapport du Saskatchewan Health Quality Council « Shared decision making: Helping the system and patients make quality health care decisions ».

Effets changeants des soins centrés sur la personne et la famille

Cette nouvelle approche collaborative des soins a une incidence majeure sur la manière dont les prestataires de soins de santé communiquent avec la patientèle et les familles et sur la participation et l’influence des cadres et des gestionnaires en soins infirmiers. Les cadres et les gestionnaires doivent particulièrement prêter attention à l’évolution des attentes de la patientèle et des familles, qui ont un accès accru à l’information grâce à la technologie. Ces attentes visent notamment le partage d’information entre les prestataires de soins, la prise de décision partagée et la participation significative. L’un des principes fondamentaux des soins centrés sur la personne est « chaque patient, en tout temps ». Ce changement de culture concerne le personnel à tous les niveaux du système de santé, du personnel soignant au personnel de soutien.

Activité d’apprentissage essentielle 16.4.3

Pour en savoir plus sur les effets changeants des soins centrés sur la personne et la famille, consultez la plateforme de ressources sur la participation du patient sur le site Web d’Excellence en santé Canada.

Consultez les sites Web suivants et réfléchissez à leur effet sur les environnements de gestion locaux :

Institute for Patient- and Family-Centred Care, Free Downloads—Reports/Roadmaps

Pour en savoir plus sur les innovations en matière de promotion des soins centrés sur la personne et la famille dans les hôpitaux, consultez la page Health Care Innovations Exchange du site Web de l’Agency for Healthcare Research and Quality.

Expérience sur le terrain

  • Développez vos connaissances en matière de soins centrés sur la personne et la famille afin d’avoir une base solide en vue d’un rôle de direction.
  • Étudiez des exemples précis de collaboration fructueuse avec les personnes et les familles dans une optique de soins et travaillez avec ces personnes pour apporter des changements dans votre domaine (par exemple, inclure les personnes et les familles aux rondes ou modifier les heures des repas dans les CHSLD pour accommoder les préférences des personnes résidentes).
  • Améliorez vos compétences en communication pour collaborer et interagir avec la patientèle et les familles individuellement ou en groupe (comme un conseil de patients). Apprenez la différence entre les rôles des parties prenantes (qui a un rôle de conseil et de consultation et qui a un rôle décisionnel), et soyez en mesure de l’expliquer aux personnes et aux familles.
  • Raffinez vos compétences en communication pour inciter les personnes et les familles à participer aux soins et à les améliorer. Consultez les exemples présentés dans les Lignes directrices sur les pratiques cliniques exemplaires (2015) pour les soins axés sur les besoins de la personne et de la famille de l’Association des infirmières et infirmiers autorisés de l’Ontario.
  • Développez des compétences en encadrement et en mentorat de divers groupes de personnel, de personnes et de membres de la famille. Développez des compétences en résolution de conflits pour aider le personnel à composer avec les interactions plus difficiles et les problèmes familiaux.
  • Prêtez attention aux questions d’actualité qui auront une incidence sur l’importance accrue accordée à la participation de la patientèle et des familles dans les soins, telles que l’assistance médicale à mourir et les directives médicales anticipées.
  • Apprenez à sensibiliser les personnes et les familles à la crédibilité des ressources, en particulier sur Internet, et orientez-les vers des sources fiables.
  • Initiez-vous aux processus de communication pour divulguer les erreurs de façon appropriée et efficace et incluez les personnes dans l’amélioration de la qualité.
  • Veillez à ce que toute votre équipe comprenne comment préserver la confidentialité des renseignements de la personne soignée lorsque la participation de la famille est accrue.
  • Raffinez vos compétences en mesure de l’expérience patient. Par exemple, dotez-vous d’un outil qui vous permet d’avoir une rétroaction systématique des personnes soignées et des familles, et utilisez ces données pour améliorer les soins.

16.5 Gestion du stress et pratiques d’autosoins

Aujourd’hui, les gestionnaires en soins infirmiers ont des tâches diversifiées et leur rôle évolue constamment. Les priorités multiples et la pression associées aux enjeux complexes affectent presque tous les aspects du quotidien des gestionnaires. Le chevauchement des considérations urgentes et non urgentes peut avoir des conséquences négatives sur le temps et les ressources disponibles pour prendre une décision efficace et optimale. Dans certains cas, l’ambiguïté et le manque de données peuvent compliquer la prise de décision. Les priorités sont parfois fixées en fonction de données temporaires, d’enjeux de haut niveau ou de besoins en gestion des soins, puis réajustées ultérieurement. Cet environnement de gestion et de direction constitue la nouvelle norme en santé.

À travers ce chaos et ces changements incessants, il est essentiel que les cadres et les gestionnaires en soins infirmiers gardent à l’esprit leur principale responsabilité de leadership vis-à-vis des organisations et de leur personnel et assurent une surveillance proactive et positive et des soins de qualité, sûrs et appropriés pour la patientèle. Les gestionnaires doivent anticiper les changements, communiquer efficacement et collaborer facilement avec les autres pour faire progresser les soins de santé. Les chapitres 1 et 3 ont abordé l’utilisation de la théorie de la complexité pour expliquer et fournir un cadre pour les priorités environnementales en constante évolution.

Il n’existe pas de recette unique pour gérer le changement dans une organisation. Le pragmatisme et la logique doivent être au cœur de chaque réflexion. Soutenir et promouvoir le changement de manière proactive est exigeant et épuisant. Les gestionnaires en soins infirmiers doivent se connaître et avoir conscience de leurs forces et de leurs mécanismes d’adaptation, sans quoi un tel environnement peut avoir des répercussions négatives sur leur vie et leur comportement. Parfois, les conséquences néfastes comme la fatigue peuvent ne pas être ressenties, mais peuvent mener à l’épuisement professionnel, qui peut se manifester par un épuisement émotionnel, du cynisme et une faible auto-efficacité (Laschinger et Fida, 2014).

Aujourd’hui plus que jamais, les personnes en position de gestion et de leadership doivent prendre soin d’elles de façon proactive et assidue. Le fait de prendre soin de soi commence toujours par une prise de conscience stratégique de ses forces, compétences et aptitudes en tant que gestionnaire ou leader. Selon Rath et Conchie (2009), les chefs les plus habiles ne s’appuient pas sur le pouvoir associé à leur position, mais se concentrent sur leurs forces et leurs atouts pour se perfectionner et réussir dans leur rôle. Gottlieb et coll. (2012) décrivent également le leadership fondé sur les forces comme un concept à multiples facettes qui implique le développement non seulement de connaissances et de compétences tangibles, mais aussi d’un état d’esprit serein qui permet de miser sur ses forces pour gérer les problèmes et de se concentrer sur l’amélioration de ses compétences les plus faibles au fil du temps. Leur théorie du leadership fondé sur les forces va au-delà de l’autoévaluation; elle aide à reconnaître les points forts de ses coéquipiers et autres collègues. En outre, en tant que leader, votre façon de penser et de voir le monde a également une incidence sur vos actions et comportements. Comme nous l’avons vu dans les chapitres précédents, la pleine conscience et l’état d’esprit des gestionnaires sont des éléments importants de la gestion de la complexité.

Un cadre de leadership permet d’orienter le développement personnel des gestionnaires. Le Cadre des capacités de leadership en santé LEADS est étroitement lié aux travaux de Rath et Conchie (2009). Il est désormais approuvé par le Collège canadien des leaders en santé. L’acronyme LEADS signifie : Être son propre Leader, Engager les autres, Atteindre des résultats, Développer des coalitions et transformer les Systèmes.

La première étape du cadre LEADS, être son propre leader, souligne l’importance pour les gestionnaires et les leaders de s’engager consciemment dans un cheminement personnel de connaissance de soi, d’introspection et de reconnaissance de ses compétences, de ses forces de caractère et de son expertise. On n’attend pas des gestionnaires ou des leaders l’excellence dans tous les domaines, mais prendre conscience de ses forces et faiblesses permet une planification stratégique des autosoins et de son développement personnel.

Expérience sur le terrain

  • Consultez les outils d’évaluation des compétences en leadership et en gestion dans les deux documents suivants pour cibler vos forces et vos points à améliorer : Le document Registered Nurse Practice Standards de la SRNA (en anglais) et le Cadre des compétences de base des infirmières et infirmiers praticiens du Canada de l’AIIC.
  • Envisagez des approches pour utiliser l’intelligence émotionnelle dans la prise de décision et la mobilisation efficace des autres (Bradberry et Greaves, 2009), et tenez compte de vos points forts dans une optique du leadership fondée sur les forces (Gottlieb et coll., 2012).
  • Utilisez les résultats d’outils d’évaluation des compétences pour vous aider à vous fixer des objectifs de carrière et de perfectionnement professionnel. Tenez-vous-en à ces objectifs et évaluez-les régulièrement (Echevarria, Patterson, et Krouse,2017).
  • Restez à l’affût des signes physiques et mentaux que vous envoie votre corps, qui peuvent être un indice de surcharge ou du besoin de prendre une pause des environnements complexes et rapides. La négociation d’un moment pour réfléchir et considérer les options de façon stratégique mène presque toujours à une prise de décision fructueuse.
  • Prenez soin de votre santé en adoptant des habitudes de vie saines; en particulier, veillez à dormir suffisamment, à manger sainement, à bouger et à gérer votre stress.
  • Trouvez-vous un mentor, soit une personne qui occupe un poste de direction ou de gestion similaire ou supérieur qui vous inspire et vous sert de modèle. Consultez votre mentor et planifiez des moments pour obtenir de la rétroaction, des conseils et du soutien afin de guider votre développement comme gestionnaire ou leader au fil du temps.
  • Optimisez le temps et les ressources pour favoriser l’efficacité et la simplification des processus. Les compétences et les signes d’automotivation sont importants pour s’assurer de remplir la tâche et de respecter les délais pour la remise des rapports et des livrables.
  • Bloquez des plages dans votre horaire pour faire une évaluation régulière de vos points forts et de vos approches. Faites preuve de créativité dans votre processus de développement personnel.

16.6 Leadership international en soins infirmiers

Ce chapitre a abordé d’importants enjeux émergents pour le leadership en soins infirmiers dans le contexte canadien, et plus particulièrement en Saskatchewan. Mais qu’en est-il des soins infirmiers ailleurs dans le monde? Dans l’activité suivante, Judith Shamian, Ph. D., présidente du Conseil international des infirmières de 2013 à 2017, parle de santé et de soins infirmiers à l’échelle mondiale dans le cadre de la série Global Leadership organisée par le Centre for Global Child Health du SickKids.

Activité d’apprentissage essentielle 16.6.1

Visionnez la vidéo « Sustainable Development Goals: Global Health and Nursing » (56:10) de la série Global Leadership organisée par le Centre for Global Child Health. Dans cette vidéo, Judith Shamian parle des soins infirmiers dans le monde et des objectifs de développement durable. Répondez ensuite aux questions suivantes :

  1. Quel est le lien entre l’Association des infirmières et infirmiers du Canada (AIIC) et le Conseil international des infirmières?
  2. Pourquoi Judith Shamian affirme-t-elle que l’argent dépensé pour les prestataires de soins de santé constitue un investissement?
  3. Quels sont les trois termes à la mode mentionnés par Judith Shamian?
  4. Nommez les objectifs de développement durable (ODD) à l’échelle mondiale.
  5. Comment pouvez-vous, en tant que responsable du personnel infirmier, aider les citoyens du monde à atteindre ces objectifs?

16.7 Éléments fondamentaux de la transition du rôle professionnel pour la relève en soins infirmiers

Les éléments fondamentaux suivants se recoupent et alimentent l’expérience initiale du personnel infirmier nouvellement diplômé au travail : 1) Stabilité; 2) Prévisibilité; 3) Familiarité; 4) Cohérence; 5) Succès (Duchscher, 2012). Lorsque tous ces éléments sont en place, la personne peut avoir un sentiment de contrôle sur son expérience.

Figure 16.7.1 Facteurs de qualité du lieu de travail pour le personnel infirmier nouvellement diplômé

réussite des étudiants, environnement de travail, prévisibilité, familiarité, stabilité, cohérence

« Quality Workplace Factors for New Nursing Graduates » © Judy Boychuk Duchscher, 2012. Tous droits réservés, utilisation avec autorisation.

La stabilité fait référence à la constance des circonstances et de la situation pendant l’expérience de transition; essentiellement, la stabilité évoque ce qui ne risque pas de changer ou de se détériorer. La stabilité est une caractéristique fondamentale de l’homéostasie, qui, même d’un point de vue purement biophysiologique, est recherchée par tous les êtres humains. Lorsque vous envisagez d’optimiser votre stabilité, pensez à votre vie personnelle comme à votre vie professionnelle. Essayez d’envisager un travail qui vous offre des situations cliniques stables, dans un contexte qui ne change pas constamment. Pour cette raison, les équipes flottantes (qui se déplacent quotidiennement d’une unité à l’autre) n’offrent pas de stabilité pour la patientèle. En outre, le personnel infirmier nouvellement diplômé, encore en apprentissage, se retrouve dans une situation précaire lorsque la présentation clinique d’une personne est très changeante ou la phase de sa maladie permet de prédire avec quasi certitude de l’instabilité ou une décompensation (donc des soins d’urgence ou critiques). La capacité limitée du personnel infirmier nouvellement diplômé à reconnaître ce genre de signes complique l’intervention dans ce genre de situations cliniques instables. Enfin, la stabilité au travail est d’autant plus importante si votre vie familiale est instable (en raison de situations chaotiques ou stressantes). L’inverse est également vrai : une vie familiale stable est essentielle si vous manquez de stabilité au travail.

La prévisibilité du personnel infirmier nouvellement diplômé est liée : 1) aux attentes (par exemple, le niveau de performance attendu du personnel infirmier diplômé, les tâches à réaliser, le degré d’aisance avec les responsables pour exprimer un débordement); 2) au lieu de travail (l’emplacement, la constance, le même lieu à chaque période de travail ou le déplacement dans plusieurs unités), le passage de personnel occasionnel à permanent avec une exposition minimale à des lieux de travail inconnus); 3) à l’horaire (des quarts de 8 ou 12 heures, le moment de la journée, la façon de réagir si une situation se produit [un code, un décès, un patient agité, un diagnostic d’infection transmise sexuellement, un suicide dans la communauté]); 4) à l’équipe (les collègues, les personnes-ressources en cas de question, les personnes qui peuvent congédier le personnel, les personnes de confiance); 5) aux façons de faire (les différences entre le travail du personnel infirmier étudiant et du personnel infirmier diplômé, la façon de réagir aux nouvelles tâches, les écarts entre les façons de faire au travail et les méthodes étudiées).

La familiarité évoque « j’ai déjà vu ça », voire « … je sais quoi faire ». Si vous avez eu la chance d’avoir un emploi étudiant ou un stage final (ou encore un projet d’intégration ou de consolidation des apprentissages) dans l’unité ou le contexte de pratique où vous avez l’intention de travailler après l’obtention de votre diplôme, le manque de familiarité ne contribuera peut-être pas autant au stress de la transition. Le simple fait de savoir où se trouve le nécessaire pour faire votre travail soulage le stress lié à la transition (par exemple, où se trouvent les tests de dépistage des ITSS dans la clinique ou les sacs spéciaux de solution physiologique à 20 mEq K+/L dans l’unité).

Il est très utile de savoir qui est qui dans le domaine de pratique. Si de nombreuses personnes parmi le personnel infirmier nouvellement diplômé vivent une excellente collégialité avec leurs homologues d’expérience, beaucoup se font mettre en garde contre les personnes à éviter parce qu’elles découragent la relève. Un nouveau lieu de travail est un peu comme un champ de mines : vous devez avancer, mais personne ne vous dit où sont les mines (et parfois même, personne ne le sait), et elles ne donnent pas toujours de signes évidents avant d’exploser. Les programmes de résidence ou de stage en soins infirmiers (parfois appelé programme d’intégration professionnelle) ou les dispositions moins formelles pour le personnel surnuméraire ont une incidence importante sur le sentiment de familiarité lors de la transition. Le personnel surnuméraire fait partie de l’équipe et travaille auprès de la patientèle, mais n’a pas de tâche fixe. Cette situation permet de travailler dans de nouveaux environnements, de profiter de diverses expériences d’apprentissage et de développer des liens avec l’équipe et la patientèle sans avoir le stress d’une charge de travail prédéterminée. Les programmes de mentorat ou de préceptorat constituent une autre approche pour se familiariser avec les rôles et responsabilités en soins infirmiers. Le mentorat exprime généralement une relation professionnelle personnalisée à long terme entre une personne nouvellement diplômée et une personne expérimentée. Le préceptorat est souvent associé au transfert de connaissances pratiques et est souvent utilisé dans le contexte d’un jumelage entre une personne étudiante en soins infirmiers et une personne instructrice chevronnée. Cela dit, la personne préceptrice peut aussi être un ou une membre du personnel infirmier clinicien qu’on jumelle avec une personne nouvellement diplômée pour lui enseigner les rôles, routines et responsabilités associés au milieu de travail. Dans cet esprit, la personne préceptrice peut être assignée, mais la personne mentore est choisie, puisque ce type de relation implique le développement d’un lien plus personnel.

La cohérence traduit l’expérience d’une exposition semblable à chaque occurrence d’un événement, d’une situation, d’un concept ou d’une idée, ce qui procure familiarité et prévisibilité. D’un point de vue purement logique, la cohérence est définie comme ce qui ne contient pas de contradictions. Voici quelques incohérences à surveiller en début de pratique professionnelle :

  • L’environnement de pratique est souvent conçu pour garantir la rentabilité et la productivité plutôt que l’efficacité et la qualité.
  • Les établissements de santé doivent fonctionner avec des budgets qui sont influencés par de nombreux facteurs sociopolitiques et économiques concurrents, ce qui se traduit souvent par des tensions entre les motivations des prestataires de soins de santé, fondées sur l’éthique et les valeurs, et les limites du système de santé en termes de budget et de ressources humaines.
  • Lorsque l’on sort d’un programme d’enseignement qui encourage la pensée critique indépendante, il est un peu déconcertant de dépendre en quelque sorte du personnel infirmier expérimenté. On peut avoir l’impression que les autres s’attendent à une complète autonomie de notre part, et on s’y en attend souvent soi-même. On se rend rapidement compte qu’une grande partie de ce que l’on fait et de ce que l’on voit est nouveau, ce qui crée un sentiment de confusion. L’incohérence se situe entre ce que vous croyez que les gens attendent de vous, ce que vous attendiez de vous lorsque vous étiez aux études et la conscience de vos limites dans votre nouvelle pratique professionnelle.

Lorsque vous vivez des moments d’incohérence, souvenez-vous de vous en tenir aux objectifs fondamentaux du personnel infirmier nouvellement diplômé :

  • Se familiariser avec les rôles et responsabilités du personnel infirmier diplômé.
  • Créer son propre système d’organisation du travail.
  • Apprendre à gérer son temps avec une charge de travail de plus en plus complexe.
  • Se familiariser avec les pratiques courantes du milieu de travail.
  • Voir et expérimenter une diversité de situations « normales » et « anormales » dans un contexte supervisé.
  • Échanger avec un ou une collègue de confiance, une personne responsable de la formation en soins infirmiers ou une personne mentore à propos des situations cliniques pour bien comprendre les schémas cliniques et les relations entre une situation et le jugement qui en découle.
  • Gagner de l’assurance dans l’exécution des compétences fondamentales requises du personnel infirmier dans le contexte de travail. (Les compétences du personnel infirmier qualifié ne sont pas de simples tâches, mais un ensemble complexe de rôles et responsabilités mis en œuvre dans un ensemble infiniment varié de séquences et de combinaisons et dans des conditions dynamiques, fluides et souvent intenses et chargées de risques.)
  • Évaluer une patientèle de plus en plus complexe présentant différents degrés de stabilité.
  • Apprendre à travailler en équipe et à connaître son équipe.
  • Comprendre la dynamique du milieu de travail. Que signifient les « soins infirmiers » pour vos collègues? Comment les soins infirmiers sont-ils valorisés dans votre établissement et dans votre communauté?
  • Trouver un équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle.
  • Apprenez à vous (re)découvrir sans le fardeau des études et des échéances universitaires.
  • Amusez-vous!

Activité d’apprentissage essentielle 16.7.1

Visionnez la vidéo « Duchscher’s New Graduate Nurse Transition Stages » (19:53) de Judy Boychuk Duchscher, Ph. D., qui traite des étapes de la transition que vit le personnel infirmier nouvellement diplômé. Consultez également les figures 16.7.2 et 16.7.3.  Pour en savoir plus sur la transition du personnel infirmier nouvellement diplômé, consultez le site Web Préparer l’avenir des soins infirmiers. Répondez aux questions suivantes :

  1. Décrire les étapes de la transition. Quelles sont les recommandations de Judy Boychuk Duchscher pour chaque étape?
  2. Qui est généralement le premier employeur de la majorité du personnel infirmier fraîchement diplômé? Pourquoi?
  3. Qu’est-ce qu’un flux? Donnez-en un exemple.
  4. Quelle est la différence entre accommodement et adaptation?

Figure 16.7.2 Modèle des étapes de transition

étapes de transition, orientation, faire, être, savoir

« Modèle des étapes de transition », © Judy Boychuk Duchscher, 2007. Tous droits réservés, utilisation avec autorisation.

Figure 16.7.3 Modèle de choc de transition
Agrandir l’image : Modèle de choc de transition

choc de transition, responsabilités, rôle, connaissances, relations

« Modèle de choc de transition » © Judy Boychuk Duchscher, 2007. Tous droits réservés, utilisation avec autorisation.

Résumé

Compte tenu des multiples défis et incertitudes actuels et futurs, il est impératif que les cadres et les gestionnaires en soins infirmiers continuent à améliorer l’efficacité de leur leadership. Carroll (2006) décrit plusieurs moyens efficaces de devenir leader en soins infirmiers, quels que soient votre formation ou votre poste actuels. Parmi eux, les moyens suivants sont directement liés à la gestion en soins infirmiers et au cheminement vers la réussite professionnelle :

  • Se doter d’un plan de formation continue et s’engager à le respecter.
  • Trouver sa passion et développer ses points forts dans ce domaine.
  • Participer à la vie de la communauté infirmière et rester au courant de l’évolution des enjeux en soins infirmiers.
  • Comprendre son style de leadership personnel et son incidence sur son travail.

À la fin du chapitre, vous devriez être en mesure de faire ce qui suit :

  1. Reconnaître l’évolution rapide des approches de gestion et de leadership infirmiers au sein des unités de soins en Saskatchewan, au Canada et dans le monde entier.
  2. Évaluer l’évolution et les approches de gestion des priorités et des questions houleuses en matière de soins dans le système de santé actuel.
  3. Déterminer l’importance des concepts liés au sens des affaires et des attentes en la matière dans les rôles d’administration.
  4. Reconnaître le rôle essentiel des approches centrées sur la personne et la famille et de la prise de décision partagée pour une gestion collaborative et efficace des soins.
  5. Déterminer l’importance de la planification du parcours personnel des cadres pour une croissance professionnelle et un développement de carrière fructueux et satisfaisants.
  6. Reconnaître le choc de la transition.
  7. Décrire les cinq éléments fondamentaux de la transition du rôle professionnel pour la relève en soins infirmiers.

Figure 16.7.4 Lettre de Katherine McKenzie Ross à toutes les nouvelles personnes diplômées en soins infirmiers

« From the Superintendent of Nurses: To the Graduating Class, 1929 », article publié dans l’édition 1929 du journal The Torch. Photo fournie par l’Autorité de la santé de la Saskatchewan (anciennement la région sanitaire de Regina Qu’Appelle), sous licence Creative Commons Attribution 4.0 International.

Exercices

  1. Choisissez une personne gestionnaire dans l’un de vos sites cliniques. Interrogez cette personne pour en savoir plus sur la gestion des soins infirmiers. Pensez à poser les questions suivantes : Pourquoi avez-vous choisi de devenir gestionnaire? Comment décririez-vous votre style de gestion? Quels changements turbulents avez-vous observés dans le système de santé au cours des deux à cinq dernières années? Comment avez-vous su vous adapter à cette évolution du paysage de la gestion?
  2. Quelles sont les principales conclusions du rapport « Optimizing and Integrating Patient-Centred Care » de 2016? Selon vous, quelle sera l’incidence de ces résultats sur les cadres et les gestionnaires de la Saskatchewan?
  3. Quels sont les trois principaux éléments que les gestionnaires en soins infirmiers doivent considérer lors de la mise en œuvre d’un système de dossiers médicaux électroniques dans une unité de soins infirmiers?
  4. Songez à l’âge de la patientèle dans l’un de vos environnements cliniques actuels ou passés. Quels sont les principaux problèmes de santé auxquels chaque groupe d’âge est confronté et comment se reflètent-ils dans ce contexte clinique? Qu’allez-vous faire pour maximiser la participation de ce groupe dans les soins?
  5. Évaluez les activités en cours dans chacun de vos contextes cliniques pour promouvoir les soins centrés sur la personne et la famille.
  6. Tenez compte de l’évolution rapide et des utilisations émergentes des appareils sans fil et de l’Internet dans les soins quotidiens. Croyez-vous que les applications sans fil dans le domaine de la santé améliorent l’efficacité des systèmes de prestation des soins? Pourquoi ou pourquoi pas? Comment mesurer le rendement de ces systèmes sans fil à long terme?
  7. Réfléchissez à votre propre parcours professionnel en soins infirmiers. Quels éléments de ce chapitre vous seront utiles, quel que soit votre rôle de leader en soins infirmiers (par exemple, personnel infirmier soignant, responsable d’unité, gestionnaire, membre de la direction)?
  8. Si l’on se réfère à la vidéo de Judith Shamian de la série Global Leadership, comment trouverez-vous votre place dans le milieu? Quel est votre plan décennal?

Références

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À propos des contributeur.trice.s

À propos des contributeur.trice.s

Amanda Willcox, baccalauréat spécialisé en justice

En avril 2011, Amanda Willcox entre au service du Bureau de règlement des différends du ministère de la Justice (gouvernement de la Saskatchewan) comme médiatrice. Auparavant, Amanda a obtenu un baccalauréat en justice humaine, avec une spécialisation en justice pénale et en justice réparatrice, à l’Université de Regina. Amanda offre des services de résolution de conflits aux familles, agriculteurs et prêteurs, aux organismes, aux municipalités et dans le cadre de poursuites civiles. Elle anime également des ateliers de groupe sur la résolution des conflits, la médiation et le leadership. Amanda se dévoue en épaulant les gens pour qu’ils résolvent leurs différends dans une démarche la plus constructive que possible.

Anne Sutherland Boal, inf. aut., B.A., maîtrise en administration des services de santé

Anne Sutherland Boal est une professionnelle de la santé qui cumule 40 années d’expérience et a gravi les échelons, dans trois provinces canadiennes et en Chine. Elle a occupé divers postes dans des établissements de santé universitaires, notamment infirmière, coordinatrice des soins aux patients, directrice des soins infirmiers, vice-présidente des soins infirmiers et des programmes, et directrice de l’exploitation. Anne devient membre et directrice de l’exploitation de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada (AIIC) en 2010 et a occupé le poste de directrice générale de décembre 2013 à mai 2017.

Tout au long de sa carrière, Anne a mis en œuvre des programmes novateurs et a opéré des changements. Infirmière en chef et sous-ministre adjointe au ministère de la Santé de la Colombie-Britannique, elle a supervisé la mise en place du rôle d’infirmière praticienne et l’adoption du baccalauréat comme condition d’accès à la pratique. En tant que directrice de l’exploitation à Vancouver Coastal Health, Vancouver Acute, Anne a chapeauté la mise en place d’une pratique collaborative qui met davantage à profit les compétences et capacités des infirmières diplômées, des infirmières auxiliaires et des aides-soignantes.

Anne détient un diplôme en soins infirmiers de l’École des sciences infirmières de l’hôpital Foothills (Université de Calgary). Elle est également titulaire d’un baccalauréat ès arts (Université Brock) et d’une maîtrise en administration des services de santé (Université de l’Alberta).

Anthony de Padua, inf. aut., Ph. D.

Anthony de Padua est professeur adjoint à l’École des soins infirmiers de l’Université de la Saskatchewan, sur le campus Prince Albert. Auparavant, il a été chef du département de la santé, du travail social et de l’éducation des autochtones et directeur des sciences de la santé à l’Université des Premières Nations du Canada. Il est allochtone, mais a eu le privilège de travailler des dirigeants, des aînés et des infirmières autochtones. Il tient compte des différences entre styles de leadership autochtone et non autochtone et il comprend l’importance de collaborer avec les leaders autochtones en misant sur les points de vue autochtones pour améliorer les soins de santé pour tout le monde. Il a œuvré dans divers champs infirmiers comme les unités médicales et chirurgicales, la pédiatrie, les soins intensifs, la santé communautaire et les soins infirmiers en établissement correctionnel.

Beverly Balaski, inf. aut., B. Sc. inf., M. Sc. inf.

Beverly Balaski a commencé sa carrière comme infirmière auxiliaire immatriculée (appelée aujourd’hui infirmière auxiliaire autorisée). Elle a fait un retour aux études un an plus tard et obtenu un baccalauréat en soins infirmiers. Tout au long de sa carrière, elle a travaillé dans les soins directs, la formation, la recherche et l’élaboration de politiques.

Beverly se démarque, car elle a travaillé à la fois pour un organisme de réglementation des soins infirmiers, la College of Registered Nurses of Saskatchewan (Ordre des infirmières et infirmiers de la Saskatchewan), comme conseillère en pratique des soins infirmiers et directrice intérimaire, et pour le syndicat représentant les infirmières et infirmières psychiatriques autorisées en Saskatchewan, la Saskatchewan Union of Nursing, comme conseillère en recherche et en pratique de soins infirmiers.

Beverly est actuellement directrice générale de la Registered Psychiatric Nurses Association de la Saskatchewan. Elle possède d’ailleurs de vastes connaissances sur les réglementations, les normes, la recherche, les données probantes et les lignes directrices en matière de pratiques exemplaires en soins infirmiers. Elle met tout en œuvre pour clarifier les rôles des prestataires de soins infirmiers et fait activement la promotion de la pratique des infirmières autorisées et des infirmières psychiatriques autorisées comme modèle unique, irremplaçable et fondé sur le savoir.

Brendalynn Ens, inf. aut., M. Sc. inf., CSIC(C), certificat en évaluation des technologies

Brendalynn Ens est actuellement directrice de la mobilisation des connaissances, agente de liaison des programmes et des partenariats à l’Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé (ACMTS). Elle travaille en Saskatchewan, mais gère une équipe nationale. À ce titre, elle fournit de l’information étayée par des données probantes, fait la promotion des services de l’ACMTS et éclaire la compréhension des renseignements factuels pour la prise de décision. Elle cumule plus de 25 années d’expérience comme infirmière en soins intensifs, formatrice en cardiologie, chercheuse et infirmière gestionnaire dans divers milieux hospitaliers ruraux et urbains.

Brendalynn a obtenu un baccalauréat en sciences infirmières en 1988, puis une maîtrise dans le même domaine (Université de Saskatchewan) en 1992. En 2005, elle a obtenu un certificat en évaluation des technologies de la santé de l’Université Laval. Elle est infirmière en cardiologie certifiée par l’AIIC depuis 2003.

Par ailleurs, Brendalynn enseigne à l’occasion à l’École des soins infirmiers, à la Faculté de pharmacie et à l’École de physiothérapie de l’Université de la Saskatchewan. Elle enseigne parfois dans le cadre des programmes paramédicaux et d’infirmières praticiennes à l’école polytechnique de la Saskatchewan.

Colleen R. Toye, inf. aut., B. Sc. inf., M. Sc. inf.

Colleen Toye a commencé sa carrière comme infirmière auxiliaire. Elle a ensuite obtenu un baccalauréat (avec mention honorifique) et une maîtrise en sciences infirmières. Son mémoire de maîtrise, intitulé « Beyond Adoption : Exploring the Utilization and Integration of RAI-HC », est une étude qualitative réalisée auprès de participants de la région sociosanitaire de Saskatchewan. Dans la foulée de sa thèse, elle a publié un article dans la revue évaluée par les pairs Home Health Care Management and Practice et intitulé « Normalisation Process Theory and the Implementation of Resident Assessment Instrument-Home Care in Saskatchewan, Canada : A Qualitative Study ».

Colleen possède 38 ans d’expérience en soins infirmiers dans les soins chroniques, palliatifs, de courte durée et de réadaptation en milieu rural, urbain, institutionnel et communautaire. Outre les soins infirmiers, elle a assumé des responsabilités dans des fonctions administratives, de direction et en milieu clinique ainsi que dans des rôles de mentore et d’enseignante. Peu importe le rôle, Colleen a adopté une philosophie de pratique axée sur la patientèle et la famille. Elle n’a jamais perdu de vue l’importance de s’adapter et d’accompagner collègues et clientèle dans un environnement de soins de santé en constante évolution.

Colleen a travaillé activement au sein de l’Ordre comme membre du conseil pendant huit ans et a été élue au poste de présidente pour quatre ans. Pendant son mandat, Colleen a également représenté les infirmières de la Saskatchewan au conseil d’administration de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada. Colleen est une infirmière autorisée fière et engagée. Elle a travaillé dans divers milieux en Saskatchewan et se sent privilégiée de collaborer avec beaucoup d’infirmières exemplaires et d’apprendre d’elles.

Joan Wagner, inf. aut., Ph. D.

Joan Wagner est professeure agrégée de sciences infirmières à l’Université de Regina. Elle possède une vaste expérience en matière d’élaboration de cours et a été agente de liaison du programme d’études de l’École des sciences infirmières de l’Université de Regina de 2011 à 2014. Elle y est actuellement coordonnatrice de la recherche et de l’érudition. Elle participe activement à de nombreux comités de l’École des sciences infirmières et demeure impliquée au sein de son association professionnelle.

Joan donne le cours « Leadership and Influencing Change » aux étudiant.e.s en troisième année en sciences infirmières. De plus, elle a collaboré avec des collègues infirmiers pour concevoir ce cours de leadership en ligne, qu’elle donne depuis. Elle possède une vaste expérience en soins infirmiers communautaires et de longue durée, dont plus de 12 années en matière de leadership et d’élaboration de programmes dans le milieu de la santé.

Les recherches multidisciplinaires de Joan portent sur les lieux de travail sains, l’esprit professionnel, l’autonomie et le leadership au travail dans le secteur de la santé. Elle est actuellement la chercheuse principale d’une étude financée par la Saskatchewan Health Research Foundation, qui porte sur l’utilisation de l’outil de synergie dans les services d’urgence de la région de Regina. Joan a publié ses recherches dans le Western Journal of Nursing Research, le Journal of Nursing Management, le Canadian Journal of Nursing Research, le Canadian Journal of Nursing Leadership et le Journal of Health Organization and Management. Elle a fait de nombreuses présentations sur ses recherches en Saskatchewan, dans le reste du Canada et à l’étranger.

Judy Boychuk Duchscher inf. aut., Ph. D.

Judy Duchscher a commencé sa carrière en 1979 et depuis vise l’excellence dans la formation, la pratique, la recherche et le leadership. En tant qu’universitaire, elle a été chercheuse et consultante engagée dans la transition du rôle professionnel des nouvelles personnes diplômées, réalisation qui lui a valu plus de 20 prix et bourses à l’échelle nationale et internationale. Les résultats de ses recherches ont abouti à une théorie du choc de transition et à un modèle d’étapes de l’adaptation, qui ont donné lieu à la publication de plus de 18 articles évalués par des pairs, de deux livres et de cinq chapitres d’ouvrage ainsi qu’à plus de 200 conférences sur le thème de l’intégration des nouvelles infirmières présentées au Canada, aux États-Unis, en Australie et en Asie. Pour traduire et publier ses travaux, Judy a fondé Préparer l’avenir des soins infirmiers, un organisme qui sert de passerelle reliant les préceptes enseignés au premier cycle en soins infirmiers et la réalité de métier. Judy est actuellement considérée comme une sommité de la transition des nouvelles infirmières en Amérique du Nord. Elle soutient avec ferveur que la vision, la créativité et l’engagement passionné des jeunes professionnels, en plus de l’expérience et de perspicacité des collègues plus expérimentés et des mentors feront progresser les soins infirmiers et les soins de santé au Canada.

Louise Racine, inf. aut., Ph. D.

Louise Racine est née et a grandi à Québec. Elle a commencé sa carrière en 1978 comme infirmière autorisée et a travaillé plus de 14 ans en chirurgie générale, en ORL, en chirurgie de la tête et du cou, en urologie et en gynécologie. Louise a obtenu son diplôme d’inf. aut. au Cégep de Sainte-Foy et un certificat en administration de la santé à l’Université de Montréal en 1991. Elle est également titulaire d’un baccalauréat (1994) et d’une maîtrise en sciences infirmières de l’Université Laval. En 2004, elle a décroché un doctorat en sciences infirmières de l’Université de la Colombie-Britannique. Les travaux de Louise portent sur la santé des immigrants et des réfugiés. Son programme de recherche met aussi l’accent sur la prestation aux personnes racisées de soins infirmiers sûrs et qui tiennent compte de la sensibilité culturelle.

Lisa Little, inf. aut., maîtrise ès sciences de la santé

Lisa Little cumule plus de 25 années d’expérience en soins de santé comme infirmière autorisée. Depuis sept ans, elle est propriétaire de Lisa Little Consulting, un organisme offrant des conseils en politiques en matière de santé qui met l’accent sur la recherche et les réglementations en santé, des activités de consultation, des services d’aide et des stratégies. Elle est également chargée de cours à l’École des sciences infirmières de l’Université Queen’s. Auparavant, Lisa a travaillé pendant dix ans à l’Association des infirmières et infirmiers du Canada, occupant au passage le poste de directrice des politiques publiques. Elle y a chapeauté des projets de recherche nationaux, des comités, des groupes consultatifs et des mesures politiques dans le but d’élaborer des politiques publiques saines.

Lisa est titulaire d’un baccalauréat en sciences infirmières de l’Université Queen’s et d’une maîtrise en sciences de la santé de l’Université d’Athabasca. Elle a rédigé nombre d’ouvrages et présenté des conférences au pays et à l’étranger.

Lisa a travaillé à l’Hôpital Winchester District Memorial de 2007 à 2015 et a notamment été présidente du conseil d’administration. En 2012, elle siège au conseil d’administration de la Rural Healthcare Innovations et en 2017 est élue au conseil d’administration du Conseil international des infirmières.

Maura MacPhee, inf. aut., Ph. D.

Maura MacPhee est professeure de sciences infirmières à l’Université de la Colombie-Britannique (UBC) à Vancouver. Elle a co-fondé la British Columbia Nursing Leadership Institute, un modèle de développement du leadership en collaboration entre le ministère de la Santé, les régions sanitaires de la province et l’UBC. De 2005 à 2010, plus de 500 infirmières novices ont participé au programme. Maura MacPhee a adapté la formation au leadership de l’établissement pour qu’elle soit utilisée ailleurs dans le monde, notamment à Taïwan, à Hong Kong et au Brésil. Les recherches de Maura portent sur les environnements de travail sains pour les infirmières, en particulier sur l’influence des responsables du personnel infirmier. Elle se penche également sur la dotation sécuritaire en personnel. Elle préconise l’utilisation d’outils de dotation pour aider le personnel infirmier et les responsables à mieux évaluer les besoins prioritaires de la patientèle en matière de soins, qui devraient toujours déterminer la dotation en personnel infirmier. Elle a effectué des recherches sur la dotation sécuritaire en personnel à l’aide de l’outil de synergie. Maura MacPhee est actuellement professeure à l’École des sciences infirmières de l’Université de la Colombie-Britannique.

Norma Rabbitskin, inf. aut., B. Sc. inf.

Norma Rabbitskin est membre de la Première Nation de Big River et parle couramment le cri. Elle œuvre actuellement auprès de la Première Nation de Sturgeon Lake comme infirmière principale, chargée de superviser les programmes de soins primaires et à domicile et de santé communautaire. Elle se dévoue aux autres et se consacre pleinement à l’élaboration de programmes communautaires solidement ancrés dans les pratiques de guérison traditionnelles. Elle a également à cœur les compétences parentales, les compétences de vie traditionnelles, les enseignements des aînés et des gardiens du savoir, la vitalité de la langue dans l’acquisition des connaissances et le bien-être dans la vie.

Shauna Davies, inf. aut., Ph. D.

Shauna Davies enseigne à l’Université de Regina. Elle cumule 16 ans d’expérience dans la formation en soins infirmiers et a enseigné dans des programmes d’études supérieures et de premier cycle en soins infirmiers. Elle a enseigné en milieu clinique dans divers domaines médicaux et chirurgicaux, principalement en chirurgie générale, abdominale et cardio-vasculaire thoracique. Son enseignement porte sur l’évaluation de la santé et des cours en médecine et en chirurgie. Ses recherches portent principalement sur la technologie dans le cadre de la pratique infirmière. Shauna Davies a intégré un éventail de mises en situation médicales et chirurgicales en classe et en laboratoire à l’aide de mannequins haute-fidélité. Elle a également enseigné aux infirmières autorisées comment utiliser le iPad dans la pratique clinique dans deux régions sanitaires. Sa thèse de doctorat a porté sur l’utilisation des médias sociaux pour épauler et informer les fournisseurs de soins. Elle mène actuellement des recherches sur l’utilisation des médias sociaux dans la formation en soins infirmiers. Elle s’attarde aussi à la façon dont la technologie a amélioré les soins infirmiers.

Stacy Muller, B. A. A., LL. B.

Stacy Muller est bachelière en administration des affaires de l’Université de Regina et diplômée en droit de l’Université de la Saskatchewan. Stacy est procureure de la Couronne de la Saskatchewan et également directrice du Bureau de règlement des différends du ministère de la Justice.

Susan Bazylewski, inf. aut., B. Sc. Inf., maîtrise en éducation (enseignement en santé)

Susan Bazylewski est infirmière autorisée, titulaire d’un baccalauréat en sciences infirmières de l’Université McMaster et d’une maîtrise en formation permanente et aux adultes de l’Université de la Saskatchewan. Elle a travaillé pendant plus de 40 ans dans le système de la santé en soins communautaires, de courte et de longue durée. Elle a notamment été infirmière en milieu clinique, formatrice et gestionnaire. Elle a aussi occupé différents postes de direction (dont celui de vice-présidente de divers programmes de santé régionaux et provinciaux en Saskatchewan jusqu’à tout récemment). Elle est actuellement consultante dans le secteur de la santé et enseigne à temps partiel en milieu clinique. Elle a à cœur l’enseignement et la pédagogie et se consacre à opérer des changements positifs dans le système de soins de santé. Ce faisant, elle participe à de nombreux projets, forme et encadre des gestionnaires, des dirigeants, du personnel, des équipes interdisciplinaires, des patients et des familles aux quatre coins de la Saskatchewan.

Sonia Udod, inf. aut., Ph. D.

Les recherches de Sonia Udod portent sur les environnements de travail du personnel infirmier et la prestation des services de santé dans le cadre du programme Translating Evidence for Nursing LEADership and Health Services (programme LEAD Outcomes Research). Dans la foulée, elle s’attarde au leadership en matière de soins de santé, aux environnements de travail du personnel infirmier, à la formation des infirmières gestionnaires et à la diversité.

Le programme de recherche du Sonia Udod se concentre donc sur le leadership infirmier et les retombées sur la qualité des environnements de travail, ce qui permet d’améliorer les réalisations pour les patientèles, le personnel infirmier et les établissements. Elle recueille et diffuse des données probantes sur les approches du leadership en soins infirmiers et en soins de santé pertinentes.

Sonia Udod a reçu le prix Top Researcher in Socio-Health, une subvention d’établissement pour nouveaux chercheurs (2013-2014) et est membre du Centre de recherche en sciences infirmières du Manitoba (École des sciences infirmières, Université du Manitoba) et de l’Institut international de méthodologie qualitative de l’Université de l’Alberta. De plus, elle enseigne le leadership, la gestion et les méthodologies avancées de recherche qualitative. Elle encadre des étudiant.e.s de premier et de deuxième cycle qui s’intéressent au leadership et aux environnements de travail du personnel infirmier et à d’autres aspects organisationnels de la prestation des soins de santé qui influencent les établissements, les fournisseurs de soins et les résultats pour les patients.

Wendy Whitebear

Wendy Whitebear est membre de la Première Nation de White Bear aux alentours de Carlye en Saskatchewan. La majorité de son travail et de ses activités bénévoles ont été consacrés à l’amélioration des communautés, des peuples et des jeunes des Premières Nations. Wendy a conçu et mis en œuvre des programmes et des projets qui mettent l’accent sur le bien-être, le développement personnel, la carrière professionnelle et la planification financière pour les membres des Premières Nations et les organismes communautaires. En 2013, Wendy a reçu le prix Service of Excellence—Spirit Award pour sa contribution importante aux démarches d’autochtonisation de l’Université de Regina et pour son apport à divers autres projets sur le campus.

Au cours des deux dernières années, Wendy est productrice communautaire et co-animatrice d’une émission-causerie de femmes autochtones (The Four). L’émission présente des récits sur l’histoire, les communautés et les aspirations des Premières Nations. Wendy est actuellement directrice des affaires des Presses de l’Université de Regina et participe aux acquisitions autochtones et à l’examen des ouvrages. Elle est également membre du groupe de travail sur la diversité et l’inclusion de l’Association of Canadian Publishers afin de promouvoir l’autochtonisation du milieu de l’édition au Canada.

Yvonne Harris, inf. aut., B. Sc. inf., CSU(c)

Yvonne Harris cumule plus de 30 ans d’expérience en soins infirmiers cliniques et en leadership, principalement dans les services d’urgence. Sa passion pour les soins infirmiers d’urgence et la formation a atteint l’apogée dans sa plus récente réalisation : la participation à l’élaboration et au lancement du programme de certificat avancé en soins infirmiers d’urgence de l’École polytechnique de la Saskatchewan.

Yvonne a obtenu un baccalauréat en sciences infirmières de l’Université de la Saskatchewan en 2011 et poursuit actuellement une maîtrise en sciences de la santé à l’Université d’Athabasca. En 1997, elle réussit l’examen de certification en soins infirmiers d’urgence, qu’elle repassera avec succès en 2012. Elle conserve son titre par le biais de formation et d’apprentissage continus.

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Remerciements

J’ai donné pendant les quatre dernières années le cours « Leadership et influence » offert dans une formation à distance en ligne pour personnel infirmier. Lorsque s’est présentée l’occasion de créer un manuel libre pour le cours, il m’a semblé judicieux d’utiliser la matière que j’avais colligée et peaufinée pour le cours en ligne. Le manuel s’appuie donc sur ce contenu.

Je tiens à remercier David Gregory, doyen de l’École des sciences infirmières de l’Université de Regina, de son soutien. Il m’a encouragée à entreprendre un tel projet. Le manuel a vu le jour grâce à sa volonté de piloter un nouveau domaine de développement de ressources éducatives libres au sein de l’École des sciences infirmières. La conception d’un manuel n’est pas une mince affaire. Toute une communauté de spécialistes comme des responsables en soins infirmiers et des experts en la matière, des rédacteurs, des concepteurs et du personnel de soutien qui encadrent la publication ont mis la main à la pâte. Je tiens à remercier tous les spécialistes en soins infirmiers qui ont consacré expertise et temps à la rédaction de chapitres de l’ouvrage. Ils ont joué un rôle crucial dans le projet et leurs contributions confirment que les soins de santé en Saskatchewan sont soutenus par une solide communauté infirmière et d’experts qui collaborent pour offrir les meilleurs soins de santé à la population saskatchewanaise. J’encourage les étudiant.e.s qui utilisent le manuel à lire les biographies des contributeur.trice.s. Ils œuvrent dans des établissements universitaires et d’organismes infirmiers de notre province et du Canada et apportent des connaissances et des points de vue enrichissants sur le leadership infirmier dans divers domaines.

Je tiens également à remercier les spécialistes en soins infirmiers qui ont pris le temps de fournir des analyses détaillées et des recommandations d’amélioration. Je tiens à remercier particulièrement Jayne Naylen Horbach. Grâce à sa vigilance et à sa passion pour les soins infirmiers et le leadership, elle a passé au peigne fin le texte et a contribué à en renforcer le contenu. Merci également à Wendy Whitebear, que j’ai rencontrée, car nous partageons le même intérêt pour le Saskatchewan Centre for Patient-Oriented Research. Wendy a rédigé l’avant-propos du manuel et a apporté un éclairage précieux sur les soins de santé des populations autochtones.

Le personnel des Presses de l’Université de Regina m’a épaulé tout au long du processus de publication et m’a apporté son soutien à chaque étape de la rédaction.

Enfin, je voudrais remercier mon mari pour ses encouragements et son écoute lorsque j’exprimais mon enthousiasme pour chaque chapitre terminé.

Joan Wagner

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Publication en libre accès

Grâce au financement du gouvernement de la Saskatchewan, les Presses de l’Université de Regina conçoivent des manuels et ressources pédagogiques libres, mettent à jour les versions antérieures et les proposent en ligne gratuitement. Notre programme d’édition de manuels libres offre à la population étudiante et au personnel enseignant des ressources accessibles à tous et évaluées par des pairs. Il démocratise l’apprentissage en diminuant les dépenses des étudiant.e.s, en améliorant les résultats scolaires et favorisant la rétention des étudiant.e.s tout en donnant aux enseignant.e.s la possibilité de personnaliser les supports de cours.

Pour accéder aux ouvrages, visitez la page Web Accès libre de l’Université de Regina. Les textes peuvent être téléchargés ou consultés en ligne gratuitement dans différents formats (PDF, ePub ou html).

Le programme de publication de manuels pédagogiques en libre accès n’aurait pas vu le jour sans le soutien et les connaissances de nombreuses parties prenantes de l’Université de Regina.

  • Tom Chase (recteur et vice-président, programme pédagogique)
  • Dena McMartin (ancienne vice-présidente associée, responsable du programme pédagogique et de la recherche)
  • Bruce Walsh (éditeur et directeur des Presses de l’Université de Regina)
  • Cara Bradley, Christina Winter, Brad Doerksen et James Holobetz (Bibliothèque de l’Université de Regina)
  • Jermain McKenzie (Association étudiante de l’Université de Regina)
  • Département de l’apprentissage flexible
  • Librairie de l’Université de Regina
  • Elsa Johnston (responsable du programme d’édition de manuels libres)

Le financement du programme d’édition de manuels libres des Presses de l’Université de Regina et de toutes les publications du programme a été généreusement offert par le gouvernement de la Saskatchewan.

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Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives Canada

Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives Canada

Leadership et influence en soins infirmiers / sous la direction de
Joan Wagner, inf. aut., Ph. D. (professeure agrégée, École des sciences infirmières de l’Université
de Regina)

ISBN 978-0-88977-548-0 (PDF)

  1. Services de soins infirmiers–Canada–Administration–Manuels.  2. Leadership–
    Canada–Manuels.  3. Soins infirmiers–Canada–Manuels.  4. Manuels.  I. Wagner,
    Joan Irene Joy, 1951-, édition

RT89.L43 2018                                 610,73068                                 C2018-903207-3